Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: « Le pianiste », l’histoire vraie. Episode 1 - Le récit (1/2)

Europe 1 Europe 1 11/1/23 - 14m - PDF Transcript

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On de l'âtre à compte.

Christopher Delathe.

Vous avez peut-être vu le pianiste de Roman Polanski.

L'histoire d'un jeune pianiste polonais pendant la guerre,

enfermé dans le ghetto de Varsoy,

dont toute la famille est déportée,

et qui lui parvient à se cacher jusqu'à la fin du conflit.

Et bien voici l'histoire vraie du pianiste qui a inspiré ce film,

l'histoire de Vladislav Spilman,

que je tire directement du livre qu'il a écrit juste après la guerre,

édité en France par Robert Lafon

et que vous trouverez désormais chez Poquette.

Voici donc le premier épisode.

La réalisation est signée Céline Lebrass.

Europe 1.

Christopher Delathe.

Je m'appelle Vladislav Spilman.

À l'été 1939, j'ai 18 ans,

et je suis pianiste à la radio polonaise à Varsoy.

Parfois soliste, je donne des recitals en direct,

ou accompagnateur, j'accompagne au piano d'autres musiciens,

ou des chanteurs.

À 18 ans, bien sûr, j'habite encore chez mes parents,

avec mes sœurs et mon frère, Rusliska.

Fin août 1939, à matin,

la veille, je suis rentré tard, je n'ai aucune intention de me lever tôt.

Je suis réveillé par des bruits.

Je regarde mon réveil, six heures.

Je me dis, ça doit être des exercices militaires.

Et comme après quelques minutes, les grondements se taisent,

je suis tenté de me rendormir.

Mais vers huit heures, la porte de ma chambre sous,

et ma mère apparaît habillée comme si elle allait sortir,

mais plus pale que d'habitude.

Qu'est-ce que tu fais encore au lit ?

Debout, Vladislav.

C'est la guerre, Vladislav. La guerre a éclaté.

...

Alors, je décide d'aller s'entarder au siège de la radio.

J'y retrouverai mes amis, et j'aurai les dernières nouvelles.

Dehors, de grandes affiches ont déjà été collées un peu partout.

L'appel à la nation du président.

Il annonce que les Allemands ont déclenché les hostilités.

Et je vois la propriétaire de l'épicerie, qui est proche de notre immeuble,

en train de coller des bonnes deux papiers sur ses vitres.

Avec l'espoir, sans doute, les empêcher de voler en éclat,

avec les bombardements qui arrivent.

Édition spéciale !

Édition spéciale !

La Pologne, attaqué par l'Allemagne !

Édition spéciale !

Mais il n'y a pas de panique.

Les gens se demandent juste.

Et maintenant, quoi ?

Ils sont étonnés.

C'est donc comme ça que débute une guerre.

J'ai fait la moitié du chemin vers la radio.

Quand la sirène se déclenche.

Ceci est une alerte destinée aux habitants de Varsovie.

Soyez vigilants.

Les Allemands sont maintenant en approche.

Quand j'arrive à la radio, où je travaille,

on vient d'interrompre une émission pour diffuser un bulletin du front.

Et un producteur qui vient de recevoir sa feuille de route,

parade dans son uniforme.

A la porte du studio, un vieux pianiste qui travaille,

lui aussi pour la radio, m'attrape par le bain.

Il a l'air désorienté, abazourdi.

Ah, va-t-il cela ?

On ne m'a même pas dit si j'allais travailler aujourd'hui.

Vers midi, on sort manger un morceau

dans un restaurant près du studio.

Les rues ont repris leur apparence, presque normal.

Les magasins sont ouverts.

Il n'y a pas de queue.

Le maire a promis qu'il était inutile de stocker des vives.

Et les colporteurs vendent un jouet sur le trottoir qui fait fureur.

De prime abord, c'est un cochon, mais en le pliant d'une autre façon,

on obtient la tête d'Hitler.

La Pologne dispose désormais d'un allié puissant.

La Grande-Bretagne vient d'annoncer qu'elle rentre en guerre contre l'Allemagne.

Et quatre heures plus tard,

la radio annonce que c'est la France qui entre en guerre contre l'Allemagne.

Mais notre joie n'est que de courte durée.

Les jours passent,

et les bulletins du front sont de plus en plus alarmants.

Et le matin du 7 septembre, juste avant l'aube,

nous sommes réveillés par des coups insistants à la porte,

un voisin.

Vous n'êtes pas au courant ?

Les Allemands marchent sur Varsovie.

Le gouvernement a dû évacuer.

Ils ont demandé que les hommes valides quittent la ville

pour se regrouper de l'autre côté de la Vistule.

Là-bas, ils veulent installer une nouvelle ligne de défense.

Bah moi, j'y vais quoi.

D'abord, je ne veux pas le croire.

Alors je vais voir chez d'autres voisins.

Beaucoup d'appartements sont déjà fermés.

Et dans d'autres, des femmes en pleurs

sont en train de préparer les pactages.

Et moi, je prends rapidement ma décision.

Je vais rester.

Je vais rester à Varsovie.

Quitter Varsovie ne servira à rien.

Si la mort m'attend,

je mourrai plus vite chez moi.

Et mes parents ont pris la même décision.

Quoi qu'ils puissent nous arriver,

il vaut mieux l'endurer ensemble.

...

Le lendemain soir, à huit heures,

un obus allemand touche la Syrie

en face de notre immeuble.

Les premières vitres à voler en éclats

sont celles de l'épicerie en bâte chez moi.

Les bandelettes de papier sur les vitres

n'auront servi à rien.

Et dans les jours qui suivent,

les tirs d'artilleries laissent place au raid aérien.

Il ne se passe pas une heure

sans convoi la silhouette d'un bombardier dans le ciel.

Et là, il faut se précipiter aux abris.

Et là, c'est la roulette russe.

Parce que si l'immeuble sous lequel vous êtes caché

est atteint,

c'est la mort assurée.

Les ambulances n'arrêtent plus de sillonner les rues.

Elles sont chargées de cadards

et de blessés.

...

Le commandant en chef

a demandé aux habitants de Varsoy

de creuser des tranchées autour de la ville

pour empêcher les chars allemands d'avancer.

Chez moi, on se porte tous volontaires.

Sauf ma mère, bien sûr.

Et donc on se retrouve à piocher

sous la menace permanente des bons.

Au bout de deux jours à creuser comme ça,

j'apprends que la radio a repris ses émissions.

Et je me dis que ce serait plus utile en studio, non ?

Que dans une tranchée.

Et aussitôt, je recommence à jouer

aussi bien en soliste qu'en accompagnateur.

...

Mais à Varsoy,

les conditions se dégradent rapidement.

L'artillerie allemande a repris son pilonnage.

Beaucoup d'immeubles ont des trous béants dans les façades.

Et la nuit, les incendies teintent le ciel en rouge.

Les vivres commencent à manquer.

Le maire a commis une erreur

en nous dissuadant de faire des réserves.

Le 27 ans,

nous quittons notre appartement de la Rusliska

au troisième étage trop exposé.

Et on va s'installer chez des amis

qui vivent au riche chaussée.

Et on n'est pas les premiers à suivre ce raisonnement.

L'appartement des amis est bondé.

On doit dormir à même le sol.

...

Et me rendre à la radio le matin

devient chaque jour plus difficile.

Les cadavres des morts et des chevaux

encombrent les rues.

Des quartiers entiers sont en flamme.

Le 23 septembre,

je joue pour la dernière fois devant un micro

de la radio.

Un récital Chopin.

...

Et pendant tout le temps où je joue,

les obus explosent près du studio.

J'arrive à peine à entendre mon piano.

Le même jour,

à trois heures et quart de l'après-midi,

la radio est en train de diffuser

le concerto de Rachmaninov.

...

Une bombe tombe sur le transformateur électrique.

La radio est réduite au silence.

...

Et puis arrivent

les terribles journées du 25 et du 26 septembre.

...

Le grand demandet canon.

Le sifflement des avions empliqués.

Et l'air chargé de fumée,

de poussière, de plâtre, de briques

qui s'infiltrent partout.

Et qui vous prend à la gorge,

dans les appartements et jusque dans les caves.

Et dans la chambre où je dors,

par terre chez mes amis.

Juste à côté de moi,

quelqu'un est tué par un éclat d'obus.

Et après,

on passe un jour et deux nuits

à dix dans le cabinet de toilette.

Dix.

Quelques temps plus tard, on essaiera de le refaire.

On ne rentrera pas à plus de vuites.

C'est la force

de la peur panique de la mort.

...

Le mercredi 27 septembre,

Varsovie capitune.

Et il me faut deux jours

pour oser ma aventure et dehors.

La ville n'existe plus.

À chaque carrefour,

il faut contourner des maricades de trames renversées,

au milieu des cadavres en décomposition.

Les gens sont tellement affamés par le blocus

qu'ils se rues sur les chevaux morts.

Et là, je vois arriver

une motocyclette du pont sur la fistule.

Deux soldats,

vêtus de l'uniforme vert.

Les premiers soldats allemands

ont entré dans la ville.

Et quelques jours plus tard,

les murs de Varsovie se couvrent d'affiche.

C'est une proclamation du commandement nazi.

Elle promet le retour

à une existence normale

sous la protection de Reich.

...

Les bombardements étant terminés,

on retourne chez nous, russes liscains.

Hormis les vitres, l'appartement est intact.

Mais les bombardements

ont fait vingt mille morts.

Dans des amis, c'était pouvantable.

Mais rien, rien ne peut entamer

le plaisir animal que nous avons

d'être en vie.

Mon père, qui est violoniste,

est le premier à se remettre à la musique.

...

Entre temps,

les nazis se sont lancés

dans des rafles raciales en ville.

Des voitures banalisées sillonnent les rues.

Et quand un juif est en vue,

elle s'arrête.

Toi, viens.

Pour l'instant,

il se contente de gifles

et de tabassages.

...

Les premiers décrets

ont commencé à être placardés sur les murs.

...

Toute personne surprise

en train d'acheter ou de vendre du pain

à un prix supérieur au prix habituel

sera abattu sur le champ.

Alors,

alors nous renonçons à manger du pain

et on sera bas sur les pommes de terre.

Les lois s'impliquant au juif

font aussi leur apparition.

Une famille juive

n'a pas le droit de détenir plus de 2 000 slottis chez elle.

Et les juifs doivent remettre

leurs biens immobiliers aux Allemands.

Nous décidons de cacher notre modeste richesse.

C'est-à-dire la chaîne

et la montrant nord de mon père

ainsi que 5 000 slottis.

Et il y a des bas sur la cachette.

Mon père tient une idée

de la précédente guerre.

Il faut évider le pied de la table

de la salle à manger.

Ah ouais ?

Et s'il l'emporte avec eux la table,

son tise,

qui voudrait d'une ta pareille.

On a finalement mis la montre

sous la commode,

la chaîne dans le violon

et l'argent dans la fissure près de la fenêtre.

Maintenant,

ils veulent que les hommes juifs

s'inclinent devant le moindre soldat allemand

quand ils le croient.

Ça nous met dans une rage, mon frère et moi.

Alors, on fait de longs détours

pour ne pas tomber sur un allemand.

Et quand on en croise un,

hop, on tourne la tête.

Et maintenant,

l'accès des trains est interdit au juif.

Et l'éthique et de trames

sont quatre fois plus chers

que ceux des Ariens.

Les premières rumeurs de construction

d'un ghetto se mettent à circuler.

Machine-generated transcript that may contain inaccuracies.

Wladyslaw a 18 ans en 1939. Il est pianiste à la radio polonaise et se retrouve enfermé avec sa famille dans le ghetto de Varsovie. Récit tiré du livre « Le pianiste » de Wladyslaw Szpilman (Editions Robert Laffont).