Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Le procès de Bobigny - Le récit
Europe 1 10/11/23 - 31m - PDF Transcript
Oh ! Non mais vous vous rendez compte de ce que vous avez fait ?
C'est un tout l'érable, croyez-moi !
Alors là...
Hé, le sourire, tu penses qu'il va le garder longtemps ?
Au moins trois mois.
Allez, hop !
Préparez-vous à garder le sourire.
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Pensez à covoiturer.
Je vous raconte le procès de Bobigny en 1972,
le procès qui a ouvert le débat en France sur l'avortement
et conduit dans la foulée au vote de la loi Veille.
L'histoire d'une gamine de 16 ans, Marie Claire Chevalier,
qui tombe enceinte après un viol, qui avorte
et qui se retrouve avec sa mère, l'avorteuse
et deux amis qui les ont aidés devant le tribunal à Bobigny.
J'ai écrit cette histoire en m'appuyant sur le livre de Catherine Valentich et Larousse,
Bobigny, le procès de l'avortement, la réalisation et de Céline Lebrun.
À la fin des années 50, Michel Chevalier est une fille mère, commandée.
Un homme lui a fait trois enfants, trois filles, et il s'est barré sans même les avoir reconnus.
Michel se retrouve seul avec trois filles à élever, sans argent.
Alors elle les confie à sa mère, et elle se saigne aux quatre veines
pour lui verser une petite pension,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle s'occupera de ses enfants,
et elle se segne aux quatre veines
pour lui verser une petite pension,
et elle vient les voir de temps en temps.
Et puis au bout de quelques années, en 1965,
dans la bolueseste de Paris,
elle s'installe avec ses trois filles.
Marie-Claire s'en est née à alors dix ans,
et les deux autres, neuf et huit ans.
Quand on mènera une enquête de moralité
sur cette mère,
on ne trouvera rien à dire de mal.
Elle s'est sacrifiée
pour élever ses enfants.
Elle a renoncé à toute vie personnelle,
et depuis le départ du père,
elle n'a jamais plus ramené d'homme
à la maison.
La fille est née de Michel,
Marie-Claire,
à maintenant 16 ans.
À l'école, elle n'est pas très brillante.
Elle a échoué dans un CET,
un collège d'enseignement technique.
Qu'est-ce que tu veux faire plus tard, Marie-Claire ?
Je ne sais pas trop.
Mais tu es par rapport aux enfants, quoi.
À 16 ans,
Marie-Claire commence à s'intéresser aux garçons.
Mais elle n'en parle pas à sa mère.
À l'époque, au début des années 70,
ça ne se fait pas.
Même si 68 est passée par là.
Au mois d'août 1971,
Marie-Claire se met à fréquenter
une bande de copains de son âge.
Et un jour,
elle fait la connaissance de Daniel,
un garçon de 18 ans.
Il sort de maison de correction pour de petits vols.
Il est, comme on dit,
en liberté surveillée.
Et Marie-Claire, ben...
Il la trouve mignonne.
Oui, mignonne.
Lui est un peu plus âgé que le reste de la bande.
Il a déjà son permis.
Ça te dirait que je t'emmène
faire un tour en voiture ?
Ben oui.
Ça te dit de...
de venir faire un tour chez moi ?
Je voudrais te faire écouter
des disques que je viens d'avoir.
Oh ben d'accord.
Il lui a menti.
Sa mère n'est pas chez lui,
et peut-être qu'elle n'a jamais habité là.
Il l'emmène dans sa chambre.
Il la jette sur son lit.
Pourquoi tu fais ça ?
T'es mignonne.
Tu m'excites.
Faut qu'on le fasse.
Il lui arrache le collant.
Il lui arrache la culotte.
Et là, il attrape une paire de ciseaux
sur la table de nuit.
Est-ce qu'il les avait mis là pour ça ?
C'est du bouge.
Je te crève les yeux.
Il baisse son pantalon.
C'est la première fois qu'elle voit
un sexe en érection.
Il se jette sur elle.
Il lui fait mal.
Très mal.
Et quand il a fini, il se désintéresse d'elle.
Il est là, sur le lit, sans bouger.
Et elle, elle ramasse ses vêtements.
Et elle s'en va.
Et elle se rabille
dans un coin du hall de l'immeuble.
Elle traverse, neuillie, plaisant sans pleurant.
Elle arrive chez elle.
Elle s'enferme dans la salle de bain.
Elle se met sous la douche.
Trois semaines plus tard,
Marie-Claire a, comme elle dit,
des troubles.
Elle est enceinte.
Elle hésite à en parler à sa mère.
Mais comme elle est nerveuse,
qu'elle ne mange plus, qu'elle ne dort plus,
sa mère finit par se douter que quelque chose
ne va pas.
Alors elle lui dit tout.
Tu sais,
c'est tout le feu, ce bébé.
On se débrouira.
Non.
Je suis pas capable
d'élever un enfant.
Qui a eu l'idée
d'une feuzeuse d'ange.
Qui a eu l'idée d'avorter.
Marie-Claire, elle-même,
ou Michel, sa mère.
Tu sais, maman,
je veux pas connaître la même vie que la tienne.
Je te comprends, ma chérie.
C'est vrai que c'est un fardeau.
Si on m'oblige à le garder,
je l'abandonnerais
à l'assistance publique.
Marie-Claire
recroise Daniel
qu'il l'a violée.
Il habite le quartier.
Et elle lui dit qu'elle est enceinte.
Il le prend très mal.
Il est violent.
Ça la rend force.
Elle ne veut pas d'enfant
d'un garçon brutal.
Quelques jours plus tard,
Marie-Claire va voir son gynécologue.
Bien.
Je confirme que vous êtes enceinte, mademoiselle.
Je veux avorter.
Je peux le faire si vous voulez.
Mais ça sera 4 500 francs.
4 500 francs.
Trois fois le salaire de sa mère.
Il va falloir se débrouiller autrement.
Michel, la mère.
On parle à Lucette,
qui est une de ses collègues de la RATP.
Lucette est très catholique.
Elle lui dit que pour elle-même,
elle préférait mourir plutôt que d'avorter.
Mais pour les autres, elle ne veut rien imposer.
Chacun sa liberté de conscience.
Et donc elle-même,
elle en parle à une autre collègue, René.
Et c'est elle, René,
qui donne à Michel le numéro de téléphone.
Tiens Michel.
C'est une avorteuse.
Elle s'appelle Micheline Bambuc.
Appelle-là.
Micheline Bambuc
Cette Micheline Bambuc,
comme toutes les femmes d'ailleurs de cette histoire,
élève elle-même 3 enfants,
seuls.
Son mari n'est pas parti, il s'est suicidé.
Et avant, quand il faisait l'amour,
son mari ne prenait pas de précaution.
Il lui disait, c'est à toi de te débrouiller.
Alors plusieurs fois,
elle s'est avortée, elle-même, toute seule.
C'est comme ça qu'elle a appris.
Michel l'appelle.
L'autre lui raccrochonnait.
Alors elle la rappelle, plusieurs fois.
Vous comprenez,
c'est qu'elle est enceinte de 10 semaines.
Faudrait pas traîner, quoi.
Bon, d'accord.
Mais ça sera 1200 francs.
Michel rassemble ses économies.
Elle en prend de ce qui lui manque.
Et le 5 novembre 1971,
Micheline Bambuc
vient voir Marie-Claire.
Bon.
Je vais te poser une gaine de filles
électriques.
Faudra que tu la gardes 3 semaines.
Et je viendrai régulièrement contrôler.
Elle vient 5 fois pour contrôler.
Et tous les jours,
Marie-Claire va au collège.
Et pourtant elle a mal.
Mais dans la nuit du 20 novembre,
elle fait une grosse émoragerie.
Elle se vide de son sang.
Michel court téléphoner chez une voisine
pour appeler les scores.
Et Marie-Claire est transportée
à la Clinique Saint-François,
à Paris.
À l'arrivée, on lui demande 1200 francs.
Elle ne les a pas.
La mère donne 200 francs en liquide
et un chèque en bois.
Son émoragerie est jugulée sous anesthésie.
Elle sort de la clinique
3 jours plus tard.
Un jour, Marie-Claire
croise à nouveau Daniel,
au pied de l'immeuble.
Je me suis fait avorter.
J'ai failli y passer, mais je me suis fait avorter.
Quelques temps plus tard,
ce Daniel tombe pour un vol de voiture.
Et il se dit
si je veux la paix,
il faut que je lâche quelque chose.
Alors il balance Marie-Claire.
Je sais pas si ça vous intéresse, mais
moi je connais une fille, elle s'est fait avorter.
C'est lui qui l'a violée.
C'est lui qui l'a mise enceinte.
Et c'est lui qui la balance.
Le 12 janvier
1972
Michel Lambert
est au lit avec la grippe.
Ouvrez madame,
c'est la police.
Et Michel a vous tout de suite ?
Elle assume.
Oui, elle a aidé sa fille
à avorter.
Et puis craque, un beau jour,
la police arrive à la maison
et puis voilà, le grand cinéma,
madame, dites-nous tout, il vous arrivera rien
où on en est aujourd'hui.
C'est tout à fait injuste, c'est une loi qui est très injuste.
La loi elle est faite pour les riches.
C'est qu'on les moyen d'aller en Angleterre,
d'aller en Suisse, d'aller partout ailleurs.
Bon, ils ont de l'argent, c'est très bien.
C'est la justice des pauvres, c'est ça.
Et les policiers perquisitionnent le petit appartement
HLM.
Et tous les acteurs de l'avortement de Marie-Claire
sont inculpés.
Marie-Claire, la maman,
Lucette, la collègue de la RATP,
René qui a donné le numéro
de la Feuzeuse d'Anges,
et bien sur la Forteuse, Micheline Bambuc.
Quatre femmes
a qui on annonce qu'elles seront jugées.
Marie-Claire, devant le tribunal
pour enfants le 11 octobre
et les quatre complices le 8 novembre
devant le tribunal correctionnel
de Bobigny.
...
La mère et la fille
sont au fond du trou.
Marie-Claire s'en veut beaucoup
d'avoir mis sa mère dans cette situation.
Elle a des pensées suicidaires.
Mais Michel est une combative
et elle lit beaucoup.
Et elle vient justement de lire le livre
d'une avocate, Giselle Alimi,
un sujet d'une jeune militante du FLN
torturée et violée par des para-français
en Algérie.
Elle va l'avoir fin janvier 1972
à son cabinet.
Et tout de suite,
Métralimi voit dans cette affaire
une opportunité.
Profitez de ce procès
pour ténoncer la loi.
L'article 317 du Côte pénale
qui dit jolie,
qui compte par aliments, brevages,
médicaments, manœuvres, violences
et tout autre moyen aura procuré
ou tenté de procurer l'avortement
d'une femme enceinte ou supposée enceinte
qu'elle y ait consenti ou non
sera punie d'un emprisonnement
d'un an à cinq ans
et d'une amende.
Le procès de la petite se fera à huit clots
mais le procès de la mère et de ses trois complices
sera public.
Giselle Alimi veut en faire le procès
de la loi qui réprime l'avortement.
Et l'association choisir
qu'elle vient de créer avec l'écrivaine
de Beauvoir sera le bras armé
de ce combat.
Donc,
les juges du tribunal pour enfants de Bobigny
ont décidé que Marie-Claire
serait jugé à huit clots.
Ça n'est donc pas là que mettre Alimi
pour amener son combat.
Mais tout de même, une réunion de choisir
a lieu quelques jours avant le procès de Marie-Claire
et il est décidé d'imprimer des tracts.
Moi je propose qu'on aille
distribuer ces tracts sur les marchés.
On devrait mettre l'accent
sur le fait qu'elle vient d'un milieu défavorisé
que c'est parce qu'elle est pauvre qu'elle est là.
Le tract
appelle à manifester devant le tribunal
le 11 octobre
à 9 heures.
Le dimanche qui précède
les militantes du mouvement
de libération de la femme et de choisir
vont distribuer plus d'un millier de tracts
sur le marché de Bobigny.
Et le lendemain, le neuf, une première manifestation
est organisée place de l'opéra
à Paris.
Quelques centaines de manifestants
qui scandent le prénom de Marie-Claire.
Et le matin du 11
le jour du procès de Marie-Claire
c'est une foule compacte
qui se presse devant le palais de justice.
250 personnes
et quelques personnalités
l'actrice Delphine Serriguela
son compagnon, Samy Fré.
À l'intérieur, dans la salle d'audience
Marie-Claire entend
elle entend les slogans, elle se dit
c'est pour moi tout ça
il va falloir que je tienne le coup
elle se lève pour parler
et pour la première fois
elle raconte le viol
et elle assume
elle assume tout.
C'est pas la peine d'aller chercher des nois à ma mère
c'est moi
c'est moi toute seule qui ai pris la décision
de me faire avorter
je voulais pas devenir mère assaisant
en vérité
les juges sont très en voie assez
elle a été violée
c'est une circonstance atténuante
mais elle n'a pas porté plainte contre son violeur
alors comment justifier
cette circonstance atténuante
Quand Giselle a limi
se lève pour plaider
elle aussi entend les gens
à l'extérieur qui crient
libérer Marie-Claire
si Marie-Claire
était issu d'un milieu
favorisé
elle aurait avorté
confortablement
dans une clinique suisse
anglaise
voire parisienne
mais il y a deux poids de mesure
les femmes ont revenu confortables
peuvent avorter dans un milieu médicalisé
et sans crainte d'être poursuivie
alors que pour celle des classes défavorisées
l'avortement est souvent
réalisé par des incompétentes
et les émoragies fréquentes
et le risque de poursuite judiciaire
si vous regardez
les cinq à six cents jugements
prononcés chaque année
pour avortement
35%
sont des employés de bureau
26%
sont des ménagères
5% sont des ouvrières
toutes
des femmes de milieu
populaire
pas chez Nissan
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quelques minutes plus tard
Marie-Claire apparaît
en haut démarche du palais de justice de Bobigny
toute frêle
dans son manteau bleu
elle a été
relaxée
les juges
ont retenu l'excuse de jeunesse
voilà comment c'est formulé
attendu que Marie-Claire Chevalier
écolière à peine âgée de 16 ans
non préparée à l'état où elle se trouvait
ni averti des risques qu'elle courait
n'a pas librement
et délibérément choisi d'accomplir l'acte
qu'il lui est aujourd'hui reproché
qu'elle a souffert de contraintes d'ordre moral
familial et social
auquel elle n'a pas pu résister
elle est donc relaxée
ce jour-là
Giselle Alimi dit à Michel
la mère
tu sais Michel
pour toi ça sera beaucoup plus dur
l'après-midi
de la relaxe de Marie-Claire
le premier coup de fil de Giselle Alimi
est pour Simone de Beauvoir
elle a été relaxée
oh merde j'avais déjà écrit mon papier
pour le nouvel observateur
je pensais qu'elle allait être condamnée moi
c'est suspect cette relax non ?
le pouvoir magouille
il veut casser notre mouvement non ?
Giselle Alimi est un peu
abasourdi parce que pour elle c'est une victoire
écoutez Castor
le vrai procès c'est dans trois semaines
hein
vous verrez
on va en faire le procès de la loi
le procès de Michel Chevalier
de cette deux copines de la RATP
Lucette et René
et de la vordeuse Micheline Bambuque
sera public
Métralimi a décidé d'en faire
un procès politique
elle va passer par-dessus la tête des magistrats
elle va parler directement à
l'opinion
au pays
et pour ça
elle a envie de faire venir
des grands témoins
des gens comme Simone de Beauvoir
ou Françoise Fabian la comédienne
ou le biologiste Jean Rostan
ou le professeur Paul Miliaise
qui est catholique mais qui défend l'avortement
alors elle décide de soumettre sa stratégie
de défense
à une assemblée générale
du MLF
et du mouvement choisir
et elle tombe sur un os
de faire venir des grands témoins
et donc tu veux faire venir des mecs
faut que des femmes
c'est un procès de femmes
et des femmes anonymes
et surtout pas de mecs
Giselle Alimi est atterrée
et Michel Lucette et René
qui sont là aussi
Lucette se lève à son tour
je comprends pas votre attitude
moi je suis une femme du peuple
et j'ai besoin de voir à la barre
le professeur Mono, le professeur Jacob
le professeur Rostan
me dira moi qu'il sait rien
que je suis pas coupable
on vote à main levée
et le projet de grand témoin
de Giselle Alimi est rejeté
tant pis
ce dit Giselle Alimi, une défense
c'est un tête à tête entre un avocat
et l'accusé
ça ne se gère pas en réunion plénière
qu'elles aillent se faire voir
elle fera ce qu'elle a prévu
le procès s'ouvre le 8 novembre
1972 à 8h du matin
devant le palais de justice
de Bobigny des centaines de manifestants
avec des bandes rôles
la Suisse pour les riches
les Assises pour les pauvres
le procès commence par l'audition
des accusés
la première à être interrogée
et Micheline Bambuc, l'avorteuse
je reconnais
que j'ai accepté d'avorter
Marie-Claire
contre une somme de 1200 francs
je suis veuille vous savez
et j'ai deux enfants en charge
qu'avez-vous fait madame
quand vous êtes allé voir Marie-Claire
pour la première fois
eh bien je l'ai examiné
avec un spéculum
vous l'avez examiné par la bouche
ah non monsieur
pas par la bouche non
ensuite vient le tour de Michel Chevalier
la mère
vous savez
j'ai surtout voulu éviter
à ma fille
la vie de mère célibataire
que j'ai moi-même connu
je ne regrette rien
même si c'est Marie-Claire
qui a pris sa décision
seul
et ensuite, Lucette qui a fait
l'intermédiaire avec René
le numéro
assume
vous savez je suis catholique
pour moi je l'aurais pas fait
mais j'ai changé là-dessus
si c'est fait dans certaines conditions
eh bien je pense que c'est à la femme
de décider
ça n'est pas le problème madame
si
si pour nous c'est le problème
mais Tralimy vient
de surgir de son banc
pour nous c'est même
le problème
nous ne faisons pas mettre le procès d'une loi
si
si personnellement je le ferai
ensuite on passe à René
qui a donné le numéro de la feseuse d'ange
elle assume
elle aussi
ensuite on passe au témoin
et la première
eh bien c'est Marie-Claire
qui raconte à nouveau tout, mais pas le viol
et après
c'est autour des grands témoins
auquel le président va mettre des bâtons dans les roues
lui ce qui l'intéresse ce sont les faits
pas la politique
Michel Rocard, dirigeant du PSU
et le premier
Monsieur que pouvez-vous nous dire
sur les faits eux-mêmes
écoutez je suis indigné
de la législation française actuelle
qui place ses femmes sur le banc des accusés
et je prépare d'ailleurs une proposition de loi
à l'avortement
tenez-vous au fait Monsieur Rocard
je vous en prie
le professeur de médecine Paul Milies
et le grand témoin suivant
à titre personnel je n'ai pratiqué qu'un seul avortement
alors que j'avais 19 ans
et que j'étais jeune externe
eh bien que catholique pratiquant
je l'ai fait
parce que j'ai été touché
par le désarroi
d'une jeune femme en détresse
et ensuite je ne l'ai plus fait moi-même
mais je les ai orientés
ces femmes disons
vous savez nous nous sommes
des bourgeois
nous connaissons les méthodes contraceptives
et ces femmes du peuple
on ne leur a pas enseigné
le docteur Palmer
gynécologue vient ensuite
donner des chiffres
j'estime qu'il y a entre 360 000
et 1 million d'avortements
pratiqués chaque année en France
et que dans 1% de ces cas
les femmes en meurt
le docteur Mandel
neuropsychiatre
et le grand témoin suivant
vous savez une grossesse non désirée
n'est pas sans conséquence pour la femme
mais aussi pour l'enfant
qui n'a pas été voulu
arrive ensuite Jacques Mono
directeur de l'institut Pasteur
est pris Nobel de médecine
le président est agacé
je suppose que c'est encore
un témoin de moralité qui ne connaît rien
à cette affaire
monsieur le président
je vous le dis si j'avais fait la connaissance
de madame Chevalier
je l'aurais aidé à faire avorter sa fille
puis vient l'actrice
Françoise Fabian
je n'ai pas honte de le dire
j'ai moi-même avorté
en 1971
juste avant Marie Claire
et puis l'actrice Delfine Sérig
j'ai avorté
à plusieurs reprises
parce que j'ai estimé
que c'était mon droit
de ne pas avoir d'enfant
et arrive
Simone de Beauvoir
la loi qui interdit l'avortement
a été mise en place pour opprimer
les femmes
l'exaltation de la maternité
n'est qu'une façon de garder
la femme au foyer
et est sous couvert de mission naturelle
de lui faire accomplir
des tâches domestiques non rémunérées
et maintenant
place au réquisitoire
et à l'applédoirie de Métralimi
le procureur de la République
se lève
la culpabilité de ces quatre femmes
ne fait aucun doute
et d'ailleurs elles ont reconnu l'effet
mais bien sûr je reconnais aux accusés
la circonstance atténuante
de pauvreté
c'est un argument
recevable
mais il ne fait pas disparaître le délit
la défense nous dit
la loi est périmée
il n'appartient pas au juge
d'abroger la loi
mais simplement de l'appliquer
il réclame donc
du sursis
pour Michelin Mambu
et une amende
et pour Michel Chevalier
une sanction
sans en dire plus
quand Alus était renait
dont il dit qu'elles sont à l'écart du délit
il fait une sanction de principe
et puis arrive
l'applédoirie de Métralimi
je veux vous dire d'abord
que je m'identifie
totalement
avec ces quatre femmes
elles sont ma famille
voilà 20 ans que je plaide
messieurs
je n'ai jamais plaidé pour la femme
d'un haut commis de l'état
ou d'un médecin célèbre
ou pour la maîtresse de ces mêmes messieurs
jamais
je n'ai plaidé que pour des femmes pauvres
vulnérables
d'argent
sans relation
ou condamné toujours les mêmes
les madames Chevalier
savez-vous messieurs
que
les rédacteurs du côte civil
dans leur préambule
avaient écrit ceci
la femme
est donnée à l'homme pour qu'elle fasse des enfants
elle est donc sa propriété
comme l'arbre à fruits
et celle du jardinier
alors certes le côte civil a changé
mais ce qui n'a pas changé
c'est que nous n'avons pas le droit
de disposer
de nous-mêmes
regardez-vous
et regardez-nous
quatre femmes
comparèent devant
quatre hommes
est-ce que vous accepteriez-vous messieurs
de comparètre devant des tribunaux de femmes
parce que vous auriez
disposé de votre corps
ce jugement messieurs vous le savez
ce jugement de relax
que vous allez prononcer
sera irréversible
messieurs
il vous appartient de dire aujourd'hui
que l'air d'un monde fini
commence
le jugement dans cette affaire
est rendu le 20 de novembre
1972
il n'est pas sévère
mais ça n'est pas non plus
une relaxe générale
René et Lucette sont relaxés
mais Micheline Bambuc est condamnée
à un an de prison avec Sourcy
et Michel Chevalier est condamnée
500 francs d'amende
avec Sourcy
elle fait appel
et la justice oublie de la convoquer
un nouveau procès
elle bénéficie donc de la prescription
et endroit
Michel Chevalier n'a jamais été condamnée
deux ans plus tard
Simone Veil présente le projet de loi
qui légalise l'avortement en France
en conseil des ministres
et la loi veille
est promulguée au journal officiel le 17 janvier
1975
J'ai écrit cette histoire en m'appuyant
sur le livre de Catherine Valentich et Larousse
Bobigny
Le procès de l'avortement
Machine-generated transcript that may contain inaccuracies.
L’histoire de Marie-Claire Chevalier, 17 ans en 1972, qui avorte après un viol et se retrouve devant le tribunal de Bobigny. L’histoire d’un combat, celui de l’avocate Gisèle Halimi, pour la légalisation de l’avortement.