Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: L’attentat contre Jean-Paul II - Le débrief

Europe 1 Europe 1 4/10/23 - 12m - PDF Transcript

Renaud.

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Pour commenter son histoire du jour,

Christophe Andelat reçoit un invité,

acteur direct de son récit.

Voilà donc pour ce récit que nous allons débriffer

dans un astin avec Romiana Ogarchinska.

Pardon, madame, d'avoir écorché votre nom

pendant toute la partie enregistrée de ce récit.

Vous avez écrit la vérité sur l'attentat contre Jean-Paul II

au presse de la Renaissance en 2007.

On va reprendre cette histoire à zéro dans...

Dans un instant, je voudrais juste que vous commentiez

cette dernière scène qui vient renforcer l'idée

d'un étrange Ali Aqqa,

puisque il baisse la main du pape.

On a affaire à donc quelqu'un qui est censé être

militant d'extrême droite, musulman,

et qui semble totalement retourner

par ce geste du pape à son endroit.

Oui, c'est ce qu'il a d'ailleurs déclaré à plusieurs reprises

après avoir rencontré le pape, après cette rencontre

qui est effectivement à marquer les esprits,

mais également des années après.

Et il l'a presque considéré comme un frère,

également en lui adressant des lettres,

des lettres dans lesquelles il l'a mis en garde

contre ceux qui étaient les plus proches de lui,

puisque vraiment en fin d'emprisonnement,

et quand il a été libéré,

Ali Aqqa a commencé à pointer du doigt

comme commanditaire le Vatican lui-même.

Si j'ai bien compris, au bout de votre enquête,

qui peut-être ne s'achèvera jamais,

vous êtes bulgares d'origine vous-même,

vous ne croyez pas du tout à la manipulation d'Ali Aqqa

par les services secrets bulgares.

Disons que je n'ai pas trouvé de preuves ni d'éléments

qui puissent m'en convaincre.

Et pourtant j'ai brassé énormément de documents, d'archives,

j'ai eu des accès assez restreint

et parfois même des documents que je n'aurais jamais dû voir,

parce que quelqu'un de malveillon aurait pu les utiliser à charge,

mais véritablement je n'ai pas pu trouver les éléments

qui pouvaient mener et confirmer surtout cette fameuse filière bulgares.

En revanche, en enquêtant, il y a d'autres pistes qui s'ouvraient

et qui étaient également les pistes

sur lesquelles avaient travaillé les juges d'instruction italien.

Et donc j'ai beaucoup aussi travaillé avec eux

pour essayer de comprendre ces affaires.

– Restons sur les bulgares, alors pour quelle raison,

deux mois après sa condamnation, les services secrets bulgares

vont à deux reprises de voir en détention

et c'est la deuxième fois qu'ils disent c'est les bulgares.

Pourquoi est-ce qu'ils disent c'est les bulgares?

Vous avez une explication à ça?

– Alors, ce sont en réalité les services secrets italiens

– Italiens, pardon, chez Dicois français.

– qui lui rendent de visites en prison,

il a eu de multiples visites en prison.

En fait, après sa condamnation qui est assez rapide,

ce premier procès bâclé,

il se retrouve dans une prison qui est très connue

parce qu'elle est surnommée l'Hilton de la détentionnée,

donc c'était la prison des chefs mafieux et de la camora.

Ils étaient très bien logeés, très bien souhaités.

– Il avait de la moquette sur le mur.

– Et donc il se retrouve là-dedans un petit peu perdu,

ne parlant pas italien, il commence à apprendre l'italien,

il l'aide, ils deviennent amis.

– Avec les chefs mafieux?

– Avec les chefs mafieux.

Et durant sa détention,

il se demande comment il va sortir de là.

Il est condamné à une lourde peine de soi-même.

Et il se dit, mais il faut que je trouve un moyen,

entre-temps la loi italienne change justement

pour permettre à tous ceux qui sont des repentis,

aux peines titaux, d'obtenir des remises de peine,

donc il trouve là un moyen,

et on peut estimer aussi que ces nouveaux amis de la mafia,

de la camora, l'aide un peu à arriver à cette idée,

mais surtout parce que ces repentis mafieux,

ces peines titaux, ont des contacts avec les services italiens.

– Donc ce sont les services italiens qui auraient demandé aux gens de la camora

de dire à Liaxa de sortir cette histoire de bulgar.

Mais pourquoi alors?

– Alors, toute l'histoire de la filière bulgar,

mériterait évidemment, il est mis sur la part,

parce que c'est une formidable histoire de la gafferade,

et c'est une formidable histoire de manipulation.

C'est un rideau de fumée,

et c'est dans l'histoire des services secrets,

peut-être l'exemple le plus frappant

et le mieux réussi de ce que les Américains appelaient les covered action.

Donc se servir d'un événement

pour lui faire dire autre chose et pour en cacher un autre.

Et les Américains et les Italiens dans cette affaire

ont marché main dans la main

pour déployer le rideau de fumée de la filière bulgar.

Pourquoi?

Parce qu'il fallait brouiller les pistes sur qui étaient les loups gris,

avec qui ils avaient été en contact de Laurent

ce long périple avant que Liaxa arrive en Italie

et qu'ils ne commettent ces tactes de tentatives d'assassinats contre Jean-Paul II.

Il fallait surtout orienter toute l'instruction

vers autre chose que la réalité de ce que sont ces loups gris.

Qu'est-ce qu'ils faisaient?

Avec qui ils étaient en contact?

Et là, arriver à d'autres vérités

qui, à un moment ou à un autre,

allaient amener à parler des connexions entre Italiens, Américains et Turcs.

Un mot avant que vous nous disiez ce à quoi vous croyez.

Sur ce procès, on juge à Liaxa 2 mois et demi après l'attentat contre le pape.

C'est surréaliste.

Un procès terroriste, c'est au minimum de tout le temps,

depuis la 2e Guerre mondiale, un minimum de 2, 3, 4, 5 ans d'instruction.

Pourquoi est-ce que les Italiens vont si vite?

Est-ce que c'est parce qu'ils ne sont pas intéressés par la vérité?

Ils ne sont pas intéressés par la vérité, ils en savent trop.

Cette condamnation et ce procès expéditif est aussi surréaliste

que l'information que la police est capable de donner à peine 10 jours après que l'attentat soit commis

sur toute la trajectoire et tous les voyages et toutes les rencontres et toutes les personnes que Liaxa connaît.

Et n'oublions pas que Liaxa était déjà à l'époque recherchée par Interpol.

Or, il passe un an à se balader en Europe.

C'est dental et également en Italie, 6 mois.

Et la police est au courant.

Donc il y a tellement de choses en réalité que les Italiens ne souhaitent pas qu'on aille chercher.

Et exposer au grand public.

Alors, ce dont on est absolument certain, c'est que Liaxa appartient au Lougris,

que les Lougris sont en quelque sorte une milice ultranationaliste turque qui collabore avec la CIA.

Et avec les services secrets turcs ou en tout cas avec des membres des services secrets turcs.

De ça, on est certain.

Alors, les Lougris sont plus qu'une milice.

C'est une organisation armée extrêmement puissante qui compte des centaines, voire des milliers d'adeptes.

Ils ont une organisation qui est non seulement basée en Turquie, mais qui a des cellules et des fédérations.

Il y a une fédération européenne des Lougris.

Ils existent toujours aujourd'hui?

Ils existent toujours. Il y en a en France aussi.

C'était une fédération européenne qui avait son siège en Allemagne, mais qui avait des représentations dans toute l'Europe occidentale.

Les Lougris sont le bras armé d'un parti d'extrême ou droite, le MHP, qui existe depuis les années 70,

qui est une organisation non seulement d'extrême droite, mais quasiment fascisante.

Le créateur de cette organisation avait coopéré avec les nazis.

Et leur signe d'ailleurs qui reproduit la tête de Lou et quasiment l'équivalent du signe nazi, le brandis de la même façon.

Et cette organisation qui est le bras armé de ce parti, juste pour l'anecdote,

ce parti existe toujours, il est au Parlement Turc et aujourd'hui ils sont les alliés de Erdogan.

Mais revenons en arrière, les Lougris sont impliqués énormément d'affaires d'attentats en Turquie, mais également dans toute l'Europe.

Et on se rend compte à travers les années qu'en réalité, ils travaillent en étroite collaboration avec les services secrets turcs,

mais pas dans n'importe quelle structure, dans une structure ultra secrète qui ne comprend pas uniquement cette organisation d'extrême droite des Lougris,

mais également d'autres organisations d'extrême droite à travers toute l'Europe, qui sont des sortes de cellules dormantes d'une organisation ultra secrète qui s'appelle le Stay Behind.

Ce qui veut dire, en anglais, rester derrière, c'était un projet des Américains qui avait été créé au lendemain de la Seconde Guerre Froide

pour créer des cellules capables d'être mobilisées et d'être entraînées, bien sûr dans le plus grand secret, au cas où les Soviétiques envahiraient l'Europe occidentale.

Mais après, on s'en est servi à des fins de manipulation et surtout pour essayer d'empêcher la montée de la gauche et la prise de pouvoir par la gauche dans différents pays.

Ces organisations ont pris des noms différents dans les différents pays membres de l'OTAN, comme le Gladiou en Italie, le Glève en France et, en Turquie, la Controgueria qui est s'appuyée sur les Lougris.

– Ça ne nous dit pas pourquoi on a tué le pape? – Mais vous avez faim, seconde!

– Ça nous dit le comment, ça ne nous dit pas le pourquoi et le pourquoi est à aller chercher dans les connexions de ces réseaux et surtout pourquoi le pape était gênant.

Le pape était gênant pour plusieurs raisons, mais également parce qu'il y avait une grosse affaire de banqueroute de la Banque du Vatican qui concernait beaucoup de continents, et y compris les Américains.

– Merci Rumiana ou Garchinskaya d'avoir partagé avec nous ces quelques informations, fruits d'années et d'années de recherche.

J'ai parfaitement conscience que cette interview est pour vous extrêmement frustrante.

Pour tous ceux qui veulent aller plus loin, néanmoins il y a ce livre et les livres aujourd'hui ont une vie éternelle grâce à Internet.

Ce livre s'appelle La vérité sur l'attentat contre Jean-Paul II, il est paru aux presse de la Renaissance. Il y a 10 ans, Rumiana ou Garchinskaya.

Merci beaucoup.

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Le 13 mai 1981 sur la place Saint-Pierre à Rome, le Pape Jean-Paul II est la cible d’un attentat. Un homme est arrêté et emmené dans les locaux de la police antiterroriste.