Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Amoureuse d’un criminel : Chloé - Le récit
Europe 1 8/15/23 - 32m - PDF Transcript
Voici l'histoire de Chloé qui, en 2016, enceinte jusqu'au coup, tomberait dingue d'un assassin
rencontré en prison. Et vous verrez, ça a failli très mal se terminer. Je dirais cette histoire
du livre de Marine Mazéas aux éditions du Rocher, l'aimait meurtrier. Et c'est avec Chloé elle-même
que nous la débriefrons dans un deuxième podcast disponible sur votre application. J'ai écrit
ce récit avec Tuduel de Dieu le veut, réalisation Céline Le Bras.
Je m'appelle Chloé. En 2016 j'ai 29 ans et je propose mes services comme bénévole au
chénépie. C'est une association qui propose du soutien scolaire et des ateliers en prison. Et
on me met au parfum dès le début. Vous devez savoir que, comme tous ceux qui interviennent en
prison, vous ne pouvez pas, vous ne devez pas entretenir la moindre relation, comment dire privée,
avec un détenu. À l'époque je suis éducatrice spécialisée auprès d'un
adulte autiste. Mais je suis enceinte de quatre mois et mes patients peuvent être violents,
vu mon état impossible de continuer à travailler. Alors je ne connais pas du tout la prison,
je ne sais pas si j'aurai les épônes, mais j'ai envie d'éter.
La première fois que j'entre en prison, je suis observatrice au côté de bénévoles plus
expérimentés. J'apprends les règles. Les fouilles à l'entrée, à la sortie, les attendants
dans le sas, les alarmes, le bruit des clés. Et on me donne un nouveau déconseil.
C'est une aborde surtout pas avec le détenu, le crime qu'il a commis. Et puis alors pas de
lien affectif avec lui pour éviter toute tentation de leur part. Je te conseille de
venir s'en maquillage et puis surtout avec des vêtements qui ne sont pas trop près du corps,
ou qui dévoilent pas trop ta peau. D'accord ?
Té le premier jour, ça se passe bien. J'ai un bon relationnel avec les détenus.
J'anime des ateliers, de jeux de société, des débats. Je donne des cours de soutien à ceux
qui s'y inscrivent. Ça me plaît. Et je me sens utile.
Quelques semaines plus tard, on me présente Loïc. Et comme on dit, dès la première
poignée de main, c'est un coup de cœur. Je suis comme appé par le long regard qui
m'agresse, son sourire, si beau, si charmant, son charisme. Je suis complètement déboussolé
par ce détenu de 24 ans. Bah voilà, j'ai arrêté mes études très jeunes et donc pour trouver
un emploi à ma sortie, je voudrais passer d'abord le brevet des collèges et puis un C.A.P.
Nous convenons que je lui donnerai quatre à six heures de cours particuliers par semaine,
en mathématiques et en anglais. Au début, même s'il me trouble, je maintiens une distance
prudente. J'ignore quel crime il a commis. Et si j'avais su, j'aurais peut-être
refusé. Bah voilà, j'ai été condamné à 18 ans, mais ma peine a été ramenée à
15 ans. Mais ce n'est pas pour une affaire de meurs. J'ai tué quelqu'un.
Et là, il me livre les détails de son crime. A l'époque, il est sans abri et toxicomane
depuis plusieurs mois. Un homme lui tend la main et propose de l'héberger et de le nourrir
contre des travaux de rénovation dans sa ferme. Un an plus tard, il le tue à coup de marteau,
sans raison apparente. Ce jour-là, il me parle aussi de son enfance, fracassé.
Bon, en fait, je suis issu d'un viol. Et puis après, j'ai été battu par mon beau-père.
Et puis, on m'a baloté de foyer en famille d'accueil. Et puis voilà, je suis tombé dans la drogue.
Je me suis retrouvé dans la rue. Et dans la rue, tu sais, soit tu survises, soit tu crèves.
Ça me secoue tout ça. Je sens une volonté de s'en sortir. Mais à côté de ça,
il n'exprime pas vraiment non regret. En tout cas pas celui d'avoir tué.
Oh ben j'aurais jamais dû me faire attraper. J'ai été mauvais.
Bon, de toute façon, ça n'est pas à moi de le juger. Je dois me concentrer sur mon rôle
d'enseignante bénévole. Mais il me trouble. Il me trouble toujours.
Pendant les temps de pause, Loïc se montre curieux. Et c'est quoi vos passions ? A vous,
quoi ? Vous loisir à l'extérieur ? Je lui réponds, mais sans donner de détails.
Je ne lui parle pas de ma famille. En tout cas avec moi, il est très prévenant.
Il reste à lui-même ma chaise au début de chaque séance.
Ah, c'est vous ! Alors ? Ça se pose bien cette grossesse ? Vous voulez un verre d'eau ?
Bref, entre nous, le courant passe déraisonnablement bien. Au point d'ailleurs que nos discussions
prennent le pas sur les études. On se parle de plus en plus. Et on travaille de moins en moins.
Désormais, les surveillants ne passent plus tous les quart d'heure comme au début. Il n'y a pas
eu d'incident. Ils nous font confiance. Et donc nous nous retrouvons dans une bulle toute douce,
agréable, un peu cotonneuse. Nos mains s'effleurent, nos jambes se touchent avec gêne, mais avec envie
aussi. Mais je ne suis pas toute seule dans ma vie. Je suis enceinte. Et pourtant tous les jours,
je m'empresse de venir le voir. Et je suis triste quand je le quitte. Je suis amoureuse,
mais je refuse de me l'avouer.
Ça fait neuf ans que je suis en couple. Et je suis content d'avoir un enfant avec le papa.
Je l'aime profondément. Mais c'est vrai qu'il est peu impliqué dans ma grossesse et dans son
rôle de futur père. Il n'est pas là aux écographies, très peu au cours de préparation à l'accouchement.
Il ne participe pas à l'aménagement de la chambre du bébé. Il me dit que cette nouvelle
responsabilité l'angoisse. Moi ça je l'accepte, mais je m'encrue le monde de soutien. Et ce soutien,
eh bien je le trouve paradoxalement auprès de Loïc, en prison.
Un homme qui a tué. Je me dis je suis folle. Un jour un chef de détention me dit
« Eh faites attention, c'est un manipulateur ce gars-là ! »
Et il est vrai que j'ai entendu dire que Charmé Parloïc, une psychologue intervenante
à la maison d'arrêt, avait demandé à cesser la thérapie car leurs relations n'étaient
plus professionnelles. Je garde ça dans un coin de ma tête.
A la maison, j'essaye de camoufler mes troubles auprès de mon compagnon. Je donne le change.
Mais dès qu'il est parti, je m'effondre. C'est fou quoi. J'ai l'impression de le tromper
alors qu'il s'est rien passé. Mais mes brancées me font culpabiliser car
j'ai très envie de l'embrasser, Loïc. Alors en octobre, à un mois de mon accouchement,
alors que la situation m'échappe totalement, je décide d'arrêter. Je veux me concentrer
sur ma vie personnelle, même si dans mon couple ça ne se passe pas comme je l'espère. Je vais
devenir maman. C'est tout ce qui doit me préoccuper. Mais Loïc me manque. Juste avant
mon départ, il tente une approche. Ben, je vois bien que t'es pas indifférente.
Est-ce que je peux te demander ce que tu ressens pour moi ? Ben, je ne sais pas vraiment.
Tu me perturbes, ça c'est évident. Mais bon, tu connais ma situation.
Et ben, j'espère que j'aurais quand même noté nouvelles.
Mais toi aussi, tu pourras m'en donner. Tiens, note mon numéro de téléphone.
Et il l'inscrit fièrement au feutre sur son avant-bras, comme un trophée.
En novembre 2016, j'accouche d'un magnifique petit garçon.
Mais ce bonheur est un peu terni par le peu d'investissement de son papa.
Au fil des semaines, notre couple se délite. Et Loïc est toujours dans ma tête.
Et moi, à la maternité, je lui écris une lettre pour lui annoncer la naissance de mon fils.
façon de dire que même dehors, je ne l'oublie pas.
Seulement voilà, cette lettre est interceptée par les services pénitentiaires.
Quelques semaines plus tard, me voilà convoqué chez le directeur.
Vous savez, je suppose, madame, que vous n'avez pas, en tant que bénévole du génépi,
le droit d'écrire à un détenu.
Alors vous n'avez pas signé votre lettre, mais nous vous avons vite identifié.
Ça n'a pas été difficile, puisque vous êtes la seule femme enceinte à le fréquenter.
C'est assez humiliant et gênant.
Il me conseille de me préserver de lui.
Et en attendant, mon permis de visite est suspendu, définitivement.
Et Loïc est transféré dans une autre prison à une heure de route.
Je le prends comme un signe, même si ça me rend triste.
C'est l'occasion de passer à autre chose, de l'oublier.
Pendant ce temps, mon compagnon n'est toujours pas très présent.
Il ne se lève pas la nuit pour nourrir ou pour apaiser le bébé.
Il part même au ski pendant son congé paternité.
Et moi, j'accumule beaucoup de rancœur et de colère contre-nuits.
Ça ne peut plus continuer.
Je décide de tout arrêter avec lui.
Et c'est là, en mars 2017, au moment où je rompe avec le père de mon fils, que Loïc réapparaît.
Quand je lui ai donné mon numéro de téléphone, je lui ai dit qu'il pourrait me donner des nouvelles à l'occasion.
Et bien, c'est ce qu'il fait.
Alors, comment arrive-t-il à ce bébé ?
Bien, bien. Très bien.
Et avec ton mari ? Ça va ?
Ouais. Enfin, pas trop, en fait.
Écoute, si jamais t'as envie de venir me voir, tu sais où je suis.
Entendre sa voix m'a totalement déconcerté.
J'ai de nouveau envie de le voir.
Comme me dit une amie, ça n'engagea rien, après tout.
Dès le lendemain, j'écris au service pénitentiaire pour demander un permis de visite.
Alors que j'étais professeur bénévole en détention, je donnais des cours à ce détenu et un lien s'est créé.
Je souhaiterais donc le voir, sachant qu'il ne reçoit aucune visite.
Et un mois plus tard, je reçois mon permis.
Et tous les jours, je me demande si c'est une bonne idée.
Quand j'entre dans le petit box vitré du parloin,
nos regards disent tout ce qu'on a refraîné pendant tant de mois.
On se prend tout de suite dans les bras.
C'est la première fois qu'on se l'autorise.
Et je retrouve son odeur.
Si agréable.
Tu ne sais pas à quel point tu m'as manqué.
J'ai essayé de t'oublier.
Mais je ne suis pas arrivé.
Et à la fin du parloir d'une heure, on échange notre premier baiser,
fougueux, passionné.
On a tellement attendu.
Je ne sais pas où on va, tous les deux.
La suite me paraît vertigineuse.
Mais plus rien ne me retient.
Tous mes doutes se sont envolés.
Je reviendrai le voir le week-end prochain.
Dans sa nouvelle prison,
les parloirs se font dans de petits boxes vitrées
dont les portes sont au pas qu'en bas.
Alors, pour ne pas subir le regard des surveillants,
eh bien on s'assoit pour terre.
Et on se crée à un cocon rien qu'à nous.
Et là, plus rien ne compte.
On est serrés l'un contre l'autre.
On ne se lâche pas comme deux adolescents vivant leur premier amour.
Et on parle de tout.
Je lui raconte mon côté dien, mais difficulté de maman
dans l'éducation solitaire de mon fils, par exemple.
Oh, je suis sûr que tu es une bonne mère.
Et moi,
moi j'écoute sa vie de prisonnier, ses préoccupations, son monde.
Et quand j'entends le gardien annoncer
« Fin de parloir, c'est terminé pour tout le monde ».
C'est violent.
Un déchirement.
« Fin de parloir, c'est terminé pour tout le monde ».
Pendant la semaine, on s'écrit des lettres de plusieurs pages.
Et quand arrive le week-end, au parloir,
on s'échange nos écharpes
et même des sous-vêtements qui ont, comment dire,
notre odeur corporelle.
Il m'a demandé de lui acheter une puce de téléphone
qu'il glissera dans son portable.
Car il en a un.
Et du coup, il m'appelle le soir depuis sa cellule.
« Ça va ? T'as passé une bonne journée ? »
Au bout de quelques mois,
on s'autorise une relation intime au parloir.
Ça me met mal à l'aise.
Il m'a demandé de lui acheter une puce de téléphone
et qu'on s'autorise une relation intime au parloir.
Ça me met mal à l'aise à cause des gardiens
qui peuvent nous surprendre.
Cette première fois n'est pas aussi romantique qu'on l'espérait.
Mais c'est comme ça.
Loïc progresse tous les jours.
Je sens un apaisement émotionnel par rapport à son passé.
Il y a ses actes.
Il tient un discours positif sur sa réinsertion.
Ça me donne plein d'espoir, tout ça.
Je le vois deux heures tous les week-ends.
Et quand il y a un jour férié,
je loge sur place pour avoir un double parloir.
Et le soir, dans ma chambre d'hôte,
je parle avec lui via son portable.
Notre lien devient fusionnel,
presque cadnaçant, en prise au nom.
Le reste de la semaine, quand il fait froid,
j'enroule son écharpe bleu marine et grise autour de mon cou.
Et lui, dans sa cellume,
sert fort mon t-shirt imprégné de mon parfum.
Je n'ai plus vraiment de temps pour moi.
Enfin, c'est rare que je sorte avec des amis
ou que je pars tant week-end.
Je vois ma famille régulièrement.
C'est ma seule distraction.
Dans sa prison, après le petit déjeuner
et la douche réglementaire,
Loïc rejoint son atelier
dans lequel il est manutensionnaire,
façon de s'occuper et de gagner
quelques dizaines d'euros pour cantiner.
Et l'après-midi, il fait du sport.
Nous ne vivons rien en commun.
Nous ne partageons rien.
Mais j'ai le sentiment qu'on ne construit pas véritablement.
J'aimerais bien partager des choses à l'extérieur avec lui.
Mais qu'est-ce que tu fais, Chloé ?
Mais dans quoi tu t'es embarqué ?
Visite après visite,
j'en apprends un peu plus sur lui.
Avant moi, il a eu peu de relations
et il dit que ses petites amis l'ont déçue.
C'est pour ça que la nôtre
reste important à ses yeux.
J'ai que toi, Chloé.
Personne n'autre que toi.
Et moi, ben...
je deviens comme toutes les femmes
et je n'ai que toi, Chloé.
Et moi, ben...
je deviens comme toutes les femmes de prisonniers.
Une femme qui attend.
J'attends qu'il appelle.
J'attends ses courriers.
Et surtout, j'attends qu'il sorte.
Oui.
Oui, je me suis un peu enfermé.
Centré sur lui.
Sur notre histoire.
Mais je suis très amoureuse.
Alors je fais ce qu'il faut.
En attendant qu'il sorte.
À côté de ça,
je vis avec le poids du secret.
Car c'est un amour clandestin.
Je n'en ai parlé à personne.
Ni au père de mon fils,
ni même à ma famille.
Il n'y a qu'une très bonne amie,
bénévolo Génépi, qui est au courant.
Je ne veux pas qu'on me juge.
Et surtout, je ne veux pas qu'on me retire
mon enfant au prétexte
que je serai folle
de m'attacher à un criminel.
Alors, pour ne pas être démasqué,
je m'invente des explications.
Ah, ce week-end,
ça ne va pas être possible.
Je fais au cinéma, avec une copine.
Et bien sûr,
je camoufle les photos de Loïc
dans une petite boîte,
à l'abri des regards.
Je m'entends très bien avec ma mère.
Ça me fend le cœur de devoir lui mentir.
Mais c'est mieux comme ça.
Pour moi, comme pour elle.
Pour la préserver.
J'ai deux vies, en quelque sorte.
J'avoue que
venir totalement,
qu'elle sera son comportement à l'extérieur.
Je ne sais pas
à quoi m'attendre de la pardonnome
qui est incarcérée depuis déjà 5 ans.
Mais bon,
ma seule envie,
c'est de partager des moments tendres
de bons moments avec lui.
Dehors,
Loïc a maintenant 26 ans.
Ça fait 5 ans qu'il est en prison.
Et il vient d'obtenir
sa première permission de sortie.
Je serai son garant.
Il logera chez moi.
Et dans ce cadre,
je suis convoqué à la gendarmerie.
Vous êtes sûr, madame,
de vouloir l'accueillir chez vous.
Vous avez une bonne situation,
et vous êtes mère de famille.
Oui, mais je sais qui il est.
Je sais ce qu'il a fait.
Je sais ce que je fais.
Vous savez,
ces gars-là, ils sont forts
pour manipuler les jeunes femmes comme vous.
Faites attention.
Et il est vrai
que ça ne va pas se passer
exactement comme près.
Loïc fait sa première sortie
un matin de février 2018.
Il a droit à quelques heures
autour de la prison.
Je suis heureux.
Et lui aussi.
Il prend sa première bouffée d'air libre
depuis 5 ans.
J'avoue que je suis un peu engossé.
Je me demande
si tout va bien se passer.
S'il aura
un comportement
qui va bien se passer.
Il aura un comportement
adapté à l'extérieur.
On a réservé une chambre d'hôtel
pour passer un moment rien qu'à nous.
Et en allant
à l'hôtel, on croise
deux hommes qui me regardent.
Sans plus.
Il sert la mâchoire et il me balance.
Tu veux aller avec eux ?
C'est ça ? Il te plaise ?
Non, Loïc c'est...
C'est juste un regard.
Ça fait partie de la vie à l'extérieur.
T'es plus habitué.
Et là, il se met à m'insulter.
Je mets tout de suite l'eau là
et il s'excuse.
Tout ça, comment dire ?
Une déception.
Ça n'augure rien de bon pour sa réinsertion.
C'est vrai que...
Cette première sortie me laisse
un goût...
à mer.
Je dirais que c'est...
c'est un peu la douche froide.
Et la semaine d'après
eh bien son comportement change.
Il devient plus nerveux, moins patient.
Il se met en colère
si je ne suis pas disponible pour répondre
au téléphone en journée ou le soir.
Il devient suspicious quand je sors
avec mes amis.
Il me demande comment je suis habillé pour sortir.
Moi je minimise.
Il doit se réhabituer
à l'extérieur.
Ça viendra.
Et puis il a toujours les mots pour se faire pardonner.
Il s'excuse plusieurs fois.
Il dit que ça se passera bien la prochaine fois qu'il sortira.
Quelques semaines plus tard
Loïc obtient une seconde permission
d'une journée
et une nuit
avec la permission d'aller chez moi.
Il a deux envies.
Il veut aller nager à la piscine
et il veut faire un bon repas.
Alors je la même s'achetais un maillot de bain.
Mais ça tourne au cauchemar.
Le moindre regard sur lui la graisse.
Mais qu'est-ce qu'il me veut celui-là ?
Je suis gêné.
Et j'essaye de le calmer.
Mais disons, il a l'habitude
que les détenus baissent le regard quand ils le croisent
parce que c'est un tueur.
Mais plus tard, à la piscine municipale
il s'agace à nouveau
à cause d'un regard appuyé d'un maître nageur.
Il est prêt à se battre avec lui.
Il a le point serré
et un regard terrifiant.
Alors je tente de le raisonner
mais il m'écoute pas.
Alors je sors
et je quitte le bassin.
Je suis déçu.
Il me parait
et m'est mortifié
et aussi un peu effrayé
par ce regard que j'ai aperçu.
Le regard d'un tueur.
Et lui il s'excuse.
Il promet qu'il en parlera avec sa psychologue
à son retour en prison.
Le dîner en tête à tête
se passe bien.
La permission se termine
sur une note plus douce.
Et la séparation est difficile.
Mais ça du terre aussi.
Depuis
à chaque fois que je vais le voir au parloir
j'ai toujours autant envie.
Mais j'ai un peu plus d'appréhension.
Mais pourquoi tu t'infliges ça Chloé ?
Est-ce que tu l'imagines vraiment
en famille ?
J'étais parent.
Au téléphone
il doute de plus en plus de ma fidélité.
Tu vois qui ? Tu fais quoi ?
Des détenus jaloux lui ont fait croire
que j'ai été vu avec un autre homme dehors
ou carrément dans un film pornographique.
On se dispute de plus en plus
et ça devient pesant
et inutile.
Tout ça me détruit
peu à peu.
Mais sur le moment
eh ben je m'en rends pas compte
car il y a encore de l'amour et de la tendresse.
C'est bien pour ça que c'est difficile
d'y voir clair.
Au début de l'été
nouvelle permission de 2 jours
plein.
J'ai décidé de peser chacun de mes mots
de contrôler mon regard
pour qu'il ne soit pas mal interprété.
Et pourtant
il se met en colère
dès les premières minutes.
Pourquoi tu me tiens pas la main ?
Je sais pas qu'on me le ferait
une femme amoureuse quoi.
Il entre dans une colère
noire.
Il développe des trésors de diplomatie
pour le calmer.
Le soir chez moi
une nouvelle dispute éclate.
On est chacun d'un côté du lit
dans la chambre.
Il me hurle dessus
et il m'insulte à nouveau
et il a les points serrés, fermés.
Il est ivre de rage
et moi je reste près de la porte
d'un voisin.
Ah oui !
Il a tué quand même.
On ne sait jamais.
C'est la première fois
que j'ai peur.
Le lendemain
j'organise une randonnée en pleine nature.
Je me dis qu'il appréciera le décor
et l'isolement.
Et là, pour une futilité
monate, il dégoupille à nouveau.
Sauf qu'on est seul.
Au milieu de nulle part, près d'une falaise
et d'une rivière, je suis totalement
paniqué.
Face à son maître 80, je n'ai aucune chance
s'il s'en prend à moi.
Heureusement, ce jour-là,
Loïc en reste au mot.
Bon, tu sais que Loïc
mes réactions,
j'avoue qu'elle me dépasse.
Je vais continuer mon suivi psychologique
et tout ça pour
m'imposer.
Je veux y croire.
Je refuse de laisser tomber.
Mais quelque chose s'est brisé.
J'espace les parloirs.
J'espace les courriers.
Et je réponds de moins en moins
à ses appels.
Ma seule bouffée d'air,
ma petite bulle
d'oxygène,
c'est mon fils.
Il est mon petit bonheur.
Quand je suis avec lui,
je lui fais découvrir plein de choses,
on passe des moments
prouves, magiques.
Et la permission suivante
tourne court.
J'ai été trop blessé et trop déçu.
Alors je préfère qu'il aille ailleurs que chez moi.
Mais lui,
lui veut m'embrasser.
Je le repousse. Il s'énerve.
J'appelle un ami à lui pour qu'il vienne le chercher
et là, il tente de me rattraper
dans la rue. Il m'agrippe.
Et puis devant le regard des passants,
finalement, il me lâche.
Entre nous,
c'est fini.
Fini, fini.
J'ai bloqué son numéro.
Mais il a trouvé un autre téléphone.
Je te retrouve.
Tu verras ce que je vous ferai à toi et ton fils.
Et puis la fois suivante.
Non, mais je dis ça.
Je t'ai en colère.
Je te ferai jamais de mal.
C'est bien.
Certains jours, il menace
de se suicider.
Il joue avec tous les ressorts
possibles. Et ça fonctionne.
Je suis perdu.
Mon ami me conseille de déposer
plein de contre lui. Je ne veux pas.
Je préfère jouer la carte
de l'apaisement. En revanche,
j'appelle la prison.
Dites-moi,
je voulais vous dire que je ne le
recevrai plus chez moi.
Ah bon ?
C'est étonnant, fin.
En détention, il se comprend bien.
Il est calme.
Il n'y a jamais d'incident avec lui.
Il me faut
un an
pour me reconstruire.
Avec, malgré tout,
le sentiment d'un énorme gâchis.
Parce que j'y ai cru.
Je me dis aussi que si je ne l'avais pas
rencontré, ça se serait
peut-être passé autrement avec le père de mon fils.
On n'a pas complètement
coupé le pont avec Louis.
Depuis, il est sorti
en semi-liberté.
Et il m'a appelé.
Il m'a appelé pour me dire que j'étais toujours
la femme de sa vie, mais qu'il
n'interviendra plus jamais dans la mienne.
...
...
...
J'ai tiré cette histoire
du livre de Marine Mazéas
aux éditions du rocher Les Mets Meurtriers.
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Chloé donne des cours en prison, elle tombe amoureuse de Loïc condamné pour assassinat. L’histoire se finit mal.