Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Ridgway, le tueur de la Green River - Le débrief

Europe 1 Europe 1 9/7/23 - 17m - PDF Transcript

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Pour commenter son histoire du jour, Christophe Ondelat reçoit un invité, acteur direct de son récit.

Je vous ai raconté l'histoire de celui qu'on a appelé le tueur de la Garene River, Gary Ridway,

qui dans les années 80, dans la région de Seattle, aux États-Unis, a tué un coup sur 48 femmes et peut-être 60.

À la suite d'un accord avec le procureur, il a échappé à la peine de mort, en faveur

d'une peine de prison, à perpétuité et incompressible.

Et nous allons débriffer cette histoire avec le criminologue Alain Boer, grand connaisseur

du système judiciaire américain, professeur de criminologie au conservatoire national

des arts et métiers à Paris, prof à New York, prof à Shanghai et auteur du livre

« La criminologie pour les nuls » aux éditions First.

Alors cet accord avec le procureur, Alain peut surprendre, non pas parce qu'il permet à Ridway

d'échapper à la peine de mort, mais par l'absence de procès qui en découle.

C'est très particulier ça.

Alors en fait, le pli bargain est un processus qui fonctionne dans 90% des procès criminels aux États-Unis.

Ça évite des procès extrêmement longs, extrêmement complexes et surtout d'éviter une instruction

qui n'en finit pas puisque en fait le procès, c'est l'instruction.

Il y a d'un côté le parquet à charge, la défense à décharge et le juge n'est pas le juge de l'instruction,

mais le juge de l'égalité entre l'accusation et la défense.

C'est donc un système très différent et pour éviter de dépenser trop d'argent que ça dure

des années ou des siècles, ce qui arrive malheureusement assez souvent dans le système inquisitoire français.

Le système accusatoire américain permet ce qu'on appelle des deals, des accords, ça s'appelle le pli bargain.

Mais le pli bargain, ce n'est pas seulement un accord entre l'accusation et la défense.

Il y a ce que vous avez appelé à juste type le simulacre de procès, mais c'est plutôt une homologation de l'accord

et qui peut permettre justement aux familles d'intervenir.

Mais il faut se rappeler que NASCAR surdise aux États-Unis.

Il n'y a pas de procès au sens où nous l'entendons nous.

Mais en contrepartie, la rapidité du dispositif et son efficacité et parfois de nombreuses erreurs judiciaires en découle.

Vous plaideriez pour un tel système en France ?

Non, il a des qualités et des défauts.

Le problème du système français, c'est qu'il était inquisitoire à sens unique.

Il est devenu contradictoire, c'est-à-dire qu'il a pris les pires des deux systèmes accusatoires et inquisitoires sans en retirer

ni la rapidité ni l'efficacité.

Je suis juste pour qu'on choisisse celui qu'on veut, mais qu'on essaye d'aller jusqu'au bout d'un processus où il y a un juge de l'instruction,

un parquet qui soit à charge, une défense qui soit à décharge et qu'on rééquilibre un peu les choses.

Et par ailleurs, le CRCT, le dispositif français qui permet dans un certain nombre d'écats une convention entre accusation et défense,

c'est le cas notamment dans beaucoup de délits financiers, puissent s'étendre.

Par contre, ce qui me paraît absolument indispensable, c'est de conserver les jurys citoyens.

En France, on juge au nom du peuple français et de plus en plus, il est exclu du système judiciaire.

Il est un des rares jurys au monde à siéger avec des magistrats qui sont très compétents d'un point de vue technique,

mais dans la légitimité d'être jugé par les siens, il y a une petite difficulté.

Donc le système français a toujours été extrêmement compliqué, assez peu représentatif et du coup assez ignoré par les français

qui pensent que le juge s'appelle votre honneur et qui demande des mandats de perquisition quand ils ont une visite,

parce qu'ils voient beaucoup plus de téléfilms américains qui ne comprennent leurs propres systèmes judiciaires.

Est-ce que vous savez, vous, à l'invoire, pourquoi on a ce genre de tueur en série aux Etats-Unis et pas en Europe et notamment en France ?

Il n'y a quand même jamais eu chez nous de tueur en série qui a tué soixante personnes.

Si on a pire que ça, Gilles Deray est supposé en avoir tué plusieurs centaines.

Il a été jugé pour plusieurs dizaines de crimes, de mutilations et de viols et on lui en attribue plusieurs centaines.

Mais il est vrai que les Etats-Unis sont les seuls à en produire autant.

Pourquoi ?

Alors on ne fait pas bien, il semble qu'il y ait une particularité locale dont on n'a aucune capacité d'identification.

Quand on fait la liste des tueurs en série connues, je précise bien qu'on ne parle que de ceux qu'on a identifiés,

il y a une surreprésentation des Américains, puis des Russes, et ensuite ça tombe régulièrement.

Mais la France en a produit elle-même deux ou trois dizaines, dont certains encore récemment,

Émilouie, Escawan, etc.

Donc vous avez pu vous même parler d'ailleurs sur les tueurs.

Oui mais on est à moins de 10 victimes.

Oui, entre 10 et 20, entre celles qu'on a pu identifier.

Il y a 49 cas, 48 reconnus, 2 non identifiés, mais 6 potentiels dont 3 non identifiés.

Donc lui-même en 1060, les policiers en pensent 55 dont 53 identifications, on est encore dans le flou.

Mais il faut reconnaître qu'effectivement c'est un cas tout assez intéressant, pathologique,

et surtout avec la dimension que vous avez indiquée, c'est-à-dire les viols post-mortem,

qui sont un cas très particulier dans le tueur en série.

Moi j'ai toujours une proposition à faire sur le fait qu'il y a des tueurs en série

aux États-Unis, des tueurs de masse, alors qu'il n'y en a pas beaucoup, voire pas du tout en Europe.

C'est la prise en charge psychiatrique.

On sait qu'aux États-Unis, quand on est interné en général, on est libéré le lendemain,

et abandonné par une voiture de police au centre-ville.

Bye bye, au revoir, merci pour le dérangement.

Alors c'est vrai que le dispositif de sécurité sociale, et notamment de sécurité mentale,

et de suivi psychiatrique ou psychologique, est un dispositif extrêmement défaillant,

d'abord parce qu'il n'est pas centralisé, comme tous les États-Unis d'ailleurs,

extrêmement localisé, et que ce n'est pas l'endroit où on met systématiquement le plus de budget.

Ceci posé, on voit très souvent que c'est surtout le manque de suivi d'indications préalables,

parce que beaucoup d'alertes sont données initialement, mais ne sont pas suivies d'effet.

C'est plus la réaction des services publics, mais c'est valable aussi, par exemple,

pour les enfants battus ou maltraités, et comme vous l'avez indiqué très justement,

on ne devient pas psychopathe par hasard.

Dans beaucoup de cas, il y a des indications et des éléments qui ont été donnés au service sociaux

au moment de la petite ou moyenne enfance, dont on se rend compte quand on commence à reconstituer le dossier

d'un criminel une fois qu'on l'a identifié et interpellé, où on voit qu'il y a de nombreuses occasions,

une alerte a été donnée et n'a pas été suivie d'effet.

Et je pense bien avant même le suivi psychiatrique, c'est vraiment le suivi médical infantile

qui pêche extraordinairement aux États-Unis comme considéré comme un exercice où le budget n'a pas grand importance,

que ce soit pour les enfants placés ou pour les enfants signalés comme étant en danger.

Et d'ailleurs, on a beaucoup de cas où enfants en danger reproduisant la violence qu'ils ont suivi,

notamment en matière d'agression sexuelle ou d'assassinat, et en général sur des enfants,

est un sujet où on a une surreprésentation statistique qui ne manque pas d'interpellé

et il est vrai que les États-Unis sont très défaillants de ce point de vue-là.

Donc en France, on est plus performant qu'aux États-Unis.

Je dis ça parce qu'à fort de voir les verres avoitiers vides, on ne voit pas qu'ils sont aussi à moitié pleurs.

Le système de prise en charge sociale fonctionne mieux, la psychiatrie fonctionne mieux.

Elle est en crise, elle a beaucoup mieux fonctionné pendant longtemps.

Je dirais que le verre est atteint à un tiers plein pour être honnête

et pour écouter mes collègues qui vivent dans des conditions extrêmement difficiles,

à la fois des changements d'octrino post-68 art qui n'ont pas facilité la vie,

c'est-à-dire en fait, il faut interner personne, il faut enfermer personne,

il faut essayer de maximiser le suivi hors les murs.

Du coup, à un moment, on s'est demandé s'il fallait tout le monde hors les murs,

et donc on est passé d'un excès, l'enfermement automatique,

à un autre qui est attendant qu'il se passe quelque chose.

Et du coup, les services sont très dépourvus, ils subissent beaucoup de violences en interne,

ils sont dépourvus de personnel et submergés de questions et de demandes,

et on le voit d'ailleurs, notamment dans les affaires qui ont suivi le Covid et surtout les confinement,

il y a une extraordinaire détresse sociale, notamment chez les adolescents,

qui semblerait être indiquée qu'on est face à d'autres vagues de violence plus suicidaires,

notamment chez les filles désormais, que ce qu'on avait avant.

Donc je dirais que le verre est mieux rempli qu'aux États-Unis, mais moins bien qu'il l'a été.

– Alors j'aimerais avoir votre avis sur les profilers,

j'ai pris une position carrée, est-ce que vous allez me contredire ?

– Non, non, non, je pense qu'il faut intégrer la difficulté qu'il y a à tout profiler tout le temps.

Donc on a quelques belles réussites de profilers, et puis de nombreux échecs,

parce que quand on vous donne une pile d'indices plus ou moins bien trouvées,

et qu'on vous dit faites-moi-en quelque chose, notamment dans le système américain,

vous savez que le FBI ne vient que quand on lui demande, pas quand il en a envie,

et il a mis une institution en place en 1974, qui était le BHU, le Biavorial Unit,

qui a beaucoup servi en analysant des céréales killer pour comprendre comment ils fonctionnaient.

– Une postériorie, c'est intéressant, la postériorie et le profilage.

– Vous avez raison, mais ils ont construit pour la première fois

les seuls éléments dont on dispose pour savoir comment ça fonctionne dans leur tête.

Après la reproduction d'un céréale killer sur d'autres,

amène on va dire 10% de succès, 10% d'incertitude et 80% d'échecs,

mais c'est une des difficultés de l'exercice, ça a été de faire croire que le profiler allait répondre à tout.

Or le profiler n'est qu'un élément de l'enquête, il lui faut, pour que ça marche,

plein d'autres éléments, qui est l'enquête de terrain, l'enquête de proximité de la police.

Les meilleurs profilers sont ceux qui ne le sont pas, c'est-à-dire ceux qui ramènent de l'enquête de proximité,

qui écoutent les témoins, qui vont chercher à canvaser, comme on dit,

c'est-à-dire à faire l'enquête sur un territoire, à recueillir les informations,

à dépouiller le vrai du faux, les faux candidats des vrais candidats,

et puis ensuite à confirmer ou à infirmer avec des outils plus ou moins modernes,

et alors évidemment, comme vous l'avez dit si bien,

les détecteurs de Manson, j'ai une très grande fin de story,

mais par contre les méthodes d'interrogatoire aident beaucoup,

et surtout le profiler peut aider à discriminer, c'est-à-dire à réduire une partie du sujet,

ce qui ne l'empêche pas de commettre des erreurs, et vous avez raison, ils en commettent pas mal.

Alors justement, le détecteur de Manson, je parle 11 ans,

c'est une particularité américaine, y a-t-il d'autres pays au monde qui l'utilisent ?

Oui, il y a quelques pays, notamment anglo-saxons qui l'ont gardé,

l'Inde en avait gardé un peu, le Canada l'a expérimenté,

quelques pays américains du sud, chacun connaît les limites de l'exercice.

Aujourd'hui, les outils sont plus neurobiologiques,

vous avez des détecteurs de Manson, je parie ERM,

qui modifie un peu les modalités de l'exercice,

tout le monde cherche une technologie qui permet d'obtenir l'aveu,

sans être obligé de l'exorquer ou de le brusquer,

mais aujourd'hui, on sait que les bonnes vieilles pétniques d'interrogatoire

n'ont pas méchant gentil, mais gentil, gentil,

donnent de bien meilleurs résultats, notamment avec des criminels pathologiques,

qui ont d'ailleurs besoin d'être connus et reconnus,

et c'est une partie de l'exercice, c'est de les faire participer

à la propre reconnaissance des événements, ce qui est le cas d'ailleurs dans Ridgeway.

Est-ce qu'on a des statistiques sur la performance des détecteurs de Manson ?

Il y a eu quelques études assez anciennes,

mais pour l'essentiel aujourd'hui, on est d'accord pour dire que ce n'est pas un élément,

que ce n'est pas recevable en tant que tel,

et que ça peut dans l'enquête permettre d'éliminer quelqu'un, mais sans plus.

L'hypothèse d'avoir recours aux détecteurs de Manson,

je m'a été évoqué des gens en France dans l'histoire.

Dans les années 60-70, on s'extasie toujours sur ces merveilleuses machines

qui pourraient remplacer l'humain avant de se rendre compte

que le fétichisme technologique ne sert à rien et qu'il vaut mieux équilibrer

la capacité, l'expérience, la compétence d'un humain,

et simplement à utiliser la machine pour accélérer le processus

de validation ou d'invalidation des hypothèses.

Mais on est toujours fascinés par les nouvelles technologies,

et puis après une phase de fascination, une phase d'expérimentation,

une liste d'échecs potentiels ou de vrais faux,

dans ce sens qu'après tout l'enquêteur et le flair de l'enquêteur,

c'est quand même un outil formidable.

Vous êtes criminologue à l'Aboère, c'est une expression utilisée par beaucoup,

à mon sens par trop de monde.

Qu'est-ce que c'est qu'un criminologue et qui n'est pas criminologue ?

Moi je ne suis pas criminologue, je suis professeur de criminologie,

c'est un métier académique, il y a beaucoup de gens qui sont des criminologues.

En général, pour être criminologue, il faut avoir un diplôme de criminologie.

Alors il se trouve qu'en France, il y a très peu d'établissements universitaires

qui enseignent la criminologie.

Le conservatoire national des arts et métiers est un des rares à le faire.

J'ai en France une quarantaine de collègues académiques

qui pourraient revendiquer ce titre, mettre de conférence ou professeur.

Il y en a 400 en Grande-Bretagne, 4000 aux États-Unis,

et donc nous formons, nous enseignons et nous diffusion les savoirs

qui intègrent à la fois la criminologie, l'analyse de la relation entre un ou des auteurs,

une ou des victimes et des circonstances et la criminalistique,

les outils psychiatriques, les teams légales et éventuellement technologiques,

notamment dans les laboratoires scientifiques,

les experts qui permettent sur une scène de crime de déterminer,

selon la formule du professeur Locard, l'inventeur français de la criminalistique,

ce que sont les outils de la recherche de la preuve sans l'aveu,

dans l'élément qui vient tout à la fin.

Mais beaucoup de gens se disent criminologues sans être diplômés de criminologie.

On est d'accord, être criminologue ne garantit pas qu'on va arrêter des criminels.

Ah non, non, ça permet d'aider, il arrive à beaucoup de mes collègues,

d'être, de venir en expertise ou d'aider dans des enquêtes,

chacun en fonction de ses compétences ou de ses capacités.

Moi, c'est plutôt le terrorisme et le crime organisé,

d'autres s'occupent d'affaires d'une autre nature,

notamment en matière psychiatrique, psychologique, violence sexuelle, inceste,

problématique très particulière et très douloureuse,

notamment concernant les victimes mineures.

Mais non, non, le criminologue n'a pas pour vocation d'arrêter les criminels.

Le criminel a pour vocation d'aider les amis, la défense, l'accusation, la police, la justice,

à faire leur métier.

Il y en a qui se disent criminalistes, c'est quoi la différence ?

À la criminaliste, c'est plutôt ceux qui ont une vocation technicienne,

spécialiste de l'ADN, spécialiste par exemple de l'odorologie,

spécialiste des poisons, voilà, ils ont une connaissance technique,

les criminologues ont une compétence générale.

Donc je connais quelques criminalistes et criminologues qui usurent peu les titres.

Merci infiniment à la BOER.

Je rappelle que vous enseignez au conservatoire national des arts et métiers,

à l'Université du New York, à Shanghai,

et que vous êtes l'auteur d'un livre « Révérance, la criminologie pour les nuls » aux éditions First.

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Au début des années 80, dans la région de Seattle aux Etats-Unis, la police enquête sur le meurtre et la disparition de plusieurs jeunes prostituées. Elle recherche un tueur en série que la presse surnomme déjà le « tueur de la Green River ».