Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Marie Besnard. Episode 2 - La bonne dame de Loudun - Le débrief

Europe 1 Europe 1 10/3/23 - 12m - PDF Transcript

Pour commenter son histoire du jour, Christophe Fondelatte reçoit un invité, acteur direct de son récit.

Je vous ai raconté en deux épisodes l'infabuleuse histoire de Marie Benard,

accusée juste après la guerre d'avoir empoisonné à l'arsenic 13 personnes de sa famille

et finalement à quitter en raison de l'incurie des experts toxicologues.

Débrief cette histoire avec vous, Jean-Marie Augustin, vous êtes historien du crime

et vous êtes surtout, et en l'occurrence ça vous positionne parfaitement sur cette affaire,

professeur émérite à l'université de Poitiers où vous avez enseigné toute une bonne partie de votre carrière.

Je voudrais commencer, Jean-Marie Augustin, par une question un peu personnelle.

Est-ce que vous pensez qu'elle est vraiment innocent ?

C'est quand même assez difficile, dans la mesure où elle est quand même à quitter au bénéfice du doute.

Mais quand même, je pense un peu comme le chroniqueur judiciaire de l'époque qui était Fédérique Poitiers,

je crois qu'elle était effectivement innocente. Oui, je pense.

Alors, il faut que vous nous éclairiez sur l'état de l'expertise toxicologique à l'époque,

parce qu'il y a un truc qui m'énerverait, ça serait de juger les gens avec nos lunettes d'aujourd'hui.

Est-ce qu'on savait détecter les taux d'arsenic à l'époque ou pas ?

On avait deux méthodes, mais surtout la méthode de marche,

dont vous avez parlé, effectivement, sur la constitution d'anneau brillant

lorsqu'il y avait de l'arsenic et la confusion au moment de Dr Behrou au procès de Poitiers,

lorsque la vocale lui présente et lui dit qu'en réalité, c'est de l'antimoine.

Mais je crois que, effectivement, je crois que ce procès, c'est l'archétype des affaires ratées.

Je pense en particulier, vous en avez parlé, parce qu'il y a les règles médicolégales non pas été respectées.

Et puis ensuite, il y a cette bataille d'experts. Je crois que, dans un procès, lorsqu'il y a une bataille d'experts,

cela se termine presque toujours par un acquittement de celui qui a été accusé.

Parce qu'effectivement, le problème, c'est de savoir si, notamment dans les cheveux,

c'est les cheveux qui ont surtout été retenus, si l'arsenic a un caractère endogène,

c'est-à-dire s'il a été vraiment ingéré du vivant de la personne,

ou s'il a un caractère exogène, et ce qui a été finalement prouvé à la fin du procès,

caractère exogène, parce que cet arsenic, en réalité, il peut provenir de la terre des cimetières

par l'intermédiaire des eaux de russe seulement.

Et je crois que c'est la conclusion que l'on peut avoir, et qui du reste a fait faire des progrès

dans anticycologie, c'est-à-dire que l'arsenic, les terres des cimetières contiennent de l'arsenic,

et par conséquent, les cadavres peuvent en contenir ces tout à fait maintenant prouvés.

– Le docteur Bérou était-il inincapable ?

– Non, je ne pense pas. Il a été aussi célèbre parce qu'il était dans l'affaire,

il a été l'expert dans l'affaire du Pont Saint-Esprit.

– Oui. – Vous savez l'histoire du pain maudit.

– Du pain maudit qui rendait les gens fou. – Voilà, c'est ça.

Donc en 51 et en 52, il est vraiment l'expert presque que celui dont on pense qu'il ne peut pas se tromper.

Et malheureusement, on l'a fait beaucoup trop confiance, et je crois que là véritablement,

je pense que dans les grandes, les infais criminels, il y a des gens qui veulent profiter de ces procès.

C'était le cas, je pense, des justes d'instruction, c'était le cas des policiers,

c'est le cas aussi des docteurs Bérou pour lui.

C'est la deuxième affaire du siècle, et par conséquent, cela va lui permettre d'avoir plus d'audience,

une réalité, il s'est complètement trompé, et il a vraiment tout perdu à ce moment-là,

comme vous de la vie première marquée.

– Peut-être qu'on peut reparler des experts, parce que le premier procès, le docteur Bérou est très affirmatif.

Deuxième procès, les experts qui suivent disent « oui, on ne peut plus en garder que 6 sur 12 ».

Et troisième procès, on finit par dire « on en a peut-être un ».

Et à la fin, on en a pas du tout.

– Est-ce qu'il n'y a pas aussi un phénomène ?

C'est que voyant ce qui est arrivé à Bérou, c'est-à-dire, il s'est ridiculisé publiquement,

petit à petit, il se désengage.

– Je pense qu'il y a quand même la véritable querelle au sein des toxicologues.

Il y a des anciens qui vont aussi être tout à fait d'accord avec le docteur Bérou,

qui vont continuer à penser aux caractères endogènes.

Mais il y a de nouveaux, des plus jeunes, des toxicologues beaucoup plus jeunes,

qui vont en parler différemment.

Mais il faut quand même savoir aussi que dans l'affaire Lafarge, 100 ans plus tôt,

on avait aussi des doutes dans ce qui concerne la méthode de marche.

On avait des doutes et on pensait déjà que l'arsenic pouvait être introduit dans les cadavres

par l'intermédiaire des autres ruissellement.

C'est une querelle entre Orphida et Raspay, mais à l'époque.

Je crois que le docteur Gautra a dû avoir connaissance de tout cela.

Il a consulté des ouvrages de toxicologie.

Il s'est documenté auprès des laboratoires.

Et c'est comme ça qu'il a pu ainsi confondre le docteur Bérou.

Et ensuite, les experts qui vont suivre vont également se corréler entre ce caractère endogène et exogène.

Évidemment, ce sont ceux qui vont penser au caractère exogène, qui vont garder.

Vous confirmez qu'il y a de l'arsenic dans la terre du cimetière de Loudin et de tous les cimetières ?

Oui, je ne suis pas toxicologue.

Mais je pense effectivement que les experts vont très bien les montrer.

Et maintenant, c'est largement admis, même dans le cadre de très nombreux cinquières, je crois.

Alors, on a donc la défaillance des experts.

Et à côté, moi, je trouve une incroyable combattivité des avocats, notamment de se mettre au Gautra.

Il est rageux, il est très combattif, très mobilisé, il ne lâche rien.

Oui, il fait son cadre quand même.

Ils sont quatre. Mes maîtres Gautra, effectivement, il a fait le boulot d'avocats, comme il faut, face à l'accusation.

Il a très bien défendu Marie-Bénard.

Mais je crois qu'effectivement, il ne faut pas peut-être dire que Marie-Bénard s'en est sorti grâce à ses avocats.

Je pense vraiment, je penche pour l'innocence qui est avérée quand même.

Alors, est-ce que vous avez compris l'expertise psychiatrique qui dit « Elle est anormalement normale » ?

Oui, non, moi je n'ai pas très bien compris.

Oui, vous le commenteriez comment ?

En fait, c'était une femme comment ? En vérité, Marie-Bénard, elle était intelligente,

ou elle était saute, elle était ouverte, ou c'était quelqu'un de trop grave ?

C'est l'origine paysaine, c'est une femme qui, avec du bon sens, c'est une femme simple,

mais c'est une femme qui, je pense aussi qu'au début, elle est très très mal appréciée.

Elle a une toute petite voix, la mentille, tout ça.

Bon, je crois que ça contribue effectivement à ce qu'elle soit considérée presque comme une sorcière.

Et puis, par la suite, après le premier procès de Bordeaux, là, effectivement, l'opinion change.

Et je pense, je reviens un peu aussi à Federie Pochère qui a largement contribué à ce renversement de l'opinion.

Oui, parce que les gens ne changent d'avis que si les journalistes changent d'avis.

Ce sont les moutons de panure.

Je crois que c'est 50.

Les procès sont incroyablement couverts par la presse du monde entier.

Je dis qu'il y a des journalistes américains qui sont là.

Oui, oui, oui.

Mais vous savez, on va recommencer dans un autre procès Poitain.

C'est le procès des médecins anesthésistes de CHU en 1988.

C'est exactement pareil.

Les règles médicolégales n'ont pas été respectées.

Il y a une bataille d'experts.

Et finalement, eh bien, ça termine, ça couche d'une souris, quoi.

Tout à fait, c'est la même chose.

Et à Loudin, vous êtes allés à Loudin ? Ça vous arrive d'aller vous promener à Loudin ?

Oui, quelquefois, oui.

Bon, la maison est toujours là ?

Oui, oui.

Sur la Prove de Mirbeau, oui, tout à fait.

Vous savez aussi, Loudin est une ville qui a connu l'affaire bien-grandie, aussi, sur Louis XIII.

Donc c'est une île marquée par les affaires judiciaires.

Mais les habitants de Loudin d'aujourd'hui savent que cette maison est la maison de Marie-Bénat ?

Ah oui, oui, je crois. Oui, tout à fait, oui.

Le met est là.

Je dirais pas quand même qu'on la visite.

Il n'y a pas un parcours de visite, il ne faut pas exagerer.

Mais on sait effectivement que c'est la maison.

Donc au faubourg de la Porte de Mirbeau, la maison de Marie-Bénat, oui, effectivement.

Il y a quelque chose qui est surprenant.

Pourquoi est-ce qu'elle donne son corps à la science ?

Moi, je pensais qu'une femme comme ça, par défi, se faire énumer à Loudin.

Je pense que, non, contrairement, c'est vraiment le défi.

C'est le défi.

Je pense qu'elle ne voulait plus entendre parler de cette affaire.

Je pense qu'elle avait tiré un trait et par conséquent.

Donc, elle est venue la bonne dame de Loudin.

Et il y a des témoignages de gens qui l'ont rencontré après l'affaire, après les procès,

et qui l'ont trouvé tout à fait sympathiques.

Oui, oui, ça, tout à fait.

Elle est venue véritablement la bonne dame de Loudin.

Mais je pense que c'est peut-être aussi un pien de nez qui l'a lancé.

On donne son corps à la science aussi, c'est possible.

Je pense.

Merci infiniment Jean-Marie Augustin, historien du crime Professeur et Mérite.

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En 1949, à Loudun dans la Vienne, Marie Besnard est accusée d’avoir empoisonné son mari et 12 autres personnes de son entourage et de sa famille. Deux procès successifs sont reportés en raison de la piètre qualité des expertises toxicologiques. Il faut attendre 7 ans, avant qu’un nouveau procès soit organisé.