La source: Vinciane Despret et ses sources

Radio France Radio France 5/21/23 - Episode Page - 57m - PDF Transcript

France Inter

Quand vous faites de la fiction, tout peut vous nourrir. Tout devient bon à manger. Vous êtes tout le temps aux aguets, c'est ça qui est signé dans cette histoire-là.

Tout devient de matière, matière à rire, matière à penser, matière à spéculer, matière à fabriquer, à fabriquer du faux.

La source, c'est le lieu secret des écrivains. L'endroit caché des romancières, la planque ont tout à commencé.

J'ai éprouvé le joie dans cette écriture, un plaisir aux mensonges et l'espèce du bris.

Rien qu'en fait, vraiment de dire, d'y aller et d'y aller, de franco et de créer des liens mais qui n'avaient ni que d'une tête et qui dort se le contenait bien la route.

La source.

C'est si le coulon sur France Inter.

Quels différences faites-vous entre les hommes et les animaux ? Le monde vivant pour vous, de qui et de quoi est-il composé ?

Avez-vous dans la tête des échelles, des abscesse et des ordonnées pour définir qui a la priorité parmi les êtres qui habitent le même univers ?

Qui compte s'intéresse à sa place dans l'histoire du vivant et frappée de vertiges et d'émerveillement pendant que nous parlons, tout bouge, tout est mouvement, naissance, création et destruction.

Qu'avons-nous à apprendre du monde animal dans ce désordre bien rangé et sublime au nous jouant au petit chef ?

Depuis 27 ans, la plume de Vincent Dépré, philosophe et séliste, bouge au rythme des pattes, des ailes, des tentacules.

Formée à l'éthologie, elle étudie le comportement animal, observe celles et ceux qui observent et des poèmes naisses.

Bonjour Cécile, c'est Vinciane.

Quand vous au bifurquez vers le village à l'indication de son nom, laissez votre voiture dès que vous pouvez.

Prenez la petite ruelle qui est à gauche et qui descend en contre-bas de la place.

C'est la deuxième ou la troisième maison, selon la manière dont on compte.

Vous y reconnaitrez, il y a une table avec deux chaises, un petit Olivier et une chouette à côté de la porte.

C'est numéro 2. À demain.

Pendant une heure, au bord d'une cascade presque abondante, nous avons discuté de ce que cela signifie, écrire sur les animaux, écrire les vivants.

Je me suis demandé avant toute chose ce qu'une belge venait faire au fond du gare, dans cette nature qui ne ressemble en rien à celle de sa naissance.

C'est quand je suis arrivée, dans cette région-ci, que j'ai retrouvé quelque chose que j'avais adoré.

Ces paysages qu'on voit par exemple dans les basse-péréniers françaises ou espagnols.

C'est-à-dire des paysages de gorge, des paysages qui ne sont pas trop élevés, mais qui ne sont pas de la plaine non plus.

Et des paysages avec des rochers, avec des lumières fabuleuses, avec de la végétation de boisées, mais je ne sais pas les forêts de sapin que j'ai connues dans les Ardennes.

Et j'ai pensé, tiens, ici, ces paysages-là, ces gorges, ces toutes petites routes, ces platanes le long des routes,

tout ça pour moi, ça ressemblait à un souvenir que je n'avais pas, mais qui est un souvenir, je pense, qui correspondait au rêve qu'on se faisait de la France quand on était petits,

pas notamment parce qu'on partait en vacances avec mes parents, un souvenir de fraîcheur que j'avais connu dans les Pyrénées,

un souvenir d'altitude, mais pas trop élevée, c'était ni la montagne, ni la plaine.

Et donc voilà comment je décrireai cette région, c'est des garigues,

il y a moyen de se promener sur des chemins, pendant des kilomètres et des kilomètres, qui sont des chemins de très grande beauté,

avec des choses extraordinaires, avec des terriers d'araignées sur le côté, parce que j'appelle des terriers d'araignées,

ce sont des araignées qui tissent, il y en a beaucoup ici dans cette région qui tissent, des toiles qui ont des formes de cônes,

avec de la végétation, avec des oliviers, qui est aussi un très beau paysage.

Bref, pour moi c'était vraiment comme une espèce de photomontage de toutes les formes nostalgiques qu'on peut avoir par rapport à un pays rêvé.

Est-ce que vous pensez être précédée par la géographie ?

À quel point la géographie que vous habitez et qui vous habite a un impact sur ce que vous écrivez, ou sur ce à quoi vous pensez ?

Alors c'est une question qui est pour moi assez difficile à poser,

puisque il y a des dimensions des lieux qui sont importantes, mais je ne les vois pas tous, je vais dire c'est pas le lieu en soi,

c'est le calme, c'est le bruit d'une cascade, c'est le sentiment de ne pas être trop élevé en hauteur ni trop basse, en pleine et tout.

Mais je penserai à quelque chose, il y a un extrait d'un roman de Mélis de Kérangal, réparé les vivants,

il y a un extrait tout à fait étonnant, qui est un extrait où elle décrit les champs des Chardonnay,

de la région des bois et des forêts autour de la ville d'Alger,

et elle dit à un moment donné dans cet extrait, elle décrit le chant des Chardonnay et de celui qui les connaît bien, qui est un oiseleur,

et elle dit chaque chant pourtant lui, mais de manière presque matérielle,

ce qui fait la particularité, la singularité de chacune des régions de forêts d'outilienne,

qui faisait d'ailleurs dire à Mélis de Kérangal que l'oiseleur pouvait dire de quelle partie de la forêt l'oiseau venait, rien qu'en écoutant son chant.

Et ça pour moi c'est le rêve, c'est le point d'horizon de rêve, c'est de me dire,

est-ce que dans mon écriture je pourrais imaginer que cette casca de Pris...

Alors c'est là où je suis pas géographe, Mélis de Kérangal est une géographe justement,

parce que comme vraiment c'est romancière, on sent que c'est une romancière

qui est profondément imprégnée du type de savoir qui la forme.

L'émotion du Chardonnay excédait la musicalité de son chant et tenait surtout de la géographie,

son chant matérialisé à un territoire.

Valais citait montagne, bois, collines, ruisseaux.

Il faisait apparaître un paysage, éprouver une topographie tatée d'un sol et d'un climat.

Un morceau de puzzle planétaire prenait forme dans son bec.

Et comme la sorcière du conte crachait des crappots et des diamants,

comme le corbeau de la fable se délestait du fromage,

le Chardonnay expéctorait une entité solide, odorante, tactile et colorée.

Plus fabuleux que le gin des contes ou l'esprit de la lampe merveilleuse,

ce n'était pas seulement un oiseau, mais une forêt menacée et la mer qu'il aborde

et tout ce qui les peuples l'a partie pour le tout.

La création soi-même, c'était l'enfance.

Réparait les vivants Maélise de Carangal.

Le fait d'avoir lu cela chez Maélise de Carangal

m'a rendu extrêmement attentive et m'a permis d'imaginer

qu'il est fort possible que les oiseaux portent dans leur champ.

Peut-être même des choses comme la manière dont le soleil

se freille un passage dans les branches comme ici.

Il n'est pas impossible de se dire

est-ce que mon écriture pourrait elle-même être imprégnée,

mais non pas sur le mode du contenu mais sur le mode de la forme,

de la manière dont le soleil s'immise par exemple

dans les branches des endroits que j'aime.

Je n'en sais rien, c'est un souhait, c'est un rêve, c'est un poids d'horizon.

Il y a quelque chose qui est géographique dans l'écriture,

c'est que je n'arrive plus à écrire en Belgique

pour une raison très simple, c'est que le manque de lumière

est pour moi profondément problématique

par rapport au travail d'écriture.

Je veux dire, je peux faire quantité de choses en Belgique,

je peux donner cours, je peux faire ma recherche,

mais écrire, j'ai vraiment le sentiment que la tristesse d'un ciel,

vous savez, on appelle ça le bleu belge, ça veut dire griffoncé.

Eh bien qu'un ciel de façon permanente griffoncé,

ou c'est le sentiment qu'on a, parce qu'il ne faut pas exagérer,

il pleut quand même beaucoup, il fait souvent très gris en Belgique,

il y a quelque chose de joyeux qui manque.

Il manque cette espèce de sentiment qu'on respire à plein poumon,

cette espèce de sentiment que le ciel est très très très haut

au-dessus de notre dette et qu'il est même inaccessible,

alors qu'en Belgique ça fait partie plutôt à un couvercle de vieil casserole.

Je pense que si je veux, parce que je n'aimerais pas qu'on pense du mal de mon pays,

je l'adore ce pays, même si le temps n'est pas propice à l'écriture,

il est propice à bien d'autres choses.

La Belgique me plait profondément pour la qualité des personnes

avec lesquelles je vis, pour la qualité des amis,

pour la qualité de la joie, pour la qualité de la créativité,

pour la qualité de la liberté, de ton, de parole, de pensée qui y règne.

Donc la Belgique est un pays où il y a quand même plein de vigueurs,

plein de vivacité, plein de joie.

Puis j'ai des amis là-bas qui ressemblent à des belles cheveux.

C'est ça que j'attends de, ils ressemblent à des belles cheveux.

Vincienne Despré, est-ce que vous vous souvenez

de la première histoire que vous avez lu

ou de la première histoire qu'on vous a raconté ?

La première chose dont je me souviens dans la lecture,

c'est d'avoir vu un personnage de bande dessinée s'échapper de la page.

Et j'ai appelé ma mère en disant,

« Maman, il s'est échappé de la page ».

Et j'ai une chance inouïe, c'est que je ne suis pas retrouvée,

ce qu'on aurait peut-être pu faire si c'est arrivé 30 ans plus tard

chez un psychologue.

Donc ma mère n'a pas été inquiète, elle m'a dit non,

tu l'as imaginé, tu l'as inventé,

mais il n'a pas pu s'échapper,

ce n'est pas possible, ce sont des choses qui n'arrivent pas.

Et puis je me souviens de deux livres particuliers.

Il y en a un qui s'appelait « Tom et sa fusée ».

C'était de nouveau un livre avec des images.

Donc je devais être assez petite, je devais voir si c'est temps,

mais on a dû me lire des livres avant,

on a dû me raconter des histoires avant.

Celle-là je m'en souviens parce que c'est la maîtrise de la lecture

dont je me souviens.

Donc je peux le lire.

Donc ça a dû être des premiers que j'ai pu lire seul.

Et en plus je me suis retrouvée dans un univers merveilleux

puisque c'est l'histoire d'un petit homme qui construit une fusée.

Et je crois que ça m'a profondément marqué

parce qu'il y avait un enfant qui était capable de fabriquer

quelque chose d'aussi compliqué qu'une fusée avec ses mains.

Et puis il y a un autre qui s'est un tout petit peu plus tard

j'ai d'avoir 8 ans.

C'est un livre, c'est « Les souvenirs sont bons »

de Françoise Maléjouris.

Ça s'appelle « Le fauteuil magique ».

Et ça racontait l'histoire d'enfants

qui décident de faire une blague à leur maman

et de lui cacher son sac au moment où elle doit sortir avec le papa.

Et donc évidemment ça se termine très mal pour eux.

Ils sont punis, ils sont enfermés dans la chambre

et ils vont s'asseoir dans un fauteuil dont ils vont découvrir

que c'est un fauteuil magique.

Ils vont partir en voyage au travers de ce fauteuil.

Et c'était merveilleux.

Donc d'imaginer qu'on puisse s'asseoir dans un fauteuil

et puis partir en voyage à partir de ce fauteuil, c'était fabuleux.

Et je crois que ce que Maléjouris mettait en scène

à ce moment-là, c'est le pouvoir de la littérature.

Et sans l'avoir compris, je crois que

intuitivement j'ai saisi de quoi il était question.

Et j'ai saisi pourquoi j'aimais lire

et j'ai saisi ce que je pouvais...

Et pas seulement ce pourquoi j'aimais lire,

parce que ça, on s'en fout.

Je ne cherchais pas, ça va pour Abouitton,

je ne cherchais pas, ça va pour quand vous aimez lire.

Donc vous saisissez d'un coup

ce que vous allez pouvoir espérer et trouver dans la littérature.

Et je pense que ça, c'est une expérience extrêmement riche.

C'est vraiment un déclencher.

C'est qu'on vous guide.

Quand je dis Mélise de Carangal écrit

à propos des oiseaux quelque chose,

elle me guide sur la possibilité,

à un moment donné, de me poser moi-même,

de me dire, tiens, comment je me fais imprégné par les choses.

Bien, vous lisez le fauteuil magique

et d'un seul coup, on vous guide

sur qu'est-ce que la littérature pourra te faire,

quel choc elle pourra te procurer,

quelle imagination elle va pouvoir ouvrir.

Dans les trois textes et les trois livres

dont vous venez de me parler, dans l'enfance,

il s'agit toujours d'enfants qui voyagent,

qui s'échappent et de personnages qui quittent la page.

Toujours.

Est-ce que la façon pour vous de travailler

c'est justement essayer de sortir de la page,

essayer d'avoir la curiosité

de trouver la façon dont on n'a pas encore parlé,

de sortir de la convention de la page.

Est-ce que finalement,

ces trois textes que vous avez mentionné de manière intuitive

ne sont pas une première pierre posée

à l'édifice de la pensée ?

C'est intéressant de vous poser cette question-là

parce que vraiment, j'avais pas vu le lien du tout, moi, évidemment.

J'ai jamais travaillé vraiment hors-cadre.

Ce serait me vanter que de dire que j'ai travaillé hors-cadre.

J'ai simplement travaillé avec un cadre un peu plus large.

Alors, ça c'est le premier point.

Mais le deuxième point de moi qui m'a vraiment intéressé

pourquoi écrire ma intéresse,

pourquoi les recherches m'intéressent,

c'est que j'essaye de faire avec l'écriture

sur le réel

ce que la littérature m'a donnée

à propos du réel, c'est-à-dire de légers infléchissements

qui faisaient scintiller des choses,

qui rendaient les choses plus joyeuses,

plus compréhensibles, plus belles.

Et je me dis que moi, la littérature,

c'était ça que j'ai cherché dans la littérature,

c'était voir autrement.

Voilà, que le réel reste bien le réel,

mais qui est une prise, une façon de le voir,

qui rende plus intéressant certaines choses.

Et pour moi faire des recherches et écrire,

c'est que je me fais ça à moi-même.

Je vais lire par là que je découvre des choses

et puis brutalement tiens ça,

j'avais jamais cru qu'on pourrait penser comme ça.

Il s'est d'abord agi d'un merle.

La fenêtre de ma chambre

était restée ouverte pour la première fois depuis des mois,

comme un signe de victoire sur l'hiver.

Son chant m'a réveillé à l'aube.

Il chantait de tout son cœur,

de toutes ses forces, de tout son talent de merle.

Un autre lui a répondu un peu plus loin,

sans doute d'une cheminée des environs.

Je n'ai pu me rendormir.

Ce merle chantait,

dirait le philosophe Etienne Souriot,

avec l'enthousiasme de son corps,

comme peuvent le faire les animaux

totalement pris par le jeu

et par les simulations du fer semblant.

Mais ce n'est pas cet enthousiasme

qui m'a tenu éveillé.

Ni ce qu'un biologiste bronion

aurait pu appeler une bruyante réussite de l'évolution.

C'est l'attention soutenue de ce merle

à faire varier chaque série de notes.

J'ai été capturée,

par le second ou le troisième appel,

par ce qui devint un roman audiophonique,

dont j'appelais chaque épisode mélodique

avec un « et encore » muet.

Chaque séquence différée de la précédente,

chacune s'inventée sous la forme d'un contrepoint inédit.

Ma fenêtre est restée à partir de ce jour,

chaque nuit ouverte.

A chacune des insomnies qui ont suivi ce premier matin,

j'ai renoué avec la même joie,

la même surprise,

la même attente qui m'empêchait de retrouver

ou même de souhaiter retrouver le sommeil.

L'oiseau chantée,

mais jamais chant en même temps

de m'assembler si proche de la parole.

Ce sont des phrases,

on peut les reconnaître,

elle m'accroche d'ailleurs l'oreille exactement

là où vont toucher les mots du langage.

Jamais chant en même temps,

n'en aura été plus éloigné

dans cet effort tenu par une exigence

de non-répétition.

La parole met en tension de beauté

et dont chaque mot importe.

Le silence retenait son souffle,

je l'ai senti trembler

pour s'accorder au chant.

J'ai eu le sentiment le plus intense,

le plus évident,

que le sort de la terre entière

ou peut-être l'existence de la beauté elle-même

a ce moment reposé sur les épaules de ce mer-là.

Habité en oiseau,

Vincent de Dépré.

Le jour se lève,

j'irai bien chanter

avec le perle d'un côté.

Déjà les étourneaux

volent là-haut.

Merveilleux nuage d'oiseau,

mon amour, la belleur pour s'aimer.

L'homme en veut dans mon corps

fait couler la rosée,

le ciel est clair

et les rathons m'ont fait

par l'ample d'un couvert

de triomphe voletté.

Les jours se lèvent,

j'irai bien danser

avec les feuilles du poflier.

La lune parle

et ferait d'encore un peu.

J'ai eu le sentiment le plus intense,

le plus évident,

que le sort de la terre entière

ou peut-être l'existence de la beauté

et le sort de la terre entière.

Déjà les étourneaux

volent là-haut.

Merveilleux nuage d'oiseau,

mon amour, la belleur pour s'aimer.

L'homme en veut dans mon corps

fait couler la rosée,

le ciel est clair

et les rathons m'ont fait

par l'ample d'un couvert

de triomphe voletté.

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Les Ritamitsukou,

Dingdendong,

Le choix musical de Vincent Desprès.

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

Réglisez-vous

H Laughing

T Epic

Réglisez-vous

Réglisez-vous

C'est très simple, c'est assister à des cours d'éthologie et voir des éthologues

parler des animaux et à la fois découvrir une intelligence humaine que je n'imaginais

pas du tout parce que moi j'ai été vraiment captivée par la manière dont les éthologistes

travaillaient et pensaient comment ils arrivaient à...

Il y a le chien entre nous.

Alba, est-ce que c'est vraiment bien, malade, venir s'amèner de l'île,

c'est bien, va voir ce qu'il se passe, on va voir, allez, c'est bien, donc les éthologistes.

Alors les éthologistes, donc j'ai été captivée à la fois par le monde qui s'ouvrait,

je n'imaginais pas du tout qu'il y avait autant d'intelligence, autant de talents,

autant de sagesse chez les animaux, autant d'inventivité, autant de manière de s'organiser.

Je crois que c'est à peu près la même chose qu'un anthropologue découvre

quand il commence à étudier d'autres cultures.

Voilà, c'était ça, c'était vraiment la joie de la découverte.

Ça aussi c'est possible, et être comme ça c'est possible, et toutes ces manières d'être,

il parlait comme de l'euse toutes ces puissances dont on n'a aucune idée, nous pauvres petits humains.

Et puis donc la sagesse et l'intelligence et l'imagination de ces chercheurs en ontologie

qui devaient faire des travaux de traduction, qui devaient avoir de l'imagination,

qui avaient parfois aussi beaucoup de poésie dans la manière de décrire et de penser,

et de raconter des histoires parce que ce sont des grands raconteurs d'histoire,

et pas seulement l'histoire longue de l'évolution,

ce sont aussi des petites histoires de leurs animaux,

comment ils vivent, ce qu'ils font, quels épreuves ils doivent traverser,

comment ils s'en sortent ou ils s'en sortent pas.

Bref, c'était un monde, vraiment c'était un monde.

Vous avez eu envie de faire partie de ce monde-là ?

Moi, devenir etiologiste, ça ne me tentait pas trop.

Bon, je vais été faire des observations et tout, mais seul ça m'intéresse. Voilà, c'est ça.

J'ai tout de suite compris qu'observer seul des animaux, ça ne m'intéressait pas,

parce que moi ce qui m'intéressait, c'était de voir cette intelligence combinée

entre les choses que l'animal fait,

et l'intelligence de quelqu'un beaucoup plus compétent que moi en etiologie,

et beaucoup plus imaginative que ce que je pouvais être,

et qui me souhaitait à me dire, voilà ce que je viens de voir.

Il me semble que c'est à ça qu'on a fait, et c'est ça qui me passionnait.

En fait, c'était ça qui me passionnait, c'était de voir de la pensée au travail.

Je pense que je reste graceusement philosophe, jusque dans le fond de mon âme,

et que de voir de la pensée au travail, c'est quelque chose qui me touche,

qui me bouleverse, et qui me met vraiment dans des états de jubilation incroyables.

Rendre honneur à la diversité des mondes, voilà.

C'est moi cette phrase de Vivéros de Castro qui dit que la mission de l'anthropologie,

c'est pas d'expliquer le monde, mais c'est de multiplier les mondes

de certaines manières, de faire exister d'autres mondes.

Je pense que c'est l'attache de l'éthologie,

je pense que c'est l'attache de quantité de science,

c'est de faire exister plusieurs mondes dans le même monde.

Et il me semble qu'à certains scientifiques aujourd'hui qui s'efforcent,

je pense par exemple que les ornithologues le font depuis très longtemps,

c'est pour ça que j'ai tellement aimé les ornithologues,

qu'ils font exister des mondes.

Les généralisations, quand ce sont des bons ornithologues,

ils disent que ce qui vaut pour le rouge-gorge ne vaut pas pour le berle,

et même ce qui vaut pour ce rouge-gorge ici ne vaut peut-être pas pour le rouge-gorge là-bas.

Donc voilà.

S'il y a des territoires qui tiennent à être chantés,

ou plus précisément qui ne tiennent qu'à être chantés,

s'il y a des territoires qui tiennent à être marqués de la puissance des simulacres de présence,

des territoires qui deviennent corps et des corps qui s'étendent en lieu de vie,

s'il y a des lieux de vie qui deviennent chant ou des chants qui créent une place,

s'il y a des puissances du son et des puissances d'odeur,

il y a sans nul doute quantité d'autres modes d'être de l'habité qui multiplient les mondes.

Quel verbe pourrions-nous découvrir qui évoque ces puissances ?

Y aurait-il des territoires dansés, puissances de la danse à accorder,

des territoires aimés qui ne tiennent qu'à être aimés, puissances de l'amour,

des territoires disputés qui ne tiennent qu'à être disputés, partagés, conquis, marqués,

connus, reconnus, appropriés, familiers ?

Combien de verbes et quels verbes peuvent faire territoire ?

Et quelles sont les pratiques qui vont permettre à ces verbes de proliférer ?

Je suis convaincue avec Dona Araue et bien d'autres

que multiplier les mondes peut rendre le nôtre plus habitable.

Je dis habiter, je devrais dire cohabiter,

car il n'y a aucune manière d'habiter qui ne soit d'abord et avant tout cohabiter.

Habiter en oiseaux, Vinciane Débré.

Qu'est-ce qui fait que votre écriture navigue entre l'essai, l'anticipation,

la nouvelle, comment ça s'est construit en vous, cette manière-là d'écrire ?

En fait, l'essai, c'était ce qui s'imposait.

J'étais philosophe, j'étais engagée comme chercheuse dans une université,

dans un département de philosophie, je faisais ma thèse.

Forcément, on se format à laisser.

Mais déjà dans l'essai, par exemple le premier essai que j'ai fait

qui est la Bence du Crat d'Eropécaillé,

je savais qu'il y avait déjà une petite part de fiction.

D'abord parce que je reprenais les histoires que les hernithologues me racontaient,

ensuite parce que je racontais l'histoire de mon terrain,

c'est-à-dire l'histoire de ce que j'avais fait,

de la manière dont on s'adressait à moi, des questions que je posais,

des perplexités que j'avais, des joies de découverte que j'avais.

Et en fait, ça ressemblait très fort à de la fiction, c'est de narrer quelque chose.

Évidemment, narrer avec toutes les rues de la mémoire,

qui est enjolive, qui efface, etc.

Donc on sait très bien qu'on commence déjà un tout petit peu fictionné,

et je dirais peut-être même un peu fabulé,

puisqu'Isabelle Stelgaire propose de faire la différence entre fiction et fabulation.

C'est que la fabulation ne rompe pas du tout avec le réel,

mais rend certains aspects du réel plus saillants.

Elle rend perceptible des choses qu'on trouve, qui étaient inaperçues jusque-là.

C'est pour ça qu'on a l'impression qu'on est en dehors de la réalité, non, simplement.

On n'avait pas vu.

Et je me rendais bien compte que mon travail de ce terrain-là,

c'était de rendre perceptible des choses auxquelles on n'avait pas prêté attention,

de rendre important d'est-ce qui paraissait être des détails, des choses comme ça.

Le fait que vous avez vu, par exemple, on part sur le terrain

et qu'à un moment donné, on a pris la jeep, il est 4h du matin, il fait encore noir,

et puis on arrête la jeep et il dit, bon, il dit, on va observer ce groupe-là.

Et je dis, on va marcher à peu près combien de temps,

il me dit, mais non, on va pas marcher, il dit à la vérité.

On ne sait pas du tout où ils sont, on va les appeler, comme ça ils viendront.

Et donc ils sifflent et les oiseaux arrivent,

et puis ils leur donnent des petits morceaux de pain et les accueillent en leur tendant les bras.

Ça, je ne l'ai pas inventé, mais j'en fais quelque chose en disant

qu'est-ce qu'il y aurait un rapport entre le fait que ça a vu des théories aussi originales

et cette transgression constante des tabous scientifiques,

parce que normalement on ne nourrit pas les oiseaux, normalement on ne les appelle pas,

on va les voir, on ne les dérange pas, etc.

Non, mais il n'est pas tout gêné de les déranger,

de dire, on ne va pas les nourrir quand c'est pas où ils sont.

Et donc là, moi, j'avais du matériel qui était un matériel parfait,

d'une certaine manière, pour une amorce et de fiction et de fabulation.

Donc en fait, c'était pas déjà très tranché.

La danse du cratérophe écaillé se réfère au travaux de l'ornithologue Amos d'Aavi sur les passeurots d'Arabie,

une espèce évoluant dans le désert du Négev qui a la particularité de danser à la tombée de la nuit.

L'un des comportements surprenants du cratérophe est le fait qu'il danse.

La danse du cratérophe appartient à cette catégorie particulière de comportements

dont on peut dire s'il en existe une bonne interprétation par rapport à une autre.

Le fait d'avoir appelé une série de mouvements d'Anse, plutôt que jeu ou bousculade,

constitue déjà une classification particulière d'une séquence régulière d'action.

Cette classification va déjà privilégier certaines interprétations compatibles

avec ce qu'on insère d'habitude dans cette catégorie et va surtout en exclure d'autres.

La danse du cratérophe écaillé n'est qu'un prétexte, un nœud dans notre histoire.

Sa description m'avait tant intriguée que j'avais changé mes questions

pour adopter celle de notre anthropologue imaginaire envoyé dans le laboratoire de Rosenthal.

Je savais que, comme lui, je ne pourrais clore la question de savoir

si c'était le regard de Zahavi ou le comportement des oiseaux eux-mêmes

qui en faisaient des êtres aussi extraordinaires.

Ce n'était pas tant les oiseaux qui étaient extraordinaires,

mais les regards que l'ornithologue avait posés sur eux

et qui leur avaient conféré des qualités exceptionnelles.

L'animal est devenu dans les cultures occidentales

le lieu de projection au sens psychanalytique du terme.

Il offre à l'homme un miroir plus ou moins déformant, plus ou moins acceptable,

proche et lointain à la fois.

Il est à la fois le même et le différent.

La danse du cratérophe écaillé, Vinciane Desprès.

Donc pour moi, la fiction n'était pas du tout quelque chose qui n'était totalement étranger,

mais je ne me sentais pas douée assez pour en écrire comme ça.

Et donc je pouvais faire ce petit décollement par rapport à la réalité,

ces petits infléchissements qui étaient ma manière à moi de faire de la fiction

dans un cadre où je ne me sentais pas trop maladroite, pas trop empotée, pas trop naïve,

pas trop candid, pas trop... Bref.

Ça, c'est la première chose.

Et en fait, autobiographie d'un poultre et les autres récits,

mais en fait, j'avais fait des fictions et mes amis écrivains qui lui m'ont dit

« T'as pas encore la tête tuillée pas, ça demande beaucoup plus de travail

que ce que tu n'imagines devoir faire ».

Et mes amis m'avaient d'ailleurs dit, je crois que si tu devais faire de la fiction,

tu devras te crier des faux archives.

Comme ça, tu seras au plus près de ce que tu sais déjà faire,

c'est-à-dire avoir du matériel scientifique,

et si tu veux fictionner, créez-le ce matériel scientifique.

Et ça m'était resté dans un coin de la tête.

Et en fait, ça s'est représenté parce que Thomas Araceno,

l'artiste argentin qui travaillait donc avec une exposition avec les araignées,

m'avait demandé la première texte que j'avais fait,

puis m'en a demandé en deuxième et j'ai dit « Thomas,

je crois que j'ai dit tout ce que je pouvais dire sur les araignées,

je vois pas très bien ».

Et puis j'ai dit sauf, et si je faisais une fiction.

L'araignée était un bon personnage de fiction si on essayait.

Et il m'a dit d'accord, tu le fais et je t'aide.

Il m'a donné toute la documentation dont j'avais besoin.

Et grâce à cette documentation,

j'ai pu commencer à créer des fausses archives et des vrais archives.

Et donc à mélanger le vrai et le faux.

Et j'ai écrite et j'ai éprouvé le joie dans cette écriture,

un plaisir ou mensonge,

une espèce du bris.

Par contre, on fait vraiment de dire,

d'y aller et d'y aller, franco,

et de créer des liens mais qui n'avaient ni que d'une tête

et qui d'un seul coup tenaient bien la route.

D'imaginer par exemple de lire des articles d'un scientifique

qui est écrit en 1890

et puis de me dire qu'est-ce que je peux découvrir

sur ce vrai scientifique.

Je découvre qu'il était prof, que c'est un horrible,

qu'il était une mauvaise prof, que ce n'était pas possible.

Le roman s'y est à G. Wells qui raconte ça,

que ce n'était pas m'abominable.

Et je me dis, et si maintenant,

ce mauvais prof a eu des étudiants qui ont témoigné

du fait qu'il avait des accouffènes

et qu'il entendait des voix

et qu'il était un peu bizarre.

Et où est-ce qu'on va mettre ce témoignage ?

À G. Wells, ça m'écrit en roman

où il raconte, à un moment donné,

ce vrai professeur de science,

ce vrai professeur de physique.

Et s'il avait écrit un bruyant du roman

et que c'est son neveu,

et on y va, quoi, et on y va.

Et chaque fois qu'on découvre quelque chose,

on se nourrit de tout.

C'est ça qui est signé dans cette histoire-là.

C'est quand vous faites de la fiction,

tout peut vous nourrir,

tout devient bon à manger,

tout devient de matière,

matière à rire, matière à penser,

matière à spéculer, matière à fabriquer,

fabriquer du faux.

Archive numéro 451,

fonds de l'Association Science Cosmophonique

et Paralinguistique,

extrait de lettres de Mme Frédéric Leimann-Wels

au Docteur A. Bichop,

psychiatre enseignant

à la Harvard Medical School,

datée du 15 février 1936.

Cher Docteur,

suite à votre demande,

je vous adresse des nouvelles de mon époux,

par ailleurs votre collègue,

Frédéric Leimann-Wels.

Elles ne sont à vrai dire pas excellentes

et son état s'est encore détérioré.

Il a absolument tenu à reprendre les recherches

qu'il avait menées au cours de l'été passé

et ce contre votre sérieuse mise en garde.

Vous aviez fait l'hypothèse

que le maniment trop fréquent du diapason

pouvait servir et responsable des accouphènes

dont ils souffrent depuis l'or.

Non seulement ils contestent votre hypothèse

concernant leur origine,

mais ils prétendent que ce ne sont pas des accouphènes.

Ils partent chaque matin à l'aube

rejoindre la prairie de Hopkinson,

à près de 40 km de notre domicile

et ils restent tout le jour durant.

On ne le voit presque plus,

ni au laboratoire de psychologie,

ni à la clinique où ils devaient continuer

à mener ces recherches sur les tests.

Je suis allée le retrouver quelquefois

pour le supplier de rentrer à la maison.

Ils maniaient l'instrument

et notaient fébrillement chaque réaction des araignées

en réponse aux vibrations.

Ils disent à présent

qu'il est leur chorégraphe expérimental,

que chacune des vibrations

auxquelles il les soumet,

en plaçant tantôt le diapason

directement sur un fil de la toile,

tantôt sur un des supports d'accroche de celle-ci,

tantôt sur le corps même de l'araignée,

suscitent les mouvements les plus élégants

qu'ils s'efforcent d'anticiper.

Les araignées dansent

sur des sons silencieux, dit-il.

Même à vraie inquiétude

concernent les accouphènes

qui, malgré ces dénégations,

me semblent s'être considérablement agravées.

Mon mari prétend, à présent,

que les araignées soumises

à ces vibrations

envoient des messages qu'il peut entendre.

Elle lui répondrait.

Autodographie d'un poule,

Vinciane Dépré.

Ça fait des soirs et des soirs

que je revois ces lieux.

C'est des histoires dans le noir

quand je ferme les yeux.

Tu vois.

C'est bizarre et séchamment

de savoir le feu.

C'est mouvoir sans radar

savoir que l'on est deux.

Tu vois.

J'aimerais retourner

là-bas.

À chaque fois que c'est là

je retrouve mes ailes.

Je revois à ces endroits comme la citadelle.

Tu vois.

Insédisable qu'on voit

filant dans les vénèles.

Régis-toi et moi

et puis quelques chandelles.

Tu vois.

J'aimerais retourner

là-bas.

J'aimerais retourner

là-bas.

...

France inter.

...

La source.

...

...

La fiction m'a permis de quelque chose

qui me plaisait terriblement.

C'est que je m'étais

assurée comme discipline de travail

parce que c'est ainsi que j'aime travailler.

C'est ainsi que je pense que je suis

compétente.

C'est que je ne dis pas grand-chose

moi-même des animaux.

Je suis toujours en train de relayer

ce que les scientifiques m'ont dit.

Je ne suis pas compétente

pour dire des choses sur les animaux.

Je ne spécule pas leurs sujets.

Je ne dis que ce que les scientifiques disent.

Je pousse un peu plus loin que

l'interprétation en disant

est-ce qu'on ne pourrait pas mais.

Je le fais avec une prudence extrême.

C'est pas mon métier.

Parfois du relais, parfois sérieuse.

Parfois un peu imaginative

dans la mesure où je leur propose

d'aller un peu plus loin

et d'être un peu moins frileux.

Il y avait quand même par moment

j'avais envie de me dire

par exemple les animaux écrivent

si je pense que les animaux écrivent.

Les scientifiques je ne me trouve pas chez eux.

Pas telle qu'elle.

Je me suis dit que dans la fiction

je peux créer des scientifiques

avec lesquels

je peux laisser libre cours

à la jubélation

de spéculer à propos des animaux

et donc de commencer à dire que les animaux

sont animés de pulsions créatrices

et que cette pulsion créatrice fait que

ils ont des responsabilités ontologiques

à l'égard des autres vivants

et qu'ils écrivent etc.

Et donc d'un seul coup je pouvais

laisser un tout petit peu plus

de marge de manœuvre

à cette envie qu'on a quand même

parfois de prendre position

sur les animaux.

Le langage des animaux, leur écriture

l'esthétique

de leur langue

les animaux nous écrivent, écrivent sur eux-mêmes

s'écrivent entre eux

et ils écrivent les uns sur les autres

au sens littéral et au sens

figuré.

Qu'est-ce qu'on a à prendre

de la façon dont les animaux écrivent

les uns sur les autres.

Il faut donc bien entendre l'écriture

au sens très très large ici.

C'est un peu...

Mais qui me semble pour moi tellement

important, c'est Patis Morizzo

qui disait ça que

d'une certaine manière

l'élégance

de la biche qui saute

est un produit du loup

d'une certaine manière, c'est un produit

de la relation de la biche avec le loup. Pourquoi?

Parce que cette élégance de c'est bon

et au fait qu'elle a dû...

Voilà, c'est une proie et elle a dû échapper

au prédateur et donc ça l'a obligé

d'élégance d'une certaine manière.

Ça c'est le loup qui écrit

sur la biche.

Et d'un seul coup une fois que vous pensez que le loup

a écrit les arabesques de la biche.

Vous vous dites que

d'une certaine manière vous élargissez

l'écriture, vous élargissez, vous êtes obligés

de remettre en cause évidemment

quantité de conception que sont la signature,

que sont l'écriture

significative littéralement

et des choses comme ça.

Mais vous entrez aussi d'une certaine manière

où les compétences sont tellement

mieux distribuées.

Mais sont distribuées sur les modes

que j'adore tels que les décrivains le plus moules.

C'est-à-dire de plus parler en termes cognitifs

ou de intelligences parce que c'est là

où ils sont toujours perdants les animaux évidemment.

Mais parler en termes de sagesse.

Tiens, la sagesse

et la sagesse de la biche.

Voilà, la sagesse du bond de la biche.

Voilà, c'est sa forme de sagesse.

Une des formes de sagesse, la sagesse de la biche

c'est aussi la guée et elle a certainement

des formes de sagesse.

Et moi ça m'intéresse de redistribuer

des formes de sagesse,

mais pas seulement de leur redistribuer

c'est de leur redistribuer sous des formes d'interdépendance.

C'est-à-dire de co-évolution.

De penser par exemple que les rapports pro-prédateurs

qui peuvent être

qui sont tellement facilement moralisables.

Comment est-ce qu'on les démoralise ?

Voilà, comment est-ce qu'on démoralise

une rapport pro-prédateur pour en faire un rapport social,

pour en faire un rapport de création,

pour en faire un rapport qui va produire

quelque chose comme ça ?

D'une certaine manière, c'est là où on est

avec cette idée que

d'une certaine manière, le loup et la biche

ont co-écrit ensemble un scénario

qui est participé au devenir de la biche,

qui a participé à l'élégance de la biche,

qui a participé à la manière de la biche

écrit elle-même dans l'espace.

Et bien je me dis à ce moment-là,

ça veut dire qu'on rassemble à la fois la possibilité

de reconsidérer la prédation comme quelque chose

de passionnant,

de la démoraliser, parce que c'est important

de les voir toujours avec cette espèce

de vision morale du monde

et de penser

en termes de co-évolution,

c'est-à-dire en termes de symbiogenèse,

en termes de coopération,

qui à mon sens ne peut pas nous faire

de tort, disons-le comme ça,

ça ne peut pas nous faire de tort de penser

en termes d'adherdépendance et de coopération,

on sera peut-être un peu moins bête

si on pense comme ça.

Moi je sais.

Comment les loups peuvent-ils vivre ici ?

C'est là qu'enfant,

je venais en balade dominicale.

C'est une montagne pour touristes,

un musée changeant

ou de durs sentiers relis

des tableaux de paysages grandiose,

une ferme à ciel ouvert

avec de gentils animaux.

Le loup n'était plus là

depuis un demi-siècle.

Il était exclu de la nature,

divertissement périurbain

aménagé pour et par les 30 glorieuses.

Mais il ne faut jamais douter

de l'invisible.

Même après sa disparition

de nos écosystèmes,

le loup était visible

dans la grâce des chevreuils

comme un écho d'un très lointain passé.

La grâce des chevreuils

est un cadeau des loups.

En exerçant une pression de prédation,

les loups sont les opérateurs

de la sélection naturelle

et produisent ainsi des chevreuils

plus agiles, plus vifs, plus alertes,

plus puissants.

Cette vitalité extrêmement aiguë,

cette presque perfection sans modèle

tissée dans ses propres conditions

écologiques, lorsqu'on la pressant

dans le mouvement désinvolte du chevreuil

rencontré par hasard,

qui broute ou glisse de lisière en soleil,

c'est précisément

ce qu'on appelle sa grâce.

C'est peut-être

un invariant de la rencontre animal.

Quand on croise un animal sauvage

par hasard dans la forêt,

une biche qui lève les yeux vers soi,

on a l'impression d'un don,

un don très particulier,

sans intention de donner, sans possibilité

de se l'approprier.

C'est ce qu'en phénoménologie,

on appelle un don pur.

Personne n'a voulu donner,

personne n'a rien perdu en donnant

et le don ne vous appartient pas,

il pourra se donner à d'autres.

On sent monter dedans

une improbable gratitude,

juste l'envie de rendre grâce

à cet imprévu aussi beau,

qui en cet instant existe

et se donne aux yeux.

C'est le même sentiment de don gratuit,

inexplicable,

qui a lieu lorsqu'on entend la meute

tisser son champ collectif, les pieds dans le torrent.

Il y a ce verre

dans un poème dont j'ai oublié

et le nom et l'auteur,

en vérité, tout est offert

et imprenable parmi le ciel bleu,

la terre verte.

Baptiste Morizzo,

sur la Piste Animal.

Si vous étiez un animal

à l'écriture,

lequel serait-ce ?

J'aime tellement les corvidés

que je ne peux pas imaginer

être autre chose qu'un corvidé.

J'ai une passion pour les corvidés,

je les trouve sages, drôles, malins,

surprenants.

Je serai un corvidé, probablement,

et je crois que j'aimerais écrire

en laissant des sillages

de changement de la densité

de l'air dans le vol.

Voilà comment j'imagine

un mouvement d'aile.

J'ai trouvé que c'était une écriture

qui me plairait bien.

So much blood on our hands

King Queen of being lonely

Turned into the empire of sea

That we're all lost

It comes cause walking in the labyrinth

Without love

How much can you take

And when are you gonna be okay

Game controller what we made

Instead of being afraid

Children of the empire of sea

We're long gone

In that eternal flame

Trying to break away

From the mess we made

Oh we don't have time anymore

To be afraid anymore

Children of the empire

No good in our dream anymore

They wanna be free

They don't want our dream to go

We wanna be free

Pour moi qui a vraiment été la source

Au sens littéral du terme

C'est l'invention des sciences modernes

d'Isabelle Stengers

Alors qu'est-ce qui s'est passé

Je suis sur mon terrain

avec mes cratéropécaillés

Je vois quantité de choses

Je me rends compte que la question

qui m'a menée là-bas

n'est pas du tout une bonne question

Ma question était probablement

il s'agit soit que le zoologue

ou leur lithologue est très fantasque

et qu'ils transgressent les tabous

parce qu'ils échappent au circuit traditionnel

qui pèse sur les scientifiques

soit que l'oiseau est vraiment très intelligent

et puis je me rends compte que cette question

d'abord elle peut pas être résolue sur le terrain

et que c'est beaucoup plus compliqué que ça

et puis je rends d'Israël

et je sais pas quoi faire de ma non-question

je sais pas trouver non plus la bonne question

je me dis ces deux questions elles sont mauvaises

mais il y a certainement moyen de faire quelque chose

à partir de ces deux mauvaises questions

et je suis un peu perdue

et puis une de mes amis me dit

est-ce que tu as entendu Isabelle Stengers la philosophe

elle vient de faire une série d'émissions

d'histoire des sciences pour l'RTB avec nous

je vais te faire écouter

et j'écoute et je découvre

exactement quelqu'un dont je me dis

mais elle a la réponse à ma question

et donc j'achète l'invention des sciences modernes

et je me rends compte que tout mon terrain

prend sens

par rapport à ce qu'elle dit

que chacune des phrases de ce livre

est claire d'une autre manière

et ce livre me permet de comprendre

comment je dois penser mes objets

comment par exemple

pourquoi ma question était absurde

je savais qu'elle était absurde empiriquement

mais je savais pas en quoi intellectuellement

épistémologiquement

elle était pas une bonne question

et là d'un seul coup je comprends

et je me mets à écrire

ce livre

et j'écris une quinzaine de pages

et puis en plus

Isabelle Stengers dans l'invention des sciences modernes

livre de 93

commence et ouvre son texte en parlant de Bruno Latour

et de ses enquêtes de terrain

1991

et donc en fait c'est bingo pour moi

pourquoi ?

à la fois parce que je commence à comprendre

comment poser mes questions

et quel est leur intérêt

quel est l'intérêt aussi

de ses observations animales

parce qu'elle en parle aussi

et en même temps je comprends

que ce que j'ai fait

c'est quelque chose que Bruno Latour avait fait avant moi

et que je pouvais donc marcher et lancer

pas pour en rendre compte

et donc je pouvais à la fois

me mettre sous la protection de Stengers

et sous la protection de Latour

Extrait de cosmopolitique

la trahison des diplomates

dans l'invention des sciences modernes

j'avais proposé de voir

dans le praticien des sciences

théorico-expérimentales

comme un hybride singulier

entre juge et poète

alors que l'art et les risques

du scientifique de terrain

le rapprocher de l'enquêteur

ou du linier aux agais

mais je n'avais pas à l'époque

trouvé d'analogues pour ces sciences

elles nommées d'un troisième genre

parce qu'elles s'adressent à des aides

qui par définition s'intéressent

ou peuvent s'intéresser

ou sont capables de s'intéresser

à ce qu'on exige d'eux

à la manière dont on s'adresse à eux

or comme le diplomate

le praticien d'une science

ou les conditions de production

de connaissance de l'un

sont également

inévitablement des conditions

de production d'existence

pour l'autre

ne doit-il pas se situer lui-même

à l'entrecroisement de deux régimes d'obligations

l'obligation d'accepter que passent en lui

les rêves de ceux qui l'étaient dit

leurs effrois

leurs doutes et leurs espoirs

et l'obligation de rapporter

ce qu'il a appris à d'autres

de le transformer en ingrédient

d'une histoire à construire

ma deuxième dépré

on a discuté pendant une heure

de la source de votre écriture

est-ce que vous savez

où elle va, quelle est sa destination

et est-ce qu'elle a un but ?

ben où elle va, elle va aller

alors là je sais pas du tout où elle va

mais elle va aller là où le vent la pousse

et elle va aller là où

il me semble

qui a encore des choses à faire

je vais dire cette écriture elle avait

délibérément compris à un moment donné

qu'elle pouvait faire des choses notamment

à la fois certaines pratiques scientifiques

et à la fois la question des animaux

et je pense qu'il y a encore

des choses pas mal à faire de ce côté

ça c'est le premier point

mais c'est le vent qui va pousser

donc on va voir un peu

quels sont les rencontres

parce que ce sont des rencontres qui vont déterminer

ce qui se passe

et le motif je crois qu'il reste le même

c'est

à niveau large

ce qui est en train de nous arriver

la façon dont on pense les animaux puissent se prolonger

ne soit pas qu'un effet de mode

et puissent avoir des conséquences concrètes

beaucoup plus concrètes que ce que c'est l'un d'entre nous maintenant

par exemple dans les conséquences concrètes

c'est

est-ce qu'on va en jour en cesser avec les levages industrielles

par exemple

ce serait quand même pas mal

c'était la source

une émission préparée par Fanny Le Roi

réalisée par Anne Van Feld

à la technique Pierre-Henri

la semaine prochaine

à Paris je partage un bout de table

à manger avec une autrice

qui n'a pas peur des sorcières et qui croit

à l'énergie des adolescents

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C'est la première fois que j'ai fait un tour de l'hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital

de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'H

l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hôpital de l'Hô

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durée :00:56:19 - La source - Pendant une heure, au bord du cascade dans le Var, la philosophe et écrivain Vinciane Despret nous invite à partager son insatiable curiosité et son amour du vivant. Il est question de nature, de France et de Belgique et du glissement de l'essai à la fabulation.