Les Grosses Têtes: LE LIVRE DU JOUR - "Rendre les coups - Box et lutte des classes" de Selim Derkaoui

RTL RTL 10/24/23 - Episode Page - 7m - PDF Transcript

– RTL, le livre du jour. – Le livre du jour s'appelle « Rendre les coûts ». On le fait ici souvent.

Sauf que là, ça parle de boxe et de politique et de lutte, dès que là, c'est signé Selim, d'Hercawi,

que je connais un peu parce que de temps en temps, on est ensemble sur BFM TV,

c'est préfacé par le rappeur Médine, c'est, on va dire, post-facé, je ne sais pas si le mot existe,

par François Ruffin lui-même, et c'est passionnant ce livre.

On va en parler avec Selim d'Hercawi dans un instant au téléphone.

Dans ce livre, d'ailleurs, à un moment donné, on parle de la famille Parondi.

Je vais vous donner quelques prénoms. Vincenzo, Parondi, Siro, Parondi, Luca, Parondi, Simoné, Parondi.

Mais quel est le célèbre frère de Simoné, Vincenzo, Siro et Luca ?

– Michel est... – Est-ce que c'était des gens de la mafia italienne ?

– Pas du tout. – Rocco et ses frères ?

– Rocco et ses frères, bonne réponse d'Olivier Bellamy. – Le film de Visconti.

Exactement, Simoné, Vincenzo, Luca. J'avais oublié le nom de famille de Rocco et ses frères, Parondi.

C'était le film préféré, et c'est sûrement toujours le film préféré de votre papa Selim d'Hercawi.

– Bonjour. – Bonjour.

– Vous connaissiez le nom de famille ? Vous auriez su répondre à cette question ?

– François, j'aurais pas pu faire mieux. – Eh ben, bravo, bravo.

C'est vrai que vous parlez de Rocco et ses frères, parce que c'est un film culte dans le monde de la box,

même s'il est vieux. Très vieux, ce film par rapport à Rocky et beaucoup d'autres aujourd'hui.

D'ailleurs, quelle est la série après Rocky qui aujourd'hui fait un carton aussi dans les salles de cinéma ?

– Alors, c'est la série Creed. – Creed.

Mère, votre livre ne parle pas seulement de la box, il parle de la box et de la lutte des classes.

Parce que ce qui est très intéressant, vous le dites, c'est que la plupart des champions,

et là, on parle bien de box anglaise, on revient à ça, sont des gens de milieu plutôt défavorisés.

– Exactement. Alors, Rocco et ses frères, ce qui est intéressant dans le film,

c'est que ça raconte aussi l'histoire d'une famille émigrée, d'une famille prolétaire ou bruyère.

Et c'est ce qui revient souvent dans les films de box, c'est toujours des milieux sociaux populaires.

– Vous, votre papa, a été boxeur, vraiment boxeur, et vous racontez un combat abandonné

où Alain Delon est carrément, et je crois même Jean-Paul Belmondo, dans le public.

– Oui, c'est un combat qui était très important, parce que pour mon père,

Alain Delon était vraiment son idole par rapport à Rocco et ses frères.

Jean-Paul Belmondo qui a pratiqué du même la box, une box ouvrière également,

était vraiment quelqu'un de très important pour mon père.

Il s'est retrouvé à boxer face à un boxeur professionnel, et devant lui, il y avait justement

c'est de l'acteur, il y avait tout le gratin comme il disait, mon père lui-même bourgeois,

qui le regardait, retirait son t-shirt, parce qu'en box professionnel,

la box pour la télévision, il faut retirer son t-shirt, c'était Torceny,

donc c'est vraiment comme des combats de claviateurs,

et mon père avait le sentiment de se retrouver comme un bout de viande.

– Comme une prostituée, l'impression de se prostituer,

c'est ce que vous écrivez dans le livre,

et vous-même, vous avez essayé pour écrire ce livre de vous mettre à la box ?

– Alors moi, j'ai essayé brièvement et de manière assez lâche,

juste un an de temps d'écrire, parce que c'est un sport qui est extrêmement difficile,

et mon père, il m'a toujours dit, comme dans Rocky 4,

C.S. Salon qui dit à son fils, qui lui demande,

« Mais pourquoi tu ne mets pas à la boxe, moi aussi ? »

Et là, Rocky lui répond exactement comme mon père m'a répondu,

parce que c'est un sport très difficile,

tu n'as pas autant de démons que moi à résoudre à travers ce sport,

tu n'as pas de raison de te prendre des points dans la figure,

tu n'as pas autant de souffert que moi, donc je veux te préserver de ça.

– Vous expliquez à travers ce livre qu'il faut une raison sociale pour boxer,

même si c'est d'ailleurs un dépassage amusant du livre,

même si de plus en plus, on va dire des gens un peu plus aisé,

font de la boxe et même font de la promo sur le fait qu'ils en font de la boxe,

vous pensez à Édouard Philippe, l'ex-premier ministre par exemple,

c'est dans un chapitre qui s'appelle « Coil blanc et chemise noir »

et vous dites ici, on oublie le collectif, le corps à corps, le sang et les larmes,

la boxe est un simple défouloir libéral,

sauce banlieue chic du sport individualiste,

sans vraie finalité qui vient booster le narcissisme d'une classe dominante,

venu se remettre de son ex toxique, d'une réunion zoom à rallonge

ou d'autres petits bobos existentiels.

Pour vous, ça n'est plus la vraie boxe.

– Non, non, ce n'est plus la vraie boxe.

Après, c'est très intéressant qu'il s'y mette aussi,

mais ce qui m'intéresse, c'est plutôt ce que ça dit et ce que ça raconte,

c'est que finalement, il s'aventrait bien que la boxe

est un sport intrinsèquement populaire, très ouvrier, donc par conséquent très politique,

donc le fait qu'il se mette aussi à la boxe

et le mette aussi en avant dans certains médias,

ou en tout cas de manière très démonstrative,

c'est aussi une manière de se dire qu'ils sont un peu comme le peuple.

– Alors les femmes, ça c'est intéressant, le passage sur les boxeuses,

parce que ça c'est vrai que c'est encore plus compliqué pour Ufi, il a annoncé à sa mère,

c'est déjà compliqué pour un garçon, vous dites que les mères n'acceptent jamais

que leurs enfants fassent de la boxe au départ,

mais encore plus quand c'est une fille qui vient dire à sa mère,

« Maman, je veux boxer ».

– La boxe, elle est autorisée en France fin des années 90 pour les femmes,

et je cite souvent la philosophe Elzade Orlan,

qui dit que pour une femme de rentrer dans une salle de boxe,

c'est déjà une démarche politique.

Rien que le fait d'ouvrir la porte du club comme l'actrice dans Million Dollar Baby de Pink Hood,

– De Clinton.

– Oui, exactement, il y a toutes une mise en scène sur rien que la scène d'ouverture de la porte,

elles ont deux fois plus d'efforts à faire en tant que femme.

– Elles se bandent les femmes.

– Exactement, justement, il y a toute une codification qu'elles doivent faire et mettre en scène

pour pouvoir s'adapter à un milieu assez masculin,

c'est aussi les cheveux qu'elles doivent retirer, etc.

Et le sport, la boxe en tout cas, est de plus en plus tabine pour les femmes, notamment en France.

Et ce que l'on dit deux d'entre elles, qui sont Paraourami et Ayas, c'est du coup,

c'est qu'en fait, par rapport à leur zomologue masculin,

elles ont trois fois plus de rage en elles.

C'est pas que leur milieu social, c'est aussi le genre.

Soit leur statut de femme, qui fait que sur le ring, elles se surpassent encore

et les entraîneurs m'ont dit que c'était plus intéressant d'entraîner des femmes de plus en plus pour ces raisons-là.

– François Ruffin, à la fin du livre, explique le pourquoi de ce livre.

Il dit au fond, c'est pas de la boxe dont il voulait nous parler, c'est de lui me dire qu'il y a oui,

c'est de rendre hommage à son père boxeur, c'est vrai ou pas ?

– C'était un prétexte aussi de la boxe, parce que ce qui est très important,

c'est la phrase de Mohammed Ali qui disait, la boxe, ce n'était rien,

ce n'était que un moyen de me présenter au monde,

politiquement, socialement, de retrouver une confiance, une dignité en lui.

Mais c'est vrai que la boxe, c'est le moyen que j'ai trouvé plus intéressant pour rendre hommage à mon père,

mais aussi à toute ma famille.

– La classe laborieuse sur le ring, rendre les coups, boxe et lutte des classes,

c'est aux éditions Le Passager clandestin, c'est signé Céline Dercaoui et c'était le livre du jour.

– Merci.

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