La source: Dans la montagne, personne ne vous entendra crier 1/5 : Les survivants de la Cordillère des Andes

Radio France Radio France 8/27/23 - Episode Page - 56m - PDF Transcript

France Inter

Aujourd'hui, dans un faire sensible, l'histoire d'une aventure humaine inédite, héroïque et dramatique.

Celle des 16 survivants du crash aérien survenus dans la Cordillère des Andes en octobre 1972.

Cette aventure, vous la connaissez peut-être sous son appellation Naufragé des Andes,

titre éponyme de documentaire que leur a consacré notre invité,

le réalisateur Gonzalo Arijón.

Naufragé comme le serait des marins échoués sur une île désert au milieu de l'océan.

Il y a du robin son cruzoé dans cette histoire, associé près que les conditions météo ici,

sont radicalement différentes. Il est question de souffrance par le froid, la faim, la détresse, l'abandon.

Il est aussi question de transgression, l'ultime transgression pour survivre, consommer de la chair humaine.

C'est cette dimension-là qui a retenu l'attention du monde entier et qui a fait de cette histoire une affaire sensible et célèbre.

Au prix d'un courage et d'une obstination sans limite, après deux mois de calvaire,

moins de la moitié d'entre eux reviendront dans la civilisation et dans la vie.

Un temps applaudi, ils seront ensuite critiqués par une opinion publique incapable de comprendre

les choix auxquels ils ont dû faire face, là-haut, en perdition.

En 2006, notre invité Gonzalo Arijón est repartie avec eux sur le lieu de la catastrophe

pour tourner un documentaire exceptionnel, l'Orea du prix du festival international d'Amsterdam.

À faire senside, une émission de France Inter en partenariat avec Lina, préparée par Adrien Cara,

avec le soutien des documentalistes de Radio France et de Lina,

attaché de production Léa Dupuyenkin, coordination Christophe Barrère,

réalisation Joseph Carabalona, Coyenne Guilienne, Jérôme Chellius,

programmation musicale Thierry Dupin, comédien François Morel et Philippe Pirard,

à la technique aujourd'hui Raphaël Rousseau-Gilles Gaillard.

21 décembre 1972, c'est un matin du printemps, en Amérique du Sud.

Dans une vallée blottie au cœur des Andes, le long de la rivière a soufflé,

qui traverse la Cordillère à presque 3 900 mètres d'altitude,

un groupe de trois paysans chiliens aperçoit un homme étrange.

Il est barbu, grand, dépeunaillé.

Il porte plusieurs épaisseurs de vêtements sales.

Il leur adresse de grands signes là-bas sur l'autre rive.

L'un des trois paysans s'approche, mais le bruit de l'eau qui s'écoute

dans le torrent empêche toute communication,

et le courant rend impossible toute tentative de traverser sans matériel.

Après les échanges de signe, les deux hommes conviennent

de descendre de plusieurs centaines de mètres,

de part et d'autre des deux rives pour se parler, en vain.

Alors le paysan sort de sa poche un morceau de papier,

un crayon, et il écrit quelques mots.

Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ?

Il attache le précieux message autour d'un bimpierre,

il envoie cet homme étrange qui se trouve en face de lui.

Quand l'inconnu le récupère, il s'assoit et commence à écrire

frénétiquement pendant plusieurs minutes,

scrutant du regard le paysan pour éviter qu'il ne parte.

Il lui envoie son message.

Le paysan déplie le papier et découvre.

Je m'appelle Fernando Parado.

Je viens de l'avion qui est tombé dans les montagnes.

Je suis ruguil.

Nous avons marché pendant dix jours.

J'ai un ami là-bas qui est mal en point.

Dans l'avion, là-haut, il y a encore 14 personnes accidentées.

Nous devons sortir d'ici rapidement et nous ne savons pas comment.

Nous n'avons rien à manger, nous sommes épuisés.

Saviez-vous où nous sommes ?

Je vous en prie, sauvez-nous, nous pouvons à peine marcher.

À la lecture de ces mots, le paysan chilien reste ébaillie.

Cette histoire, celle d'un crach aérien,

d'un avion en provenance du rugui avec à son bord 40 passagers,

il en a entendu parler effectivement.

Oh, vaguement, c'était il y a des mois.

Et puis comme les recherches n'avaient rien donné,

on a pensé que tous les occupants de l'appareil étaient morts

et que la Cordillère avait refermé sur elle

le secret de cette tragédie qui s'était déroulée à ses sommets.

Or, ce paysan est face à l'un des survivants de la catastrophe.

Alors il lui adresse de grands signes à son tour

et le paysan, comme par réflexe,

lui lance ce qu'il a sous la main, un bout de pain,

autrement dit un trésor.

Puis il tente de lui expliquer que quelqu'un d'autre va venir

de l'autre côté de la rivière pour les aider, lui et ses camarades en détresse.

Fernando Parado se précipite vers son compagnon

à faiblir Roberto Canessa qui l'attend un peu plus loin.

Regarde, regarde ce que j'ai, du pain.

Nous sommes sauvés.

Oui, nous sommes sauvés.

Tiens, on va prendre notre petit déjeuner.

Non, mange-le, je ne le mérite pas.

Alors, peut-être que tu ne me mérites pas,

mais tu en as besoin, alors mange.

Ouais.

De toute ma vie, je n'ai jamais mangé un pain aussi bon.

Ça fait tellement longtemps.

Canessa.

Oui.

Enfouis-le sous la pierre.

Quoi ?

Tu le sais bien.

Ce qu'il reste...

Ouais, on en a plus besoin maintenant.

Nous sommes sauvés.

Fernando, regarde.

Le berger là-bas.

Oui, sauvés Canessa, sauvés.

N'écoutant que son courage,

le paysan descend le chemin périlleux

qui mène à Pointe-et-Negro,

un village situé en contre-bas

pour prévenir les carbineroses

de sa découverte et alerter les secours.

Pour les deux hommes,

le paysan de cette rencontre

marque la fin d'un calvaire,

celle d'un voyage au bout de la nuit

et au bout d'eux-mêmes,

qui a commencé 70 jours plus tôt,

le 12 octobre 1972,

sur l'aéroport de Montevideo,

capitale de l'Uruguay.

Père 7h30 du matin,

il s'est monté dans un petit avion

bimoteur blanc

en couleur de la force aérienne

du Ruguayen.

L'appareil, un Fairchild 227,

a été loué pour acheminer 40 personnes

à Santiago du Chili,

situé à près de 1000 km de là.

La durée de vol est de 4 heures.

Ensemble, bigarrés de petits,

de grands de jeunes et de moins jeunes voyageurs,

le groupe de passagers,

riant et barardant,

donne l'impression de vivre un jour de fête.

Ils ont l'air heureux et insouciants.

Il s'agit en fait de l'équipe de rugby

à son sportif d'un collège de banlieues

et de Montevideo,

réputé pour être l'une des meilleures équipes

du championnat local.

Et c'est précisément pour y disputer

quelques matchs que ces rugby-men partent au Chili.

Pour l'occasion, ils sont accompagnés

d'amis, de membres de leur famille

ou d'autres personnes

à qui ils ont vendu les dernières places

dans l'avion, afin que celui-ci soit plein

et que le trajet soit moins onéreux.

Parmi ces jeunes gens qui attendent

avec une grande excitation lors du départ,

il y a Roberto Canessa,

étudiant en médecine, membre

de rugby. Il se souvient.

Je garde une image très précise du départ

à l'aéroport de Carrasco.

L'ambiance était très détendue, tout était super.

Tout le monde était très enthousiaste.

On portait tous des vêtements légers

parce que c'était déjà le printemps.

Un printemps chaud et beau.

On était tous très excités à l'idée

d'aller jouer au Chili.

Nous étions comme deux jeunes poulins

qui découvrent la vie, qui brondissent un peu partout

que le monde ressemble à la vallée où ils sont nés.

Pour nous, ce voyage

était la grande récompense de la saison

et puis c'était l'occasion de voir enfin la neige.

À côté de l'avion, je me rappelle très bien

que certains jouaient déjà à se lancer le ballon.

D'autres discutaient pour savoir

quels seraient les sorties dans les barres

que nous pourrions faire une fois sur place à Santiago.

Au moment d'embarquer à bord, nous avons pris

une dernière photo tous ensemble.

A ce moment, la personne ne pensait que ce serait la dernière.

Au moment d'embarquer, c'est la cahue.

On se bouscule, on rigole,

on se lance des valises ou des sacs.

Dans l'excitation et l'empressement,

certains ne prennent même pas le temps

de dire au revoir à leurs parents.

Après tout, ils ne partent que pour cinq jours.

A 8h05, le Fairchild n°571

de l'armée de l'air uruguayenne décolle.

Au commande de l'avion,

le colonel Rulio César Feradas,

un homme qui a plus de 5000 heures de vol

et 20 ans de métier.

Pour ce voyage, il est assisté du lieutenant

Dante Héctor, la Guarara,

moins expérimentée, mais tout aussi compétent.

L'appareil, quant à lui, est pour insélière

quasiment neuf et entretenu avec soin.

De plus, ce vol ne présente pas

de difficultés particulières,

d'autant qu'en partant, à 8h du matin,

les pilotes espèrent atteindre les montagnes

avant midi et éviter assez de turbulences

provoquées par les vents cycloniques

qui soufflent du Pacifique et qui se heurtent

au chaud ou glacé, qui eux viennent de l'autre côté.

Là est le danger de survoler les andes.

30 minutes seulement après le décollage,

l'appareil commence à surplomber la cordillère,

la plus haute et longue chaine de montagnes

de l'hémisphère sud, avec des pics

qui dépassent les 6 500 mètres de hauteur,

soit l'altitude maximum

à laquelle peut voler le bimoteur.

Mais une heure plus tard, le pilote,

le colonel Ferradas, annonce que l'avion va devoir se dérouter

et se poser à Mendoza, en Argentine,

à seulement 150 km de Santiago,

pour éviter justement de se retrouver

dans une tempête qui, ce matin-là,

empêche tout sur vol des andes.

Mendoza escale imprévu,

mais nécessaire au moins pendant 24h

et de préférence plus de 24h

en territoire argentin.

C'est comme ça, à pas le choix, il va de la sécurité.

Pourtant, le lendemain est midi,

sans doute sous la pression de sa hiérarchie

qui ne veut pas qu'un appareil militaire uruguayin

stationne en territoire argentin

et face aux invectives inconscientes

de ces jeunes passagers,

le colonel Ferradas décide de repartir

et de faire route plus au sud

pour éviter la tempête

et rejoindre Santiago, au Chili.

Il est 14h18,

nous sommes le 14 octobre 1972,

le ferra-chai-227 redécole

avec ses 40 passagers.

Après presque une heure et demie de vol,

une joyeuse atmosphère de vacances

règne dans la cabine.

Pourtant, un orage se rapproche de l'appareil

et le secoue sévèrement.

Dans cockpit, les deux pilotes sont inquiets,

car malgré toutes les précautions

qu'ils ont prises en se déroutant

pour éviter le mauvais temps,

l'avion entre très vite

dans une nouvelle zone de turbulence.

Et en l'espace de quelques minutes,

la visibilité devient presque nulle.

Les passagers eux continuent de blaguer,

nous montrent aucun signe d'anxiété.

Fernando Parado, assis à l'arrière de l'appareil, raconte.

Tout le monde s'est alors mis à rigoler,

puis l'avion a commencé à être secoué.

On traversait des trous d'air.

Après chaque passage, certains criaient

« Hollé » si une que personne

ne prenait vraiment ça au sérieux.

Pour nous, on était comme dans un parc d'attractions

où on était sûr de redescendre

à la fin en bon état.

...

Par radio VHF, le pilote avertit Santiano

que les conditions se dégradent en vol

et qu'il va se préparer à descendre.

En réalité, le colonel Ferradas,

qui donne sa position au contrôle aérien chilien,

ne s'aperçoit pas que son estimation

de trajectoire est fausse.

Le manque de visibilité de repère au sol

l'induit en erreur.

Il pense avoir franchi le point balise

de Coriccio, c'est-à-dire avoir passé

l'accord hier.

Or, des vents contraires ont ralenti

sa progression, l'avion est toujours

au-dessus des montagnes.

Après plusieurs trous d'air sérieux,

l'appareil chute de 100 mètres d'altitude.

Mais là encore, la plupart des jeunes rugbymen

rigolent, persuadés que rien de grave

ne peut leur arriver.

Quand arrive un second trous d'air,

celui-là, beaucoup plus important,

tous les passagers aperçoivent les andes

se dresser devant eux telles un mur tragique

à quel le contact apparaît cette fois

comme inévitable.

Le Colonnais Ferradas, qui réalise toute

la gravité de son erreur de navigation

et frappée d'impuissance.

Tout autour, les picandantes s'y deviennent

très inquiétants.

Et en l'espace d'un instant, la joie

laisse la place à la panique et à l'angoisse.

Tous en sont conscients,

l'avion vole trop bas, beaucoup trop bas.

Il va percuter une cime, forcément.

Alors certains commencent à prier,

d'autres s'accrochent à leur siège.

La condition de passagers dans un avion

perdition, l'expérience inhumaine,

intolérable.

Alors le pilote pousse les moteurs à pleine

puissance et l'appareil semble reprendre

de l'altitude, mais il est trop tard.

Et c'est le choc.

Dans la poignée de seconde qui suit,

dans un bruit fracassant, l'une des ailes

de l'avion heurte le versant d'une montagne.

Le fuselage étant parti éventré,

la queue de l'avion est arrachée.

Certains passagers sont apais et expulsés.

Puis telle une luge, l'avion poursuit sa

route sur le sol pendant plusieurs minutes

et s'immobilise dans un léger relèvement

de terrain niché à plus de 3500 mètres

d'altitude.

Les bruits de métal tordus,

déchirés, déchiquetés, disloqués,

laissent place un silence profond,

un silence de mort.

Lorsque j'ai repris connaissance,

il y avait plusieurs visages au-dessus

de moi.

J'ai reconnu immédiatement Gustavo

et Diego Storm.

Il criait Nando, Nando, tu nous entends ?

Quand j'ai commencé à vraiment

reprendre mes esprits,

je me suis souvenu que je n'étais pas seul

dans l'avion, que j'étais avec ma mère

et ma sœur.

J'ai demandé à ceux qui étaient près de moi

où est maman, où est Suzy ?

Ils m'ont répondu, Nando,

l'avion est tombé, on s'est écrasé.

Ta mère est morte

et ta sœur Suzy est blessée à l'avant

de l'avion.

Ça a été comme un coup de hache pour moi.

Alors j'ai tenté de me relever

et d'aller m'occuper de ma sœur.

Elle était gravement accidentée.

Elle pouvait seulement communiquer

avec les yeux.

Je l'aiderai à tenir 48 heures du rang

avant qu'elle ne s'endorme définitivement

comme les autres.

Essayant tant bien que mal de se relever

et de sortir la tête de la carlingue,

Fernando Parado découvre l'univers

qui va devenir pour nombre de ses camarades

un tombeau.

Dans ce monde-là, si beau à voir de haut

ou de loin, qui devient désolation

lorsqu'on y pose le pied,

un monde dans lequel les cris des douleurs

déblessés sont les seuls qui semblent trouver

de l'écho dans le creux de la montagne

déserte, absolument déserte.

Chez les rescapés, c'est l'incompréhension

et c'est immédiatement leur des questions

existentielles.

Qu'on a fonctionné le destin selon quel

formule agit-il et sur quelle équation

ils font des cette logique.

Pourquoi toi et pas moi ?

Au début, la catastrophe ne concernait

que les autres, ceux qui étaient blessés,

ceux qui étaient morts.

Moi, j'avais la chance d'être vivant,

ce n'était qu'une question d'heure avant qu'on

vienne nous chercher.

Des heures, en réalité,

ce sera des semaines.

Dans ce qui reste de l'avion,

devenu cylindre métallique défoncé

sans elle sectionnée au niveau de la queue,

ceux qui le peuvent dégagent les sièges

et les morceaux taux pour libérer ceux

qui appellent à l'aide.

Et là, ils découvrent des cadavres,

leurs amis pour certains, leurs parents,

leurs frères, leurs sœurs,

douze personnes au total pour qui la

collision était fatale.

Lorsqu'ils arrivent à sortir, déneigés

pu accéder aux postes de pilotage,

les jeunes étudiants rencontrent encore la mort.

Nous ne pensions qu'à une chose,

envoyé à SOS par la radio

du pilote pour signaler notre position.

Dans le cockpit,

le colonel Ferradas

était mort écrasé par le tableau

de bord de l'appareil.

Son copilote était dans un état

qui n'avait rien à lui envier.

Il arrivait tout de même à parler.

Nous avons dépassé Curico,

nous avons dépassé Curico, répétait-il.

On avait beau essayer de faire tout

ce qu'on pouvait, on savait

que la radio ne fonctionnait plus.

En repartant vers la cabine, on a dit aux

policiers qu'on avait tué Santiago.

On voulait les rassurer.

Les trois étudiants en médecine,

Roberto Canessa, Gustavo Zerbino

et Diego Sturm retournent dans la cabine,

en jambes les fauteuils à l'arrière de l'avion

et retrouvent le sombre espace

où leurs compagnons criaient et gémissaient.

Ils tentent alors de soigner les blessés,

certains sont gravement taillés au niveau

des jambes ou du thorax.

Or, les trois futurs médecins n'ont rien

d'émorager, la trousse de secours

semble avoir disparu dans la queue de l'appareil.

D'or, autour de l'avion,

la neige est plus loin.

Sur trois côtés, les parois gris

démontent à une telle de haut mur

infranchissable, tel est le décor.

Il est seulement 16 heures,

la neige tombe, un vent violent

souffle, le froid glacial

s'installe, la nuit s'annonce

longue.

Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org

Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org

Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org

À faire sensible aujourd'hui les naufragés

de la cordillère des andes,

personne n'arrive à dormir,

les gens de l'appareil qui leur servent

d'abris de fortune, le bruit du vent

tape violemment sur le métal.

La nuit a été rythmée par les gémissements

des uns qui recouvrent les pleurs

et les lamentations des autres, l'enfer.

Lorsqu'enfin le jour se lève,

vers huit heures, les rescapés peuvent apercevoir

le paysage qui les entoure.

Tout est blanc, on aperçoit ici et là

des morceaux de l'avion, des bagages,

des corps. Dans cet océan

de neige, de vide, ils sont comme livrets

eux-mêmes dans un monde totalement hostile.

On était, pour ainsi dire, perdu,

on se retrouvait un peu comme quand

nous entrions sur le terrain pour jouer au rugby.

On attendait les ordres du coach,

mais il ne venait pas.

On était dans une micro société et il nous fallait

un chef. C'est justement

autour de Marcel Opérez, le capitaine

de notre équipe, qui a commencé à se former le groupe.

C'est nous qui lui demandions

de nous encadrer, de rationner la nourriture,

d'organiser les tâches qu'on pouvait faire

car on ne savait pas comment s'y prendre.

Pour la nourriture, on faisait avec ce qu'on avait.

Un petit carré de chocolat par jour et par personne.

Un petit bouchon de liqueur

et comme dessert,

un doigt d'antifrice.

Dans l'épave de l'avion, la vie s'organise

en installe des sièges et des valises pour boucher

l'orifice et empêcher le froid de pénétrer.

Marcel Opérez lui décide d'organiser

la vie ou ce qui l'en reste

avec des règles. Il recrée

une micro-société, premier réflexe d'un monde civilisé

dans un espace totalement sauvage.

Il distribue les places

par roulement pour que chacun puisse profiter

du peu de la chaleur qu'on ressent

encore au fond de l'appareil.

Tout est ordonné, tout est compté, rien ne les c'est au hasard.

Il faut économiser

les maigres en réserve de nourriture, il faut partager

aucun traitement de faveur

n'étant visager.

Mais les jours passent

et des secours ne viennent pas.

Les blessés les plus graves meurent

malgré les tentatives acharnées des trois étudiants

en médecine. Chaque corps est transféré

à l'extérieur de l'appareil et en se voulit

dans la neige. Plusieurs fois

des avions semblent passer au-dessus de

alors les rescapés sont persuadés que

puisqu'ils les voient eux aussi en haut

ou ils l'ont vu. Forcément, ils ont vu

l'avion se vu les paves, ils ont été repérés.

Mais non, rien. Sur le petit poste radio

que les rescapés ont fabriqué

les bulletins annoncent que les recherches

ne donnent rien et que leur avion a dû être

recouvert par la neige. C'est un enterrement

avant l'heure.

Au bout de quatre jours

j'ai compris qu'on était fichus.

Ils ne nous avaient pas trouvé.

Ils avaient envoyé des hommes

sur la lune et nous en quatre jours

ils ne nous retrouvaient pas. C'était foutu.

On regardait les montagnes

et on s'est dit, s'ils ne viennent pas

ce sera à nous de descendre les chercher.

Mais pour cela, il nous faut manger.

J'ai dit à Carlitos, qui dormait

à côté de moi, que je pensais

à une solution.

On s'est regardé dans les yeux.

Il a tout de suite compris

et m'a répondu, non, non, on ne peut pas.

Ensuite, il a été raconter

cette histoire à Adolfo, Strauss

et aux autres. Eux aussi,

ils avaient déjà pensé.

En fait, on y avait

déjà tous pensé en se disant

qu'on ne le ferait pas, pas nous.

Mais, c'était désormais

choisir de vivre

ou de mourir.

On a choisi de vivre.

Cette solution dont parle

Fernando Parado, porte un nom officiel

glacé comme la neige qui les entoure

l'anthropophagie qui l'a

rime avec survie.

...

Sans nourriture,

c'est la mort, alors.

Alors, c'est la transgression

fascinante dans tout ce que se moure

couvre de sens tragique.

Un soir, dans la carlingue et l'appareil

autour de Roberto Canessa et Fernando Parado,

une grande discussion anime survivant.

Face au manque total de nourriture,

le corps d'une personne décédée,

une source de protéines, peut-il

et doit-il être considéré comme de la nourriture ?

Un grand silence

en part des participants.

En Uruguay ou la religion catholique,

comme dans toute l'Amérique du Sud,

a beaucoup d'influences dans la société,

consommer une partie d'un corps humain

est plus qu'une question tabou, c'est un sacrilège.

D'autant plus que ces corps,

ce sont ceux de leurs amis, même pour anater.

C'est à devenir fou.

C'était pas une question facile.

C'était une solution de dernier recours

parce qu'il fallait vivre, parce qu'on sentait

que c'était notre dernière chance.

A l'aide d'un petit morceau de verre

et d'une lame métallique, on a choisi

un de ceux qui était mort au début.

Avec Adolfo, on est allé découper

des bouts de chair sur les fesses.

Des fines lamelles de tissus humains.

Rien à voir avec du cannibalisme

comme on peut le décrire certains journalistes.

Nous avons pris plusieurs fibres

et nous les avons posés sur la carlingue

et puis on est repardis avec.

On ne mangeait pas dans la chair,

on en récupérait de minuscules morceaux

et avec le dégoût le plus absolu,

on les avalait un peu sans autre chose.

À ce moment-là, nous étions en train

de faire un pas dans le vide,

dans l'incertitude,

dans une situation dont on savait

si c'était une terrible sophistication

de civilisation,

ou au contraire un retour au monde

sauvage et primitif.

L'acte est impensable, inimaginable,

mais tous le commettent

parce qu'ils veulent vivre.

Qui a-t-il de plus humain ?

C'est grâce à leur radio de fortune

que les naufragés apprennent ensemble

la fin des recherches épouvantables,

coups de massu, exprimés laconyquement

sur les ondes en trois phrases,

comme l'énoncé d'une condamnation à mort.

L'armée de l'air chilienne a décidé

d'interrompre ses recherches

à cause d'importants de chutes de neige.

Il existe peu d'espoir

et l'avion s'est probablement craché

puis a été recouvert par la neige,

point final, comme une extrême onction.

Voilà dix jours en effet qu'un balai incessant

d'hélicoptères et d'avions vénus du Ruguay,

d'Argentine et du Chili Ratis,

le paysage montagneux de la Cordillère des Andes,

des recherches qui se basent sur le dernier

message radio du pilote,

à proximité de Curitio,

loin, en réalité, de l'endroit

où se trouvent les naufragers.

Jusque-là,

on vivait suspendu à des suppositions.

Il viendrait demain,

peut-être après demain,

mais on n'était sûr de rien.

Pour la première fois dans cette aventure,

on était sûr d'une chose,

on avait une certitude,

il ne nous cherchait plus.

On allait devoir sortir de là

par nos propres moyens.

...

Le lendemain, une première expédition

de trois hommes les plus en forme

par du campement pour grimper la montagne

et tenter de retrouver la queue de l'avion

dans laquelle se trouvent les batteries

qui pourraient permettre de faire fonctionner

la radio de l'appareil.

Ils portent plusieurs couches de vêtements,

mais à chaque pas, ils s'enfoncent dans la neige.

Malgré plusieurs paires de chaussettes

enfilées dans des baskets, leurs pieds sont

permanents à chaque pas, du froid et de l'eau

qui s'y infiltrent.

Alors malgré la douleur, la fatigue et la fin,

les trois hommes grimpent de plus en plus haut

pour tenter d'atteindre le col

et voir ce qu'il y a de l'autre côté.

Les paves de l'avion leur semblent

devenir de plus en plus petites

pour finalement disparaître.

Les heures passent, la nuit tombe.

Au campement, leurs compagnons imaginent déjà le pire,

car ils connaissent la rigueur du climat

sur les cimes, ils en souffrent eux-mêmes.

Alors leurs trois amis qui vont devoir

passer la nuit dehors, on ne donne pas

très cher de leur peau.

Pourtant au petit matin, le trio a réussi

par miracle à redescendre.

Mais le bilan est catastrophique.

L'un d'eux est quasiment aveugle,

un autre semble avoir perdu plusieurs kilos,

ils ont les mains et les pieds gelés.

A leur retour, Roberto Canessa et Diego Storm,

les étudiants en médecine, les examinent.

Leur constat est sans appel.

À ce moment-là, on s'est rendu compte

que c'était du suicide d'escalader

cette fiche montagne.

Quand ils partent, on savait que c'était très dangereux,

mais on n'imaginaient pas les revoirs

dans un aussi sale état.

Leurs pieds étaient devenus noirs

comme des morceaux de bois.

Ils étaient arrêtés, fatigués.

Rendvoyer quelqu'un d'autre comme ça

serait le condamné à mourir ou revenir

dans les mêmes conditions.

On a compris, grâce à Pedro,

qu'il avait vécu quelque temps en montagne

que nous aurions de bien meilleures chances

d'attendre le début du printemps austral

vers la fin du mois de novembre.

Comment allions-nous survivre

pendant plus d'un mois, jusque-là ?

Cette déconnexion de la civilisation

rend la vie des survivants très primitifs,

dormir, manger, tenter de s'occuper.

Ils font face au désespoir, à l'anxiété.

Pourtant, alors que tout peut très vite

basculer dans le chaos,

ils restent tous parfaitement organisés

derrière leur capitaine et chef

unianiment proclamé, Bartilopérez.

Ce dernier organise équitablement

les tâches pour que chaque jour,

chacun ait quelque chose à faire

et puisse se rendre utile pour le groupe.

Pour les frères Straor, Adolfo et Edouardo,

par exemple, il s'agit de préparer

les fins morceaux de chers humaines

et d'en faire des portions équitables

pour que chacun ait à manger.

Et tous acceptent de se plier aux règles du groupe,

montrant ce que l'homme peut avoir

de meilleures en lui. Tous respectent

à la lettre les consignes de partage et de solidarité.

Ils ont, pense-t-il,

plusieurs semaines à tenir avant le printemps

qu'il permettra de traverser l'école

pour rejoindre la vallée.

Il ne se doute pas que la montagne

va une nouvelle fois s'acharner sur eux.

En pleine nuit, le 29 octobre,

soit 16 jours après le crash de leur avion,

un tremblement dans le sol réveil les survivants.

Dans la carlingue de l'appareil,

on commence à entendre un bruit étrange.

Ce n'est que quelques instants plus tard,

lorsqu'ils sont balayés par la neige glacial,

qu'ils comprennent que l'avion est pris dans une avalanche.

En l'espace de quelques minutes,

les restes de l'appareil sont remplis

et recouverts par un épément au negeux.

Quand j'ai voulu bouger,

j'étais comme pris dans du ciment,

impossible de pouvoir se dégager.

On ne voyait rien,

on ne comprenait pas ce qui se passait.

A l'inverse,

je commençais à ressentir comme

une vague de plaisir,

celui de savoir que j'allais

enfin pouvoir quitter l'avion

et mourir.

Tout allait enfin s'arrêter.

Puis, on m'a attrapé la main

et j'ai compris

que tout le monde n'était pas condamné,

qu'il y avait des amis à l'air libre

qui nous recherchaient.

J'ai donc tout fait pour me dégager.

Puis, enfin,

une bouffée d'air fraîche.

Là, j'ai compris que je n'étais pas mort,

presque à regret, car je me retrouvais

dans l'avion, toujours perdu

dans les montagnes, comme si le

cauchemar ne voulait pas s'arrêter

et, au contraire, recommencer de nouveau.

Certains arrivent progressivement

à passer la tête hors de la neige pour respirer

des par d'autres qui creusent pour déblayer

ceux qui sont encore en ce vie.

Mais tous n'ont pas cette chance, si l'on peut dire.

Cette nuit-là, 8 d'entre

succombe, dont Marcel Opérez,

le chef du groupe, s'est éprouvé

dramatique pour le moral des 19 rescapés.

Pendant 3 jours, ils vont rester

en cevelis sous la neige à devoir se nourrir

des corps qui sont restés auprès de eux.

Une nouvelle fois, ils doivent repousser

un peu plus loin les limites qu'ils se sont

déjà fixés. Et cette fois,

il n'est plus possible de découper une lamelle

de chers humaines et la manger loin du regard

des autres, car l'espace s'est rétrécie

avec cet avalanche.

Après plusieurs jours,

les rescapés felissent par creuser

un petit tunnel qui leur permet

de rejoindre l'extérieur.

Une fois sur la neige, il leur semble

que la montagne est définitivement recouverte

l'avion comme pour cacher l'objet du malheur

et du péché aussi.

Alors, avec l'incroyable énergie du désespoir,

un trio composé de Roberto Canessa, Fernando

Parado et Antonio Vesintin

se portent volontaire

pour aller retrouver les batteries,

quelle que soit la distance à parcourir.

On leur cède le meilleur place pour dormir,

on leur confectionne des vêtements de fortune

et surtout, le maximum de rations

de chers humaines.

Quelques jours plus tard, leur audace

paye, il retrouve la queue de l'avion

et donc, les fameuses batteries

pour la radio.

Nous avons fait une expédition

de huit jours dans la queue de l'avion.

Grâce au valise qui s'y trouvait et à de la toile,

nous avons pu faire des sacs de couchage.

Nous avons tenté de faire marcher la radio

mais le fer n'a jamais fonctionné.

Ce n'était pas une victoire

mais une belle avancée.

De retour au campement, on s'est rendu compte

que le temps nous était désormais compté.

Les autres étaient très mal en point.

Nous allions devoir tenter de descendre

quoi qu'il nous encoute les pentes montagneuses

avant qu'il ne soit vraiment trop tard

et que nous n'ayons plus la force de le faire.

Nous avons porté avec les survivants

sur le lieu de la catastrophe pour tourner un documentaire

en 2006, nous lui donnerons la parole dans 5 minutes.

Au campement, Gustavo Zerbino a l'idée

de se nourrir de la moelle des eaux

pour y récupérer du calcium et autres substances

qui peuvent leur permettre de faire face à toutes les carences.

4 semaines après la dramatique avalanche,

au début du mois de décembre,

la neige commence à fondre.

Ils peuvent apercevoir des parcels noirs

sur les montagnes adjacentes.

Il leur faut désormais partir

avant d'être trop faible.

Dans leur malheur, le temps semble désormais joué pour,

car plus les jours passent,

plus ils sont longs, plus l'ensoleillement est important.

Et puis, le risque de tempête diminue.

Les ingrédients de l'espoir

sont réunis.

Au matin du 61e jour,

après avoir passé nuit à peser le pour

et le contre, la décision est prise.

Aucun retour en arrière n'est possible.

Ils doivent tenter de rejoindre les vallées

au péril de leur vie et de toute façon,

cette vie.

Elle ne tient plus qu'à un fil.

Alors ils partent à 3.

De la force de leurs jambes et de leur mental

dépend la vie des très autres survivants

qui ont laissé leur ration de nourriture.

Oui, de nourriture,

même quand on en connaît la nature.

Et c'est assez que vers midi,

Fernando Parado, Roberto Canessa

et Antonio Vicintin s'élancent

pour affronter la montagne.

La fatigue et la malnutrition dont ils souffrent

déjà depuis deux mois rendent leur ascension

plus dangereuse encore.

Leurs amis restent dans les paves de la vie

et on les regarde partir.

Et s'ils ne revenaient pas,

on imagine les pensées cruelles

de leur vie.

Le premier soir,

après des heures d'airance,

les trois hommes réussissent à s'abriter

à se protéger du vent leur pire et nuit.

Alors pendant trois jours,

ils marchent de sommet en sommet

qui tous leur réservent ce scénario infernal.

Après une crête,

une autre crête, indéfiniment,

au corps des montagnes où sont donc

l'ivalée verdoyante chilienne.

C'est à ce moment qu'Antonio Vicintin

décide d'abandonner et d'offrir

à ses deux compagnons sa part des rations alimentaires.

Et ils se laissent glisser

jusqu'à l'avion qu'il atteindra

quelques heures plus tard, à bout de force.

Au campement, les survivants reprennent

espoir quand Antonio leur explique

que les deux autres sont encore en vie

et qu'ils continuent leur ascension.

Malgré l'attente, toujours plus dure,

jour après jour, la paix et l'harmonie

subsistent au sein du groupe

qu'elles le sont.

Plus loin et beaucoup plus haut

dans les montagnes, Fernando Parado et Roberto Canessa

continuent leur marche. Ils se battent

et ne désespèrent pas.

Chaque part les rapprochent un peu plus du chili

de la vie. Mais tous les 20 ou 25 mètres

ils doivent s'arrêter, reprendre

leur souffle.

Au 10e jour, ils aperçoivent enfin

autre chose que de la neige. Des zones

sont recouvertes par ceux qui leur semblent

être du gravier. Ils commencent

à redescendre pendant près d'une journée

le long de la rivière à Zouffre. Quand ils

t'ont néané sur un petit sentier

creusé apparemment par des animaux.

Puis, ils aperçoivent des vaches

qui profitent de maigres paturages

pour s'alimenter. Des vaches, la vie,

l'animal nourricier par excellence.

Pour soudain,

soudain, Roberto Canessa crie. Là, là, non,

regarde un cavalier.

Les deux hommes lui font signe. Oui, il y a un homme

sur un cheval et il les voit.

Il renvoie un morceau de pain en échange

et comprend le message qu'il tente de lui envoyer.

C'est la fin d'un cauchemar

de près de deux mois

dans les montagnes.

À haut, grâce à leur radio

de fortune, les autres survivants apprennent

que leurs deux amis viennent d'être retrouvés

et amener en ville pour y être soignés.

La nouvelle fait le tour des médias locaux

et du monde entier. Il reste

des survivants du crash aérien dans les andes

incroyables.

Le lendemain matin, ce sont les hélicoptères

avec à l'orbeur faire dans nos paradis pour Guide

qui parcourent le ciel. C'est la

délivrance. Enfin,

les secours sont là.

Prochaine destination, l'hôpital

de Santiago, où prend fin cette aventure

extrême en pleine montagne, un voyage

au bout de la nuit, au bout du courage,

un cauchemar qui aura duré

71 jours.

C'est la

cusserie

bonjour

à Ray won.

Je voudrais juste vous mettre la parole

à un grand merci, le Don

de François Morrell qui nous a prêté sa

et notamment dans son dialogue avec l'excellent Philippe Hirard qui, lui, est notre comédien habituel.

Merci messieurs.

Alors vous connaissiez donc ces jeunes gens qui ont vécu cette histoire absolument incroyable,

et vous êtes repartis sur les lieux avec eux, mais vous les connaissiez, vous étiez dans la même université ?

Alors, alors, alors, ils sont un petit peu... Moi, je suis uruguayen comme eux, j'ai grandi là-bas,

je suis un petit peu plus jeune que eux, donc j'ai connaissé certains, eux, ils allaient dans un collège UP,

de la banlieue de Montevideo, un collège irlandais catholique,

et d'ailleurs, ils jouaient au rugby, ce qui était surtout à l'époque un sport très élitiste à l'uruguay,

et donc c'est vrai, c'était quand même une bande des fils à papa qui sont tombés comme ils disent eux-mêmes,

et un chemise à la coste et moquassin, en pleine cordillère des andes.

Moi, j'ai connaissé deux ou trois d'avant, et Roberto Canesa, qui est un de mes meilleurs amis, Gustavo Saruino aussi,

et évidemment, comme tout uruguayen, moi, je t'ai lissé à l'époque,

on a été totalement choqués à la nouvelle de la disparition de l'avion,

mais étonnamment, les familles et chercher,

n'ont jamais laissé des chercher, il y a un père d'ailleurs, un peintre très connu,

là-bas, père d'un survivant, Carlos Paevilalos, qui n'a jamais arrêté de des chercher pendant le 72 jours,

donc il y avait un espèce de côté irrationnel, comme quoi, oui, oui, je démerde, santé ça, mon fils est en vie, etc.

Donc, face à toutes les évidences d'une disparition, d'une mort complète du groupe, il y avait ces...

Et moi, j'ai été très sensible, comme tout uruguayen, je pense, jeune de l'époque,

et effectivement, il y a eu cette fameuse conférence de presse juste avant Noël, 72,

à leur retour où, et il y avait toute la presse mondiale, parce qu'ils se trouvent qu'ils sont tombés au Chili,

au moment où le gouvernement de Salvador Allende était en train de se finir,

il y avait beaucoup de presse, parce qu'on chantait les coups d'état, etc.

Donc, il y a eu tous les journalistes du monde qui sont allés à Montevideo pour écouter cette conférence de presse

dans laquelle il devait dire, finalement, qu'est-ce qui s'était passé là-haut, et ça a été un moment incroyable.

Quand il a fallu qu'il raconte, c'est la façon dont ils ont survécu, en consommant de la chère humaine,

est-ce que vous avez senti, vous, de la compréhension ou au contraire du jugement ?

Alors, alors, et moi, ce que je me rappelle, et d'ailleurs, c'est dans mon film,

et au moment, en fait, au tout début, comme vous le disiez tout à l'heure dans le récit,

on parlait de miracle, voilà, il y a 16 survivants, après 72 jours.

Après trois jours, il y a eu quelques photos qui ont fait la une des quelques journaux pas très fréquentables,

dans lesquelles, effectivement, autour de la carlingue, on voyait des débris, enfin bref, des restes des corps humains,

alors tout d'un coup, le miracle est devenu l'horreur.

Et les survivants eux-mêmes, qui étaient dans un état autre, ils étaient en train de se réalimenter,

de retrouver leurs familles et les mondes, ils n'avaient rien caché, ils étaient dans une espèce de,

je ne sais pas si un retour à l'enfance ou en tout cas ailleurs,

et si on leur posait des questions, ils répondaient toujours la vérité,

sauf que les médecins et les militaires chiliens, ils ont dit, oh là là, ils ont fait ça, vous avez fait ça,

alors dites-le chez vous ça, ça, on ne veut pas que le Chili soit mêlé à une histoire pareille,

bon bah très bien, donc pendant quelques jours, le monde entier a compris qu'il n'y avait pas d'autres solutions,

que celles qu'ils ont choisi, mais qu'il fallait le dire,

et donc ils l'ont dit à la conférence de presse où un, deux des gars, je me rappelle bien,

il a trouvé une image qu'ils avaient utilisée à Montagne au moment de la décision,

et comparaison un peu osée avec la dernière scène du Christ,

dans laquelle donc il fallait partager le sang et la chair,

et quand il l'a dit, il n'a même pas pu finir de le dire qu'il y a eu une ovation,

une stand innovation, comme on dit aujourd'hui, et incroyable,

et qu'ils l'ont aidé, à ne pas être obligés d'aller jusqu'au bout,

et c'est vrai qu'il y a des gens qui m'ont dit, chose que je n'avais pas pensé,

est-ce que aujourd'hui, dans le monde d'aujourd'hui, donc 35, 40 ans après,

est-ce que ce stand innovation aurait eu lieu aujourd'hui ?

C'est une vraie question, du bon.

Vous savez, moi je voudrais qu'on écoute quelques secondes,

mais je rentre en train de la voix, la vraie voix du vrai,

Roberto Canessa, ce personnage dont la voix était incarnée par François Morel,

précisément, en rentrant de la vraie voix de, simplement, de Roberto Canessa.

Je ne sais pas s'il y a eu un esprit maléfique qui s'est dit,

au lieu de pondre des cobayes, n'étant des êtres humains sur un glacier,

de préférence des jeunes, parce qu'ils sont plus résistants,

nous allons les choisir d'un certain niveau social et culturel.

Il y aura surtout des étudiants, sportifs,

et nous allons voir comment ce groupe, plutôt privilégié de par ses capacités physiques,

ses connaissances et ses convictions religieuses,

nous allons voir combien de temps ils peuvent tenir et comment ils s'organisent.

À un certain moment, on a cru qu'on allait devenir des sauvages et s'entre-tuer.

On a dû faire des choses que je pense aucun animal ne serait capable de faire.

Comme de manger sa propre espèce.

Nous avons dû nous humilier jusqu'au limite de ce que l'être humain peut imaginer.

Et oui, c'est la double peine, parce qu'il y a la souffrance physique,

il y a l'angoisse, il y a aussi l'accident d'avion qui est d'une horreur,

vivre un accident d'avion, c'est une horreur absolue.

C'est quadruple peine, et s'il faut en plus,

le reprocher ce qu'ils ont fait.

Et là, je trouve que sa défense, elle est sereine pour autant, il n'y a pas de couleur.

Et bien, je pense que c'est un extrait essentiel du film,

parce que ça monte toute sa capacité de réflexion et son humanitaire, Roberto.

C'est lui qui m'inspirait ce film,

et c'est vraiment quelqu'un qui a travaillé toujours depuis l'accident,

qui m'impressionnait chez lui, où on allait venir de plus en plus proche.

Et avec les années, je voyais comment avec ses enfants,

les sujets de la cordillère étaient toujours présents.

Et même des fois, il forçait, il est sorté, même d'une manière un peu forte,

on avait l'impression qu'il avait besoin de faire une catharsis et de travailler.

Et c'est vrai qu'il me disait, il faut que je comprenne pourquoi le destin m'a fait vivre ça.

Ça ne peut pas être juste le hasard.

Donc, ça doit porter un enseignement.

Et peu à peu, avec les années, et je l'ai vu travailler,

et c'est ça qui m'inspirait sur ce film,

que je pense que c'est, en toute humilité, en tout cas cette histoire.

Je ne sais pas si c'est des films, mais en tout cas l'histoire,

ou la manière dont j'ai choisi de la raconter,

c'est un compte initiatique et c'est un compte philosophique aussi.

Je crois que c'est un récit total,

il y a toute la condition humaine dedans,

et on ne sort pas le même une fois qu'on traverse ces récits,

et on fait ce qu'ils ont fait, et puis on est transformé.

Et c'est dans ça que j'espère, d'ailleurs,

qu'il y ait d'autres cinéastes écrivains,

et ça va devenir un classique.

Et en enlève-en ce côté gore qui en fait rend plus grand l'histoire,

et plus visible aussi.

Alors effectivement, il y a ce côté de l'anthropophagie

qui donne cette dimension à l'histoire,

d'ailleurs on l'a vu dans le récit,

nous l'avons construit avec Rien-Gar,

on n'était pas complètement, et que dans cette histoire-là,

on était aussi dans l'histoire de gens qui sont extrêmement courageux,

physiquement, qui vont escalader une montagne,

qui s'enfoncent dans la neige, qui s'arrêtent tous les 20 mètres,

parce qu'ils n'en peuvent plus, qui ne sont pas habillés pour ça.

Il n'y a pas que la dimension anthropophagie,

même si elle donne une dimension.

Tout à fait, une chose qu'il faut savoir,

c'est qu'il y a quand ils ont pris la décision de franchir,

et c'est tabou,

et ils ont tout fait un pacte entre eux,

c'est-à-dire si je meurs, mon corps, servez-vous de mon corps.

Donc ils ont tout fait donc de leur corps,

quelque chose d'assecretien aussi,

et ça c'est important.

L'autre chose qu'ils ont tenu aussi à un secret jusqu'aujourd'hui,

c'est qu'ils n'ont jamais parlé, c'est le seul secret.

D'ailleurs parce qu'en fait ils ont la force,

ils ont la force de ne pas avoir des secrets.

Il n'y a rien de caché dans cette histoire,

sauf effectivement quelles corps ont été utilisées

et quelles corps ont été épargnées, forcément.

Ça leur appartient, ça.

Il y a une frontière de la violence quand t'es journaliste.

Absolument, et c'est vrai que, même aujourd'hui,

il y a plusieurs alpinistes ou plutôt comme ils disent là-bas,

indinistes, parce qu'ils trouvent, c'est les andes quand même,

et qui ont essayé de référer les 10 jours

de traverser des cordillères que Roberto et Nando ont fait,

mais là aujourd'hui ils le font avec des GPS,

avec de la nourriture comme il faut,

déshydraté avec tout l'équipement qu'il faut,

et ils n'arrivent pas à l'affaire à moins de 10 jours.

C'est-à-dire qu'ils ont fait un miracle,

un exploit incroyable des gens qui n'avaient jamais vu Montagne.

Pourquoi ? D'abord parce qu'ils étaient portés par leur courage,

mais le fait qu'ils étaient des rues bimènes, jeunes, vigoureux,

ça a dû compter quand même.

Oui, oui.

Et aussi, comme ils disent tous les deux, Roberto et Nando,

Nando a perdu sa mère et sa sœur,

donc la seule chose qu'il voulait, Nando,

c'est retrouver son père et l'embrasser,

et qu'il arrête de pleurer, parce qu'il s'est disé,

mon père a perdu toute sa famille dans un vol.

Et Nando aussi m'a dit pendant des années,

écoute, si je pouvais changer mon destin,

j'ai donné un coup de volant à cette voiture

qui conduisait mon père vers l'aéroport,

et j'aurais aimé vraiment que ma vie soit autre.

Et dernièrement, ces dernières années que je l'ai vues,

il m'a dit, tu sais, non, même pas.

C'était une jolie idée, de donner un coup de volant,

mais ça c'est mon destin, énormément, j'ai une magnifique famille,

j'ai appris beaucoup de choses,

et je peux pas dire que je suis content

de ce qui nous est arrivé, non, personne n'est content,

mais on a grandi tous,

et c'était forcément, il fallait qu'on passe par ces chemins-là,

même s'il a été énorme.

– Alors dernière question, il nous reste une minute,

donc vous êtes retournés avec eux sur les lieux.

Quand ils sont arrivés, ils ont été arrivés avec eux,

c'est la première fois qu'ils y sont retournés, j'imagine.

Qu'est-ce qui a été leur réaction ?

– Alors, c'est vrai que ça a été le lieu le plus haï du monde,

par eux, pendant des années,

et peu à peu ils ont commencé en partant,

des fois avec leur fils, des fois avec un frère,

à y retourner tout doucement, et moi,

donc je profiterai de ce mouvement,

j'ai amené quatre survivants et leur famille,

et bien, émotions énormes,

mais ils ont eu beaucoup de mal à quitter ces lieux,

parce que comme ils disent eux-mêmes,

et au moment où les hélicoptères les aménaient vers la vie,

et la civilisation, ils ont senti quelque chose à le régler,

quelque chose comme s'ils perdaient une société idéale,

la société et la neige, comme ils disent,

qu'ils ont construit là-haut et qu'ils ne retrouveront plus jamais en bas,

donc ils ont eu du mal à remonter sur le cheval,

et à redescendre ensemble.

– J'imagine.

Il me reste à vous remercier Gonzalo Arikron,

je rappelle le titre de votre documentaire,

« Naufragé des andes »,

exceptionnel, un franchement son documentaire,

et d'ailleurs, il a été le réage, je le rappelle aussi,

du prix du festival international,

d'Amsterdam, merci, au revoir. – Merci beaucoup, merci.

– C'était Affaire sensible, aujourd'hui, les survivants de la Cordillère des Annes,

d'une émission que vous pouvez réécouter en podcast sur franceinter.fr,

rendez-vous également sur la page Facebook d'Affaire sensible,

demain ce sera la fiction, puisque nous serons vendus,

elle sera consacrée au coureur cycliste Louis-Zon Bobet.

Sous-titrage ST' 501

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durée :00:55:26 - Affaires sensibles - par : Fabrice Drouelle - Aujourd’hui dans Affaires sensibles, l’histoire d’une aventure humaine inédite, celle des 16 survivants d’un crash aérien survenu dans la cordillère des Andes en octobre 1972.