La source: Le cas Maurice Audin et la torture en Algérie
Radio France 9/18/23 - Episode Page - 48m - PDF Transcript
France Inter.
Aujourd'hui, dans La Faire sensible, l'histoire tragique de Maurice Rodin,
assistant à la faculté des sciences d'Alger, membre du Parti Comiliste algérien.
Nous sommes en 1957, la bataille d'Alger en sanglant la capitale de la colonie française.
Le général Massu a reçu les pleins pouvoirs pour rétablir l'ordre
par tous les moyens, y compris les pires.
C'est dans ce cadre que Maurice Rodin est arrêté par les parachutistes le 11 juin.
Son épouse et ses enfants ne le reverront jamais.
Le jeune homme est officiellement disparu, l'armée maintient qu'il s'est évadé lors d'un transfert.
Il faudra plusieurs dizaines d'années, 61 exactement,
pour que l'État reconnaisse que Maurice Rodin était torturé et assassiné par l'armée française
et que l'État est responsable de sa mort.
Notre invité aujourd'hui, Sylvie Tenot, historienne, directrice de recherche au CELRS, spécialiste de la Guerre Algérie.
Affaire sensible et démission de France Inter,
récit documentaire au Duconset, coordination franco-nière,
chargé de programme Rébecca Donante, réalisation Frédéric Milano.
Fabrice Drouëlle,
affaire sensible,
sur France Inter.
Il est 23 heures, ce 11 juin 1957,
quand des parachutistes et des policiers coignent à la porte d'un appartement
au troisième étage d'un H&M de la rue Flaubert à Alger.
À l'intérieur, tout est calme.
Les trois enfants, Michel, trois ans, Louis, un an et demi et Pierre, un mois,
dorment tranquillement.
Les parents sont couchés, il y a le couvre-en-feu à Alger.
Brutalement, les parents en ont le droit de s'occuper.
Brutalement, les parents entrent, repoussent la jeune femme dans une chambre
et se saisissent de son mari.
Vous l'arrêtez, mais pourquoi, où l'emmenez-vous ?
Pas de réponse.
Mais en sortant, l'indo fini par lâcher,
vous le reverrez, s'il est raisonnable.
Raisonable.
Cette jeune femme s'appelle Josette Audin, elle a 26 ans.
Jusqu'alors, avant cette guerre,
que les autorités s'obstinent à appeler Opération de maintien de l'ordre,
la famille Audin avait tout pour être heureuse.
Heureuse, oui, mais pas insouciante.
Josette Audin évoquait cette période
dans un article de l'Humanité du 13 novembre 2000 signé Minacassi.
Nous étions un couple enthousiaste,
comme pouvait l'être beaucoup de jeunes de notre génération.
Simplement, nous étions révoltés par le colonialisme.
Nous ne supportions pas de voir des gosses algériens
tirer les chaussures dans les rues au lieu d'aller à l'école,
où le mépris a fiché envers la population algérienne d'origine.
Au marché, si le vendeur était arabe, tout le monde le tutoyait.
Nous ne l'acceptions pas.
Maurice Audin est arrêté, mais pour quel motif ?
Aucune charge précise n'est notifiée, aucune instruction menée.
Les parachutistes, alors maître d'Alger, arrêtent qui m'en ressemblent.
Dans le cadeau d'un,
sans doute veut-on lui faire dire où se cachent les responsables communistes
activement recherchés.
L'aveil, un autre communiste a été arrêté et torturé.
Georges Adzait, un médecin.
Ces bourreaux veulent savoir où se cachent Paul Caballero et André Moine,
les deux principaux responsables du Parti communiste algérien,
ainsi qu'Orialeg, directeur du journal Algériepublicain,
tous passés à la clandestinité depuis l'interdiction du Parti
dissout par les autorités en septembre 1955.
Lorsque les parachutistes menacent Adzait,
jusqu'alors, meuaient de torturer sa femme.
Sous ses yeux, ils craquent.
Et ils reconnaient avoir soigné quelque temps plutôt Paul Caballero
caché chez les Audins.
Immédiatement, les paraffils arrêtaient Maurice Audin.
Ils le conduisent à Elbiard,
un immeuble en construction de cet étage,
et le passent immédiatement à la question.
George Adjaj le confirme dans le Monde du 7 juin 1960.
J'ai vu Audin à deux reprises lors de mon séjour dans l'immeuble d'Elbiard.
La première fois, c'est pendant la nuit du 11 au 12 juin 1957.
On est venu me chercher pour me faire répéter devant Audin ce que j'avais dit,
c'est-à-dire que j'avais soigné chez lui, Monsieur Caballero.
Il y avait par terre une porte sur laquelle étaient fixées des lanières.
Audin y était attaché, nu, à Paris Slip.
Des petites pince reliées à la manietto par des fils
étaient fixées d'une part à son oreille et d'autre part à sa main.
J'ai ensuite regagné la chambre de l'infirmerie,
où j'avais été amené dans l'après-midi, à la suite d'une crise de tétanie,
que l'électricité avait provoquée.
De là, j'ai pu entendre l'écrit plus ou moins étouffé d'Audin.
Les tortures infligées à Audin s'en confirmaient par le témoignage d'Henri Aleg.
Le 12 juin, au lendemain de la restation de Maurice,
le journaliste pas séché l'Audin tombe dans le piège.
Car un policier était maintenu en faction,
autant pour interdire à Josette de sortir ou d'alertés qui que ce soit par téléphone,
que pour arrêter tel ou tel visiteur intéressant.
Et, précisément, Aleg est un visiteur intéressant.
Arrêté conduit aux cités au Elbiard, il y subit la même sorte que Maurice Audin.
Ce qui n'est pas surprenant, comme il le relatait dans le film La Disparition,
c'est le dos d'Audin, réalisé par François de Merliac en 2008.
Des gens comme Maurice et d'autres, et comme moi-même,
nous savions que le jour où nous serions arrêtés,
quelles que soient les circonstances, nous serions torturés.
Parce que c'était la règle, à partir d'un certain moment,
c'était la règle les gens qui sont arrêtés pour des motifs politiques.
Tous, je dis bien tous, l'ont peut-être une exception,
mais tous les gens qui étaient arrêtés étaient torturés.
Dans La Question, témoignage écrit en prison sur des feuilles de papier toilette,
publiées par Jérôme Lindon aux éditions de minuit en février 1958,
et interdissies même plus tard, Henri Aleg racontait tortures qui lui ont été infligées.
Et il cite le nom de ses torsionnaires,
ceux-là même qui s'acharnent sur lui depuis la veille.
Le lieutenant André Charbonnier et le lieutenant Érulyn en particulier.
Dès le jour de son arrestation,
un président prouvant une séance de tortures à l'électricité,
suivi de claques monumentales, Aleg émit face à Audin.
Il relate ainsi la scène, bref.
Allez Audin, dites lui ce qu'il attend.
Évitez-lui les horreurs d'hier soir.
C'était Charbonnier qui parlait.
Érulyn me releva la tête.
Au-dessus de moi, je vis le visage blême et agard de mon ami Audin,
qui me contemplait tandis que j'ossillais sur les genoux.
Allez, parlez-lui, dit Charbonnier.
C'est dur, Henri, dit Audin, et on le ramène là.
C'est la dernière fois qu'Henri Aleg voit Maurice Audin.
Le samedi 15 juin, quatre jours après l'arrestation de Maurice,
Josette pense à sortir.
Elle cherche, enfin, à avoir des informations sur l'endroit où est son mari.
Elle alerte l'université,
elle se rend à la permanence des collectifs d'avocats qui défend les nationalistes.
Ils sont en métropole, mais se rendent paroulement en Algérie.
Deux d'entre Pierre Rohn et Jude Borger prennent d'Ociama.
Des télégrammes sont envoyés au président de la République et au président du Conseil.
Le 19 juin, la commission de sauvegarde des droits et des libertés individuelles
est installé deux mois plus tôt sous la pression de l'opinion.
Pour enquêter sur les violations des droits de l'homme commises par les forces de l'or et l'armée française,
inspecte le centre de triage d'Elbiard.
Oui, centre de triage.
C'est le non-officiel de celli où les prisonniers sont généralement torturés
avant d'être envoyés en prison, en tout cas pour ceux qui en sortent vivant,
et jugés à la vavite.
On en a dénombré plusieurs dizaines en Algérie.
Averti de la visite de la commission,
les parachutistes sortent d'Elbiard, les prisonniers les moins présentables,
et notamment Odin, Aydjaj et Aleg.
C'est à ce moment-là que George Aydjaj voit Maurice Odin pour la dernière fois,
extrait de son témoignage paru dans le monde du 7 juin 1960.
On nous transférera, Odin et moi, dans une petite ville-là située à un kilomètre du lieu où nous étions détenus.
Odin a pu me raconter les sévices qu'il avait subis.
Il emportait encore les traces.
Il avait subi l'électricité.
On lui avait fixé les pince successivement à l'oreille,
au petit doigt de la main, au pied, sur le bas-ventre, sur la verge.
Il avait eu l'eau aussi.
A cette occasion, il avait perdu son tricot,
parce qu'on s'en était servi pour envahyoter sa figure,
avant de glisser entre ses dents un morceau de bois et le tuyau.
Et puis bien sûr le parachutiste,
qui lui sautait sur l'abdomen pour lui faire restituer l'eau qu'il avait absorbée.
Le 21 juin, Paul Tegène, secrétaire général de la préfecture de police d'Alger,
est informé de l'arrestation d'Odin par l'avocat Jules Borcair.
Paul Tegène connaît la torture pour l'avoir subie entre les mains d'Agestapo.
Il l'a officiellement interdit au policier de la pratiquer, mais en vain.
Depuis que Masu et ses hommes ont les pleins pouvoirs de police,
il sait que c'est une pratique courante,
pas seulement tolérée, mais acceptée, voire recommandée.
Tegène utilise alors la seule ressource à sa disposition
pour offrir une maigre protection prisonnière.
Il signe une assignation à résidence.
Ceux qui rendent les officiers parachutistes responsables de ce prisonnier
et de ce que peut lui arriver.
D'ailleurs, le lendemain, soit le 22 juin,
José Taudin reçoit un courrier du directeur de cabinet de Robert Lacoste,
ministre résident en Algérie.
Il est l'équivalent d'un gouvernement général.
Qui l'informe ainsi ?
Votre mari est en très bonne santé
et il vous sera accordé prochainement l'autorisation de communiquer avec lui.
Mais c'est-il que le jour où José Taudin lit cette lettre,
soit marié mort depuis la veille au soir ?
Peut-être pas.
Mais les paramassus le savent, eux.
Odin, assemblée-t-il, était étranglé par le lieutenant Charbonnier,
pris d'un accès de fureur face au silence obstiné de son prisonnier.
C'est du moins l'inversion officieuse qui circule pendant la guerre.
Mais un européen tué par les parats, ça fait mauvais genre.
Ces derniers, Charbonnier en tête, inventent alors une fable,
celle de la disparition, qui donne à peu près ça-ci.
Emmené dans une jeep pour être conduit au commissariat de police
pour un interrogatoire,
Maurice Odin profitait d'un virage serré
pour sauter hors du véhicule qui avait dû ralentir
et s'évanouir dans la nature.
On finit all même.
Le sergent qui accompagnait le prisonnier,
ayant failli à son devoir, est comme de 15 jours d'arrêt de rigueur.
C'est en tout cas ce qu'indique le rapport de l'accident.
Pour l'armée, l'affaire est clair et nette.
Maurice Odin est désormais indisparu.
Il le restera officiellement pendant plusieurs dizaines d'années.
Le 1er juillet,
au Josette Odin est informé que son mari s'est évadé.
Mais, elle n'est pas dup.
Elle comprend qu'il est mort.
En métropole, la disparition de Odin signalait dans le journal Humanité
qu'il publie également la plainte Coriale et Crédige
depuis la prison où il a été transféré.
Il y dénonce les tortures dont il a été victime.
Le monde, l'express, suive également l'affaire.
Le cas de Maurice Odin retient tout particulièrement
l'attention d'un jeune assistant d'histoire
à la faculté de Camp Pierre Vidalnaquet.
Il se mobilise dans une logique de réfusarde
au nom d'une France nation garante des droits d'hommes.
Vidalnaquet écrit au monde un courrier d'électeurs
estimant que la disparition de Maurice Odin
et l'absence totale d'information
sur ce qui lui est arrivé est insupportable.
Début septembre, il reçoit une lettre de Josette Odin.
Elle écrit ainsi à tous ceux qui, à travers le courrier d'électeurs
de journaux, semblent s'intéresser au sort de son mari.
Voici l'extrait des mémoires de Pierre Vidalnaquet
parure 1998 aux éditions Le Seuil la découverte.
Josette Odin insistait dans cette lettre
sur le fait que le cas de son mari n'avait rien d'exceptionnel
et que des algériens musulmans disparaissaient tous les jours.
Et c'était vrai.
Ce qui était exceptionnel, c'est qu'un européen,
membre de l'enseignement supérieur,
assistant, comme je l'ai té moi-même,
donc doublement privilégié en principe,
s'évanouissent dans la nature.
Il est vrai qu'on parlait d'évasion,
mais comment expliquer qu'un homme marié
père de trois jeunes enfants puissent disparaître,
voire passer au maquis sans avertir les siens d'un mot
ou d'un appel téléphonique ?
Vidalnaquet prend immédiatement l'affaire à coeur et à bras de corps.
Il propose à Josette Odin de rédiger un fascicule
sur cette disparition
et se lance dans une enquête,
comme le ferait un juge d'instruction, dis-tu-le.
Oui, il étudie toutes les pièces du dossier,
pointe des contradictions flagrantes
entre mes procès verbaux et les témoignages
recueillis par les enquêtes militaires,
puis civils, entre autres.
Comment Odin, que plusieurs témoignages décriffent
comme étant de constitution fragile,
vraisemblablement encore plus fragile après les séances de torture,
aurait-il pu fuir, sauter d'une voiture en marche,
échapper au tir de mitraillettes ?
Au passage, aucune balle n'a été retrouvée sur le jus.
Pourquoi Odin, habituellement menotté comme le sont tous
les prisonniers concondus d'un endroit à un autre,
ne l'aurait-il pas été cette fois-là ?
Et pourquoi le commissariat de police
ou Odin de des prétenduements être emmenés
n'est-il pas au courant de l'arrivée de ce prisonnier ?
Dans la foulée, un comité morisodin crée
qui rassemble un certain nombre de personnalités
sensibilisées par l'appel que José Todin a lancé dans le monde,
appel dans lequel a affaire sa certitude
que son mari était torturé.
Ce comité a deux objectifs.
Dénoncer la torture qui sévient en Algérie
et faire la lumière sur la mort de morisodin.
Dans l'affaire Odin, publiée en 1957,
le fascicule initialement prévu est devenu un livre.
Vidal naquait dissèque le rapport
sur l'évasion du détenu Odin à rédiger par l'armée,
le croise avec les témoignages et différents témoins de l'évasion,
scrute un plan des lieux
et inscrit le parcours de Jeep.
Rien de tout cela ne tient debout.
Pour tous ceux qui s'intéressent à l'affaire,
sauf en l'armée qui n'en démore pas,
morisodin est bien mort sous la torture.
Le 25 septembre,
à la tribune de l'Assemblée,
le député communiste Jacques Duclos
accuse formellement les parachutistes d'avoir assassiné morisodin.
Le ministre résident Robert Lacoste
reconnaît qu'il y a un problème
et rappelle qu'une enquête est ouverte.
De fait, le 4 juillet,
Josette Odin déposait plein de contrées
pour homicide volontaire,
mais elle refuse d'en dire plus.
Tu avais juste 18 ans
quand on t'a mis un béret rouge,
quand on t'a dit rentre dedans, tout ce qui bouge.
C'est pas exprès que t'étais fasciste,
parachutiste.
Alors de combat en combat,
c'est formé ton intelligence.
Tu sais qu'il n'y a ici pas que deux engenses.
Les jambiens et les terroristes,
parachutistes.
Puis on t'a donné des galons,
des rôds de toutes les défaites,
pour toutes les bonnes actions que tu as faites.
Tu torturais un spécialiste,
parachutiste.
Alors sont venus les honneurs,
les décorations, les médailles,
pour chaque balle au fond d'un coeur,
pour chaque entaille,
pour chaque croix noire,
sur ta liste, parachutiste.
Mais malheureusement pour toi,
bientôt se finira ta guerre,
plus d'auturie, plus de combat,
que vas-tu faire ?
C'est fini, le travail d'artiste,
parachutiste.
C'est plus qu'un travail de nana,
tu commandais à ceux qui savent lire,
surtout que t'as appris avec moi
ce que veux dire.
Le mot anti-militariste,
parachutiste.
T'as rien perdu de ton talent,
tu rates pas une embuscade,
mais comment t'y repluves vraiment ?
Tu trouves sa fade,
c'est peut-être pour ça que t'as les yeux tristes,
parachutiste.
Mais si t'es vraiment trop gêné,
d'être payé à ne rien faire,
tu peux toujours te recycler chez tes petits frères.
Je crois qu'on engage
dans la police,
parachutiste.
Aujourd'hui, l'affaire Maurice Odin.
France Inter,
affaire sensible.
En métropole, à la faveur de l'affaire Odin,
en particulier un peu plus tard
de la publication de la question d'Horia Leg,
on commence à faire le procès de la torture.
Des voix se sont élevées depuis le début des années 50
contre cette pratique de grande voix,
celle de Moriak,
la dénonce dans les colonnes de l'Express
à travers un dialogue qui l'entretient avec un ami
qui travaille dans la région de Constantin.
En voici un extrait,
c'est l'ami en question qui parle.
Ils n'ont pas renoncé au coup de nerfs de beaux,
vous savez,
mais la baignoire,
ou plutôt le baquet d'eau sale,
où la tête est maintenue jusqu'à l'étouffement,
mais le courant électrique sous les aisselles
et entre les jambes,
mais l'eau souillée introduite par un tuyau
dans la bouche,
jusqu'à ce que le patient s'évanouisse.
Cela ne laisse guerre de trace en effet,
pas plus que les goulots de bouteilles enfoncées.
Au même moment,
Kloch Bourde, ancien membre
du Conseil National de la Résistance,
publie dans France Observateur
un article du même tonneau.
Il y interpelle le gouvernement sous le titre
« Votre Guestapo d'Algérie ».
Et le gouvernement réagit.
François Mitterrand,
alors ministre de l'Intérieur
du gouvernement de Pierre-Madness France,
confie à Roger Vuillom,
inspecteur général de l'administration,
une enquête sur les sévices policiers en Algérie.
Et ses conclusions sont claires.
La police torture en Algérie.
Et depuis longtemps,
et cela est tellement admis,
tellement habituel,
que Vuillom suggère non de bannir ses pratiques,
mais d'en autoriser
quelques-unes,
de les réglementer en quelque sorte.
Extrait de son rapport,
lu par un comédien
dans une émission de France Culture en 1987.
On recommande les méthodes
utilisant l'eau et l'électricité
parce que, pourvu qu'elles soient utilisées
avec précaution,
elles produisent, dit-on,
un choc plus psychologique que physique
et ne constituent pas une cruauté excessive.
Selon l'opinion de certains médecins
qui m'a été communiquée,
la méthode du tuyau d'eau,
si elle est utilisée comme indiquée si-dessus,
ne fait courir aucun risque
à la santé de la victime.
Ce n'est pas le cas de la méthode électrique
qui peut être dangereuse
si on l'utilise sur une personne
dont le cœur est affecté de quelque manière.
J'incline à croire que ces méthodes sont acceptables
et que, si elles sont utilisées
de la manière contrôlée
qui m'a été décrite,
elles ne sont pas plus brutales
que la privation d'aliments,
de boissons et de tabas
qui a toujours été admise.
Mais des voix si opposent,
jusqu'au cœur de l'État,
on ne va quand même pas officielliser la torture.
Il n'empêche.
Les témoignages s'accumulent.
Jean-Jacques Servanche-Rébert,
jeune fondateur de l'Express,
mais surtout dans l'Algérie
où il a passé six mois comme réserviste,
en fait le récit en feuilleton
dans son journal, une fois rentré en métropole.
Poursuivi pour atteindre
au moral de l'armée,
il s'avresse à son ancien chef,
le général Jacques Paris de la Bollardière,
pour lui demander son soutien.
Oh, un personnage Bollardière,
un grand soldat
et des décorations les plus prestigieuses,
courageux, respectés, admirés,
aimés de ses hommes et non violents.
En désaccord avec la façon de faire
de ma suite de ses parachutistes,
il vient de demander
être relevé de son commandement.
Le 29 mars 1957,
Jean-Jacques Servanche-Rébert
publie dans l'Express
la lettre du général de Bollardière.
Elle est concise,
claire et précise,
elle dit notamment.
Je pense qu'il était hautement souhaitable
qu'après avoir vécu notre action
et partager nos efforts,
vous fassiez votre métier de journaliste
en soulignant à l'opinion publique
les aspects dramatiques
de la guerre révolutionnaire
à laquelle nous faisons face
et l'effroyable danger
qu'il y aurait pour nous
à perdre de vue.
Sous le prétexte fallacieux
de l'efficacité immédiate,
les valeurs morales qui seules
ont fait jusqu'à maintenant
la grandeur de notre civilisation
et de notre armée.
Il pèse ses paroles de 2 mois de forteresse.
Pour quelques courageux comme Bollardière,
ou comme le sergent parachutiste Noël,
faveur lié à qui en 5 août 1956
préfèrent déserter
que son prisonnier
plutôt que de l'exécuter
comme on lui commande,
combien d'autres ont obéi aux ordres,
se sont habitués,
y ont pris du plaisir peut-être.
Mais toutes les accusations portées
dans la presse
ou dans les brochures
sont au mieux ignorent et au pire,
ni ceux qui s'en font les côts
sont des ennemis de la France, des traîtres.
Ils veulent s'appeler le moral de la nation.
Comment pourrais-t-on torturer
de façon systématique
au pays des droits de l'homme ?
Enfin, impossible !
Et si tenter que cela arrive,
il s'agit de regrettables exceptions
à mettre sur le compte d'individus isolés.
Certains finissent par reconnaître
la pratique d'interrogatoire musclé
selon le fémisme en vigueur.
Mais ils sont, dit-ils, indispensable
pour éviter de nouveaux attentats
du Eiffelène.
En résumé,
on ne torture pas.
Et s'il arrive qu'on le fasse,
c'est pour sauver 2, 3, 20 européens
d'un attentat aveugle.
Argument balayé par Jacques de Bollardier
dans un film de 1974,
réalisé par André Gazu et Pierre Stécky,
produit et diffusé par la télévision
suisse romande,
superbement ignoré par la télévision française.
Sur temps de la résistance,
j'avais chanté moi-même le chant des partisans,
ami quand tu tombes,
un autre ami sort de l'ombre à ta place,
et je savais très bien
qu'on n'arriverait absolument pas
à démenter les résultats terroristes
et que nous courirons à un échec
et à une prise de conscience
de plus en plus grande
par tout le peuple algérien
de la nécessité pour lui
de se rendre indépendant
et de se rallier au Eiffelène.
De son côté,
le mathématicien Laurent Schwartz,
président des comités haudins,
écrit dans Le Monde du 26 octobre 1960,
sous le titre simple Vérité,
que les tortures sont, je le cite,
directement encouragées
par des ministres en exercice
M. Robert Lacoste,
Max Lejeune,
Maurice Bourges Monoury,
Pierre Vidal-Naquet-Ranchéry
dans une interview
donnée à la radio publique
en 1972.
Ce qui m'a frappé,
ce qui m'a bouleversé
dans la guerre d'Algérie,
c'est que les faits de tortures
dont ils s'agissaient
n'étaient pas des faits individuels,
ils ne s'agissaient pas d'accidents,
ils s'agissaient d'un système
dans lequel l'État tout entier,
notre État,
s'était trouvé peu à peu engagé
jusqu'à aboutir
à une dégradation
dont nous subissons
encore aujourd'hui les conséquences.
Pour Joséthe Haudein,
comme pour tous les membres
du comité Haudein,
ils font continuer à parler
sans relâche de Maurice.
Et c'est dans cette logique
que le 2 décembre 1957,
sa thèse des mathématiques
qu'il avait quasiment terminée
en tombé au main des parachutistes
et soutenu à la Sorbonne
inabsentia, c'est-à-dire
en l'absence de l'intéresser
devant un grand amphi
plein à craquer.
Joséthe Haudein est là,
la mère de Maurice également,
François Mauriac aussi.
Maurice Haudein,
il est représenté par René de Posselle,
son patron à la faculté des sciences
d'Alger et Laurent Schwartz,
qui est donc à l'initiative
de cet événement
largement couvert par la presse,
et il en est le rapporteur.
Ce travail reçoit la mention
fort honorable
et Haudein est proclamé docteur.
La soutenance de la thèse
et l'écho qu'elle a eue
relance mollement l'instruction,
mais la justice militaire d'Alger
continue à imposer sa loi.
En février 59,
elle conduit le procès
de plusieurs communistes
pour reconstitution
de ligues dissoutes
et atteintes
à la sûreté extérieure
de l'État.
Parmi les accusés,
figurent Henri Alleg,
et Maurice Haudein,
toujours officiellement considéré en fuite.
Nouveux commentaires
de Pierre Vidal Naquet
dans l'affaire Haudein
dans la version richie de 1989.
La justice militaire,
qui avait bloqué toutes les plaintes
en sévices qui lui avaient été soumises,
se préparait imperturbablement
à juger un mort,
et ceci dans des conditions assez particulières,
puisque au terme
d'un article
du Code d'instruction militaire
en vigueur à l'époque,
aucun conseil, aucun avoué
ne pourra se présenter
pour défendre l'accusé
jugé par Contumas.
Il faut attendre le début
de l'année 60
pour que la justice
ait un nouveau droit de cité.
Le dossier judiciaire
de l'affaire Haudein
est dépaysé à Reine
pour la sérénité
des débats
selon l'expression consacrée.
Le juge d'instruction
Etienne Hardy
fait son travail.
Il convoque
un certain nombre
des militaires,
dont Massus, Charbonnier
et Osares.
Ce dernier
est alors le commandant
de Charbonnier,
et il refera parler de lui
dans les années 2000
en reconnaissant.
Sur le tard,
l'usage généralisé
de la torture
et sa responsabilité
directe
dans le sort
de certains suicidés.
Ces hommes
ne se rendent pas
chez le juge
de Quété-de-Cœur.
Celui-ci doit faire intervenir
à deux reprises
le ministre
de la Justice
Edmond Michelet
pour qu'il s'y résolve.
On se doute
que la version
des parachutistes
reste un changé.
Dans son ouvrage
de 1989
sur l'affaire,
il y a l'explication
que la capitaine Charbonnier
sert au juge.
Bien entendu,
il n'y a tout,
y compris
l'existence de la torture,
cette invention
de la propagande communiste.
Oui, il connaissait
l'accusation qui pesait
sur lui
et aurait porté
plein d'infamations
contre le comité
Maurice Audin
s'il en avait tué
l'autorisation.
Il était clair
qu'il avait lu de près
l'affaire Audin
qui mettait en lumière
toutes les incohérences
de ses contendues,
car il s'efforça
de boucher les trous
de son emploi du temps.
Quant à Massu,
il se réfugie derrière
les directives gouvernementales
qui étaient, je cite,
d'arriver
coûte que coûte
à la destruction,
à l'extermination
sans ménagement
de l'organisation rebelle
et de tous ses satellites
en particulier
le Parti communiste algérien.
Comme ça, c'est clair.
Le juge d'instruction
convoque Robert Lacoste
mais cette demande
est bloquée.
Et puis arrive
les accords des viens
en mars 62
qui mettent fin
à la guerre
et définissent
les conditions
Ces accords prévoient
également
une amnistie générale.
Un décret
déclare notamment
amnistier
l'effet commun
dans le cadre
des opérations
de maintien de l'ordre
dirigés contre
l'insurrection algérienne.
Comprendre
les tortures,
meurtres individuelles
et collectifs,
exactions diverses.
L'instruction éclose,
le juge Ardisigne,
Nord de Nance,
de non lieu.
Sur la mort
d'Odin,
sur le nom
et la responsabilité précise
de tous ceux
qui sont impliqués
dans son assassinat
sur le lieu
de sa dépouille
également
ni vérité
ni justice.
Mais Josette Odin
ne désarme pas.
La figure
et le nom
de son mari
restent vivants
et reparaissent
régulièrement
dans la presse.
En 2001,
elle est l'une des
signateurs
de l'appel des 12
qui sollicitent
de Jacques Chirac,
président de la République
officielle de la torture
pratiquée en Algérie
au nom de la France.
Cet appel
ne recueillera que
quelques belles paroles
sans suite
du premier ministre
sur un nécessaire
travail de vérité.
Josette Odin
s'exprime d'une voix douce,
parfois
presque un murmur,
mais elle cache
une télacité d'acier.
Elle refuse
qu'on continue
au plus haut
au niveau de l'État
observer un silence
indifférent
ou coupable
ou complice.
Le 21 juin 2007,
50 ans au jour pour au jour
après l'assassinat
de son mari,
elle écrite
l'être ouverte
au président de la République,
publiée par l'humanité
sous le titre
Vérité pour Morousse Odin,
dont voici un extrait.
Je ne demande pas,
Monsieur le Président,
dans le cadre
de cette démarche,
que s'ouvre un procès
des torsionnaires
meurtriers de mon mari.
Sachons que
des lois d'amnistie
les couvrent,
même si je pense
que la justice française
se grandirait
en appliquant
une jurisprudence
internationale
pour laquelle
aucune affaire criminelle
ne peut être éteinte
tant que le corps
reste disparu.
Je vous demande
de ne pas laisser
enfoui
dans la fausse commune
de l'histoire
sans rendre
au moins son identité
et sa vérité
à un homme
qui avait tellement
l'Algérie au cœur.
Et dont les convictions
de jeunes mathématiciens
et de militants communistes
étaient si pures
qu'il s'est dressé
contre des méthodes barbares.
Le président s'appelle alors
Nicolas Sarkozy.
Il ne répondra
jamais à cette lettre.
Sans successeur en vange,
ouvre une brèche.
En 2014,
François Hollande
clôt officiellement
la thèse de l'évasion
et reconnaît
qu'Odin est mort
lors de sa détention.
Commentaire
de l'historienne
Sylvie Ténaud
dans le journal
de France 24.
Il y a un progrès
parce que François Hollande
reconnaît que
cette évasion
était en fait
un mensonge.
Là où il reste
un pas à faire,
c'est de
reconnaître
que Maurice Odin
n'est pas simplement
mort durant sa détention
comme un prisonnier
qui se serait suicidé
dans sa cellule,
par exemple,
mais qu'il est mort
durant sa détention
alors qu'il était
soumis
à des tortures
et qu'il était
sous la responsabilité
des militaires.
Donc il manque un pas
vers la reconnaissance
de la responsabilité
de l'État
dans la mort
de Maurice Odin.
Et ce pas
est franchi le 13 septembre
2018.
Devenue président
de la République,
convaincu par
deux députés,
Cédric Villani,
Macroniste,
mais surtout mathématicien
et le communiste
Sébastien Jumel,
Emmanuel Macron,
reconnaît,
au nom
de la République française,
que Maurice Odin
était torturé
à mort par des militaires
et que sa mort
était rendue possible
par un système
légalement institué.
Emmanuel Macron
se rend
au domicile
de Josette Odin
en région parisienne
où elle habite
depuis 1966
et lui demande
pardon
au nom
de la France.
Josette Odin
s'était un peu après
le 2 férié 2019.
Son combat
aura porté ses fruits.
L'État a reconnu
sa responsabilité
dans la mort
de Maurice Odin.
Mais elle n'aura
jamais su
ce qu'il était devenu
de la dépouille
de son mari.
Et ses torsionnaires
n'auront jamais été
jugés.
Charbonnier
recevra même
la légion d'honneur
qui serait élevée
grâte de commandeur.
Toute sa vie
Josette Odin
aura eu
sous les yeux
une photo de son mari
regardant l'objectif
d'un air joyeux
confiant,
incroyablement juvénile.
Il tient
le journal Humanité
dont on aperçoit
le titre
de l'éditorial
Bé en Algérie.
France inter
A faire sensible
Fabrice Droëlle
Aujourd'hui
le sort dramatique
de Maurice Odin
en Algérie
dont nous allons parler
avec notre invité
Sylvitane
au Bonjour.
Vous avez entendu
la fin de ce récit.
Vous êtes historien
spécialisé
dans la Guerre d'Algérie.
Vous venez
de publier
aux éditions
Bouquin
un dictionnaire
de la Guerre d'Algérie
que vous avez
co-écrit
avec Tramor
Kebner
et Ounissa
Siarit Angour
Qu'est-ce qui vous a conduit
à vous intéresser
à la Guerre d'Algérie
et plus particulièrement
je vais me
préciser ma question
plus particulièrement
à la justice
pendant cette période
parce que c'était
ça le sujet de votre thèse.
En fait
j'ai grandi
en bon lieu
et dans la deuxième
moitié des années 80
on était à cette époque
lointaine
aujourd'hui
où le Front National
commençait tout juste
à s'installer
dans le paysage politique
français
et à cette époque-là
on avait l'antiracisme
bon enfant
et léger
c'était très consensuel
donc j'étais
dans cette vague-là
et contrairement
à l'idée
qu'il y a eu un espèce
de tabou et qu'on n'en parlait pas
on en parlait beaucoup
et donc moi j'étais
dans une ambiance
où on évoquait
beaucoup la Guerre d'Algérie
pour dire en deux mots
à quoi le racisme
peut conduire
et donc
finalement je suis
devenue historienne
avec l'idée naïve
mais c'était la mienne
qu'on peut tirer
des leçons de l'histoire
et ce qui m'intéressait
c'était
la République en guerre
et ses contradictions
donc la justice
et le droit d'exception
n'est complètement
au cœur de tout cela
Dans le pays
des droits de l'homme
Totalement
C'est la dichotomie
et là aussi
ça choque
C'était
le ressort majeur
de l'engagement
de quelqu'un
comme Vidal Nakey
qui se réglamait
de l'engagement
de réfusard
qui considérait
Tout à fait
d'ailleurs on a évoqué ça
on a dit une logique
de réfusard
alors la justice
qui dans le cadeau d'un
rend non lieu sur non lieu
et donc se refuse
à mettre en cause
l'armée
et spécifiquement les parachutistes
dont le récit
qu'on porte pourtant
en nom d'un vrai semblant
ça m'a dit bon
pour ne pas dire
d'impossibilité
mais comment
peut califier
cette justice
peut-on la califier
est-elle digne de notre démocratie
qu'elle soit
version cinquième
ou quatrième République
parce que je précise
que ce drame
de la guerre d'Algérie
commence sous la quatrième
et continue sous la cinquième
En fait j'ai rompu
avec l'idée
que la République
et ce modèle
idéal
et infaillible
ça c'est un horizon
mais c'est pas une réalité
donc tout régime
à sa part d'ombre
La série est une République
pour elle est vraiment
très très loin dans la comparaison
Voilà et donc
cette justice
elle est
dans le contexte
d'une législation d'exception
la tortue reste interdite
ça elle est toujours restée
illégale
c'est ce qui permet d'ailleurs
qu'il puisse y avoir
des plaintes
et des instructions
mais on est dans un contexte
où il faut absolument
le rappeler pour cette histoire
les pouvoirs de police
au parachutiste de Massu
c'est une décision politique
ça vient des pouvoirs spéciaux
loi votée
pour le gouvernement
de Guy Mollet
et à la suite
des pouvoirs spéciaux
on arrive à cela
donc vous avez parlé
du jugeard dit
il a fait ce qu'il a pu
il aurait peut-être fait
pu faire plus
mais ce qui compte
c'est qu'on est dans un contexte
où le pouvoir politique
ne veut pas de la vérité
Et pourtant
il y a des aveux
la coaste
qui dit bon
la torture c'est pas bien
on peut être un peu dur
mais voilà
il règlemente la torture
c'est un aveux
non ?
Vous savez
même antérieurement
j'étais très contente
que vous parliez
de la torture avant la guerre
en 1949
il y a une circulaire
de gouverneur général
de l'époque
qui dit qu'il ne faut pas
pratiquer les sévices
quand on arrête les nationalistes
donc
on le sait
c'est toujours très frappant
pour moi d'ailleurs aujourd'hui
quand on dit on ne le savait pas
vous lisez la presse de l'époque
vous avez lu le monde
dans le monde en 57
au printemps
avant l'affaire Odin
il y a
tous les jours
ou presque
des articles
il y a un débat public
sur la torture
et avant Odin
on a dénoncé
le soi-disant suicide
de l'arbi ben midi
le soi-disant suicide
de Ali Boumenjel
donc on le sait
au moment
où Maurice Odin est arrêté
on sait que
à déjà ce moment-là
quand les parachutistes
nous arrêtent
on risque vraiment
de mourir
surtout quand on est communiste
parce que c'est
une dimension très importante
parce qu'il y a peut-être
dans la tête
des colons français
des dirigeants français
l'idée que probablement
l'URSS et les partis communistes
soutiennent
le soulèvement algérien
évidemment
et qu'avec les communistes français
on est une espèce de sous-marin
enfin des forces
qui demandent la dépendance
qui vont être très fortes
avec le EFLN
donc les communistes
sont une cible
est-ce que c'est lié à ça
on est en peine guerre froide
je ne le rappelle
il n'y a pas de déconnexion totale
avec la guerre froide
ça c'est plutôt
la vision des militaires
qui reviennent d'un dos chine
et qui pensent
que l'ennemi communiste
est maintenant en Algérie
même si
assez rapidement
on comprend que le EFLN
n'est pas communiste
quand même
les communistes français
c'est beaucoup plus compliqué
parce que quand je vous parlais
des pouvoirs spéciaux
les députés communistes
votent la loi
des pouvoirs spéciaux
pour guimoler
vous avez dit
sur l'humanité
que tient Maurice Audin
dans les mains
c'est la paix en Algérie
donc
il y a une ambiguïté
à la direction du PCF
sur le sort de l'Algérie
les violences sont dénoncées
vous lisez l'humanité
c'est là que vous avez le plus d'éléments
sur les violences de l'armée française
mais l'idée de l'indépendance
ne fait pas forcément consensus
parce que le PCF
il est dans un jeu politique national
donc si on veut
ménager la SFIO
on va faire des concessions
en Algérie c'est très différent
le PCA
le PC algérien
Parti communiste algérien
ou il y a aussi
des lignes un peu fluctantes
mais sauf que les militaires
en Algérie
font l'amalgame
entre les communistes
et le FLN
le PCA
a aussi une diversité
il y a
algé un groupe
qu'on appelle
les combattants de la libération
qui commettent des attentats
par exemple
il y a eu Fernand Ifton
et sa fameuse...
dont nous avons raconté
l'histoire
avant les vacances d'été
c'est plutôt au ennemi
et donc
il y a des communistes
qui sont
investis
dans les attentats
mais c'est pas le cas d'Odin
et ça c'est vraiment très important à dire
parce que je dirais
que dans le débat public à l'époque
on eut complètement
la pratique de la torture
à l'existence du terrorisme
et donc
il y a toujours suspicion
mais Odin n'a jamais
trompé dans une quelconque
action violente
et c'est ce qui permet aussi
la reconnaissance d'ailleurs
parce que vous imaginez bien
qu'un président de la République
n'aurait jamais pris le risque
de reconnaître la responsabilité de l'État
si jamais quelqu'un avait pu dire
non mais vous vous rendez compte
cet homme là
a posé une bombe un jour
ou participé à un groupe
qui en posait
France Inter
à faire son cible
Cibitano nous avons évoqué
au fil du récit
la commission de sauvegard des droits
et des libertés individuelles
l'instaurait au printemps 57
sous la pression de l'opinion publique
cette commission a été impuissante
dans le cas Odin
mais a-t-elle été par ailleurs
est-ce que par ailleurs elle a pu
faire rufre utile
d'une façon ou d'une autre
cette commission
c'est un machin
ou ça a servi
elle est utile pour nous aujourd'hui
parce qu'elle a reçu tellement
de dénonciations
que ces archives sont précieuses
pour nous aujourd'hui
pour connaître
les formes
de la répression
des indépendantes
d'Algériens
c'est un machin
je le dirais pas
dans ces mots-là
et j'ai posé la question
je ne l'ai pas affirmé non plus
oui
ben
en fait
elle offre une
solution
à la dénonciation
des tortures
parce que
en 57 on est vraiment
au printemps
des dénonciations
qui montent
donc le gouvernement
doit faire quelque chose
désavouer les militaires
ça n'est pas possible
mais il faut donner une réponse
parce que
ce qu'il faut dire
de façon vraiment cruciale
c'est que vous l'aurez compris
ce qui se passe Algi
à ce moment-là
c'est un système
on ne sait pas combien
mais des centaines
et des centaines
peut-être des milliers de personnes
qui ont disparu comme Odin
et bien avant lui
donc la pression
elle arrive jusqu'à Paris
parce que
Odin est un universitaire
sa femme est très militante
donc son affaire arrive à Paris
mais les autorités à Algi
reçoivent quotidiennement
des plaintes de famille
des femmes
qui vont à la préfecture
des pères
des frères
qui disent voilà
on a arrêté
tel ou tellement de ma famille
et on ne sait pas
ce qu'il est devenu
et alors la réponse
il s'est évadée
elle n'est pas inventée
pour Odin
c'est quelque chose qu'on répond
déjà aux familles
sauf que d'habitude
on ne va pas jusqu'à jouer
une mise en scène
parce qu'en fait
les familles rentrent chez elles
et non pas du tout
le même capital politique
et social
et culturel
pour faire monter l'affaire
jusqu'à Paris
l'humanité a publié
en février 2018
le témoignage d'un ancien appelé
qui pense avoir renterré
le corps de Maurice Sondat
parce que le mystère
reste entier
vous n'êtes pas
enquêtrice juge
on ne sait pas
bon voilà
vous n'avez pas plus que moi
enfin
qu'est-ce que vous pensez
de témoignage comme celui-ci
par exemple
qui pense avoir renterré
le corps de Maurice Sondat
est-ce que ça pense vraiment
quelque chose ?
plus le temps s'écoule
moins vous pouvez vérifier
donc tous les dire sont fragiles
et la mémoire a ses fragilités
si on fait les forts
chacun d'entre nous
d'essayer de se souvenir
de choses qu'on a faites
quand on avait 20 ans
il y a bien des distorsions
donc ces dire-là
sont tout aussi fragiles
que d'autres
et c'est vrai que la localisation
du corps reste
quelque chose qui aurait été
important certainement
pour Josette
mais
quand même très
très compliqué à faire
alors Josette
Odin
vous en parlez beaucoup
on en parle beaucoup
vous l'avez souvent rencontré
vous avez souligné
l'innusable télacité
de cette femme
quelle souvenir
vous gardez d'elle ?
ben
j'ai envie de dire
que je regrette un peu
de pas l'avoir connu
dans les années 50
mais j'étais pas là évidemment
parce que
c'est vrai que dans les images
par exemple
en septembre 2018
autour d'Emmanuel Macron
on voit une femme
très affaiblie
et très âgée
les gens qui l'ont rencontré
jeune
parlent de cette fragilité
hein
mais en fait
c'était
avant tout
une militante
une militante
qui a dédié sa vie
certainement
au combat pour essayer
de savoir la vérité
sur son mari
et ça c'est vraiment dramatique
qu'elle soit morte
sans la connaître
mais c'était vraiment
une communiste
une militante communiste
en 2018
elle allait encore
à la fête de l'Humma
donc c'était aussi
une continuité
d'un engagement
anticolonialiste
d'une dénonciation
des violences de l'État
d'une dénonciation
des violences
de la torture
Josette Odin
elle est née en Algérie
dans une famille
française d'Algérie
et elle racontait bien
qu'à l'époque
même au sein de sa famille
des gens désapprouvaient
ses engagements
donc c'est une femme
c'est une grande militante
vraiment
et alors
aujourd'hui
où on fait quand même
pas mal de travaux historiques
on essaye de revaloriser
la place des femmes
dans l'histoire
je pense qu'on pourrait
revoir l'histoire
cette affaire Odin
en regardant un peu moins
Vidal Nakka
même s'il joue un rôle
majeur
et un peu plus
Josette Odin
nous on a beaucoup cité
Vidal Nakka
vous avez raison
mais
on peut aussi
déplacer le regard
vous pensez qu'il fallait
un président née
après la guerre d'Algérie
pour que
la responsabilité
de l'État soit reconnue
quoi c'était le cas
avec le Macron
ça compte ça
je pense
non moi je pense pas
que ce soit une question
naissance
c'est pas une question
de génération
je modère
c'est quand même
c'est quand même
un président
formé à Sciences Po
grande école
les autres aussi
Ricœur et la mémoire
il est d'une génération
où
dans les années 90-2000
autour de Vichy
c'est complètement
installé l'idée
que la mémoire
est à prendre en charge
et à prendre en compte
par le politique
c'est là qu'il y a une rupture
pour moi c'est plus
une rupture de culture
politique
et du rapport à la mémoire
parce qu'il y a effectivement
un grand débat
il y a quelques années
entre la politique
et les historiens
qui doit être
qui doit être
je cherche le mot
séparé ou pas
ouais c'est ça
en fait
en fait là
je vous dis pas que
toute la politique
et l'activisme
mémorial de Macron
les historiens
en sont contents
mais
il y a une accélération
certainement liée au fait
qu'aujourd'hui
ça fait consensus
que le pouvoir politique
prenne en charge
les questions mémoriales
parfait
ce sera le mot
de la facile vitale
merci infiniment
au revoir
c'était à faire sensible
aujourd'hui Maurice Audin
la torture en Algérie
une émission que vous pouvez
réécouter en podcast
bien sûr
à la technique aujourd'hui
il y avait Julia Michel
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
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c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
c'est à dire
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durée :00:48:00 - Affaires sensibles - par : Fabrice Drouelle - Aujourd’hui, dans Affaires Sensibles, retour sur la courte existence de Maurice Audin, assistant de mathématiques à la faculté des sciences d’Alger et membre du parti communiste algérien.