Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: « Le pianiste », l’histoire vraie. Episode 1 - Le récit (2/2)

Europe 1 Europe 1 11/1/23 - 16m - PDF Transcript

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On de l'attraconte, la suite du récit.

Fin novembre, un soir, mon père, mon frère Henrik et moi sommes chez des amis

et soudain je regarde ma montre et je m'aperçois que l'heure du couvre-feu est proche.

Mais bon, normalement, un quart d'heure de retard n'est pas un crime majeur.

On prend nos manteaux, on sort dans la nuit noire, il pleut.

On marche en longant les façades.

Et Rusiel n'a une patrouille surgie.

Vous êtes un juif ?

Il n'attend pas notre réponse, on se retrouve plaqué contre le mur.

Il déverrouille le cran de sûreté de leur fusil.

Alors, c'est comme ça que nous allons mourir ?

Mon père se met à genoux.

Je vous en supplie.

Épargnez-nous.

Qu'est-ce que vous faites dans la vie ?

Nous sommes musiciens.

Ah, vous avez de la chance, hein ?

Moi aussi, je suis musicien.

Allez des guerres puissées !

Dans la seconde moitié du mois de novembre,

notre statut de paria est proclamé aux yeux de tous.

Nous, les juifs, avons jusqu'au 5 décembre

pour nous équiper d'un brassard blanc avec une étoile de David.

Nous voilà donc replongés en plein Moyen-Âge.

Au début du coup, on ne sort plus.

Et quand on est obligé, on marche en essayant de se fondre dans le paysage.

Les yeux au sol, à câblé, à câblé de honte, de peur.

C'est vivaire maintenant.

Il gèle sans discontinuer.

Et là, arrive un parceauville

des centaines de juifs déportés de l'ouest du pays,

entassés dans des wagons abbestiaux.

Ils sont là debout, dévorés par les Angelures.

Au milieu des cadavres de ceux qui n'ont pas tenu,

la moitié, au moins.

...

En septembre,

n'est pas nous apparaissent à l'entrée des rues,

dont la nôtre.

Ces rues sont contaminées par le typhus.

Évitez-les.

Les juifs ont un quartier séparé,

disent-ils nous pourrons librement pratiquer nos coutumes.

Et si cette zone devra être entourée de murs,

c'est uniquement pour des précautions hygiéniques.

Et le 15 novembre, au bout de ma rue,

j'aperçois une palissade en bois toute neuve.

Les portes du ghetto viennent de se refermer sur nous.

...

Ce soir-là,

je suis sorti au bout de la Russienne,

et je suis tombé sur un ami de mon père.

Alors,

t'en penses-tu de tout ça, Vatislav ?

Ce que j'en pense,

c'est qu'ils veulent notre mort à tous.

Mais non.

Voyons pas d'inquiétude.

Tu verras, ils nous laisseront sortir très bientôt,

à tant que les Américains la prennent qu'on est enfermés.

Hum.

En attendant,

la vie dans le ghetto est d'autant plus atroce

qu'elle garde des apparences de liberté.

Quand on descend dans la rue,

on peut avoir l'impression de se retrouver

au milieu d'une ville comme les autres.

Mais toutes les rues finissent contre des murs.

Et c'est comme ça tous les jours.

Et ça me plonge dans un désespoir insondable.

...

Ma carrière de pianiste en temps de guerre,

début tout café nouveau de Chesne,

rue nouveau Lipke,

un café fréquenté par des richards du ghetto.

Il fallait bien que je trouve ne quoi gagner ma vie.

...

Ils sont là, avec leur diamant,

ou leur bijou en or,

ils ne prêtent pas la moindre attention à ce que je joue.

Tous les jours, c'est une lutte ouverte entre eux et moi.

Plus je tape fort sur mon piano, plus il lève la voix.

Alors qu'autour cet hiver 1941-1942,

autour de cette insolente opulence,

c'est en tant qu'un océan de misère.

La fin, le froid, l'absence de chauffage,

et les poux qui se propagent.

Ils se collent même à la croute du pain que vous venez d'acheter.

Ils tombent sur vous quand vous marchez.

Ils se glissent dans les pages de votre journal.

Et les poux, ils sont porteurs du typhus.

Et maintenant, le typhus décime le ghetto.

On ne parle que de lui.

Il emporte 5000 hommes tous les mois.

On ne parvient plus à enterrer les morts.

On les abandonne sur le trottoir enveloppé dans du papier journal.

Je les croise tous les soirs en rentrant du café.

Et je dois prendre garde de ne pas trébucher dessus.

Le vent glacial soulève leur l'insol de papier.

Elle laisse apparaître un ventre familique

et des grands yeux ouvert sur le néant.

Au printemps 1942,

un vendredi de faveuril,

le ghetto est pris d'une panique sans motif apparent.

On sent que quelque chose se prépare, mais on ne sait pas quoi.

Une peur soudaine qui, à midi, voit toutes les rues se vider.

Quand je vais au café le Ch'touk à où je travaille maintenant,

je trouve porte-close.

Ce soir-là, à la maison, on reste debout jusqu'à 11h du soir,

sur le qui-vive, habillé.

Et puis constatant que dehors tout est calme,

on finit par se mettre au lait.

Le lendemain, mon père est le premier sorti.

Il revient à l'évide.

Pendant la nuit,

les Allemands ont ratissé plusieurs immeubles.

On m'a dit qu'ils avaient traîné des dizaines d'hommes dehors.

Soixante-dix au moins, d'après ce qu'on m'a dit.

Et ils les ont fusillés.

Dans la rue,

les cadables sont encore là.

Cet après-midi-là, on voit surgir des affiches.

Les Allemands expliquent qu'ils ont été contraints de purger

notre quartier d'éléments indésirables.

Mais que les magasins et les cafés doivent ouvrir

et la vie reprendre son cours.

Et de fait, le mois suivant s'écoule tranquillement.

Même si à cette époque la police juive

commence à développer une mentalité de guestapistes,

comme si c'était devenu chez eux une seconde nature,

on les voit paradés dans les rues,

avec leurs uniformes, leurs matraques en caoutchouc,

avec la guestapo.

Maintenant, la chasse à l'homme avec la froideur d'OSS.

Des Juifs, comme nous.

J'ai appris bien plus tard qu'un soir.

Ils ont arrêté un millier d'hommes

pour les conduirent tout droit au camp de Treblinka.

Pour expérimenter sur eux les nouvelles chambragases

qu'ils venaient d'installer.

Un soir de juin, je me souviens, ils faisaient très chaud.

On avait fermé les persiennes après souper

et on avait laissé les fenêtres ouvertes à l'intérieur.

Une voiture de la guestapo est arrivée dans la rue.

Elle s'est mise d'abord à tirer.

Ensuite, les Allemands sont descendus

et ils se sont précipité dans l'immeuble en face.

Nos voisins étaient encore assis autour de la table.

On les voyait à travers les persiennes.

Ils étaient tétanisés.

De beau ! De beau, j'ai dit !

Ils se sont tous levés,

sauf le grand-père qui ne pouvait pas.

Ils l'ont soulevé avec son siège,

ils l'ont amené jusqu'au balcon

et ils l'ont précipité dans la rue

de troisième étage.

Et après, ils ont rappelé

quelques douzaines d'hommes dans l'immeuble.

Ils les ont descendus dans la rue.

Ils ont démarré leur voiture

et ils les ont forcé à courir devant eux

en leur tirant dessus.

Et après,

ils sont partis en roulant

sur les cadavres.

Après la rumeur,

une opération de réinstallation

des Juifs du Ghetto doit débuter cette nuit.

Mais le matin, il ne s'est rien passé.

Alors les gens reprennent confiance.

Mais quand le soir arrive,

un vent de panique souffle à nouveau

et on voit apparaître un peu partout des groupes

chargés de ballaux et de grosses mâles.

Un matin vers onze heures,

je marche, perdu dans mes pensées.

Un ami me prend par le brin.

Mais qu'est-ce que tu fais ici ?

Entre chez toi immédiatement.

Pourquoi qu'est-ce qu'il y a ?

Ils entrent en auction dans une heure.

Regarde !

Et là,

il me montre un détachement de soldats en uniforme

mené par un sous-officier allemand.

Tous les dix mètres, l'un de se détache

et va se placer en faction

au pied du mur qui entoure le Ghetto.

Peu après,

la ville se couvre d'affiches.

Elles annoncent la réinstallation.

Tous les Juifs, apte au travail,

partent vers l'est.

Ils ont le droit de prendre 20 kilos de bagages par tête,

leurs bijoux

de jour.

On dit qu'à l'arrivée, ils seront logeés dans des baraquements

et affectés aux usines allemandes du coin.

L'inconsevable

est arrivé.

5 000 âmes vont être expulsées

de la ville.

Ça paraît tellement absurde

qu'on ne veut pas y croire.

Les premiers jours,

l'opération est menée sur le principe de la loterie.

Un coup de sifflet devant un immeuble.

Et tous les habitants doivent descendre

et se regrouper dans la cour.

On les entasse dans des chariots

tirés par des chaux, des nourrissons

jusqu'aux vieillards.

Et on les conduit sur l'hum chlac plate.

On les fait monter dans des wagons bondés.

Et ils disparaissent

dans l'inconnu.

...

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Wladyslaw a 18 ans en 1939. Il est pianiste à la radio polonaise et se retrouve enfermé avec sa famille dans le ghetto de Varsovie. Récit tiré du livre « Le pianiste » de Wladyslaw Szpilman (Editions Robert Laffont).