La source: Le populisme 4/4 : 2023 : la pente du populisme
Radio France 9/1/23 - Episode Page - 49m - PDF Transcript
France Inter
Citoyens et citoyennes
camarades
confagnons
travailleuses
travailleurs
françaises
français
Suivez-moi en quête de politique pour compléter notre collection de
ismes et tentés de mieux comprendre les idées et les mots de la politique,
leurs significations et leurs histoires.
Enquête de politique
Thomas Legrand sur France Inter
Populisme dernier épisode
maladie inévitable de la démocratie libérale
Y a-t-il un vaccin ?
On pense parfois que les parasites
ce sont les mendians dans les rues
ou les prostitués sur les trottoirs
Eh bien non, ce qu'il faut vraiment dégager ce sont nos parlementaires
Je suis un gaulois et comme les gaulois
je ne crains rien d'autre que le ciel ne me tombe sur la tête
Je suis candidat pour parler du quotidien des français
pas pour être le représentant d'une petite élite pour qui tout va bien
Le peuple a-t-il toujours raison ? Si c'est pas lui, qui a toujours raison ?
Le vrai mot fourre-tout c'est élite, qui est une élite ?
On n'a pas besoin d'un grand représentant qui parle à un peuple muet
Non, le peuple n'est pas muet et il n'a pas besoin de tribun
Le populisme qui vient, ça semble une vague irrépressible
chaque événement de l'actualité
la perte de prise des gouvernants sur le cours des choses
la crise de la représentation, la chute de la confiance mutuelle
l'espèce de colère ambiante
la polarisation des débats tout semble concourir
à ce que nous n'y coupions pas
nous allons aujourd'hui nous intéresser à la réalité de cette menace
et à ces ressorts
Et pour commencer nous allons retrouver Gérald Bronner
sociologue, professeur à l'université de Paris
cité membre de l'académie des technologies
qu'est-ce qui, dans l'écosystème médiatique
composé aussi des réseaux sociaux envahissants
qu'est-ce qui fait prospérer le populisme
ou au contraire peut le contenir
Les mécanismes argumentatifs du populisme
tiennent à deux choses
premièrement ce que j'ai proposé d'appeler la démagogie cognitive
c'est-à-dire des formes de raisonnement
qui vont dans le sens de nos attentes spontanées
par exemple la figure de Donald Trump
donc personne de doute qu'il est une figure du populisme contemporain
et qui dit par exemple
lors d'un hiver particulièrement rigoureux aux Etats-Unis
il a fait très froid
cette histoire de réchauffement climatique
ce genre de trucs intuitifs comme ça
qui n'ont absolument aucun sens scientifiquement
ou au fond de la météo et le climat
c'est classique
un segment très très bref temporellement
pour en déduire hyperboliquement
une réflexion sur le climat
ce qui est absurde d'un point de vue scientifique
ou prenez le même homme
lorsque il y a eu la pandémie
et que l'hydroxychloroquine
qui a été bien connu en France
s'est proposé comme solution thérapeutique
quasi mort de mémoire
je la sens bien cette molécule
je suis un type intelligent
je suis pas spécialiste mais je la sens bien
c'est un appel direct à l'intuition
à ce type de raisonnement
qu'on retrouve par exemple à l'époque au front national
tant de millions d'émigrés, tant de millions de chômeurs
donc le fait d'établir une corrélation
comme une causalité
c'est-à-dire ces millions de chômeurs
c'est une forme de démagogie cognitive
c'est-à-dire qu'on va aller parler directement
aux intuitions du cerveau
même lorsqu'elles sont trompeuses
on a pas besoin des réseaux sociaux pour ça
ça existait bien avant
l'histoire a montré que ce type
de propositions argumentatives
elle trouve sa demande d'une certaine façon
facilement mais elle la trouve d'autant plus facilement
que le marché de l'information est fluidifié
et qu'il y a une fluidification entre l'offre et la demande
c'est pour ça que c'est leader populiste d'aujourd'hui
que j'appelle plutôt néopopuliste
précisément parce qu'ils se servent des outils numériques
pour communiquer
elle trouve facilement leur demande
et qu'ils utilisent Twitter pour parler
de Donald Trump par exemple
ou Bolsonaro
les chaînes WhatsApp
ou prenez BP Grillo
qui est une des premières figures émergentes
qui est d'abord émergée sur internet
avec le mouvement 5 étoiles
parce que ça permettait de parler directement au peuple
je mets bien entre guillemets
c'est-à-dire une certaine représentation
figée d'un peuple qui serait homogène
alors qu'il n'y a pas de tel peuple qui existe
qui soit homogène à proprement parler
c'est une fiction de l'esprit
et lui parler donc sans intermédiaire
et le deuxième élément
je vous l'ai parlé
de la démagogie cognitive
mais le deuxième élément
c'est les éléments
à la fois contre-intuitifs narrativement
et qui vont nous mener à l'indignation
par exemple
tel fait d'hiver
tel agression
qui aurait été le fait
de quelqu'un qui n'est pas français
par exemple sur le territoire français
va susciter une indignation particulière
prenez les événements d'Anci par exemple
qui ont à juste titre suscité évidemment
une stupeur
mais évidemment un des points qu'on a relevé
c'est que le porteur du couteau
était syrien
était un réfugié
donc évidemment
l'extrême droite s'est emparé de cela
après elle était très désemparée
lorsqu'elle a appris qu'il était chrétien
finalement évidemment
donc ça ce sont des contre-pieds narratifs
mais on sent bien
que
et d'ailleurs
la presse en général
sera un coupable de cela
parce que même des journaux
comme le monde
qui ne traitait pas
les faits d'hiver
il y a encore quelques dizaines d'années
on va dire
se sont mis à donner une place
toute particulière au fait d'hiver
le fait d'hiver précisément
c'est quelque chose
qui est là
qui est une histoire qui est censée être exemplaire
et qui suscite avant tout
une émotion
parce que normalement
elle est singulière
et il faut la prendre comme tel
je ne sais pas
il y a des faits divers
qui peuvent être considérés
comme exemplaires bien sûr
mais en l'occurrence
ils peuvent donner lieu
à des formes de généralisation
surtout quand ils s'emboîtent
à des récits politiques
or
l'indignation
la conflictualité
ce sont des passiontristes
comme on dit
qui vont être mises
particulièrement en avant
sur les réseaux sociaux
et ça c'est très documenté
par la science contemporaine
c'est aussi bien vrai
en France
aux Etats-Unis
en Chine
puisque des collègues chinois
ont montré que sur le Weibo
qu'est le
twitter chinois
si vous voulez
les messages
qui avaient le plus de viralité
c'était les métages
qui étaient assortis
de l'émoticon de colère
et lorsque
Frances Hogan
qui était la donneuse d'alert
de Facebook
qui a fait le tour du monde
c'est vous voulez
que nous avions
dans la commission
que j'ai présidée
auditionnée
sur ce point
eh bien elle nous a révélé
que Facebook
pendant longtemps
a donné une prime
de visibilité
cinq fois supérieure
au message
qui était assorti
de l'émoticon de colère
par rapport au simple like
ce veut dire que
c'est non seulement
notre cerveau
qui a une forme d'appétit
pour les informations
fondées sur la conflictualité
et l'indignation
c'est-à-dire qu'on va aller chercher
une vidéo
qui va s'intituler
tel homme politique
se fait humilier par un tel
ou intellectuel
se fait humilier par un tel
ou c'est la lutte des claches
c'est-à-dire c'est le clash
le clash est permanent
il suffit de l'observer
il y a une indignation
toutes les deux jours
sur twitter collective
j'entends
et donc on le voit bien
chacun qui pratique
les réseaux sociaux
voit bien que ce sont
des réseaux hautement
inflammables
carburant si je puis dire
de tout cela
c'est la conflictualité
l'indignation
on pourrait ajouter
que Elon Musk
a établi
une nouvelle politique
de référencement sur twitter
la petite virgule bleue
qui vous référence
par exemple les journalistes
l'ont perdu
et il faut maintenant l'acheter
et on peut imaginer
on peut remarquer
même que ceux qui l'achètent
ne sont pas les plus moderés
ne sont pas les les plus
pondérateurs
et donc le like
plus le référencement
plus le petit thémoticon
colère
plus la mécanique algorithmique
fait que des messages
des propos les plus agressifs
ou les plus scandaleux
ou qui suscitent plus
l'émotion que la raison
sont plus puissants
oui c'est ça le problème
l'histoire que nous sommes
en train de vivre
c'est celle finalement
de la rencontre
entre le fonctionnement
assez ancestral
de notre cerveau
et l'hypermodernité
du monde de l'information
et les deux en quelque sorte
se donnent la main
pour donner une audience
particulière
à la proposition politique populiste
ce n'est pas les seuls
qui bénéficient
de cette dérégulation
du marché de l'information
mais c'est inconstastablement
eux aussi en politique
qui en bénéficient
des sortes un peu partout
dans le monde
il y a d'autres raisons
il y a la question de la mondialisation
le déclassement
d'un certain nombre
des classes moyennes
il y a toutes sortes de variables
mais ces variables là
en effet elles ouvrent la porte
à certaines propositions
même certaines aventures politiques
et c'est tellement vrai
qu'il y a quelques mois
dans la revue Nature
qui est une revue d'importance
et bien il y a une météanalyse
c'est-à-dire une analyse globale
de toutes les résultats
sur 496 articles
sur ces questions
et qui montent quintestablement
la démocratie
est menacée par les flux numériques
à certains de ces aspects
notamment sur la question
de la polarisation affective
dont bénéficient le populisme
et est-ce qu'on pourrait dire
que les nouveaux leaders populistes
sont les patrons
de ces gars femmes
qui non seulement
sont des patrons économiques
mais aussi maintenant
ont des discours politiques
des discours globaux
des visions de l'humanité
et de la société
des projets pour l'avenir
Oui alors c'est difficile
de leur coller l'étiquette
de néo populiste
dans la mesure où
ils ont un discours politique
incontestablement
ils ont un pouvoir
sans avoir de légitimité politique
ils ont un pouvoir énorme
qui est celui d'éditorialiser
le monde de l'information en partie
ce qui est gigantesque
ils le font plutôt
avec leurs intérêts économiques
ceci dit en passant
qu'avec leur valeur politique
Elon Musk, patron de Twitter
en 2022 traduit par Franck Oliver
Il y a un bon signe
pour savoir si la parole est libre
c'est quand quelqu'un
que vous n'aimez pas
le droit de dire quelque chose
que vous n'aimez pas
si tel est le cas
nous avons la liberté d'expression
c'est vrai c'est sacrément ennuyeux
quand quelqu'un que vous n'aimez pas
dit quelque chose que vous n'aimez pas
c'est pourtant le signe le plus sûr
du fonctionnement sain
la liberté d'expression
Gérald Brunner
en réalité
l'intérêt économique d'une gaffe
c'est que vous restiez
le plus longtemps possible
sur le réseau social
ou sur la plateforme vidéo
et c'est pour ça
que les passions tristes
elles sont mises en avant
parce que précisément
ça amsonne notre attention
et leur business model
eux c'est de convertir
notre disponibilité mentale
en capital économique
par le biais des publicités
tout simplement
alors ils ont un discours politique
Elon Musk par exemple
peuvent avoir un discours très
futuriste
progressiste
on va aller sur Mars etc
tout ça c'est un discours
d'une certaine façon politique
je ne dirais pas
qu'il est caractérisé
par le néo populisme
alors il y a quand même
un élément qu'on pourrait
décrire comme étant
contre populiste
avec les réseaux sociaux
c'est que les populistes
parlent au nom du peuple
souvent ils parlent d'ailleurs
de majorités silencieuses
c'est bien pratique
parce que comme ça
ils peuvent parler
à la place de cette majorité
silencieuse
qui étant silencieuse
ne dit rien
et donc ils réinterprètent
et ils parlent
la vox populie
le peuple parle
sur les réseaux sociaux
et le peuple dit des choses
différentes
et on s'aperçoit
avec les réseaux sociaux
que finalement
il n'y a pas
une unité
du peuple
en tant que peuple
alors est-ce que ça
ça n'irait pas
contre
la progression
du populisme
alors d'abord certainement
vous avez raison
il faut se méfier
de ce qu'on appelle
le biais d'intentionnalité
c'est à dire de prendre
un groupe
et croire que ce groupe
est homogène
il veut quelque chose
par exemple lors des émeutes
en France
on surgit
au début du mois de juillet
on essayait d'analyser
les émeutiers
alors qu'ils avaient probablement
des motivations
très différentes
dans ce groupe
voilà
donc il faut faire attention
à ce qu'on appelle
l'hypostase
donc d'un groupe
c'était le premier élément
du populisme
l'hypostase du peuple
et le plus grand danger
à mon avis
et qui est aussi
très bien documenté
c'est surtout
qu'on prenne
des minorités
pour la majorité
parce qu'on sait
qu'il y a
sur les réseaux sociaux
et dans le monde numérique
il y a des gens qui vont parler
beaucoup
plus souvent que les autres
c'est une drôle de démocratie
parce que certains votent
1000 fois tant des que d'autres
ne votent jamais
et on n'a pas pu établir
que 1% des comptes
sur les réseaux sociaux
produisaient 33%
de l'information disponible
ce qui fait qu'on peut prendre
la visibilité
de certains arguments
pour de la représentativité
et donc lui accorder
une forme de légitimité politique
ainsi par exemple
les anti-vaccins
des vrais anti-vaccins
peuvent pas grand chose
en réalité
ils sont peu nombreux
je ne parle pas de la méfiance
vaccinale
qui est trop importante
très peu nombreux
et on les retrouve justement
beaucoup à l'extrême droite
pas seulement mais beaucoup
à l'extrême droite
et ils trouvent qu'ils pèsent
pas grand chose
mais ils parlent beaucoup
donc si on considérait
que les traces numériques
qu'ils laissent
sont représentatives
de l'opinion de la population
française
on sure estimerait
beaucoup leur nombre
et c'est d'ailleurs
pour ça que je déplore
que les journalistes
soient trop souvent
sur Twitter
parce que je vois
excusez moi de faire
une petite attaque
à votre profession
qui est par ailleurs
essentielle pour la démocratie
justement c'est pour ça
qu'ils sont imprégnés
de ce qui se passe sur Twitter
et donc souvent
elles surestiment
des points de vue
qui sont très minoritaires
et radicaux
en leur conférant
une forme de représentativité
ça c'est une forme
étrange de populisme
justement de prendre
des minorités
pour la majorité
donc pour l'expression
du peuple
la colère sourde
tous ces Français
qui ont compris
que le système
ne marchait plus
eh bien ce qu'attend
le peuple
c'est pas de reprendre
les mêmes
ce qu'attend
le peuple
c'est le renouvellement
je suis candidat
quotidien des Français
pas pour être le représentant
d'une petite élite
pour qui tout va bien
j'ai vu
de l'intérieur
la vacuité
de notre système politique
le système
c'est précisément
tout ce qui est autour
du parti
pardon
M. Macron
et M. Main
que l'a dit d'ailleurs
dans une forme
d'élan
et d'aveu
c'est le meilleur
candidat du système
c'est le candidat
construit
par le système
si je me suis battu
pour bousculer
le système politique
en place
les habitudes
les hypocrisies
qu'il est touchant
ce nouveau cartel
des noms
écoutez-les
on appelé au peuple
quel scandale
comment disent-ils
quel populisme
enquête de politique
Thomas Legrand
sur France Inter
dernier épisode
de notre série
disponible en podcast
sur le populisme
il y a un élément
un ingrédient
du populisme
dont on n'a pas encore parlé
c'est l'antissystème
une rhétorique
utilisée par
à peu près tout le monde
et qui ne bénéficie
au bout du compte
qu'à l'extrême droite
pour évoquer
la tentation facile
mais aussi pour évoquer
les raisons de fonds
pour lesquelles
l'argumentaire antissystème
fonctionne
nous retrouvons Marciale Foucault
chercheur
au Cévi-Poff
le vote antissystème
est un phénomène
d'abord récent
au cours des 20 dernières années
on a pu observer
en Europe
l'émergence
de familles politiques
rejetant
à la fois le fonctionnement
d'une démocratie
représentative
au nom de 2 principes
le premier
ces institutions
ne garantissent pas
l'émergence
de formation politique
et donc d'idées politiques
autres que celles
qui ont façonné
les institutions
et puis
deuxième principe
de rejet
l'idée selon laquelle
le peuple
ne peut pas être
pleinement représenté
dans des institutions
qui ont été
élaborées
pour préserver
les intérêts
d'une classe dominante
et donc
l'émergence
d'un vote antissystème
va s'appuyer
sur des relais
des mouvements politiques
qui vont convaincre
et séduire
une partie des électeurs
qu'aujourd'hui
leur voix
ne peut pas être
représentée
pleinement entendue
dans des institutions
telles qu'elles existent
et donc ce vote antissystème
c'est un vote
antissystème politique
et puis
là il y a une grande variété
de situations
dans plusieurs pays
où l'antissystème
c'est le système économique
on pourrait rajouter
le système culturel
de fil en aiguille
on voit bien que ce vote
antissystème
a agrégé
l'ensemble
d'une société
qui est souvent
schématisée entre
les possédants
et les non-possédants
mais quand vous parlez
d'antissystème
vous parlez pas
d'idéologie
c'est-à-dire que
les deux grandes forces
qui ont créé
ces institutions
où la social-démocratie
et la démocratie chrétienne
ne sont trop droits
elles sont trop gauches
pour parler schématiquement
c'est pas
ces forces-là
qui sont contestées
dans leur
positionnement politique
ou leur idéologie
c'est
ce qu'elles ont fait
de l'Etat
ce qu'elles ont fait du pouvoir
Oui parce que
le vote antissystème
c'est une condamnation
d'une forme de convergence
des idées politiques
de ces deux grandes familles
politiques que vous avez citées
c'est-à-dire
la social-démocratie
et effectivement la démocratie chrétienne
c'est pas l'idée simplement
de dire
le vote antissystème
c'est un rejet
de la social-démocratie
avec cette idée
de l'égalité
d'une recherche de compromis
sur du progrès social
et puis pour la démocratie chrétienne
assurer un certain nombre de valeurs
autour de l'autorité
de la stabilité politique
non c'est la condamnation
que quand ces deux familles politiques
et partout en Europe
ont exercé le pouvoir
les différences
sont devenues trop minces
il y a une condamnation
de ce qu'on appelle
cette oligarchie politique
c'est que négatif
c'est antissystème
et pourquoi ?
parce que dans votre description
on ne sent pas poindre
ou l'extrême droite
ou l'extrême gauche
du côté de l'offre
des leaders
des mouvements politiques
qui sont nés
et qui ont prospéré
sur l'antissystème
c'est vraiment une condamnation
d'un pouvoir accaparé
par non pas des idéologies
mais par un système politique
qui s'entretient
un esprit de système
alors si je prends
un exemple très concret
dans le cas de l'Allemagne
l'alternance du pouvoir
entre la gauche
le SPD
et puis la droite
la CDU
on voit bien que dans un système
parlementaire allemand
cette question
elle est consubstantielle
du régime
et du système électoral
du régime politique
c'est-à-dire
on essaie de construire
des coalitions
dans des pays
où on n'a pas cette tradition
ou cette culture politique
comme la France
on agite
où on active un autre ressort
disant
droite et gauche
et souvenons-nous
des discours
dans les années 90
début des années 2000
quand l'expression UMPS
c'est bien installé
cette idée
qu'il n'y a pas de différence entre...
avec la bande des 4
de Jean-Marie Le Pen
PS, PC, UDFRPR
exactement
on vient de voir
que la défiance
est un des moteurs
du potentiel système
et donc nourrit le populisme
dans votre livre
il y a 2 autres moteurs
la colère et la peur
alors c'est une avancée
qui renvoie
à un certain nombre
de controverses et de polémiques
au cours des années
en fait 2010-2020
lorsque un certain nombre
de leaders populistes
vont accéder au pouvoir
que ce soit
en Italie
avec le mouvement 5 étoiles
que ce soit Donald Trump
et également
UKIP
à travers le référendum
Brexit
en juin 2016
on dit ils ont joué
avec la peur
ils ont joué sur nos peurs
on a une vieille tradition
sociologie électorale
qui consiste à dire
on peut objectiver
la condition des individus
votre sexe, votre âge
votre niveau d'éducation
votre condition sociale
votre lieu de résidence
et bon en malin
on sera
dans quelle direction
votre vote se portera
et on a écarté
un ensemble de dimensions
subjectives
comme la confiance qu'on vient
d'évoquer
la satisfaction de la vie
moi j'ai décidé
d'aller un peu plus loin
sur ces éléments
plus subjectifs
et donc
autour des affectes
des passions
et voir comment
l'électeur
était traversé
par des émotions
liées à des événements politiques
et donc
c'est important de le situer
parce que
il y a quand même
parfois des oppositions
on dit Oulala
mais le vote
c'est une affaire
suffisamment sérieuse
les émotions
ne viennent pas
perturber
l'électeur
au moment où il se rend
dans l'isoloir
je pense qu'on a tort
de raisonner comme ça
et c'est pas dire
qu'il faut
mettre de côté tout ce
que l'on sait
Est-ce qu'on a tort
parce que les idéologies
ont moins d'importance
les grands schémas
les grandes grilles
de lecture
ont moins d'importance
depuis la disparition
des blocs
du communisme
et
des grandes explications
globales
et donc nos avis politiques
serait plus
comme un petit bouchon
sur l'eau
facteur de l'actualité
Moi j'arrive à la conclusion
qu'il ne faut pas
opposer
la subjectivité
l'objectivité
dans le choix d'un vote
au contraire
c'est parce qu'on a
peut-être pas suffisamment pris
au sérieux
le poids des
des affectes
et des passions
que nous avions
des grilles
de lecture
qui ne devenaient
plus opérantes
pour comprendre des phénomènes
comme
l'élection de Trump
le Brexit
sur les élections
des manuels Macron
en 2017
En revanche
quand on combine
ces deux dimensions
on découvre
des choses
très intéressantes
on a entendu
après l'élection
de Trump
des observateurs
nous dire
de façon
assez certaine
presque benoîtement
que
c'est très simple
de comprendre
l'élection de Trump
ce sont tous ces Américains
qui avaient peur
des menaces
qui pesaient
sur la société
dans son ensemble
mais aussi
sur leur propre vie
en fait
nos travaux montrent que
la peur
n'explique
en rien
le vote populiste
là vous cassez
une évidence pour beaucoup
disons que
ça implique
de comprendre
qu'est-ce qu'on entend par peur
et nous on oppose
la peur à la colère
et vous prenez
un exemple assez explicit
2017
l'élection
après une série d'attentats
c'est pas la peur
d'être visé
contre des attentats
qui fait monter Marine Le Pen
c'est plutôt la colère
c'est ça
absolument
il y a deux mécanismes psychologiques
qui sont à l'oeuvre
pour distinguer la peur
et la colère
c'est très simple
quand vous êtes traversé
de peur
ou d'anxiété
vous retrouvez
dans une situation
où un choc vient de se produire
il faut qu'il y ait un choc
ça produit
un renversement
de la compréhension
du monde
qui nous entoure
cela vous conduit
à deux choses très simples
premièrement
vous voulez comprendre
et pour comprendre
vous vous mettez
dans une situation
où vous êtes prêts
à réviser
vos propres croyances
sur la compréhension
vous cherchez des ressources
pour éviter que
ce qui s'est produit
d'improbable
ne se reproduise plus
donc la peur
elle produit un moment
où les gens ont besoin
de s'informer
vont discuter
donc on produit
de la confiance sociale
les éléments sont liés
et vous allez essayer
de trouver
l'offre politique
qui vous donne
des garanties
des assurances
pour qu'un tel choc
ne se reproduise pas
après les attentats
de 2015
on avait été frappés
de voir
le nombre de ventes
d'ouvrages
sur le jihadisme
a totalement explosé
en France
une sorte de s'informer
de façon rationnelle
besoin de comprendre
besoin de comprendre
quand vous êtes traversé
par la colère
le mécanisme psychologique
est radicalement différent
vous n'êtes plus
dans cet état d'esprit
de vouloir comprendre
vous estimez que vous avez
déjà investi
beaucoup trop de ressources
par le passé
pour comprendre
et à chaque fois
vous n'avez pas eu
une réponse adaptée
et donc
l'impossible s'est produit
donc quand vous êtes traversé
par la colère
vous êtes plus dans un mécanisme
ou vous êtes prêts
à réviser vos propres croyances
donc vous êtes plus
perméables
à des réponses très simples
vous voulez une réponse
eh j'ai dire
immédiate et la plus radicale
la réponse d'un peuple en colère
c'est de choisir
la voie la plus polarisante
l'idée que les populistes
veulent renverser la table
des citoyens en colère
veulent effectivement
que la table soit renversée
et donc
on peut pas comprendre
le vote Trump
le vote Brexit
ou le vote Marine Le Pen
simplement disant
ce sont des électeurs
qui ont peur
des menaces à venir
non c'est pas ça
et d'ailleurs
ce que l'on montre
c'est que la peur
elle produit plutôt
du statu quo
elle produit
même je ne sais pas
ce que du conservatisme
Enquête de politique
sur France Inter
démocratique
Tout est si différent maintenant
Mais qui peut encore rêver tout court
quand tout est flippant
aux alentours
Tout est si différent maintenant
en attendant
bien patientement
la fin du monde
quelle liberté d'être condamné
après ces années de culpabilité
agissons enfin sans conséquence
salut patron
on se verra en vacances
Tout est si différent maintenant
en attendant
bien patientement
la fin du monde
Tout est si différent maintenant
en attendant
bien patientement
la fin du monde
la fin de nous
C'est nous les nouveaux dinosaures
On finira au musée dans un décor
Et sur la pancarte en gros caractère
Hommes en terrasse vivant un verre
Et qui attend
bien patientement
la fin de son air
2, 3, 4
Nouveau dinosaure par sévrin
Et pour cette série d'émissions
merci à notre stagiaire Lila de Saint
à la technique aujourd'hui Alexandre Chénet
Comment éviter la vague populiste
ou il est question de peur et de colère
La question est de faire en sorte
que les citoyens oublions le peuple
pardonne-moi cette expression
les citoyens n'ont plus besoin
de cette forme intermédiaire de représentation
ils ont la possibilité
en termes de rationalité
et non pas d'émotion
comme on veut sans cesse le faire
le dire de nos jours
en justifiant les émotions
chez Ruffin, chez Mélenchon
partout c'est l'émotion qui prime
les citoyens français
sont doués de rationalité
Revenons un peu à Abermas
Revenons à la grande tradition
rationaliste du XIXe siècle
Revenons à Bentham
Revenons à Rousseau
Revenons à Anna Harène
on a besoin de rationalité
et de voir en sorte que les citoyens
quelles que soient leur culture
musulmanes, juives, catholiques
n'importe laquelle sont doués
tous de rationalité
sont tous appelés à une culture
et à comprendre et à juger
et ils n'ont pas besoin de nos jours
ils ont moins besoin de nos jours
de formes intermédiaires
de grands représentants aussi extraordinaires
que le soit-il comme Victor Hugo
ou à d'autres niveaux peut-être
comme Monsieur Mélenchon
ou Monsieur Trump
non, on porte parole
plus de porte parole
plus de dictateurs, plus de leaders
des formes d'entrée
dans la vie collective
à travers une citoyenneté active
à travers une rationalité
qui repousse l'émotion
bien sûr qu'il y a de l'émotion
mais cette émotion elle doit être canalisée
au maximum
en aidant la prise de parole
La prise de parole elle est là
avec internet, les réseaux sociaux
on peut pas dire que cette prise de parole
multiple avantage la rationalité
si
oublions là encore les réseaux sociaux
revenons, pardonnez-moi
aux partis politiques, aux syndicats
aux groupes d'association
à la vie associative locale
extrêmement puissante
aux clubs de joueurs de boules
aux clubs de pétanques
aux clubs philatélistes
à travers lesquels passent des formes de sociabilité
des formes de rencontres
et des formations d'une pensée commune
qui est porteuse de valeur
et qui conduit à des formes d'engagement
politiques elles aussi
c'est là au fond que se trouve
la source de la sociabilité, de l'engagement
et on n'a pas besoin
de ces formes émotives et d'un grand représentant
qui parle à un peuple muet
non le peuple n'est pas muet
et il n'a pas besoin de tribun
Ce qui me paraît
finalement peut être aujourd'hui assez
rassurant
Mais Simon Naoune, historienne professeur
au département de philosophie
de l'école normale supérieure Ulm
C'est que l'opinion publique
s'est éduquée politiquement
et je crois qu'il serait
assez difficile par exemple
en France aujourd'hui
de faire croire à l'ensemble de l'opinion publique
qu'elle représente
un corps unique
Je crois que nos citoyens
ont bien conscience
de former des groupes
d'intérêt qui sont divergents
dont l'histoire est divergente
et finalement c'est peut-être ça
qui pourrait philosophiquement
constituer un rempart
contre l'arrivée du populisme
Quand vous dites que le populisme
peut être le résultat
d'une crise de la médiation
d'une crise de la représentation
on est bien obligé de constater
qu'il y a cette crise, il faut bien la traiter
et qu'il y a un moment où peut-être
les médiateurs, la presse est souvent critiquée
les élus sont souvent critiqués
peut-être que les médiateurs, les raffineurs
de l'opinion publique, des colères publiques
ne sont plus à la hauteur
quelquefois ils peuvent vivre pour eux-mêmes
ne plus être à l'écoute
et ne plus représenter
la base
est-ce qu'il ne faut pas quelquefois
un moment populisme ?
Non je ne crois pas, il est très difficile
de revenir en arrière
une fois qu'on a expérimenté le populisme
parce que comme je vous l'ai dit
l'un des caractères du populisme
c'est de changer de l'intérieur les institutions
et on le voit très bien aujourd'hui
dans des régimes comme la Hongrie
ou la Pologne
le Fidesse en Hongrie
et droit et justice en Pologne
qui sont des régimes qui sont arrivées
au pouvoir de façon légale
électorale
et qui une fois au pouvoir
ont pratiqué
ce qu'on a vu apparaître
depuis une dizaine d'années dans les régimes populistes
qui est ce que les constitutionnalistes
appellent un légalisme discriminant
c'est-à-dire
qu'on laisse l'apparence de la démocratie
et en même temps
promulgue des lois
qui sont discriminatoires
contre certaines catégories
de population
et donc une fois que ces lois sont votées
il est très difficile de revenir en arrière
et on mine
la démocratie
on mine tous les outils
tous les outils de contre-pouvoir
et de l'imitation du pouvoir
bien sûr on voit ça à travers les attaques
qui sont portées contre les cours constitutionnels
par exemple
contre les médias
ou contre la mémoire, contre l'histoire
je renvoie nos auditeurs
à un épisode d'enquête de politique
que nous avons consacré à l'illibéralisme
ce terme qui recouvre un peu ce que vous venez de dire
Perrine Simon-Naoun
vous avez une recommandation
vous la formulez dans votre dernier livre
« Sagesse du politique le devenir des démocraties »
aux éditions de l'Observatoire
vous avez une solution ?
Non je n'ai pas vraiment de solution
mais oui mon idée
ce serait qu'aujourd'hui
on le voit bien en France
par exemple
il ne suffit pas de dire qu'on va réformer les institutions
ou il ne suffit pas de dire
qu'on va en appeler
aux valeurs, aux principes fondamentaux
des démocraties
en réalité ce qu'il faut faire comprendre
je crois à nos concitoyens
c'est qu'il faudrait que nous changions de regard
envers les démocraties
finalement
nous ne savons pas très bien ce que c'est que le populisme
mais nous ne savons pas très bien ce que c'est que la démocratie
notamment nous avons habillé
la démocratie d'habit beaucoup trop grand pour elle
depuis 1945
en la confondant avec la croissance
avec la mondialisation
la mondialisation
avait porté une ambition supérieure
qui était finalement de
former comme ça
une humanité qui serait cultivée
qui recevrait
finalement les fruits de ce à quoi elle a droit
ce qui est très différent
de ce que peuvent penser Montesquieu ou Tocqueville
c'est à dire que nous
nous fonctionnons en pensant
que et pour des raisons historiques
parce que l'état providence
est né pendant la seconde guerre mondiale
nous pensons que nous avons droit
à un certain nombre de choses
or la démocratie c'est pas ça
je veux dire la démocratie ça n'est pas
l'égalité économique qui ne sera jamais atteinte
ça n'est pas le bien-être
économique ça n'est plus la croissance
nous sommes en période de contrainte budgétaire
donc l'idée c'est de changer le regard
sur la démocratie
et de savoir ce que nous pouvons lui demander
et de constater que dans notre quotidien
vous et moi
nous faisons chaque jour
des expériences démocratiques
juste avant que vous nous parliez des expériences
démocratiques parce que c'est intéressant
quand même je voudrais revenir sur
cette idée des droits et de la démocratie
par exemple la démocratie
sociale issue
du CNR
en France mais dans beaucoup d'autres pays
de l'état providence qui a formé
nos sociétés depuis 1945
il faut oublier cet aspect là
il faut revenir à une conception
de la démocratie beaucoup moins importante
beaucoup moins ambitieuse
il faut revenir à une définition de la démocratie
qui correspond à un état historique
et il est évident que la période
que nous vivons aujourd'hui n'est plus
celle de 1945
il faut surtout concevoir la démocratie
comme un régime politique
qui est un régime de conflit
et qui n'est pas un régime de consensus
mais de compromis
de compromis bien sûr
et donc ce sont sur ces méthodes
d'accord finalement collectifs
qui dépassent les intérêts individuels
sur lesquels il faut travailler
d'une certaine façon ces accords
ne sont jamais acquis
ils doivent être rediscutés
en permanence avec
ces fondements de valeur
qui sont des valeurs d'égalité
de fraternité, de liberté
il s'agit absolument pas
évidemment de remettre ceci
en cause mais de ne pas demander
à la démocratie plus qu'elle ne peut donner
parce qu'à force de faire ça
finalement on la délégitime
on arrive à des régimes populistes
parce que 38% de nos concitoyens
pensaient il y a deux ans
que finalement ce serait très bien d'avoir
un chef d'État autoritaire
et je pense qu'un certain nombre d'entre eux
vont se dire en 2027 pourquoi pas tenter
l'aventure
alors cet autre regard vous l'avez dit vous-même
c'était là c'est un regard beaucoup plus modeste
c'est vrai
c'est l'idée que nous faisons
nous donc
des expériences démocratiques à notre échelle
une échelle modeste
une échelle individuelle
au nom de nos vies
en fait ce que nous faisons
dans nos vies apparaît d'une certaine façon
opposée à ce que nous réclamons
de nos régimes politiques
démocratiques
par exemple dans nos vies nous aimons
prendre notre temps
réfléchir avant de prendre des décisions
discuter, échanger avec les autres
voir même
bénéficier du temps du repentir
si nous avons envie de changer de cap
donc tous les jours
de nos échanges avec vos proches
avec votre famille
dans le milieu professionnel
vous faites des expériences démocratiques
vous préférez le débat à la violence
je dirais que c'est un petit peu
à cette échelle modeste
que nous devrions retrouver
l'amour de la démocratie
en comprenant que
ceux que les populistes
que ce soit de droite comme de gauche
ce dont ils accusent aujourd'hui
les démocraties ce qu'ils dénoncent
notamment on l'a vu pendant
la pandémie de Covid
ou lorsqu'ils demandent
voilà une transparence absolue
ou... bah non
vous préférez quand même avoir
une vie privée peut-être que
vous préférez garder certaines choses
secrètes et ne pas les exposer
devant la place publique donc si vous voulez
ce serait avoir une sorte
de vécu quotidien
de la démocratie que nous transposerions
ensuite à un niveau
plus général ou plus collectif
non seulement je préfère avoir une vie privée
non seulement je préfère
pouvoir t'attonner, hésiter
non seulement je préfère pouvoir
même changer d'avis
mais je peux faire tout ça parce que je suis
en démocratie
donc ce que vous nous dites
c'est qu'il faudrait peut-être qu'on arrête
de demander à la démocratie
ce qu'on ne voudrait pas pour nous
et surtout quand on demande
tout ce qu'on demande ou ce que les populistes demandent
de la démocratie c'est en fait de se
dénaturer, de dénaturer la démocratie
Absolument, on demande à la démocratie
d'être un régime d'exception, regardez
ce qui s'est passé pendant le Covid
moi j'étais extrêmement choquée
d'entendre des gens m'expliquer que la Chine
avait beaucoup mieux su répondre
au problème de la pandémie que nous
la seule chose qu'ils ont oublié c'est que la Chine
a tué des centaines de milliers de gens
donc effectivement peut-être que
les démocraties ont failli sur un certain plan
elles n'ont pas été assez efficaces
il y aura des procédures à revoir
il faudra surtout expliquer je pense
mieux les choses
en même temps la démocratie a besoin
de gouvernants qui fassent
des choix, qui prennent des décisions
quitte à ensuite
et ça c'est ce sur quoi nous
devons travailler et je pense que c'est
le message que nos gouvernements
doivent entendre à venir en rendre
compte devant les populations
en expliquant les choses
Les démocraties ont fait le choix
de la vie mais elles ont
édicté des interdits, elles ont
obligé à la vaccination
alors est-ce que elles ont agi
démocratiquement, est-ce qu'elles ont
produit un glissement autoritaire peut-être
nécessaire et temporaire ?
Vous pointez du doigt
une difficulté de la démocratie
la démocratie est confrontée
à des défis et l'un des plus grands défis
et nous envoyons l'expression
à travers la pandémie
de 2020 c'est précisément
la difficulté de la démocratie
à répondre à l'urgence
ce sont des mécanismes, des procédures
sur lesquels il faut réfléchir
pour savoir
comment informer en amant les populations
comment expliquer en aval
maintenant ce sont des choses
sur lesquelles on avait réfléchi
dès l'épidémie du H1N1
dans les années 2010
et il y a toujours un moment où il faut
décider et le choix est compliqué
face à une pandémie par exemple
les questions qu'on s'était posées c'était de savoir
s'il fallait vacciner tout le monde
ou s'il fallait
vacciner d'abord les médecins
qui seraient eux en charge
ensuite de sauver une partie de la population
c'est un choix politique
et je pense qu'il faut
réfléchir aujourd'hui
à la manière dont on peut
exposer ce type de problématique
à des populations
qui n'en sont peut-être pas conscientes
ou peut-être pas informées
d'abord
comment éviter le populisme
peut-être d'abord
en évitant de le stigmatiser
montrer du doigt le populisme
serait comme reprocher
à la douleur de nous prévenir
de l'infection
c'est notre démocratie qui serait malade
notre démocratie représentative
pour la soigner pourquoi ne pas
prendre exemple sur la suisse
et sa démocratie directe
la démocratie directe le plus possible
propose Antoine Chollet
et vous allez voir que sa critique
de la critique du populisme a de quoi bouleverser
les quelques certitudes acquises
à l'écoute de ces quatre émissions
Antoine Chollet chercheur en pensée politique
c'est un beau titre, à l'université de Lausanne
Lausanne, c'est là que je suis allé
à sa rencontre
Antoine Chollet on est ici
en Suisse, à Lausanne
dans le pays du populisme
alors c'est étonnant parce que pour nous
le populisme c'est le tumulte, l'extrémisme
le bruit, la fureur
pour prendre des termes de Jean-Luc Mélenchon
et non, on est
dans le pays du calme, de la pondération
dans le pays du populisme vraiment
Antoine Chollet
ça dépend de la définition que l'on donne
du populisme évidemment, si c'est la définition classique
la définition habituelle
aujourd'hui c'est-à-dire
des mouvements d'extrême droite
en protestataire
la Suisse est une forme de laboratoire du populisme
début des années 90
comme autour du dossier européen
et si on nous donne la définition historique
la définition issue notamment
de l'histoire américaine du 19ème siècle
la Suisse est aussi une forme d'origine du populisme
puisque les populistes américains
se sont beaucoup inspirés des procédures
notamment des procédures de démocratie directe
que l'on connaît en Suisse, le référendum,
l'initiative avec l'idée
qu'il s'agit de démocratiser la démocratie
c'est une définition qui diffère
effectivement de la définition classique française
parce qu'il n'y a pas l'homme providentiel
c'est un populisme
assez fal, sans tête, dites-vous
et c'est ce qui le distingue évidemment
de ce que l'on qualifie la plupart du temps
de populisme aujourd'hui puisque généralement
on a en effet un leader charismatique
qui s'agisse de Chavez
qui s'agisse de Donald Trump
ou de Nigel Farage
vu de Suisse, nous sommes donc à Lausanne
vous défendez le modèle suisse
mais vous critiquez
l'acception française du mot populiste
et pas simplement l'acception
mais la logique politique
qui sous-tend cette critique
et cette utilisation du mot politique
le titre de votre livre est d'ailleurs
explicite l'antipopulisme
ou la nouvelle haine de la démocratie
c'est une transformation du terme
qui intervient depuis
30 ans à peu près
dans laquelle la science politique française
a une certaine responsabilité
la seule en cause, on a la même transformation
en Angleterre ou en Allemagne
et où sous prétexte
de lutter contre ces mouvements
on a fait comme si en réalité
toutes les oppositions au système se valaient
et autre point vraiment très important
à mon sens c'est que
l'idée de qualifier des mouvements d'extrême droite
de pro-populaire
parce que c'est ce qu'il y a en arrière-plan
dans le terme de populisme
donc de faire comme si l'extrême droite parlait
effectivement du peuple, au peuple
on va leur faire un trop beau cadeau
puisque on sait que dans l'histoire politique européenne
en tout cas l'extrême droite n'a jamais été
pour les classes populaires
chaque fois que l'extrême droite est arrivé au pouvoir
les classes populaires se sont pris des législations
extrêmement violentes dans la figure
que ce soit en Italie, en Allemagne
ou même en Hongrie aujourd'hui
donc l'idée que l'extrême droite
serait un mouvement populaire
est un contre-sens politique total
derrière ce terme de populisme c'est comme si on prenait
au mot les leaders d'extrême droite
prenons leurs discours, écoutons ce qu'ils ont à dire
et en réalité nous donnerait la vérité
le 4 Trump est absolument
paradigmatique de ce point de vue-là
puisqu'il a prétendu au moment de son inauguration
qu'il rendait le pouvoir au peuple
on a vu en 4 ans ce qui s'est véritablement passé
alors j'aimerais vous commentier
cette petite phrase de vous-même que j'aime bien
la tautologie
et le schéma logique fondamental
des études sur le populisme
c'est très frappant quand on livre
sur le populisme parce qu'on commence avec une liste
voilà on parle de Trump
Mélanie, Orban, Mélenchon
Tsipras etc
et puis ensuite on fabrique
une définition et miraculeusement
on trouve que la définition recouvre tous ces cas
donc c'est véritablement un beau cas
de tautologie en oubliant de choses
c'est que premièrement la liste n'a pas
composé de briquettes brocks c'est-à-dire
qu'on dit les personnes qui sont qualifiées
de populistes aujourd'hui sont celles-ci
quand on forme une définition
c'est pas comme ça qu'on procède
un certain nombre de catégories
pour construire son concept
et puis le deuxième problème c'est que
les définitions du populisme qui sont trouvées
souvent pourraient désigner d'autres mouvements également
y compris des partis tout à fait installés
et donc en fait comme si la définition correspondait bien
aux cas qui ont été
identifiés au départ
alors qu'en réalité elle est à la fois trop large et trop étroite
Oui parce que vous dites par exemple
quand on parle de mensonge, de démagogie
de négation du clivage gauche-droite
de culte du chef, de l'opposition
de peuple élite, c'est finalement des notions
qui sont assez partagées dans la classe politique
La négation du clivage gauche-droite
c'est quelque chose qu'on peut trouver
chez Macron, c'est quelque chose qu'on peut trouver
chez quantité de leader aujourd'hui
de la même manière que
des méthodes démagogiques de campagne
enfin c'est un peu le béaba de la politique représentative
disons. Est-ce qu'il n'y a pas quand même
une constante l'opposition
peuple élite ? Disons, l'opposition entre
peuple élite vous pouvez lire
tous les grands textes de l'histoire de la pensée politique
qui parlent de démocratie, ça peut être
Machiavel, ça peut être Thomas Payne, ça peut être
quantité de Rousseau ou d'autres
Vous allez trouver ce type de position
donc l'idée que ce serait, ça qualifierait
un ensemble de personnes
de positions politiques qui devraient être absolument
éliminés, me semble un peu exagéré disons
ensuite en effet tout dépense que l'on met
derrière les termes de peuple élite
mais on le voit aussi chez quantité d'acteurs
ou d'actrices politiques, moi ce qui m'avait beaucoup frappé
c'est un discours de Natalia Artaud
donc la candidate l'hut-ouvrière en France
je crois que c'était pendant la campagne 2017
où elle avait tenu des propos
qu'on qualifierait si l'on prend les définitions
du populisme, c'était vraiment l'archétype
du populisme et la grande différence
à mon sens c'est que Natalia Artaud ne fait pas
20 ou 25% des voix mais elle en fait
un nombre totalement résiduel
et absolument pas menaçant donc
ce qu'il faut ajouter c'est que généralement
les mouvements qui sont qualifiés de populistes
encore une fois à mon sens
faussement, sont des
mouvements qui menacent les partis en place
sur leur terrain même, c'est-à-dire le terrain des élections
et on l'a vu avec Trump évidemment
on l'a vu avec les partisans
du Brexit en Grande-Bretagne
on le voit avec Marine Le Pen aujourd'hui
en France, on le voit avec Mélanie
et avec d'autres mouvements, c'est-à-dire
ce sont des mouvements politiques qui arrivent
à se battre avec succès sur le terrain des élections
ce qui n'est pas le cas de petits partis
comme l'hut-ouvrière ou des partis qui
en réalité ont un discours qui n'est pas
très différent de discours que l'on peut
trouver dans la bouche de
des partis et prétendus populistes
Le populisme, nous n'avons certainement
pas fait le tour de la question certes
mais il est des sujets qui se complexifient
à mesure qu'on les disseque
c'est souvent le cas en politique, c'est pour ça
que c'est passionnant et toujours vivant
rendez-vous samedi prochain pour un autre
ISM et d'ici là n'oubliez pas
si vous ne vous intéressez pas la politique
c'est la politique qui s'intéressera à vous
...
...
...
...
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durée :00:48:53 - En quête de politique - par : Thomas Legrand - Ce populisme qui vient, est-il une maladie inévitable de la démocratie libérale comme un virus, une entité politique ayant absolument besoin de parasiter son hôte, en l'occurrence la démocratie, pour survivre ? "En quête de politique" tel un virologue pose la question : y a t-il un vaccin ? - invités : Martial Foucault, Perrine SIMON NAHUM, Antoine Chollet, Pierre Birnbaum, Gérald Bronner - Martial Foucault : Professeur de sciences politiques et directeur du Cevipof, le Centre de recherches politiques de Sciences Po, Perrine Simon-Nahum : Docteure en histoire, directrice de recherches au CNRS et professeure attachée au département de philosophie de l'Ecole normale supérieure, Antoine Chollet : Enseignant-chercheur au Centre Walras Pareto de l'Université de Lausanne et à l'Université de Montpellier., Pierre Birnbaum : Professeur émérite à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Gérald Bronner : Professeur de sociologie à l'Université Paris Diderot - Paris VII - réalisé par : Christophe IMBERT