Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Mathieu Danel, l’obsession de tuer

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En juin 2018, dans le gare, Mathieu Danel, 23 ans, tu clair régnais une auto-stoppeuse

en lui assainant 17 coups de dag et il explique qu'il voulait ressentir la sensation de tuer

et comme ça ne lui a pas plu, il jure qu'il ne recommencera pas.

Ouvrons ensemble la Côte B du dossier d'instruction de Mathieu Danel.

Dans le système judiciaire français, le dossier d'instruction contient un sous-dossier appelé Côte B.

Il rassemble les rapports des experts psychiatres, psychologues et de l'enquêteur de personnalité.

Ouvrons l'un de ces dossiers.

Le 21 juin 2018, Mathieu Danel se présente au commissariat de Montellimar et il lance au policier qu'il accueille.

Bonjour monsieur, je viens pour me dénoncer. J'ai tué une auto-stoppeuse.

Non mais jeune homme, soyez sérieux, m'y aime pas comme ça, nous dérangez.

Non non, c'est sérieux, ça s'est passé dans la campagne.

Je l'ai tué de plusieurs coups de dames. Vérifiez.

Il se présente et il indique clairement, je viens pour avouer que j'ai tué quelqu'un.

Stéphane Bertrand, avocat général.

Il donne les détails sur le moment, l'endroit, la façon dont il a procédé.

On commence à l'interroger, d'abord pour vérifier que c'est bien lui.

Des aveux, ça ne suffit pas. Et ensuite, pour essayer de comprendre comment et pourquoi, bien sûr.

Alors le comment, c'est extrêmement simple.

Le comment est médé au pourquoi d'ailleurs, c'est-à-dire que Mathieu Danel est un jeune garçon extrêmement étrange, qui t'aime un peu solitaire.

Et qu'il nous dira que depuis longtemps, sans préciser longtemps, il avait dans l'idée de tuer quelqu'un.

Uniquement pour voir les faits que ça produirait sur lui et les sensations qu'il pourrait avoir à cette occasion-là.

Du fantasme, c'est devenu une idée fixe, une idée précise.

Il avait acheté un grand couteau, qui l'avait disposé dans le vide-poche de sa voiture.

Et le jour où les choses se produisent, il se balade dans la voiture, du côté de Montelima.

Il tombe sur une auto-stoppeuse, il la prend en stop.

Cette dame qui ne connaît pas, elle n'a jamais vu avant, lui indique qu'elle vient ici, dans la région Nimoise, du côté de Saumière.

Il accepte de l'accompagner.

Ils arrivent sur place, ils ont un peu discuté, plus ou moins sympathisés.

Ils vont dîner ensemble dans une pizzeria.

On aura des témoignages après du serveur du patron qui nous disait, il y a eu aucun souci.

Une fois qu'ils ont fini de dîner, ils l'amènent faire un tour dans la campagne.

Saumière est une ville rurale, on est vite sorti de la ville, il l'amène dans la campagne dans un lieu isolé.

Et bien lorsqu'il se retrouve dans ce lieu isolé, il revient vers sa voiture, il va chercher le couteau, il revient vers elle.

Apparemment, il lui dit quelque chose ressemblant à sa narienne personnelle, quelque chose dans ce genre.

Et il se jette sur elle et il lui donne plusieurs coups de couteau jusqu'à la laisser mort.

Et ensuite, il s'en va.

Tranquillement, il rentre chez lui et deux jours après, il ira se rendre au policier.

Les choses se sont passées de manière extrêmement simple, brut, sans prévenir, c'est venu comme ça.

Et c'est comme ça que lui-même va nous les raconter de façon extrêmement calme, voire extrêmement froide.

Monsieur Danel, pourquoi Claire ? Pourquoi cette auto-stoppeuse ?

Mais vous savez, j'avais rien prévu, je lui ai tué elle parce que l'occasion s'est présentée.

J'ai frappé plusieurs fois, elle n'a pas souffert, sa mort a été rapide.

Je voulais qu'elle meure rapidement, et après je me suis dit, ça s'est fait quoi.

Je voulais voir si ça allait provoquer quelque chose à moi, et puis rien n'est venu.

Aucune adrédaline, je n'ai pas eu de plaisir, je n'ai pas eu de peine en plus, je n'ai pas eu de remords.

Ça ne me touche pas quoi.

Il n'en démordra pas du début à la fin, il voulait savoir quelle sensation cela lui produirait de tuer quelqu'un.

C'est-à-dire d'auter la vie à quelqu'un, à l'intersemblable, et ce jour-là s'est tombé sur cette dame par hasard.

Il a vu l'occasion de le faire, je pense aussi que l'occasion était belle pour lui parce qu'il était dans un endroit isolé

et que peut-être dans un premier temps il a pensé ne pas se faire prendre, parce que ce qui est intéressant,

c'est qu'il nous dira plus tard, lorsqu'il va se rendre, je viens me rendre, parce que j'ai commis un meurtre,

mais ça n'a pas provoqué chez moi de sensations particulières, ça ne m'a pas vraiment plu.

Il ajoutera, si ça m'avait plu, il y a de grandes chances que j'ai pu recommencer,

mais comme finalement je n'en ai pas tiré de véritables satisfactions, je viens me rendre.

On saurait peut-être le premier crime d'une série, s'il y avait trouvé les satisfactions qu'il en attendait.

Heureusement, ça n'a pas été le cas.

Alors, je commence à voir certains nombres d'années d'expérience et au parquet et devant la cour d'assises,

notamment des affaires criminelles, c'est la première fois que je vois ce genre de choses.

Ce cas-là est extrêmement inattendu et le fait qu'un criminel nous donne uniquement ce motif-là

et nous le donne immédiatement, c'est la première fois que je voyais ça,

extrêmement étonnant, ça a d'ailleurs étonné les enquêteurs, ça étonnait les experts, ça étonnait un peu tout le monde.

Le mis en cause n'avait pas le profil, c'est-à-dire c'est quelqu'un qui,

en tout cas dans ce que j'en savais avant de le rencontrer, n'avait pas d'antécédents

et ça dénotait un petit peu avec la gravité de son passage à l'acte.

Ah ben oui, ça interroge, surtout quand on est un médecin psychiatre et qu'on va rencontrer quelqu'un

et dont on sait que ça va être la question principale pourquoi quelqu'un peut tuer entre guillemets

pour savoir ce que ça fait, c'est-à-dire qu'est-ce que ça peut produire comme effet sur la personne,

c'est quelque chose qui peut attiser un peu la curiosité de l'expert.

Donc c'était un jeune homme qui avait, au moment où je l'ai rencontré, il avait à peu près 23 ans

et l'entretien s'est déroulé dans de très bonnes conditions parce que c'est quelqu'un qui a pu s'exprimer très très longuement

et en fait je vais être assez surpris parce que d'abord c'est quelqu'un qui n'a jamais eu

parce que d'abord c'est quelqu'un qui n'a jamais eu auparavant de rencontre avec un psychiatre ou avec un psychologue,

il n'a jamais pris de traitement médicamenteux, il n'a jamais eu de soin et puis son histoire personnelle est des plus banales.

Code B5, expertise psychiatrique du docteur Laillet.

Monsieur Daniel ne conteste pas avoir donné la mort à l'aide d'une dague

mais rectifie sans émotion le qualificatif de sa mise en examen pour assassina.

Il dit, je serai plutôt sur un homicide volontaire.

Non seulement il le reconnaît, j'allais dire que dans une certaine mesure il le revendique.

Ça laisse un peu perplexe l'expert parce qu'il le reprend de façon très neutre simplement pour apporter une précision

et c'est vrai qu'ensuite sans chercher ni à se dédouaner, ni à aggraver son cas, ni à essayer d'échapper à sa responsabilité,

il va simplement apporter comme ça des précisions qui sont très factuelles, mais aussi très cliniques, c'est-à-dire très précises.

D'abord il commence par une description très factuelle, c'est-à-dire comment pour lui ça s'est passé

et en fait il ne commence pas immédiatement par le passage à l'acte,

mais il va commencer en remontant quelques mois auparavant,

c'est-à-dire pour essayer de rendre compte à l'expert de comment il est arrivé au passage à l'acte.

Et en ce sens, il va commencer à se présenter comme étant un étudiant qui était en master d'audiovisuel à Valenciennes

et qui avait interrompu donc à peu près dix ou onze mois avant son cursus universitaire et qui était revenu vivre chez ses parents.

Bien, monsieur Nadel, où en étiez-vous de vos études, de votre vie professionnelle ?

Mais il n'y a pas grand-chose à dire, je foutais trop rien, j'avais tout abandonné,

j'étais pas bien, parce que je m'étais félargé par ma copine, j'étais chez mes parents tristes,

et mes parents, ils commençaient à me souler, ils voulaient que je trouve du travail,

alors je faisais un peu d'intérim pour les calmer et je faisais semblant de chercher du travail.

Je trouvais qu'ils se cherchent, effectivement ils n'avaient pas d'amis,

effectivement ils n'avaient pas de petits amis, très très peu de relations sociales, voire quasiment aucune,

mais ça ne donnait pas l'impression que ça le gênait.

Alors je sais pas si c'était un choix délibéré, si c'était plutôt une forme de passivité,

c'est-à-dire qu'il allait pas chercher les contacts sociaux, il allait pas vers les gens,

et il ne s'en pléniait pas, et il ne rapportait durant cette phase-là aucune souffrance,

c'est-à-dire que ça n'orientait pas justement vers un état dépressif de quelqu'un qui se dise,

je suis comme ça, je n'en peux plus, je ne peux plus voir l'avenir, etc.

Pas du tout, pas du tout, ça ne semblait pas lui poser plus de problèmes que ça.

Depuis quand aviez-vous cette envie de tuer ?

Docteur, vous savez, pour moi ce rapport à la mort, c'était de la curiosité générale,

je disais, quelque chose de antique.

J'ai commencé à me dire qu'il fallait que je le fasse à peu près un an plus tôt.

Pour moi, c'était comme une découverte de soi, vous voyez, par l'expérience,

comme on fait des boulots ou du sport extrême,

et je me demandais si ma carrière ne pouvait pas être tuer en série, vous voyez.

Alors moi, je l'ai interrogé tout de suite si c'était sa propre mort, non,

c'était pas ça du tout, c'était qu'est-ce que la mort de quelqu'un pouvait faire sur lui.

Est-ce que ça pouvait réveiller en lui un sentiment particulier, une envie particulière,

en tout cas, il était préoccupé par cette question-là,

parce qu'il s'imaginait que s'il était en contact avec la mort, ça pouvait peut-être le rendre euphorique,

lui-même qui, quand même depuis quelques mois, vivait dans une espèce de neutralité affective,

peut-être qu'il pourrait ressentir des choses, il a envie d'explorer ça.

Et à ce titre-là, comme c'est quelqu'un d'assez solitaire,

il se dit que les contacts qu'il avait avec cette dimension un peu mortifère,

il le faisait au travers d'Internet, puisqu'il était allé voir notamment des vidéos

sur l'état islamiste, sur les décapitations.

Mais aussi au travers de films d'animations japonais qui peuvent être quand même assez violents,

au travers de mangas, de dessins animés, qui quelque part scénarisaient un petit peu cette mort.

Donc ça, c'est quelque chose qu'il a accompagné aussi pendant plusieurs mois.

Ce que l'on défend, c'est un homme avant tout, c'est pas évidemment l'acte qui a été commis.

Maître Jérôme Arnal, avocat de Mathieu Danel.

Alors à Mathieu Danel, je le rencontre la première fois, la garde à vue s'est terminée,

il est déféré anime et il est conduit donc devant le juge d'instruction pour être mis en examen.

La première impression que j'ai quand même, c'est qu'il faut le mettre avec beaucoup de pincettes,

ce que je veux dire, parce qu'il a fait monstrueux, mais j'ai pas à faire un monstre.

Et donc on arrive à discuter, à dialoguer un petit peu.

J'essaye de comprendre, évidemment, j'ai pas beaucoup de réponses au départ sur ce passage à l'acte,

mais j'ai l'impression qu'il y a quelque chose qui s'est tramé dans sa personnalité et qui ne ressort pas pour l'instant.

Selon son récit, il prend en stop sa victime dans la drôme et l'a conduit jusqu'à saumière dans le gare.

Sur place, ils auraient passé du temps ensemble et c'est au moment de se quitter que Mathieu Danel aurait pris une dague présente dans sa voiture.

La victime sera retrouvée gisant sur le sol avec 17 traces de coups-de-picture.

Ce qui frappe dans cette affaire, c'est l'absence de regret et d'empathie

dont a fait preuve l'accusé pendant ses auditions.

On a affaire à quelqu'un qui, physiquement, je ne sais pas si ça existe, c'est quelqu'un normal,

mais quand on le voit, il n'a pas le profil ni le physique d'un serial killer ou d'un tueur ou quoi que ce soit, on voit quelqu'un de tout à fait normal.

Après, moi ce qui m'intéresse toujours, c'est dans ces premiers moments et même par la suite,

c'est cette relation que l'on peut créer avec la personne.

Je ne suis pas psychologue, mais je suis là aussi pour lui donner des conseils.

Il faut parler aussi sur la qualification juridique qui est retenue, lui expliquer les tenants, les aboutissants,

parce que tout ça, personne ne lui a expliqué qu'est-ce que c'est qu'un assassinat.

Juridiquement, Mathieu Danel ne le sait pas.

Moi je le sais, la justice le sait, mais lui ne le sait pas.

Donc avant, je rappelle qu'il a été placé en garde à 800 avocats,

donc on lui dit, vous avez combien d'insassinats ?

Il peut répondre oui, mais est-ce qu'il sait ce que c'est un assassinat ?

Est-ce qu'il sait que c'est un crime avec préméditation ?

Donc tout ça, il est important aussi de lui dire.

Oui, c'est pourquoi.

Bonjour, je viens voir mon client Mathieu Danel.

C'est bon, allez-y, maître.

C'est une relation qui est un peu singulière, parce qu'on parle évidemment des faits,

mais on arrive à parler de tout un tas d'autres sujets.

Je le vois assez régulièrement.

Je ne peux pas dire que c'est une relation normale,

parce qu'on ne parle pas de choses normales, ça, c'est évident.

Mais on a réussi à quand même créer un petit lien qui fait qu'il y a des discussions

qui peuvent se déclencher sur des sujets qui n'ont rien à voir avec l'affaire.

On peut parler d'informatique avec Mathieu Danel.

Moi je peux lui parler de sujets qui m'intéressent et qui l'intéressent aussi,

parce que c'est un garçon qui avait réussi à avoir un baccalauréat avec mention.

Il est intéressé par les questions technologiques, sur la philosophie,

donc il y a des discussions qui peuvent avoir lieu sur ces thèmes-là.

Les gens veulent sortir de prison.

En tout cas, vous dîtes qu'ils veulent sortir,

ou qu'il faudrait peut-être envisager de faire des demandes pour être remis à liberté.

Lui n'en fait pas.

Lui, il sait qu'il va rester là un bon moment.

Ça me laisse penser qu'il y a quand même quelque chose derrière

qu'il va au-delà de cette motivation qu'il a pénurie.

Il dit que ça fait quelques années.

Il dit qu'il en avait parlé à ses parents, je crois, deux ans avant le passage à l'acte.

Mais il dit que c'est une obsession qu'il a depuis trois, quatre ans

et que cette obsession, au départ, qui était une simple curiosité,

une simple question, va devenir de plus en plus présente avec le temps.

Mais c'est là tout le problème, c'est de savoir pourquoi il y a cette envie-là.

Et c'était le sens premier, me semble-t-il, de se dossier, de déterminer

est-ce que c'est un dérèglement d'ordre psychiatrique,

ce qui a priori n'est pas le cas puisque les experts qui se sont penchés pour l'examiner

n'ont pas déterminé de maladies psychiatriques.

Donc a priori, ce n'est pas une maladie psychiatrique.

D'où est-ce que ça vient ?

Côte P3, rapport d'expertise psychologique d'Adonyne Paulet.

Sur le plan de la personnalité de Mathieu Danel, il est repéré à un défaut de tolérance,

une tendance autocentrée, un défaut de prise en compte de l'autre,

une absence de remise en cause personnelle et une dimension narcissique marquée.

Il est également repéré une atlérance à la frustration.

Je crois que c'est quelqu'un qui est en désérence,

c'est quelqu'un qui a porté beaucoup d'importance à l'autre.

Et en fait, quand quelqu'un lui demandait un service, il lui rendait naturellement.

Ça ne fait pas de lui un symptôme, mais ça fait de lui un homme un peu normal

qui avait pas mal d'empathie.

Et puis au fil du temps, il va aller de déconvenu en déconvenu.

Même s'il a son baccalauréat, il va rater ses études, il va rater sa licence,

il n'obtiendra pas son diplôme.

Déjà, c'est un premier échec qui est difficile à encaisser.

Quand vous êtes persuadés, que vous êtes plutôt intelligents

et que vous rater vos études, c'est un premier échec.

Et ça vous remet déjà, ça vous fait poser des questions.

Il y a ce premier échec.

Il y a aussi, on en a beaucoup parlé, un échec sur le plan sentimental.

Parce qu'il était très amoureux d'une jeune fille.

Cette jeune fille va lui dire qu'elle ne veut plus de lui,

puis elle va le reprendre, mais en même temps, elle va entretenir une relation

avec un autre garçon.

Et au final, cette relation va se terminer.

Et donc, il a été là aussi sur le plan sentimental un échec,

et il était très attaché.

Et je crois qu'il est encore très attaché à cette jeune femme.

Donc il a un échec sur le plan sentimental,

il a un échec sur le plan scolaire,

et sur le plan professionnel, qu'est-ce qu'il fait ?

Au moment où il commet le crime,

il faisait un petit peu d'interim quelques mots par avant,

mais il n'en fait plus.

Et il se retrouve à vivre au domicile de ses parents dans sa chambre d'enfant.

Et ça, je crois que pour lui, c'est terrible.

Et donc, il fait croire à ses parents

que quand il sort le matin, il va travailler,

et en fait, il ne travaille pas.

Il va dans son véhicule, il tourne un peu sur la commune, sur la région,

et c'est tout ce qu'il fait.

Et il fait croire à ses parents,

et il va aussi, je crois qu'il l'a bien raconté,

qu'il se rendait dans des magasins pour chercher des mangas,

des choses comme ça.

Mais il se rendait pour continuer à vivre dans un autre monde,

dans lequel il s'était construit, qu'il semblait mieux lui correspondre,

parce qu'il n'y avait plus de sentiments,

il n'avait plus besoin d'avoir de relations avec l'autre,

parce qu'il n'y a plus d'échecs.

Je donne rien, donc je n'attends rien.

Je discute avec des gens sur Internet,

quand ça m'énerve de discuter avec eux, j'arrête.

Et l'avantage, c'est qu'Internet,

quand vous discutez avec les gens et que ça vous énerve,

vous arrêtez, et ils ne vont pas venir à votre porte pour vous dire,

« Qu'est-ce qui t'arrivait ? »

Hier, t'étais pas bien luné, ou quoi que ce soit, c'est terminé.

Et on passe à autre chose.

Et donc, on cache le fait qu'on a basculé vers une personnalité

qui ne s'aime plus et qui ne veut plus de sentiments, plus d'émotion.

Il s'enferme d'un des réseaux sociaux,

il s'enferme d'un des jeux quand même très violent.

Et il est isolé.

Et pourtant, il vit chez ses parents.

Il vit chez ses parents, mais il côtoie plus personne.

Il se construit sa vie à l'image d'un des personnages de manga,

c'est-à-dire d'un tueur qui ne ressent plus rien,

parce que quand il a pu ressentir des choses par le passé,

elles ont tout abouti à des échecs.

En janvier 2022, trois ans et demi après avoir tué Claire Régné,

Mathieu Dannell comparé devant la Cournaisiste du Gar.

Dans son box, c'est un accusé extrêmement froid.

Il y avait eu trois expertises psychiatriques,

dont une collégiale avec des experts, un certain de renommés,

qui nous disaient tous une chose essentielle,

à savoir que l'intéressé était parfaitement conscient de ce qu'il faisait,

que c'était pour lui l'aboutissement d'un projet,

que son discernement était intact au moment où il a agi.

Donc il n'y a pas de problème pour le déclarer coupable,

et comme il a servi aux experts le même discours qu'il avait servi aux enquêteurs,

tout ce que les experts étaient capables de dire,

et qu'il était cohérent dans son projet.

Il n'y avait pas de signe de mythomanie dans ce qu'il nous disait.

Tout au plus, ça a été relevé deux aspects intéressants,

un aspect un peu mégalomaniaque chez l'intéressé,

et l'un des experts nous avait dit qu'il était prêt à entamer

l'expression n'est pas belle,

mais elle a été donnée comme ça une carrière de serial killer.

Voilà, ça lui aurait plu, il y en aurait eu d'autres.

Faites entrer l'accusé.

Et lors du procès, il s'est exprimé comme ça,

il n'a montré strictement aucune émotion à aucun moment,

ce qui là aussi est assez surprenant,

parce qu'on a l'habitude de assises que les gens puissent exprimer d'une façon ou d'une autre,

soit en pleurnichant, soit en exposant de la colère, de la haine, de la peur, ou je ne sais quoi,

mais avec lui, franchement, rien.

Et chaque fois qu'il avait eu à s'exprimer, il avait été dans les mêmes dispositions,

pas d'expression, pas de mimique, pas de rien,

il y a un discours extrêmement froid et assumé.

Donc aussi surprenant que ça puisse paraître pour les jurés,

je pense, pour ceux qui avaient suivi l'enquête des débuts,

c'était la suite logique des choses.

Vous savez, tout le monde a une personnalité.

Vous savez, tout le monde a une personnalité.

Vous avez une personnalité, j'ai une personnalité.

Et notre personnalité, elle est la résultante de deux dimensions.

Il y a une dimension qui est une dimension innée,

notre patrimoine génétique,

ce qui nous est transmis dans nos gènes,

par nos parents, par nos grands-parents.

En psychiatrie, on appelle ça le tempérament.

Et dans certaines familles, on retrouve des tempéraments,

c'est-à-dire des traits de caractère,

qui sont un peu transmis de génération en génération.

Et cette dimension innée, elle se combine

au fur et à mesure de son enfant et de son adolescence

avec une dimension acquise.

La dimension acquise, c'est quoi ?

C'est l'éducation qu'on a reçue,

c'est les rapports qu'on a eus avec nos parents,

c'est nos premières années de scolarisation.

Et peu à peu, cette dimension innée, cette dimension acquise,

entre notre naissance et l'âge adulte jeune,

elles le vont travailler,

elles le vont rentrer en résonance,

et elles vont définir nos traits de caractère.

Et petit à petit,

tous nos traits de caractère mis bout à bout,

c'est une autre personnalité,

c'est-à-dire notre façon d'être au monde.

Et dans le cas de l'individu qui nous intéresse,

même s'il n'y a pas d'éléments traumatiques dans son enfance,

on s'est aperçu que rapidement,

ça va être un pré-adolescent plus un adolescent

qui va se définir comme étant plutôt quelqu'un de solitaire,

plutôt quelqu'un de détaché,

plutôt quelqu'un qui a un goût pour ce qui se passe à l'intérieur de sa tête

et peu pour les contacts sociaux,

peu pour les relations avec les autres,

ça veut pas dire qu'il en avait pas,

il en a eu quelques-unes,

mais c'était jamais très intense, jamais très prononcé,

et rapidement, il va voir que c'est quelqu'un qui vibre assez peu émotionnellement.

On a tous essayé de l'amener à en dire un peu plus

ou à rompre un petit peu le masque,

mais à chaque fois, elle nous répétait la même chose.

Je crois que vraiment ce qui était marquant,

c'est cette absence totale d'émotion.

Quand je dis totale, c'est pas d'émotion pour la victime,

pas d'émotion pour lui-même

et pas d'émotion non plus lorsque ses proches,

par an, son frère, sont venus témoigner,

pas d'émotion du tout.

M. l'avocat général,

vous avez la parole pour vos réquisitions.

...

Pour être extrêmement clair,

je n'ai jamais pensé un seul instant

qu'il pouvait s'agir d'une personne récupérable pour la société.

Si je suis amené à demander la réclusion criminelle à perpétuité,

c'est que je suis persuadé que sa place est à l'écart pour éviter d'autres drames.

Et aujourd'hui, encore, j'en suis intimement persuadé.

Quand Mathieu Danel se lève pour ces derniers mots,

il dit,

j'aimerais m'excuser,

mais je peux pas,

parce que si c'était à refaire,

eh bien, je le referai.

Cette pulchio-mortrière était

trop forte.

Je pouvais pas y résister.

...

Une peine hors norme pour un procès hors norme.

C'est ce qu'a requit l'avocat général,

hier soir, à l'encontre de Mathieu Danel,

et les jurés, après seulement 1h30 de délibération,

sont allés dans son sens.

La peine maximale a été prononcée,

soit la réclusion criminelle à perpétuité,

à sortie de 22 ans de sûreté.

Je me réjouis absolument pas.

L'avocat que je suis ne se réjouis jamais,

lorsqu'une peine maximale est prononcée.

Maître Anthony Chatbert, avocat de la famille de Claire Régné.

Maintenant, ça correspond au sentiment

qu'a inspiré Mathieu Danel.

Je pense qu'il a fait peur à tout le monde.

Il a fait peur jusqu'au bout.

Et, malheureusement,

il a été sanctionné à la hauteur

de cette peur qu'il a engendré.

Il me regarde.

Je ne lis rien sur son visage.

Maître Jérôme Arnal, avocat de Mathieu Danel.

Ça, c'est quand même terrible.

Vous avez quelqu'un qui est condamné à la peine maximale,

en tout cas pour le crime qu'il avait commis.

Il me regarde et il me dit

ça y est, c'est fini maître.

Enfin, c'est incroyable.

Mathieu Danel écope de la peine maximale.

La prison a perpétuité

avec 22 années de sûreté.

Il a rien à perdre

et donc il fait appel.

10 mois plus tard, pour son second procès,

Mathieu Danel change radicalement d'attitude.

C'est le deuxième ou troisième jour du procès.

On fait une pause

comme ça se fait entre midi et deux.

Et puis je vais le voir

dans la jole.

Et déjà, en fin de matinée,

il avait donné quelques signes d'émotion.

Ce qu'il n'avait jamais donné jusque-là.

Et puis, dans la jole, il s'effondre.

Pour la première fois, je le vois pleurer.

Et il me dit,

mais je me rends compte de ce que j'ai fait, c'est affreux.

Et là, il s'effondre, il se met à pleurer.

Et j'ai dit, écoutez, l'audience va reprendre.

Ce que vous venez de me dire,

il faudrait peut-être le dire à la cour.

Et c'est ce qu'il va faire.

La cour !

La présidente va lui poser quelques questions

et puis là, il va commencer un peu assez nervé.

Et puis, en même temps, il s'effondre.

Et il se met à pleurer.

Ça montre que cette personnalité-là,

ce n'était pas une personnalité froide.

C'est une personnalité qui s'est construite sur la froideur

parce qu'il ne voulait plus avoir de sentiment.

Et ça, c'est un élément qui peut,

je dis bien, qui peut, je parle conditionnel.

Qui peut finalement être positif.

Pourquoi ?

Parce que c'est lorsqu'on sait fondre

qu'on est en capacité de changer.

Si, à un moment donné, on déprime réellement,

c'est là, l'ouverture

à s'interroger

sur son fonctionnement.

Et c'est là, l'ouverture

à essayer de changer quelque chose dans son fonctionnement.

On peut quand même espérer

qu'il va continuer à essayer

de mieux se comprendre.

Et on peut espérer surtout qu'il n'y ait pas de nouveaux passages à l'acte.

Et ça, c'est le plus important.

L'enquête détermine

qu'il n'est pas allé, par exemple, sur Internet, rechercher

comment tuer quelqu'un, comment on s'y prend,

les coups de couteau,

à quel endroit du corps on les porte, etc.

Tout ça, il ne l'a pas fait.

On n'a pas trouvé trace non plus

d'entraînement de Mathieu Danel avec un couteau.

Donc, est-ce que Mathieu Danel a prémédité

l'acte ?

Est-ce qu'il a prémédité

l'intention de tuer quelqu'un ?

Est-ce qu'il a prémédité concrètement ?

Je ne crois pas.

Est-ce qu'il a prémédité

d'aller, ce jour-là,

tuer cette malheureuse victime

à cet endroit précis ?

Je crois que la réponse est non.

Et puis, qu'est-ce qui joue aussi

me semble-t-il en sa faveur ?

En la faveur d'une peine moins importante

que ce qui a été prononcé en première instance,

c'est le fait qu'il se rende.

...

En appel, Mathieu Danel

est moins lourdement condamné qu'en première instance.

Il est coppe de 30 ans de prison

avec une période de sûreté

de 20 ans.

...

C'était donc de la traconte

Côte B

rédaction en chef Guillaume Maury

réalisation Mathieu Fred

...

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Ecoutez Christophe Hondelatte dévoiler la personnalité de Mathieu Danel. En juin 2018 dans le GARD, Mathieu Danel, 23 ans, massacre sur une auto-stoppeuse de 10 coups de dague. Mathieu DANEL a tué Claire Reynier pour voir ce que ça faisait… Et comme cela ne lui a pas plu, il s’est dénoncé. Sinon il aurait recommencé. Mathieu Danel était un potentiel tueur en série.Vous voulez écouter les autres épisodes de ce podcast ? >> Retrouvez-les sur notre site Europe1.fr ainsi que sur vos plateformes d’écoute habituelles.