La source: Le libéralisme, gentil ou méchant ?
Radio France 9/11/23 - Episode Page - 48m - PDF Transcript
Françain Terre.
Compagnons, camarades, citoyennes, citoyens, françaises, français et les autres, bienvenue dans ce numéro de enquête de politique.
Nous explorons la jeunesse, les racines d'une idée, d'un phénomène politique.
Les idées d'aujourd'hui vont structurer notre monde.
Il faudra en débattre, peut-être même se battre.
Les idées viennent de loin, prennent leur source dans le passé de nos démocraties,
dans les rêves fous des utopistes, les colères populaires, l'intérêt des puissants, les croyances, les guerres,
les révolutions, les crises économiques et maintenant climatiques.
Les folies collectives et la raison de quelques-uns, ou plus souvent l'inverse,
parce que nous sommes un peu perdus que la désaffiliation et l'abstention sont majoritaires dans enquête de politique.
Nous explorons un isme, une idée, un mouvement, son histoire, son poids dans nos consciences et sa marque sur les débats qui nous agitent.
Et aujourd'hui, le libéralisme concept incompris.
On peut rentrer dans le libéralisme par la porte de l'économie.
C'est plus efficace, économiquement, c'est plus juste, on en reparlera.
Alain Madelin.
Mais on peut y entrer également par une réflexion sur le pouvoir.
Et il y a des gens qui, comme moi, ont réfléchi pourquoi ils étaient anti-totalitaires,
d'autres ont réfléchi pourquoi ils avaient flirté avec le totalitarisme.
Aujourd'hui, on se retrouve autour de cette pensée libérale.
Ce faux libéralisme, c'est la loi de la jungle, comme le disait un fameux écrivain.
La liberté, vue comme cela, c'est la liberté du renard dans le poulailler.
Comment un mot en isme, une idée qui proclame la liberté,
première valeur démocratique et chez nous républicaine, a-t-il pu se transformer en anathènes ?
La crise que nous vivons depuis 50 ans est-elle une crise du libéralisme,
trop passée de libéralisme ?
N'avons-nous pas tendance à confondre libéralisme et capitalisme ?
Comme souvent en politique, il faut s'entendre sur les mots,
le libéralisme est une idée née au XVIIe siècle, mais formulée ainsi à la fin du XVIIIe siècle.
Cette idée est au cœur de nos sociétés, nous vivons en France dans une démocratie
dite libérale politiquement, mais nous ne sommes pas économiquement un pays très libéral.
Enfin, ces sujets à caution beaucoup à gauche, certains même à droite,
estiment que nous dérivons vers un ultralibéralisme économique,
d'autres encore, pensent plutôt que ce n'est pas l'économie qui est trop libérale,
mais la société.
Bref, le mot libéral est l'un de ces vocables qui charrit une cargaison disparate
et sert maintenant plus d'armes rétoriques que d'outils conceptuels.
Mettez le préfixe ultra devant le mot libéral et vous obtiendrez l'une des pires insultes du débat français.
Comment le concept de libéralisme a-t-il évolué depuis son apparition
et pourquoi a-t-il évolué ainsi ?
Quelle est la spécificité du libéralisme français ?
Il faut retourner aux sources de cette idée qui est au départ une philosophie,
une conception révolutionnaire de l'autonomie individuelle et de la liberté naturelle.
Au début, c'est une idée progressiste de gauche, pour étendir,
pour bien comprendre les origines du mot et de la chose,
nous allons faire un petit voyage dans le temps avec trois historiens
aux philosophes du libéralisme qui se présentent d'ailleurs eux-mêmes comme libéraux,
Philipprenaux, philosophe, polytologue, Bernard Kirini, professeur de droit à l'université de Bourgogne
et Monique Cantos-Perbert, philosophe.
Avant d'être un vilain mot, le libéralisme était une belle idée.
D'où vient d'abord le mot ?
L'origine que j'ai trouvée, c'est donc la proclamation du XIX Brumaire en 8,
où il est question des idées libérales.
Etrangement, en propos du coup d'État qui avait eu lieu,
il y avait, c'est-à-dire le digi Brumaire, le coup d'État de Bonaparte.
Ensuite, ce terme a circulé dans les cercles de Madame de Stal et de Benjamin Constant.
Et petit à petit, l'adjectif libéral a été substantivé
sous la forme du libéralisme, en fait, sous le nom de libéralisme.
Et en effet, on constate la trahation d'un parti libéral, des libérales,
en 1812, dans le gouvernement espagnol des Cortesses.
Et puis ensuite, les british liberals, qui ont été très importants
de la vie politique anglaise au XIXe siècle.
À ce moment-là, quand on parlait de libéralisme, qu'est-ce que recouvrait cette notion ?
La notion reprenait les idées fondatrices du libéralisme.
Alors d'abord, le libéralisme politique, l'opposition au gouvernement autoritaire,
la nécessité de contre-pouvoir, d'un équilibre des pouvoirs,
de défense de la liberté de conscience et de la liberté de pignon,
et refus d'une intervention de l'État dans la vie économique
sous forme de socialisation, des activités.
Alors, il ne faut pas interpréter de manière acronique
ce refus de l'intervention de l'État dans la vie économique.
À l'époque, ça désignait surtout la lutte contre les corporations,
les métiers réglementés, tout ce qui avait caractérisé l'ancien régime,
et que la loi de Chapelier, qui est un des grands acquis de la Révolution, a supprimé.
Donc, libéralisme économique, ça veut vraiment dire au centric,
liberté des activités économiques, certes, indépendante de l'État,
mais à l'époque, l'État avait très peu de rôles dans la vie économique,
mais surtout indépendante de tous les règlements qui empêchent les personnes,
d'exercer le métier qu'elles veulent, et d'être des libres producteurs
et entrepreneurs.
La loi de Chapelier, en 1791,
voilà une loi fondatrice du libéralisme français, du libéralisme économique et social.
Il s'agit donc de casser par cette loi les corporations de métier
pour établir la liberté du travail.
Dis comme ça aujourd'hui, ça pourrait raisonner,
à des oreilles de gauche non averties, comme une première loi libérale célérate.
C'est tout le contraire.
En supprimant les corporations, on ouvre aussi la voie au syndicalisme,
au droit du travail, et direz-t-on aujourd'hui,
à une certaine mobilité sociale.
D'ailleurs, le 16 août 1940, le gouvernement de Vichy interdira les syndicats
et tentera de rétablir l'organisation économique et sociale
par métier, par corporation,
qui se fixerait chacune leur règle propre,
comme sous l'ancien régime.
1789 est donc un moment éminemment libéral,
mais libéral à la française, avec une puissance publique toujours forte.
La révolution française, c'est une révolution libérale, bien entendu,
mais qui écarte les institutions anglaises très vite.
On refuse le bicamérisme très rapidement.
Philippe Renaud, historien et philosophe, spécialiste du libéralisme.
Et si vous prenez la déclaration des droits de l'homme et du citoyen,
c'est un texte qui est plus radical que les déclarations anglaises,
qui est philosophiquement libéral quand vous voulez,
mais qui insiste beaucoup quand même sur le fait que le moyen
de promouvoir les manifestations d'individus, c'est le règne de la loi,
pas simplement le sens du règne du droit, mais au sens du pouvoir législatif.
C'est la loi expression de la volonté générale, etc.
C'est une formule qui peut être rousseauiste.
Et donc de la puissance publique.
La puissance publique qui est très présente, si vous voulez,
dans cette culture libérale française.
Il m'est arrivé d'écrire, d'ailleurs,
à propos du président Macron quand il avait été élu,
que c'est quelqu'un qui s'inscrit, à mon avis, nettement,
dans cette filière qui est la filière Thurgaux.
C'est quelqu'un qui est libéral en économie,
qui est libéral sur les questions de meurs,
mais qui est attaché à un pouvoir politique fort
et qui, à beaucoup de gars, est assez étatiste.
C'est très français.
...
Thurgaux, contre leur général des finances du Royaume,
mort en 1781, donc avant la révolution,
est considéré comme un précurseur libéral à la française,
c'est-à-dire partisan à la fois d'une certaine dérèglementation,
mais aussi d'un interventionnisme d'État.
Une des belles périodes du libéralisme et du libéralisme à la française
a été le libéralisme républicain de la fin du XIXe siècle.
Monique Quantos-Perbert, le libéralisme n'est pas qu'économique.
Tous ceux qui ont été les fondateurs de la IIIe République.
Cloutinant le loi de la liberté de la presse,
liberté d'expression, même la loi de laïcité,
qui est une loi pour la liberté religieuse,
pour la neutralité de l'espace public,
la laïcité du service public,
mais une véritable loi de liberté religieuse.
Et c'était vraiment une loi libérale, incontestablement,
qui, dans la mesure où les personnes par l'expression de religion
ne trouvent pas l'ordre public et n'empêchent pas la vie commune,
elles vivent leur rapport à la religion,
y compris dans l'espace public, de manière non intrusive,
certes, mais comme elles le souhaitent.
On s'était vraiment une loi libérale
et, en effet, vous avez rappelé la liberté de la presse,
la loi des associations, etc.
Ce qui n'empêche pas que ce libéralisme
était aussi associé à une véritable
un sens de la responsabilité collective,
ce sont les libéraux républicains
qui ont voté la première loi sur la vaccination obligatoire.
Tout à fait à même de comprendre
qu'il y a des enjeux d'intérêt collectif
où la responsabilité individuelle ne suffit pas.
Et il en est de même pour l'école,
j'ai été frappée de considérer,
de voir confirmer que dans les années 90,
quand les rambours joie étaient ministres
de l'instruction publique,
et ensuite, tout début du XXe siècle,
à quel point il était partisan
d'une organisation extrêmement libérale,
délicée et collège, demandant
au professeur de prendre toutes les initiatives
que justifierait le terrain,
d'être totalement souverain dans leur établissement,
considérant que l'uniformité opposée
par l'Etat était en général
une très mauvaise chose complètement inefficace.
Donc les républicains libéraux ont été
vraiment marqués,
l'origine du républicanisme.
Évidemment, à l'époque, on commençait à peine
à concevoir un système de protection,
l'impôt sur le revenu progressif,
en tout cas, était une chose
qui était extrêmement discutée.
Il n'y avait absolument pas d'intervention
d'Etat dans la vie économique.
Donc évidemment, on est dans des configurations assez différentes.
Aujourd'hui, nous nous intéressons
à un gros mot du langage politique français,
le libéralisme. En quête de politique,
c'est jusqu'à 19h de samedi et jusqu'à minuit le dimanche,
et il n'y a pas d'heure pour les podcasts.
Écoutez cet échange à distance
en 1974
entre Valérie Giscard d'Estaing
et François Mitterrand.
Giscard d'abord.
Je suis libéral, on le sait,
les gens trouvent que c'est très bien,
les gens trouvent que c'est très mal,
mais enfin, je suis libéral, c'est-à-dire respectueux
de l'initiative, de la capacité
d'inventer, de créer et de décider.
Je ne considère pas
que le libéralisme consiste
dans les périodes. Troubler,
c'est des choses allées à l'aventure.
Puisque nous avons des difficultés sectorielles
qui apparaissent, il est essentiel
que les pouvoirs publics apportent leur contribution
à la solution de ces difficultés.
D'ailleurs, les observateurs ont dû noter
la modification d'une tendance
dans le budget qui était pour la première fois
depuis longtemps
l'augmentation des crédits du SEDES.
Pourquoi cette augmentation ?
C'est pour doter précisément le gouvernement
des moyens de soutien nécessaires
pour celles des entreprises,
des cultures saines, qui auraient à faire face
à une difficulté, d'activité
ou de redéploiement.
Je suis libéral,
mais dis-je, Valérie Giscard d'Estaing,
et que croyez-vous que François Mitterrand,
le socialiste, lui répond
qu'il dévoit
la belle idée libérale ?
D'un côté, ceux qui semblent
incarner un libéralisme
qui est un faux libéralisme,
qui a tué la concurrence,
sinon les monopoles,
qui a imposé la disparition
des petits, des moyens
et quelquefois des grands,
aux bénéfices des plus grands,
ce faux libéralisme, c'est la loi
de la jungle, comme le disait
un fameux écrivain,
la liberté, vu comme cela,
c'est la liberté du renard
dans le poulailler.
Avec Margaret Thatcher et Ronald Reagan,
apparaît le néolibéralisme,
la période de l'état-providence
va le faire, c'est être plébiscité
partout en Europe et en Amérique,
juste après la guerre,
pour reconstruire une économie
plus forte, plus juste, c'est échoué
sur les deux chocs pétroliers
des années 70, alors dans les années 80,
l'idéologie du laissez-faire
de la dérèglementation,
l'idée que le problème, c'était
maintenant avant tout, l'état,
était une idée dominante.
Margaret Thatcher,
nous avons toujours eu le sens
que nous en avons eu besoin récemment.
Nous avons aussi d'autres caractéristiques,
un don pour l'invention, l'initiative
et le travail à charme. Avec le parti
travailliste, c'est à l'an pour être
gaspillé, parce que le gouvernement
prélève trop d'impôts. Combien de fois
attendez-vous les gens dire, regardez
combien ils ont pris sur ma paix. Alors naturellement,
ils réclament des augmentations salariales
plus importantes pour combler l'écart
et cela ne tarde pas à faire monter les prix.
Demandez à n'importe quelle femme au foyer,
elle vous le dira. Ce gouvernement a
pris plus rapidement et plus que tout
autre gouvernement.
La seule façon de maintenir les prix bas
est d'augmenter la production. Et vous ne
faites pas en alourdissant les gens avec des taxes
et d'autres restrictions. Ils ne travaillent
pas pour le bonheur des finances, ils travaillent
pour leurs familles. Nous devons donc
réduire les impôts sur les gains et
l'impôt sur les compétences. Inciter
nos employés, et une fois encore,
la Grande-Bretagne sera de retour
dans la course.
Cette période-là a imposé,
a mis sur le devant de la Seine,
une interprétation du libéralisme
qui a été progressivement
confondue par les idéologues
qui la mettaient en avant,
et par ceux d'ailleurs qui la combattaient
aussi, avec le libéralisme.
C'est-à-dire une interprétation du
libéralisme extrêmement dogmatique
et au fond réduit
au libéralisme
économique. Et en particulier
avec l'arrivée de l'économie
financière. Mais ça,
dans les années 2000, c'est quelque chose
de tout à fait caractéristique.
Il y a toujours des tendances
extrêmement dogmatiques dans le libéralisme.
Ce qui est assez paradoxal, parce que le libéralisme
est un mouvement
qui est un multifacète et qui est prêt
à constamment se soumettre à l'examen
des raisons et aux arguments contraires,
donc par un libéralisme dogmatique
et toujours quelque chose assez
surprenant.
Je vous remercie. Quand on veut,
on peut. Quand on veut vraiment,
on te prouve.
On prouve.
Vous l'avez bien mérité
Vous l'avez pas voulu
Vous l'avez bien mérité
Vous l'avez pas voulu
Mademoiselle, monsieur, il n'y a pas
de son métier. De toute façon,
choisissez.
Vous prenez ou vous ne prenez pas
vous exagérez.
Réfléchissez. Le train ne repassera pas
la charrette, oui.
Pas de poste pour le moment.
Je suis au regret. Mais je peux vous proposer
un stage. J'aurais pour cela besoin
d'une convention de stage.
Non rémunéré. Mademoiselle, monsieur,
vous prenez ou vous ne prenez pas
de toute façon, c'est ça orien.
Choisissez.
Vous l'avez bien mérité
Vous l'avez pas voulu
Si vous ne trouvez pas,
interrogez-vous.
Vous n'aviez qu'à être fonctionnaire,
emploi à vie, 3 pêletés de vacances, pas grand chose à faire.
Si vous ne trouvez pas,
interrogez-vous. Vous n'aviez qu'à
vous n'en seriez pas là.
Pas de vieux chez nous.
Si vous ne trouvez pas, interrogez-vous.
Vous n'avez pas de vieux chez nous.
Vous êtes enceinte.
Il faut bien que l'entreprise tourne
et les Français d'abord je vous prie.
Il n'y en aura pas pour tout le monde.
C'était le groupe Frère Animal,
la chanson du DRH.
C'est l'heure du livre d'Aurélie Marciro
chaque semaine pour aller un peu plus loin
sur notre sujet. Aurélie vous propose
une lecture intelligente.
Bonjour Aurélie.
Alors Aurélie vous nous parlez aujourd'hui
d'une icône de l'ultralibéralisme
et des libertariens,
Ayn Rand, dont le portrait
et la philosophie sont brossés dans un livre
Ayn Rand, femme capitale de Stéphane Le Grand.
Oui, elle a son personnage dans les Simpsons.
L'un de ses livres préférés apparaît
dans la série Mad Men, l'autre est
le préféré de Donald Trump,
un des rares qui lutise les mauvaises langues
et elle est adorée par les néoconservateurs
et par le fondateur de Wikipédia.
Ayn Rand est né en 1905,
mort en 1982. Sa vie
est un roman, Thomas, et selon
une enquête menée au début des années 2000
par la bibliothèque du Congrès et le livre du mois
son livre La Grève serait
l'ouvrage le plus influent aux États-Unis
après la Bible. La Bible,
carrément. Alors elle est
philosophe ou romancière ?
Eh bien les deux de ces romans qui sont
des dystopies découlent une philosophie,
l'objectivisme. Alors pour résumer son
maître mot c'est l'égoïsme
et le deuxième c'est dollars. Dans La Grève
c'est héros, les créateurs, être supérieurs,
les productifs, décident de s'isoler
et de vivre loin entre eux, loin du reste.
Alors le reste ce sont les masses
abruties, les parasites, hâtés,
anti-racistes, randes et surtout
anti-altruistes.
Empathique, anti-altruistes, ça veut dire quoi ?
Dans une interview en 1959 elle explique
que oui, elle s'attaque à l'État, à la religion
etc. au nom du Code Moral
qu'elle a élaboré dans ses livres
l'égoïsme rationnel. Dans son livre
La Source Vive par exemple, le héros explique
ainsi le premier droit sur terre
est celui de l'égo, le premier devoir
de l'homme est envers lui-même.
Rendre, excècre, les socialistes,
les hippies, les aides sociales,
l'État, détestation qui vient
partie de son histoire familiale, né à
Saint-Pétersbourg, sa famille de la bourgeoisie
dépossédée par les communistes, a été obligée
de fuir aux États-Unis
où des étudiants portent encore
des t-shirts à son effigie. Elle est
la Che Guevara des capitalistes.
Ça m'a pas l'air très sympa
comme philosophie, pourquoi elle est si populaire ?
Eh bien elle a par ses personnages
apporter les héros, la mythologie
dans le capitalisme avait besoin.
Il est temps que nous réalisions
comme l'on fait les rouges, que la propagation
de nos idées sous la forme de fiction est une arme
puissante car elle suscite une réaction
émotionnelle et non seulement intellectuelle
écrit dans une lettre cette femme
qui fait donc encore l'objet d'un culte
ultra-atlantique et sur laquelle nous reviendrons
Thomas. Oui nous reviendrons parce que
Enron, ça sera certainement l'une des stars
d'une prochaine émission enquête de politique
consacrée bien sûr au Libertariat
Enron, femme capitale
nova édition par Stéphane Le Grand
et il n'est pas de ma famille je précise quand même.
Alors maintenant je vous propose de passer
un petit moment avec Bernard Kirini
Bernard Kirini, professeur de droit libéral
et l'auteur d'une fable contemporaine
sur le libéralisme. C'est un roman
Le club des libéraux
aux éditions du serf. Donc j'ai été voir Bernard Kirini
à Dijon à l'université
de Bourgogne où il enseigne
et nous avons fait le tour de quelques questions
qui se posent quand même sur le libéralisme
en tout cas que je me pose
il y a des malentendus avec le libéralisme
tentons de les dénouer
le premier c'est à propos du droit
pourquoi les libéraux s'opposent souvent
au droit du travail Bernard Kirini
Alors il y a deux choses qu'il faut distinguer
il y a le droit du travail au sens
de la réglementation des conditions du travail
et puis il y a le droit au travail
ce sont deux choses tout à fait différentes
ce contre quoi Tocqueville s'est levé en 1848
à la constituante
c'était l'idée du droit au travail
c'est à dire l'idée que quand un individu
est sans emploi il a
un droit au travail c'est à dire que la puissance
publique doit se débrouiller pour
lui fournir l'emploi qu'il n'a pas
Le trait qui caractérise surtout
à mes yeux les socialistes
de toutes les couleurs et de toutes les écoles
c'est une défiance profonde
de la liberté
de la raison humaine
Alexis de Tocqueville en 1848
est discours contre le principe
du droit au travail proposé par
l'Assemblée de la Deuxième République
c'est un profond mépris pour
l'individu pris en lui-même
à l'état d'homme
ce qu'il caractérise tous
c'est une tentative continue
variée pour mutiler
pour gêner la liberté humaine
de toutes les manières
c'est l'idée que l'état ne doit pas seulement être
le directeur de la société
mais doit être pour ainsi dire
le maître de chaque homme
que dit-je son maître
son précepteur
que de peur de le laisser faillir
il doit se placer sans cesse à côté de lui
au dessus de lui, autour de lui
pour le guider, le garantir
le maintenir, le retenir
c'est la confiscation
dans un degré plus ou moins grand
de la liberté humaine
si en définitive
j'avais à trouver une formule générale
pour exprimer ce que m'apparaît le socialisme
je dirais que c'est une nouvelle formule
de la servitude
après il y a eu le droit à la santé
avec la sécurité sociale
et le conseil national de la résistance
le droit au logement dans les années 90
on a l'impression qu'il y a
des droits hauts, des droits à
comment les libéraux voient cette évolution
Bernard Kirény
il y a assez mauvais, tous ces droits à
qui nous sont très familiers aujourd'hui
c'est ce que les juristes appellent dans leur jargon
des droits créants, c'est à dire que nous avons le droit
de revendiquer quelque chose de la part de l'Etat
par opposition au vieux droit de la déclaration 1789
qu'on appelle des droits résistants
parce qu'ils ne nous permettent
que d'exiger de l'Etat une abstention
nous voulons que l'Etat n'empiedre pas
sur notre liberté de nous exprimer, d'aller devenir etc
alors ce que disent les libéraux
ils sont à peu près unanimes sur ce sujet
avec des nuances, enfin grosso modo le message
et le suivant c'est que les droits résistants
oui et les droits créants non
les droits à non, tout simplement parce que
les deux ne sont pas compatibles l'un avec l'autre
si je dis j'ai droit au travail
ça signifie que la société est obligée
les pouvoirs publics sont obligés de me donner un travail
comment il fait, il y a deux solutions possibles
ou bien il oblige quelqu'un à m'employer
donc il viole la liberté de ce quelqu'un
ou bien il fonctionne dans nos propriétés
par le biais des impôts pour créer
un emploi que je pourrais occuper
donc soit il viole la propriété soit il viole la liberté
donc il viole ce que les libéraux considéraient
comme le cœur de leur doctrine
ce ce qu'on dit à peu près tous les libéraux
droits créants, droits résistants ça peut pas marcher ensemble
une ronde parle du droit champignon
voilà le droit qui est là, la mauvaise monnaie
qui chasse la bonne en quelque sorte ouais
là vous avez donné des exemples économiques et on les comprend bien
mais le mariage homosexuel
est-ce que c'est un droit qui va
dans le sens du libéralisme ou pas
alors on arrive sur un type de problème
si vous voulez je vous explique
que les libéraux classiques évidemment n'ont pas envisagé
et c'est tout simplement parce que le problème
ne se posait pas à leur époque
même si beaucoup de libéraux ont été
de fervents défenseurs par exemple Bentham
qui a été un des premiers partisans
de la décriminalisation
de l'homosexualité en Angleterre
ou du droit au divorce par exemple
ou du droit au divorce tout à fait alors là on entre
sur un registre, sur le registre des mœurs
c'est de la culture d'une certaine manière
et là les positions des libéraux
sont moins tranchées, moins unanimes
que sur les questions d'ordre socio-économique
il y a des libéraux progressistes
et d'autres qui sont conservateurs
et les uns considèrent qu'effectivement
la liberté de l'individu doit pouvoir l'amener
à se marier avec quelqu'un qui est de son sexe
si ça lui chante, d'autres
ou les choses
d'un œil un peu plus dubitatif
En fait je vous pose cette question
parce qu'il y a aussi un dilemme chez les libéraux
entre la
prétendue tyrannie de la majorité
à Tocqueville
et maintenant la tyrannie
des minorités que beaucoup de libéraux
mettent en avant
Comment les libéraux sont passés d'une dénonciation
et d'une crainte de la tyrannie de la majorité
à
une crainte aujourd'hui de la tyrannie de la minorité
des minorités ?
L'idée tyrannie de la majorité effectivement
est associée à Tocqueville qui l'utilise dans la démocratie
en Amérique
et dans ce livre il met en garde
contre l'idée selon laquelle
le passage d'une société de type ancien
une société aristocratique
et démocratique
comme celle qui
voit à l'œuvre aux Etats-Unis
et celle qui le voit venir pour l'Europe
grossent un certain nombre de dangers
dont la tyrannie de la majorité
c'est-à-dire alors non pas tant
l'idée selon laquelle les majorités
au sens politique pourraient s'en prendre aux minorités
mais l'idée selon lequel
il y aurait une sorte de
d'arrasement des eccentricités
une sorte d'uniformisation générale des pensées
ce diagnostic a traversé
les époques et il est encore souvent cité
aujourd'hui on peut se demander
rétrospectivement si en fait Tocqueville
n'est pas passé à côté
avec tout le respect que nous devons
à sa grande oeuvre mais s'il n'est pas passé
à côté d'un problème un peu différent
et que les libéraux mettent en vedette
aujourd'hui qui est plus que la tyrannie
de la majorité, la tyrannie des minorités
et là ça a été très bien expliqué par
un sociologue américain Mancur Olson
l'idée consiste à dire simplement
qu'une minorité a un très grand
intérêt à s'agiter beaucoup
à dépenser énormément d'énergie
pour essayer de forcer les pouvoirs publics
à lui donner des privilèges
ou des avantages
par exemple si vous êtes un entrepreneur
dans un certain domaine le syndicat de votre domaine
ou la corporation de votre domaine
a un très grand intérêt à essayer d'obtenir
une protection douanière de la part de l'état
les autres consommateurs ou ceux qui ne font pas partie
de votre corporation eux ont plutôt intérêt
à ce que vous n'ayez pas cette protection
cette avantage cette subvention parce que
vous avez accédé au marchandise étrangère
qui seront vendus moins cher
mais vous avez un immense intérêt
à obtenir ces subventions
ce que disait Adam Smith alors que le reste
de la population bon voilà si vous voulez
le coût de la subvention ça lui reviendra pas
énormément donc il y a une sorte d'assimétrie
entre l'intérêt de la minorité qui est énorme
et l'intérêt de la majorité qui m'a
faut être un petit peu dilué ce qui fait que
les minorités ont beaucoup plus grande force
de frappe que la majorité en réalité face
aux pouvoirs publics
on a parlé des minorités et des majorités
dans le monde économique mais aujourd'hui
quand on parle de la tyrannie
des minorités on pense
au wokisme et à ces minorités
laquelle est la vie des libéraux
sur cette question parce que
aux Etats-Unis
beaucoup de libéraux
sont dans cette mouvance
au wokisme et en France
où on a un intérêt pour
l'universalisme et on a un autre
regard on a l'impression que les libéraux
sont les libéraux actuels
en tout cas ils signent des tribunes
souvent pour s'inquiéter du wokisme
c'est difficile de répondre parce que
quand j'essaye de comprendre
ce que pensent les libéraux
je me réfère à la grande tradition libérale
pour ce qui est des grands auteurs
ça arrête grosso modo à la fin du 20e siècle
Milton Friedman meurt en 2006 je crois
Hayek était mort dans les années 90
Ludwig von Mies dans les années 70
et mon arrond je ne sais plus qu'on exactement
mais on peut importe
si vous voulez ce sont des problèmes modernes
auxquels évidemment ils n'ont pas apporté de solutions
alors ils ont des continuateurs aujourd'hui
mais plus de la même envergure
ce qui fait qu'il est difficile
faire parler rétrospectivement des gens qui ne sont plus là
et d'imaginer la réaction qu'il y aurait été l'heure
sur les problèmes qui nous occupent aujourd'hui
et ceux que vous m'avez cité sont libéraux économiquement
et sont plutôt conservateurs
sur les questions sociales
est-ce qu'il faut être conservateur
pour pouvoir être libéral
pourquoi les libéraux en politique
qui s'organisent comme ça souvent en France
sont aussi conservateurs
c'est-à-dire que vous êtes libéral
parce que vous êtes partisans de la propriété privée
partisans de l'économie de marché
partisans de la liberté de pensée
de s'associer de tout ce que vous voulez
mais simultanément
rien n'exclut que vous soyez conservateur
sur le plan des meurs, sur le plan de la culture
on peut citer ici un libéral
un grand libéral qui aujourd'hui est éclairé
par des travaux assez nombreux
c'est William Ropp, grand tour de libéral allemand
libéral conservateur, c'est-à-dire qu'il nous disait
je suis partisan de la liberté individuelle
parce que je suis chrétien et que je considère
que tous les hommes créés à l'image de Dieu ont les mêmes droits
et ont le maximum de droits
à être libres, je suis partisan de l'économie de marché
parce que j'estime que c'est le seul système
compatible avec la dignité de l'individu
mais simultanément je suis conservateur, c'est-à-dire que je réprouve
à la fois sur le plan des meurs
et sur le plan de l'organisation de la société en général
c'est quelqu'un qui était défavorable
au capitalisme au sens où nous le connaissons aujourd'hui
qui était favorable au retour
d'une société agricole, paysanne
enfin quelque chose que d'autres libéraux
avec un dédain
La PME familiale à l'Allemande
n'est pas l'économie financiérisée
C'est très exactement ça, en gros
son idéal c'était une gigantesque Suisse
tel que lui il y a vécu, tel que lui
pouvait voir la Suisse dans les années 40-50
donc il y a
une forte nuance presque romantique
si vous voulez vous voyez, on peut être libéral
sur un certain nombre d'aspects
et relativement à d'autres questions
de libéraux socialistes mais en termes de progressistes
conservateurs
et les diverses combinaisons sont envisageables
Mais c'est pour ça que c'est compliqué
ce qui est compliqué avec le libéralisme
on a l'impression, si on reprend l'histoire de France
l'histoire politique et économique de la France
on a l'impression que les grandes périodes
qu'on pourrait considérer comme libéral
d'un point de vue économique
ne le sont pas d'un point de vue sociétal
pour prendre un terme d'aujourd'hui
je pense au second empire par exemple
et les grandes périodes qui sont
libérales sur les questions de société
ne le sont pas d'un point de vue économique
je pense au moment où la gauche est au pouvoir
Bernard Quirini
Effectivement, ce sont deux choses tout à fait différentes
Le libéralisme est-il forcément émiplégique
Alors il n'est pas forcément émiplégique
mais il peut tout à fait l'être
il y a plusieurs choses qu'il faut distinguer
on parle du libéralisme comme état de choses
Il faut distinguer cet aspect-là
du libéralisme comme doctrine
parce que le réel soit émiplégique
le réel est un tissu de contradiction
qui est une chose d'étonnant
en revanche qui est plus embêtant c'est quand les doctrines
elles-mêmes le sont
et si vous voulez, les intellectuels libéraux
peuvent parfaitement être libéraux sur certains aspects
et sur d'autres questions qui n'engagent pas
nécessairement leur libéralisme
être plutôt progressiste ou plutôt conservateur
je reprends l'exemple que je donnais tout à l'heure
c'est un peu facile, c'est quand ça les arrange
en fait ça fait un peu je suis libéral
parce que je suis riche et que ça m'arrange
mais je suis conservateur parce que comme je suis riche
je veux que la société ne bouge pas trop
des relations et des rapports de force
dans la société reste avant d'avantage
c'est pas les mêmes sujets et ils n'engagent pas
les mêmes enjeux si vous voulez
la question du mariage homosexuel pour reprendre
cet exemple dont on parlait tout à l'heure
rien à voir avec la situation socio-économique
des individus qui sont susceptibles d'être concernés
et si vous voulez, il y a les questions
d'organisation politique et économique
qui intéressent les libéraux et puis il y a les questions
de culture et de mœurs qui n'engagent pas
directement la question du libéralisme
donc c'est pas les mêmes questions et du coup il n'y a rien d'étonnant
vous avez des gens qui se présentent comme libéraux
mais qui sur les questions de mœurs seront plutôt conservateurs
d'autres gens qui à l'inverse
auront alors ce que vous pourriez appeler une cohérence
mais seront parfaitement libéraux sur, c'est le cas
des libertariens américains par exemple
sur les questions de mœurs ce sont aussi
ouverts qu'on peut l'être
vous avez toutes les combinaisons possibles
la droite
qu'est-ce qu'ils ont fait maintenant
depuis Reagan, Thatcher et les socialistes français
Cornelius, Castoriadis,
philosophe et économiste critiques du libéralisme
Ils ont ressorti
le libéralisme pur et dur
du début du 19e siècle
et moi je suis sûr
que si ça continue comme ça
moi je vois pas comment l'Europe en tout cas
pourra sortir de cette crise dans laquelle elle est
mais il y a une grande offensive
économique et politique
de couches gouvernantes et nominantes
qu'on peut s'aboliser par le nom
de Reagan et de Thatcher
et même de Mitterrand d'ailleurs
France Inter
en quête de politique
Thomas Legrand
Pourquoi maintenant le libéralisme
est devenu un mot négatif
Alors les libéraux eux-mêmes
avec parfois le côté sarcastique
qui peut être le leur
on essayait de développer des explications
ils ont expliqué que comment dire
l'anti-libéralisme était pour l'essentiel
le produit des intellectuels
qui ont diffusé l'idée anti-libérale
Robert Nozick par exemple
le philosophe américain
expliquait que ça s'explique tout simplement
par le fait que l'intellectuel
par définition
il est en posture critique
c'est le rôle de l'intellectuel
il se trouve qu'il vit dans une société libérale
donc il critique si il lui tombe sous la main le libéralisme
C'est une critique qui prend dans la population
est-ce que c'est parce qu'on confond
libéralisme avec capitalisme
et qu'il faut peut-être faire un peu la différence
entre les deux choses
dans lesquelles nous vivons, à tort ou à raison
mais nous les appelons libérales
et le moins qu'on puisse dire c'est que ce sont des sociétés
qui ne vont pas complètement bien
et où il y a toute une série de problèmes
dans la mesure où nous les appelons libérales
il est tentant intuitivement c'est une sorte de sophisme
si vous voulez mais il est presque logique de dire
si nos sociétés vont mal c'est précisément
parce qu'elles sont libérales
donc on impute les mots de la planète ou libéralisme
il est possible effectivement que le libéralisme
soit le coupable
puis ensuite on fait un saut
on consiste à sauter de l'état de chose
à la doctrine et de se retourner
vers les auteurs libéraux pour dire
écoutez vous voyez nous vivons dans des sociétés libérales
qui vont mal donc c'est de votre faute
à cause de votre doctrine
voilà il y a un fossé
qui ne devrait pas être franchi
parce que les doctrines peuvent avoir un impact
sur la réalité mais une chose est la doctrine
la théorie, la littérature
autre chose est la réalité
le mot libéral est maintenant ultra libéral
et est associé aux excès du capitalisme
est-ce que c'est juste ou injuste ?
ça c'est une vraie question difficile
et sur laquelle les libéraux eux-mêmes
ne sont pas tous d'accord
ce qui est intéressant avec le terme libéralisme
c'est qu'il a pris aujourd'hui
dans le discours public et dans les médias
une connotation qui est quand même majoritairement négative
quand on en parle c'est surtout pour en dire du mal
mais simultanément
c'est un terme qui ne peut pas
être coupé de sa racine et l'idée de libéralisme
renvoie l'idée de liberté
et du coup on peut pas se dire
hostile à la liberté, ça ferait quand même bizarre
ce qui fait qu'il conserve
quand vous me dites libéralisme je pense en
histoire rien des idées, je pense à Benjamin Constant
à Tocqueville et je pense à l'idée de liberté
du coup il conserve simultanément
à sa connotation péjorative
une connotation plutôt positive
je pense que c'est ce qui explique la floraison des préfixes
notamment ultra libéralisme
et puis ordo libéralisme
proto libéralisme, néolibéralisme
voilà alors particulièrement ultra
et néo parce que ordo
des mythes, voilà peut désigner quelque chose
qui existe réellement mais je pense que
le succès du terme ultra libéralisme
à une certaine époque aujourd'hui on prend plus la précaution
de mettre ultra devant, procède
à mon avis de ce désir
de ne pas mettre en cause directement
l'idée de liberté qui est au coeur
de l'idée de libéralisme
libéralisme lui-même
après est-ce qu'on peut mettre un signe égal entre
libéralisme économique et capitalisme
les auteurs libéraux eux-mêmes sont partagés
certains font absolument pas la différence
par exemple les deux termes indifféremment l'un pour l'autre
par exemple Milton Friedman en 62
intitule son grand livre
capitalisme et liberté voilà on peut pas être plus clair
pareil pour Ludwig von Mies
il nous dit une société libérale, une société capitaliste
c'est une société où on applique le principe
de propriété privée des moyens de production
pour moi c'est la même chose
il n'avait pas l'habitude de faire des péri-phrases
Hayek par exemple était un peu plus dubitatif
ce qui dit bon capitalisme est un terme
qui laisse à penser
que le régime est exclusivement à l'avantage des capitalistes
donc des entrepreneurs alors que les libéraux
sont toujours donné énormément de mal pour expliquer
que le système libéral
était au désavantage des entrepreneurs
dans la mesure où il leur
il les privait de toute protection
venu de la part de l'Etat donc il les exposait
à la concurrence permanente de n'importe quel nouveau venu
peut marcher sur les plate-bandes et venir les faire
tomber de leur trône en proposant
une idée plus ingénieuse ou en proposant
un produit qui satisfaura davantage les consommateurs
d'autres libéraux
encore sont totalement hostiles à l'idée
de capitalisme, cet cas d'Europe
dont on parlait tout à l'heure
et considère que le capitalisme
est une sorte de
forme contingente
et dégénéré de l'économie de marché
et que rien ne prédisposait l'économie de marché
à devenir ce qu'elle est devenue en gros ce qui reproche
au capitalisme, ce qui l'entend par capitalisme
c'est l'économie de marché
monopolisée ou ligopolisée comme foulée
par les très grands groupes, les grandes entreprises mondialisées
alors pas forcément mondialisées d'ailleurs
à l'époque où il parlait mais enfin l'idée est là
dans son esprit une économie de marché
idéale, c'est un modèle extrêmement concurrentiel
avec une multitude de petites entreprises
qui se font concurrence les unes aux autres
et qui n'aboutissent pas au grippage du système
tel que l'on peut le constater dans les années
Will V
Vous nous avez dit tout à l'heure que
l'origine du libéralisme c'est la liberté
la liberté de pensée, la liberté d'expression
pourtant
Margaret Thatcher c'est Tina
there is no alternative
donc il n'y a plus de liberté à partir du moment
où on ferme le débat
donc l'idée selon laquelle il n'y a pas d'alternatives
me paraît d'une idée stupide
il y a toujours des alternatives
si vous voulez le fait de dire il n'y a pas de l'alternative
n'empêche pas que tant que vous n'empêchez pas
les autres de prétendre qu'il y en a
vous restez libéral si vous voulez
elle serait devenue illibérale
et elle aurait été contradictoire avec elle-même
si elle avait privé ceux qui ne sont pas de son avis
de la possibilité de s'exprimer
Bernard Kirény comment les libéraux envisagent
les problèmes écologiques et l'idée du monde fini
alors que
Constant, Tocqueville, Locke
raisonné dans un monde
infili
dans l'idée de la conquête et du progrès éternel
ça c'est vraiment une excellente question
je crois qu'il y a un certain nombre
de grands défis qui se présentent aujourd'hui
à la doctrine libérale
et celui-là est peut-être l'un des principaux
et certainement même l'un des principaux
c'est-à-dire que les grands auteurs qui ont forgé
la tradition libérale ont vécu pour l'essentiel
entre le 18e siècle et la 2e moitié du 20e siècle
à une époque où les questions liées
à la dégradation de l'environnement
et au réchauffement du climat d'origine anthropique
je laisse de côté la question du consensus
sur le diagnostic, je parle du principe que
le problème existe et qu'il est grave
ces questions ne se posaient pas
ou ne se posaient pas dans les mêmes termes
ce qui fait qu'ils n'ont évidemment pas donné
de réponse aux problèmes qui nous occupent aujourd'hui
on ne peut pas leur reprocher
leurs adversaires socialistes n'y avaient pas
d'avantage sanger mais
ça met le libéralisme, la doctrine libérale
devant un défi majeur
pour poser la question
simplement on peut se demander
si les risques qui se posent
à nous aujourd'hui risquent finalement
d'inhabitabilité de la planète à moyen ou à long terme
ne justifierait pas la prise de contrôle
par les pouvoirs publics
de la production c'est-à-dire de ce qu'on produit
de la quantité dans laquelle on le produit
et des techniques que l'on utilise
pour le produire
ce qui revient aussi à prendre le contrôle
de la consommation puisque vous ne pouvez consommer
que des choses qui ont été produites
même liées à l'environnement ne justifie-t-il pas
que les pouvoirs publics contrôlent directement
ou indirectement la production alors si vous dites ça
un libéral il faut dire c'est du socialisme
oui effectivement alors c'est très intéressant
parce qu'on peut se demander
le libéralisme est mort dans l'écologie
quand vous nous dites ça
c'est la question que je me pose
finalement on peut se demander si la solution socialiste
c'est-à-dire la propriété publique
des moyens de production et le contrôle centralisé
par les pouvoirs publics de la production
des moyens de production
qui ne s'imposera pas
dans un avenir plus ou moins proche
ne reviendra pas par la fenêtre
pour des raisons environnementales et climatiques
alors qu'elle avait été évacuée par l'histoire
s'agissant des raisons pour lesquelles les socialistes
même la défendaient c'est-à-dire des raisons de justice sociale
et de plus grande efficacité
il y a une espèce de retournement
qui est tout à fait spectaculaire
je le présente d'une autre manière
est-ce que les solutions libérales sont encore adaptées
au contexte qui se présente à nous aujourd'hui
et qui n'était pas celui
les libéraux classiques on pensait
un libéral pourrait vous opposer
que justement c'est peut-être par le libéralisme
qu'on peut sauver la planète
parce que les capitaux qui vont
par exemple qui se massaient
pour financer les industries carbonées
vont s'apercevoir
et c'est la main invisible finalement
vont s'apercevoir que ce n'est plus l'avenir
que les consommateurs n'en volent plus
et ils vont
financer les industries non carbonées
et du coup les industries
carbonées vont devenir enfin efficaces
parce qu'elles seront financées grâce au marché
ce qui est certain c'est que
les libéraux actuels développent
un discours pour essayer
de nous convaincre que
les solutions classiques du libéralisme
les principes sur lesquels le libéralisme repose
demeurent parfaitement compatibles
avec la question
écologique et environnementale dans les termes
où elle se pose à nous aujourd'hui
quand vous êtes propriétaire de quelque chose
le libéralisme c'est d'abord ça
vous tenez à ce que ce quelque chose vous dure
le plus longtemps possible de manière
à pouvoir en profiter le plus longtemps possible
donc l'idée même de propriété
serait intrinsèquement conservatrice
de l'environnement
je me pose la question
ça répond pas aux problématiques de prédation
au fait que nous avons tous une vie
avec de 80 ans
si on n'a pas d'enfant on peut se dire
après moi le déluge
mais ce qui est certain c'est que les libéraux aujourd'hui
essayent de trouver avec
des parades à la critique que je viens d'évoquer
je sais pas où ça va nous mener
mais là on a vraiment un grand défi
c'est passionnant pour l'avenir de l'histoire
de ces doctrines
vous avez entendu
ce libéral admet que sa doctrine
bute maintenant sur la question
de l'écologie et sur ce sujet
la philosophe Monique Cantos-Perbert
tente mais sans certitude vous allez l'entendre
de trouver dans le libéralisme
des perspectives pour affronter la crise
écologique
il est certain que le libéralisme
est attaché à l'histoire de la modernité
c'est une histoire d'émancipation
de progrès les libéraux sont des optimistes
au sens
des optimistes tragiques
au sens où ils font quand même
l'hypothèse qu'il y a
une entreprise collective de perfectionnement humain
et donc
d'enrégissement
d'ailleurs pas simplement un sens matériel
il y a dans le libéralisme et depuis
le même siècle une véritable pensée
de la préservation et de la conservation
il y a des libéraux
qui ont
défendu des interventions particulières
pour protéger des formes de culture
ou des langues en voie de disparition
il y a des libéraux qui se sont engagés
dans la préservation aux fonds d'Uni
surtout des littorales
et de certaines richesses naturelles
qui ne devaient pas être livrés
par exemple sans précaution
la spéculation immobilière
qui est aussi dans le libéralisme
une forme de perfectionnité
c'est-à-dire dans certains courants
en tout cas qui ont le vent
au poupe aujourd'hui
il y a des formes de vie
qui sont vraiment importantes
pas du tout parce qu'elles seraient meilleures
que les autres, les libéraux
veulent éviter ce genre
de jeu de valeur
mais qui doivent être aidés
pour continuer à subsister
afin que ceux qui viendront après nous
dans un mode de vie possible
est une idée fondamentale du libéralisme
c'est même la définition de la liberté
dans le monde moderne
et parfois il faut intervenir pour préserver
la réalité de ce choix
la pluralité qui est la condition de ce choix
donc à ce titre
il va de soi que dans ce qui a trait à l'écologie
la préservation de l'écosystème
la préservation d'une nature extrêmement diversifiée
de toute la richesse
du paysage
qui justifie des restrictions de liberté
maintenant les libéraux
ne veulent pas de moralisation
ils veulent des justifications
c'est ce qui distingue au fond le point de vue libéral des autres
laissons la conclusion à Monique Cantosperbert
la philosophe du libéralisme
libéral elle-même
et vous allez voir qu'on est bien loin du Tina
du there is no alternative tachérien
conclusion un peu désabusée
Monique Cantosperbert
il est évident que le monde d'aujourd'hui
n'est plus le monde de la modernité
triomphante dans lequel le libéralisme a prospéré
il est évident aussi
que ce que devient notre monde
à tous les niveaux peut-être
une menace sur la survie du libéralisme
à ce moment là le libéralisme
rejoînera
le cimetière des grandes idées politiques
qui ont façonné l'histoire
en plusieurs siècles
et qui ne sont plus de mise
pour moi je le regretterai plus que tout
mais il est certain que l'évolution ne serait-ce que
les pratiques de gouvernement
avec des décisions de plus en plus concentrées
une mise en évidence des personnalités
hypertrophiles de la décision politique
dans le spectacle
le médiatique quotidien va complètement
contre les valeurs du libéralisme
dans les états qui se prétendent
démocratique et libéraux le fait que
on exalte la personnalité du président
l'état se présente comme pouvant tout faire
il n'y a rien de plus qui inquiète
davantage le libéral que ça
le développement des gaffames
qui sont une grande ressource de liberté
mais c'est une menace directe
évidemment avec tout le monde
enfermé dans sa bulle et sans aucune
exposition aux pensées des autres
ces phénomènes de meute terrorisant
sans son totalement opposé aux idées
ou libéraux le fait peu à peu
l'idée de responsabilité personnelle
se délite or c'est quand même
quelque chose fondamental dans la pensée
libérale ne serait-ce que la liberté
d'exprimer ce qu'on a envie de dire
vous voyez les polémiques déclenchent le fait
qu'un responsable politique
parle de ses goûts
de la manière dont il apprécie une bonne
viande rouge et un bon vin
ce que ça déchaîne comme jugement de valeur
et de réprobation c'est quand même tout à fait extraordinaire
donc même la liberté
d'exprimer des opinions
des préférences qui ne sont pas du tout contre la loi
la loi n'a pas encore sanctionné le fait
d'aimer la viande rouge
mais c'est quand même l'objet d'une réprobation
massive qui est quand même extrêmement
menaçante pour les libertés
du monde contre le problème malheureusement
amène à penser que le libéralisme
vit peut-être
ces dernières années d'où la
nécessité pour tous ceux qui en ont conscience
mobilisé pour la défense
des libertés il n'y a pas de défense et liberté
qui puisse faire en dehors du cadre
de la défense et libéralisme
voilà le libéralisme
où finalement ce qu'il en reste
sont doutes mieux que la dathème
qu'il est souvent dans nos débats
Christophe Imbert à la mise en nom des
et franco-livard dénicheurs d'archives
en quête de politique nous sommes aidés
par Thierry Dupin pour choisir les musiques
et cette semaine à la technique
Raphaël Rousseau à la semaine prochaine
et d'ici là n'oubliez pas
si vous ne vous occupez pas de politique
c'est la politique qui s'occupera de vous
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durée :00:47:17 - En quête de politique - par : Thomas Legrand - Comment un mot, un isme, une idée qui proclame la Liberté, première valeur démocratique et, chez nous Républicaine, a-t-il pu se transformer en anathème ? La crise que nous vivons depuis 50 ans est-elle une crise du libéralisme ? N’avons-nous pas tendance à confondre libéralisme et capitalisme ? - réalisé par : Christophe IMBERT