La source: La sombre histoire du roi du polar, José Giovanni

Radio France Radio France 4/5/23 - Episode Page - 54m - PDF Transcript

François Sainter.

Aujourd'hui, d'infersensible, la sombre histoire du roi du polar, José Giovanni.

Le trou, le deuxième souffle, les dangueuls, clans véciciliens.

On a peut-être oublié le nom de José Giovanni, mais par celui des classiques de la littérature

et du cinéma policier qu'il a écrit, et notamment ces deux chade oeuvres, classiques de risque et surtout deux hommes dans la ville, surpuissants et ouverts.

A la toute fin des années 50, Giovanni devient le roi du polar en France.

Ces romans sont publiés chez Gallibard, tandis que les CDA se pressent pour les adapter au cinéma quand il ne les adapte pas lui-même.

Amis et alter-égaux des plus grandes vedettes de son temps, les Ventura, Belmondo et autres de Long,

Giovanni impose et au viril mythifié son verbe sec et son sens de la mitraille dans la France d'être angloreuse.

Et il a un secret, une source d'inspiration inouïe sa propre vie.

Lui, le gangster repenti, qui a connu la prison et le couloir de la mort, puise dans ses souvenirs de Jeunesse une matière sans fin pour alimenter ses histoires.

De l'ombre de la guillotine aux Lumières de Satyamar, voici le trajectoire de vie incroyable qui reste pourtant d'un bain de mystère.

Pour rien au monde, Josep Giovanni ne voulait qu'on vienne fouiller dans son passé.

Notre invité aujourd'hui, notre spécialiste cinéma Maison, Laurent Delmas, co-producteur avec Christine Maçon de l'émission

On aura tout vu sur France Inter, le samedi à 10h et auteur de nombreux ouvrages sur l'histoire du cinéma français,

dont le ressent Bertrand Tavernier, le cinéma rien d'autre, publié chez Gallimard.

Affaire sensible, une émission de France Inter, diffusion directe, récit documentaire, Bastien Jans, coordination Franconniere, chargé de programme Rébecca Donante, réalisation Charles Lumières.

Si vous avez déjà lu un scénario de film, à moins d'être professionnel, vous vous êtes aperçu que cette lecture très spécifique est compliquée.

On s'y perd facilement, tout semble décousu, ce qui n'est pas le cas évidemment, mais bon, pour le lecteur Béotien, c'est un peu la jungle.

D'ontacte.

Régravant à Paris, 18 mai 1945, 10h extérieur jour, une citroën traction avant noir se gare en contrebande animable.

A son bord, quatre jeunes hommes minent sombre.

Le conducteur, Paul Damiani, Green Club, il a l'air détendu.

Joseph est ménassol. Vous y allez? Pourquoi pas toi, Paul? Réplique le dénommé ménassol.

Parce que t'es le seul à avoir une tête de troupion, lui répond.

Jean Lacabe, le quatrième laron Rika, un envoyant ses deux compères déguisés en souliottement de l'armée, se dirigeait vers la porte d'un immeuble.

Quelques étages au-dessus, Haïm Cohen, représentant 20 faits les sans pas dans son petit bureau.

Il a l'air inquiet. Ses superbes souliers le pirement en Weston tapent nerveusement contre le parquet de bois.

Cohen marque le pas, lui va ouvrir la porte, dans l'embrazure, les visages de Joseph et ménassol apparaissent.

Sur tes munitaires, nous venons pour une perquisition d'éclames-t-il.

La citroën traction avant débarre fondue au noir.

Extérieur nuit, une ville assuraine.

La traction avant déboule dans l'allée.

Le pauvre Haïm Cohen a le visage tuméfi, un flingue sur la trempe.

Il est solidement gardé par les Domoloss.

La voiture se garde devant la grande bâtisse aux allures gothiques.

Un panneau marque l'entrée dans le domaine, villa du bon repos.

Extérieur jour, la scène.

Au petit matin, un corps flotte à la surface.

Il a la tête enveloppée dans une serpillière tâchée de sang.

Détail remarquable, bien que tout a billé, le cadavre n'a plus de chaussures.

Extérieur jour, maison Alphor, 31 mai 1945.

Les souliers de Claire Maron de chez Weston foule le pavé.

Jacques Ménassol est confortablement chaussé lorsqu'il sort de la traction avant noir, gardé devant une rue étroite.

Joseph Damiani l'accompagne à nouveau.

Une main, lui saisit la manche.

C'est son frère Paul qui l'arrête.

Les deux frères Damiani échangent à un regard en silence.

Puis Joseph se dirige vers le fond de la rue.

Une grande enseigne surmonte la porte d'un atelier sur laquelle on peut lire

Frère Paul Jo, fabricant l'appareil électrique.

Au premier plan, Paul, toujours au volant, allume une cigarette.

Et on entend, sur tes militaires, nous venons pour une perquisition.

Voilà, normalement, à ce stade de la narration, vous êtes perdu.

Peu importe.

D'autant que ce début de film, qui fleurbont le polaire des années 60, n'a été écrit nulle part.

Ni en littérature, ni pour le cinéma. Non.

Ce ne sont que des faits éparpillés.

Une vérité enfouie de longs décennies au fond de la mémoire même de l'auteur.

C'est le scénario que Joseph Jovani n'a jamais écrit.

Haïm Cohen, les frères Peugeot, Jacques Ménassol, George Acaba et Paul Gammoni.

Le visage lointait toute sa vie.

Ils habitent, sans qu'on le sache, chaque page de son œuvre.

Lui, le grand écrire amoureux, est film policier, l'ami le plus cher de l'Innoventura.

Il y a toute une génération de jeunes scénaristes qui est arrivée et de jeunes métères en scène.

Mais qui ne peuvent pas écrire ce genre d'histoire.

Parce qu'ils ne connaissent pas la vie, ils ne connaissent pas les hommes.

Ils font du parisianisme, ils font je ne sais pas quoi.

Ils n'ont pas roulé leur boss, ils n'ont pas vécu, ils n'ont pas souffert.

Alors comment voulez-vous qu'ils vous écrivent des histoires d'hommes?

Bon, il y a très peu de gens qui peuvent écrire ce genre de choses à l'heure actuelle, à part José.

A long des années 80, l'Innoventura le blouse.

Son âge dehors semble bien loin.

Avec Giovanni, José, comme il l'appelle,

il veut s'offrir un dernier tour de pistes avant de recrocher

une dernière aventure entre mecs comme au bon vieux temps.

En termes de masculinité et de la serbée,

difficile de faire mieux que José que ses années 60, machiste à souhait.

José, le taiseux des grands espaces, c'est le fou d'action.

Le tolard repenti qui a connu le couloir de la mort.

Le gracier devenu le roi du Palais en France, mais aussi

l'un des scénaristes et réalisateurs les plus courus du cinéma français.

Giovanni a écrit aventura ses plus beaux rôles

dans les grandes gueules, le deuxième souffle, le clan des Siciliens

ou encore dernier domicile connu.

José est le frère de cinéma, avec qui l'Inno partage tout.

A commencer par sa vision de ce qu'est un homme, un vrai,

avec des muscles et une grosse voix, autre époque, autre temps.

D'ailleurs, ce côté m'acamuse beaucoup le Troubillon Pierre des proches

qui ne se gêne pas en 1983, quand José Giovanni est invité

dans le tribunal des flagres en délire sur France Inter

pour présenter les rufiants.

Le dernier film de Giovanni avec l'Innoventura donc,

et qui soit dit au passage, n'est pas son plus réussi.

Si au lieu de trottiner platement dans l'existence banale de Monsieur Tout le Monde,

j'étais un héros de José Giovanni, là, alors oui, vous seriez passionnés.

Vous aimez ça, les grosses bruts de viril avec des poils aux pattes

qui se bourrent la gueule à l'alcool à brûler en descendant le Niagara.

Ça vous excite les hypertrophiers du Deltoïde

qui s'éventrent à l'opinel pour tuer le temps entre deux physiades.

Ça vous fait bander les bûcherons velus façon King Kong

qui se défoncent la tronche à coups de pioche les jours fériés

au lieu de regarder les films sur la une.

Et qui finissent par mourir légèrement vivissactionnés

en balançant par ci par là, par de là à l'écran,

les sans-piternels banalités sans ciblard, du mélophalocratique

et autres lieux communs poilus qui célèbrent immanquablement

ces vibrantes manifestations syrupeuses et culturistes

de l'amitié virile avec un grand vie, si j'ose m'exprimer ainsi.

Giovanni, la soixantaine, chauve, le visage émassique

éclairant un cher bantax en corse, s'amuse à son tour

des bons mots de pierre et proche.

En ce début des années 80, le cinéaste est solidement implanté

plus de 20 ans dans le cinéma français.

Entre les adaptations de ses romans, les scénarios

qu'il a écrits et les films qu'il a lui-même réalisés,

il est déjà l'auteur de 27 ton métrage.

Il a dirigé les plus grands.

Ventura, Bourville, Belmendo, Dolon, il est écrit pour

Becker, sauté, Melville ou Verneuil.

Il est l'une des valeurs sûres du cinéma populaire français,

celui qui incarne au mieux ce que la critique appelle

non sans-ironie et parfois férocement le cinéma de papa.

Des histoires d'hommes souvent en décalage avec leur temps

façonnés par la rue, la prison et les horreurs de la guerre.

Des types à la gâchette facile, au jetem qui ne sortent pas

et qui, lorsqu'ils sont réunis, disent à leur femme,

laissent nous va dans la cuisine.

Ceux qui passent à l'époque comme une être à la poste

et qui fait toujours rêver les réables de tout poil genre,

c'était le bon temps.

Dans les films de Giovanni, on peut croiser les gangsters

qui ont vraiment vécu comme gangsters dans la vraie vie,

Pierre Loutrelle ou le célèbre Abel Danos,

qui inspire d'ailleurs le personnage de Lino Ventura

dans l'historique.

Qui mieux que Giovanni pour écrire l'histoire de ses hommes

sans les juger, lui qui, de notorité publique,

a fait 11 ans de prison et achapait de peu à la guillotine.

Un pédigree qui fascine les volettes du cinéma

qui jouent les gangsters.

Giovanni revenait de l'enfer ou plutôt du trou

du nom de son premier roman et premier succès.

Et il en parle comme personne d'autre.

Au tribunal des flagrants délires, toujours,

il n'évite pas la question sur sa biographie,

ses aventures dans la résistance,

le passage dans la délinquance,

à la libération, puis son séjour en prison

et l'écriture de son premier livre,

le trou donc, récit de sa tentative d'évasion ratée

et dont Jacques Becker fera un film inoubliable.

Le trou c'était une aventure...

Une évasion. Oui, une évasion.

Ce trou c'était beau parce que c'était un truc simple,

c'était une croyance primaire.

C'est de croire, quand on a 20 ans,

qu'il suffit dans une cellule de faire un trou

pour gommer le passé.

Je me suis dit, on est là, on fait un trou,

on passe par les égouts, on cie encore une de grille,

on est dehors, c'est fini.

Non, tout commence là.

Ce passé est là, il est toujours là, on ne le gommera jamais.

Et votre passé est toujours là,

on écrit tous ses livres,

vous avez pu exorciser un petit peu.

Non, je n'en peux pas.

Ce passé, je n'arrive pas.

Ça me fait drôle, ici c'est un peu marrant pour moi

d'être dans un boxe.

Mais quand vous êtes dans un boxe

et vous entendez raconter votre vie,

vous ne reconnaissez pas votre vie.

Mais quel est ce passé qui ne passe pas?

Giovanni entretient toujours un flou

pour des circonstances qui l'ont amené en prison.

Quand Franck Lombeau, qui a enquêté en 2013

sur la bio du roi du palar, interroge Bertrand Tavernier,

l'ancien assistant de Giovannis,

celui-ci confesse.

Il n'en parlait pas, ou très peu.

Personne ne s'y intéressait vraiment,

et pas seulement sur son passé,

mais aussi sur celui de ses personnages.

Quand Claude Sotèf fait classe tourisque,

il n'a aucune idée qu'Abel Danos

a participé à la carlingue.

Et personne n'en a aucune idée,

parce qu'on ne fait pas beaucoup de recherches.

On n'en parle pas.

La carlingue, c'est l'autre nom de la gestapo française.

Et Abel Danos, incarné par la figure morale de Lino Ventura,

dans la tourisque,

a été l'un des collabaux les plus élèves,

véritable porte-flamme de nazis.

Giovanni l'ignore, quand il brosse un portrait tendre

du parent parisien dans son roman et son scénario.

Et comment l'a-t-il connu?

Rencontrer en prison, raconte-t-il, toujours vague.

Avec Giovanni, il y a des questions qu'on ne pose pas.

Mais la vérité n'est pas cachée si profondément.

Lino Ventura le sait trop bien.

Un jour, il reçoit une lettre anonyme.

Selon la légende que rapporte Bertrand Tavernier,

ce serait Jean-Pierre Melville,

qui, à la suite d'une terrible dispute avec Giovanni,

aurait voulu se venger du scénariste

en envoyant son dossier judiciaire

à l'Ottawa.

On imaginais aimant les mines graves de l'imposant acteur,

le regard fixé sur l'amissive.

Tous les secrets de Giovanni sont là,

prêts à être révélés.

Mais pourquoi qu'il était condamné à mort?

Heureusement, pour lui, fidèle parmi les fidèles,

homme donneur, un peu comme les banstères

qui s'auto-attribuent cette qualité,

Lino Ventura déchire le dossier sans le lire.

Cette bio devait rester enfoui jusqu'à la mort de Giovanni.

Pourtant, à travers ses fictions,

ses mémoires publiées dans les années 90

et ses innombrables interviews,

Giovanni s'est beaucoup raconté.

Mais au fond, que s'étonne vraiment de lui au-delà

de ce qu'il a lui-même révélé?

En 2002 encore, sur le plateau de Thierry Ardisson,

toujours Giovanni gangster tendre au seuil de sa vie

vient présenter ses mémoires

dans lesquels il raconte une dernière fois son histoire familiale,

son rapport conflictuel à son père

et son passé criminel.

Vous enlève les chaînes quand votre père vient vous voir au parloir,

car il vient.

Un braquage qui a mal tourné redont conduit Giovanni

jusqu'au couloir de la mort.

Pourtant, d'autres informations circulent

sur l'histoire de l'écriveur.

Dès 1993, une agence de presse suisse s'intéresse à son cas,

mais ses informations ne sont pas relayées en France.

Et Giovanni avait l'aconiquement plaidé pour le droit à l'oubli.

Ce n'est qu'en 2013 que la vérité refait pleinement surface.

Et pour la comprendre, il faut revenir dans les années 30, à Pigalle.

Joseph Damiani, le véritable nom de Giovanni,

rendu dans les rues agitées du Paris des années folles,

où ses parents immigrés Corses se sont établis en provenance américain.

À Arlem, la famille Damiani s'est fait la main dans le monde de la nuit.

À Paris, elle possède deux hôtels

et a les moyens d'offrir une place au soleil au plus jeune du clan.

Le jeune Joseph et son grand frère, Paul,

fréquentent ainsi les prestigialistes et gens sourds et Stanislas.

Mais le père est un flambeur,

un joueur de casino doublé d'un magueur.

C'est des boires avec la police ruine la famille.

Et voilà le clan Corses qui reprend la route.

Les Damiani achètent un hôtel à Chamonix,

où Joseph tombe amoureux de la montagne,

avant de s'installer à Marseille au début de la guerre.

Voilà pour la trajectoire familiale,

la qui Joseph reste accrochée comme un bigornou à son rocher.

Il a 20 ans,

n'a passé que quelques mois à la fac de droit,

a multiplié les petits boulots sans envergure,

et va bien devoir s'inventer un avenir,

en cette offrance occupée.

Nous sommes le serment,

de nous unir,

et de mettre toutes nos forces,

notre froid,

notre armeur,

au service du Maréchal,

au service de la France.

Comme beaucoup de garçons de sa génération,

c'est dans les mouvements de jeunesse

orchestrés par le régime de Fischi

que Joseph trouve sa place.

Il intègre jeunesse et montagne

pour renouer avec sa passion première,

l'alpinisme.

Il en fait un moment fondateur de sa légende,

le recit d'une initiation virile classique,

aventure et camaraderie.

Et la suite de son destin s'écrit avec

les mêmes lettres que ses congénères,

STO,

ce service de travail obligatoire en Allemagne,

qui pousse des centaines de jeunes réfractaires

qui aient entré en résistance.

Joseph serait l'un d'eux.

Parce que cette histoire,

il la répète tout au long de sa vie,

comme là encore dans les magazines Alpinisme

et Rendonné en 1997.

Je suis parti à Nantes,

où j'avais une sœur qui tenait un bar.

Je suis rentré dans les forces françaises libres,

j'ai été fait prisonnier,

je me suis évadé.

Et puis je suis arrivé à Paris,

à Pigalle,

parce que j'avais quand même mon frère

qui était dans le gangstérisme.

Pigalle libérée,

c'était le Far West.

Je me suis retrouvé dans un mauvais coup

et j'ai fait dix ans de prison.

Joseph Damieny, leur résistant

devenu délinquant, ça sonne bien.

Mais est-ce vraiment la vérité?

Selon les traces qu'il a laissées

dans les dossiers de l'administration française,

rien n'est moins sûr.

Retour à l'automne 1945.

Le juge d'instruction Lara,

du tribunal de Marseille,

demande d'ouverture d'une enquête à la police judiciaire.

Il recherche des informations

sur un nommé Joseph Damieny,

né en 1923

à Paris et demeurant à Marseille.

Celui-ci

est soupçonné d'être membre du PPF,

le Parti populaire français de Jacques D'Oriot,

fasciste et collaborationniste,

et d'avoir été enrôlé dans les SK

pour Schutzkrebs,

une section des services secrets allemands

spécialisés dans l'achat

sur le refracteur du STO.

A ce titre,

Joseph aurait bénéficié d'un Ausweis,

une carte d'identité allemande

permettant de circuler librement

sur le territoire et d'un port d'armes.

En cet automne 1945,

le juge Lara

ouvre ainsi une instruction contre le jeune Damieny

pour atteindre la sécurité

extérieure de l'Etat en un mot

pour collaboration.

Les preuves en sa possession sont solides,

et le juge ordonne

l'arrestation du jeune homme.

Mais Damieny ne se trouve pas chez lui

dans son domicile marseillais.

A vrai dire, il est introuvable.

Et ce n'est que deux mois plus tard

qu'il refait surface. Enfin, façon de parler.

Joseph Damieny est détenu

à la prison de la santé. Il est inculpé

pour séquestration, torture

et à triple assassinat.

Celui d'Aim Cohen et des frères Peugeot

et de Pilat Suren. Souvenez-vous,

c'était la scène inaugural de ce récit

sous forme de scénario de film.

Il est inculné pour un film

qui a été un film

qui m'aidera à faire naire

en tant

mais l'illusion

s'en bloquer

dans le vent.

Ce n'est pas

de quoi

c'est beau

de se battre.

Mais

dans

cette foule

Dernier domicile connu

Mais épaule se recouvre

D'un manteau d'amectume

C'est d'un bon devoir

Si peau de ce pâtre

Pouquer pour toi

Améde moi

Me nourre

Ce combat

La justice nous tue

Et de l'innocence

Alors, comment faire

Pour que l'on vive sa vie

Comment l'aurait voulu

Pour qu'elle ne soit pas

Bien perdu

Aujourd'hui, José Giovanni

A faire sensillé sur son Saint-Ferre

Tu ne nous connais pas et on ne te connais pas non plus

C'est juste

Mais comme nous, on t'adopte tout de suite, ou presque

Vous vous êtes bien aimables

Mais sans savoir, t'es tombé sur une cellule un peu spéciale

On n'est pas tous là pour la même raison

Mais quand on passera aux assises

Le plus vénard ramassera 10 ans minimum

Comme tu vois, mes amis et moi nous risquons beaucoup

En effet

Alors nous, on voudrait bien savoir ce que tu risques de toi, Gaspar

Mais enfin, qu'est-ce qui vous prend

On voulait savoir ce que tu risquais

Parce que nous, on risque trop gros pour attendre ici tranquillement les assises

Comment?

Nous, on va s'évader, mon vieux

Dans le film Le trou de Jacques Becker

Tiré du premier roman de José Giovanni

Celui-ci arbore l'est très fin et calme

Le Philippe le roi qui incarne Mani Borelli

L'avatar de José Damiani

Le film relate sa tentative d'évasion ratée en 1946

Alors qu'il croupit dans une cellule de la prison de la santé

Mais jamais le trou n'ira plus loin dans les explications

Sur ce qui a mené ses malheureux en prison

Et ce pourquoi ils craignent tant leur passage aux assises

Mais les archives judiciaires, elles, en gardent la mémoire

José Damiani est accusé d'un triple meurtre à Paris

Auquel se joint une enquête pour collaboration avec l'ennemi

Ouverte par un juge d'instruction de Marseille

Loure, très lourd

Mais il n'y a pas que la peur de la guillotine qui anime le cœur du jeune Joseph

Il y a aussi le désir de vengeance

Qui le ronge

Car l'escapade meurtrière de la bande de Damiani

Comprenant Joseph, son frère, Paul, Jacques Menassol et Jean Jacob

d'anciens militiaires, s'est terminé dans le drame

Moins de 15 jours après leur apte

Et le meurtre des frères Peugeot, tué le 31 mai 1945

La brigade criminelle de la police judiciaire

se lance aux trous de la bande de Damiani

Jean Jacob est arrêté chez lui avec sa maîtresse Jacqueline

Pour voyose l'information de la bande

Au métro Montmartre, Jacques Menassol voit les policiers venir de loin

Le temps pour lui de se loger une balle dans la tempe

Joseph, lui, ne peut s'enfuir quand les policiers viennent à pas la porte chez ses parents

Il est gravement blessé à la jambe

Il s'est lui-même tiré une balle, involontairement

Quand il était en charge de surveiller l'un des frères Peugeot

Quand à Paul, le grand frère, il est arrêté à Strasbourg

Mais profitant d'un transfert, il s'évade et s'évapore

L'essence seule, son cadet en prison

Témoins plus tard, dans sa cellule, Joseph obtient enfin des nouvelles de son aînée

Elle provienne d'une dépêche de Nice matin

Dans la soirée du lundi 17 juin

Une scène sanglante se déroulait au bar des Santons

24 h de la buffet à Nice

Deux hommes, qui un instant avant et consommés au bar

étaient abattus par le patron de l'établissement

Mais l'identité des victimes est fausse

Celui qui se faisait appeler George Gaye ou Jean Malandrome

De peut-être en réalité le fameux Piero Damiani

C'est-à-dire un ancien agent de la Gestapo française

Un évadé de la prison centrale

Où il était détenu sous l'inculpation de trois meurtres

Dans ses mémoires, Damiani écrit

A l'époque de ma tentative d'évasion à la prison de la santé

Je ne courais que vers un but étroit

Me précipité à Nice pour abattre ce patron de bar

Qui, d'une balle de colt, avait expédié mon frère dans son dernier voyage

Pendant que le futur roman s'y est creux son trou et rêve de sa bande d'État

Le juge d'instruction Lara continue de rassembler

Informations et preuves contre lui pour faits de collaboration

Il se rapproche du juge d'instruction Robert Lévy

En charge de l'affaire du triple meurtre de Suren

Un curriculum vité du suspect Dressay qui se conclut par ses mots

On se trouve en présence d'un individu extrêmement nuisible à la société

Et qui, avant d'être un assassin, a été traître à la cause de son pays

Et a commis des actes relevants du plus pur gangstérisme

À Cablan

Dans le bureau du juge de Lara, les témoins défile

À Marseille, rue Honorat, ce sont plus de 18 000 hommes

Qui ont été déportés de force vers les usines allemandes entre 1942 et 1944

La photo anthropométrique du jeune Damiani

Cheveux-milons rejetés en arrière, les éragards

Et présentés aux requisitionnés du STO

Tous sont formels, c'est bien cet homme qui les a forcés à se rendre rue Honorat

Pour qu'il soit déporté vers les usines allemandes

Le dossier s'épaissit, on retrouve sa trace dans un stage organisé par les nazis à la caserne mortier à Paris

12 jours, où des dizaines de jeunes français sont entraînés au maniement des armes

À débusquer des réfractaires au STO et à lutter contre la résistance

Une information judiciaire a été ouverte à Lyon pour une sombre affaire de vol

Dis aux faux policiers, orchestrés en août 1944

Damiani incomplice, déguisé en policier

Auraient détruisé un négociant en soirie à un juif, Joseph Greenstein

L'entourage familial de Joseph ne plaide pas non plus en sa valeur

Paul, son frère, chez qui, la séjournée quelques mois en 44

A été arrêté la même année pour, en relation avec la Gestapo

Et puis, il y a son oncle, Ange Paul Santolini de Santos, lui aussi gangster notoire

Il est membre du PPF de Jacques D'Orio et accusé d'avoir entretenu des relations avec l'ennemi

Il aurait été le contact des deux frères Damiani dans la collaboration

Mais auprès des inspecteurs, il nit tout en brigandement de ses neveux

Damiani, Joseph, est mon neveu

Je n'ai jamais eu de rapport avec le jeune homme qui se trouvait mobilisé dans la formation Jeunesse et Montagne

Qu'on tenait en sa voix

Il faisait partie dans le service de renseignement à Nantes

Et j'ai pu savoir qu'il s'y était conduit brillamment par les certificats élogieux

Qui lui avaient été décernés par ses chefs

Je n'ai connu un méneveu que le désir de bien servir leur pays

Et l'absence absolue de toute formation politique

Reste cette histoire de résistance à Nantes a démêlé donc

Et ce sera le socle de la défense de Joseph et de la légende de Joseph Giovanni

Il assure ainsi avoir séjourné l'échec à Nantes à l'hiver 44

Et avoir participé à des missions des services de renseignement pour l'armée française dans la poche de Saint-Nazaire

Défendu jusqu'à la toute fin de la guerre par les troupes allemandes

Interrogé par le juge Lara, le chef des services de renseignement dans la poche de Saint-Nazaire confirme

En novembre 44, Joseph a bien franchi les lignes allemandes

Il a été fait prisonnier pendant un mois avant de revenir avec quelques informations précieuses

Alors, méprisant, l'officier conclut

Par la suite, il m'a demandé plusieurs fois de savoir confier une mission d'espionnage

Je l'ai toujours éconduit

Comme je n'avais aucune intention de le faire incorporer aux sœurs

Je ne me suis pas renseigné sur son passé

Ces quelques faits d'armes ne suffiront pas à faire pencher la balance de la justice dans le sens de Damiani

De petites compromissions, fructueuses activités de profiteurs de guerre

L'itinéraire de ce petit garçon, foie du loi, proche de la pèvre

Et marchant main dans la main avec l'occupant allemand, se dessine sous les yeux des jurés

Le 20 juillet 46, Joseph Damiani est condamné à 20 ans de travaux forcés, le baignes et la dégradation nationale

La presse régionale se félicite de sa condamnation

Est-ce n'est pas terminé?

Un autre procès attend Damiani, celui du triple meurtre de la Villaturen

Il débute deux ans plus tard, en juillet 48

Et cette fois, c'est dans toute la presse nationale qu'est placardé son nom et son visage

Dans ses années d'après-guerre, les quotidiens nationaux sont truffés de figures de la pec française

Ayant pactisé avec l'ennemi, ou des scrominables qui ont vu dans le chaos de la libération

L'occasion de faire des coups et de prendre un certain pouvoir

Leurs noms sont condisants tout le pays et en attendant avec avidité de les voir châtiers

On se repète de ces histoires de carlingues, de gangues, des tractions avant, des crimes d'Ori-la-Fonds, de Joao Vici ou de Pierrot-le-Fou

Le fait d'hiver comme catharsis, c'est tout un pays qui se purge en lisant la presse

Le procès de Joseph Damiani, Jean Jacob et leur complice Jacqueline ne fait pas exception

Il fait la une de l'humanité par exemple, le 10 juillet 48

L'humanité, 10 juillet 1948

Fils de bonne famille et élèves de la Gestapo, les tueurs de Suren, plastronnent devant les assises

La salle de l'Odéon est pleine, dans le box des accusés, Georges Acade, 29 ans

Joseph Damiani 25 ans et Jacqueline Bon-Sergeant 26 ans

Acade, grand bélatre, fixe tour à tour de ses petits yeux cruels, le président et le substitut

Damiani, plus petit, malingre, a l'air indifférent

Le regard dans le vague, il se creuse le menton

Jacqueline semble vouloir plaire, plaire encore, plaire toujours

Trop gâté, ils ont eu une enfance de fils à papa, pourri d'argent et bientôt de vice

Leur rôle sous l'occupation est assez sortide

Acade, trafic avec l'occupant, Damiani appartient à la milice, Jacqueline se fit à ses charmes pour subsister

La sentence intervient l'endemain, si Damiani et Attap tendent par tous les moyens de reporter la culpabilité sur leur compère mort

Les jurés, eux, sont sans pitié, les deux sont condamnés à mort pour complicité d'assassinat

Dans Libération, le journaliste écrit, je viens de voir deux hommes marcher d'un pas ferme pour la dernière fois dans le monde des hommes libres

N'a aucune raison de lui en vouloir, je pense seulement qu'il est nuisible et je le prouverai

Mais il a payé sa dette, maintenant il travaille, qu'est-ce que vous voulez?

Monsieur les jurés, je sais qu'en refusant les circonstances atteignantes, vous irez vers l'absolu, c'est-à-dire vers la peine capitale que je vous réclame pour l'accuser

Accuser qu'avez-vous ajouté pour votre défense

Rien

Dans deux hommes dans la ville que José Giovanni considère lui-même comme son chef d'œuvre, il livre un rubre remplé au plaidoyer contre la peine de mort

Ce film est nourri de toutes les angoisses qu'ils ont habité durant sept mois, entre juillet 48 et mars 49

Quand il a attendu dans le couloir de la mort, la grâce de la guillotine, Jean Gabin joue dans le film un éducateur bienveillant, véritable orange gardien d'Alain Delon

Tout juste sorti de prison et bientôt condamné à mort

Alain Delon est magnifique dans ce rôle, tout comme bouqué dans le rôle du flic casisadique

Et puis, il y a ce hochement de tête de Gabin, au moment où il voit Delon partir à la guillotine

Oui, un simple geste, inclinement, Dieu qui semble dire, quel gâchis j'aurais tout fait pourtant, son Dieu

Dans le visage de Gabin, on peut y voir ceux des hommes qui ont tendu la main au jeune Damiani, parmi lesquels Stéphanek est son avocat

Celui par qui l'incroyable histoire de l'écrivain a démarré

Oui, c'est lui qui le poussait à écrire dans le couloir de la mort

Damiani s'y essaye, prend goût, et déjà, un style sec et sans furiture émerge

31 décembre 1948, triste année, pleine déprove, je vis la plus angoissante

Je n'ai pas particulièrement mauvais moral, mais je termine l'année sans croire à la grâce

Ce soir, j'attends la mort

La mort ne viendra pas, en tout cas, pas tout de suite

Le 3 mars 1949, le président de la République commut la peine capitale prononcée contre Damiani et Aqab en travaux forcés à perpétuiter

Puis, en 51, cette paix de commuées a son tour en vingt ans de détention

Damiani voit enfin la lumière au fond du tunnel, son avocat le poussait à écrire encore et encore

En 1952, Ecke fait publier son journal d'un condamné à mort dans un recueil de texte contre la peine capitale auquel contribue aussi Jean Cocteau et Albert Camus

Puis, le 4 décembre 1956, à la faveur d'une nouvelle décision présidentielle, Josette Damiani sort de prison

Il a 33 ans, son avocat a atisé un feu en lui, celui de l'écriture et il va s'y consacrer pleinement

J'écris vite, les pages s'entassent, je revois mes fantômes et surveillant la corde de Tétnique, je sens le froid, la faim, la peur, l'odeur des îles

Dans son premier roman, il raconte sa tentative d'évasion ratée

Bien implantée dans le milieu littéraire, l'avocat Stéphane Keff fait lire le manuscrit à son ami Roger Nimier qui travaille chez Gallimard

Nimier est emballé, il fait lire à Claude Gallimard qui, pour voulu le manuscrit disons, informe

Alors Nimier se met au travail avec Josette et lui conseille de tailler dans l'engrave

Vous avez l'écriture de comportement, laissez philosopher ceux qui n'ont rien à dire

A futé, Damiani accepte sans rechigner, il coupe tout ce qu'on lui dit de couper et le manuscrit est accepté

En juillet 1957, il signe ainsi son premier contrat d'auteur pour le trou qui connaît un succès immédiat

En deux ans, il fait paraître quatre nouveaux romans, tous inspirés de sa vie d'avant, la vie de Joseph Damiani

Mais sur les couvertures cartonnées de la collection série Noire de Gallimard, celle de deuxième souffle, Claas Taurisque, l'ex-communier, histoire de fou ou encore les aventuriers

On ne retrouve pas le patronime de la petite famille de bandicorses

Joseph Damiani, ses démons et ses fautes sont restés dans le couloir de la mort

C'est un homme nouveau, Joseph Damiani donc, résistant, homme demeure, rescapé de la guillotine qui devient dans les sixties le roi du polar

Quand on s'en fure, il s'agit de la chanson

Quand on s'en fure, il s'agit de la chanson

Quand on arrive à la rire, il s'agit de la chanson

Tant le signe, il y a quelqu'un qui l'espère et qui l'espère et qui l'espère.

Françin Terre, affaire sensible, Fabrice Drouel.

Aujourd'hui, José Giovanni, dont nous parlons avec notre amitié, Laurent Delmas, bonjour.

Bonjour Fabrice.

Quo présentateur avec Christine Maçon de l'émission, on aura tout vu sur Françin Terre, émission de cinéma, évidemment,

et auteur de nombreux ouvrages sur l'histoire du cinéma français, dont le ressent Bertrand Avernier,

le cinéma et rien d'autre, livre publié chez Gallimard.

D'abord, revenons sur la carrière de Giovanni, qu'on a fait qu'est-ce qu'il sait, finalement, dans le récit.

On a surtout raconté sa vie personnelle. Que représente Giovanni son œuvre dans le cinéma des tranglorieuses?

Ah, c'est peut-être l'un des cinéastes les plus emblématiques de ce cinéma, que vous avez décrit comme un cinéma à la papa.

Oui, oui, bien sûr, je sais pas si c'est un cinéma à la papa, en tout cas, c'est pas un cinéma à la maman,

parce que le moins qu'on puisse dire, c'est que les femmes en sont absentes.

C'est pas pour faire une révérence autant présente que de dire ça, mais c'est aussi une façon de le décrire ce cinéma.

C'est-à-dire, c'est un cinéma d'homme. C'est un cinéma écrit par les hommes, réalisé par les hommes et joué par les hommes.

Alors, il y a quelques femmes qui s'insèrent de temps en temps, notamment...

Oui, c'est pour s'entendre dire, laisse-nous, enfin, dans la cuisine.

C'est ça, devant les caméras, c'est quand même assez rare, mais c'est vrai que c'est une singularité.

Et une fois de plus, on va, je pense, le redire assez souvent au cours de cet entretien, la vieille tarte à la crème,

il faut séparer l'homme de l'œuvre ou il faut pas séparer l'homme de l'œuvre.

Dans le cas de Giovanni, on peut pas séparer, parce qu'effectivement, ce que vous avez très bien montré dans ce beau récit,

c'est combien il y a une circularité de son destin avec son œuvre, même, et je dirais, à cause de son déni permanent,

on ne peut que noter, effectivement, les rés urgences de sa propre vie, au combien tumultueuse, dans ce qu'il a écrit.

Et singulièrement aussi, sur, effectivement, cette espèce de monde sans femme, qui était absolument le sien,

et qui n'a pu qu'instiller dans ses films ensuite, comme scénariste et comme réalisateur.

Alors, on peut dire vraiment que c'est du cinéma populaire, c'est typiquement le film du dimanche soir.

À cette époque, il y avait le film du dimanche soir, tout à fait ça.

Oui, tout à fait ça, avec, effectivement, un genre majeur en majesté qui est le polar, qui fonctionne très très bien,

parce que c'est toujours des histoires de fliqués de voyous, de gendarmes et de voleurs, ça marche depuis presque la nuit des temps,

on pourrait presque dire, avec néanmoins, c'est ça aussi qui en fait peut-être sa beauté,

où en tous les cas sont plus grands intérêts en dehors du genre proprement dit, Giovanni l'a lui-même dit,

avec justesse, je crois, c'est que ce qu'il a amené dans le polar français de cette époque-là,

ce sont des descriptions d'hommes perdus, c'est-à-dire d'hommes qui vont jusqu'au bout de leur destin,

tout en sachant qu'ils sont des hommes perdus.

Une fois de plus, on retrouve le destin de Giovanni, c'est évidemment un homme perdu, Giovanni.

Quand on a revêtu l'habit de la carlingue, on est perdu, à vie et à vie.

Et cette façon qu'il a eu de décrire pour sauter, pour Melville, pour lui-même, pour Robert Enrico,

pour tous ces cinéastes pour lesquels ils ont travaillé, ces gens en désirance, ces gens seuls dans la ville,

ces hommes seuls dans les villes qui marchent, comme le fait par exemple Lino Ventura dans le film de Claude Sauté,

c'est un des premiers films de Giovanni, et c'est un motif qui sera en permanence récurrent,

porté très souvent par la figure Lino Ventura.

Alors c'est dû à Claude Sauté, mais c'est vrai que Claude Sauté, qui est un polar élégant, il est vraiment très élégant.

Maintenant, pour ce qui concerne deux hommes dans la ville, l'autre film que je voudrais citer,

il est peut-être moins élégant, il n'y a pas d'effet de manche cinématographique,

il y a une science du scénario que d'accord, il y a la première à la dernière minute, il se passe quelque chose,

et ça c'est fort pour le cinéma populaire, et c'est vraiment aussi un des ingrédients du succès de Giovanni.

– Ah oui, ça je crois que le cinéma populaire, comme la littérature populaire est portée pour la littérature

par des gens comme Alexandre Dumas par exemple, et bien Josée Giovanni, il sait raconter une histoire,

il sait dresser des musquetaires et qui partent à la recherche de ferret, enfin des choses comme ça,

comme pour Dumas, lui, il sait effectivement raconter l'histoire, une fois de plus qu'il puise dans sa vie.

Alors bon, le personnage central de Classe Touriste, joué par Ventura, Davos dans le film,

le petit chénon qui manque dans la vision qu'on en a, c'est le passé.

– C'est son passé. – C'est le passé.

Or le passé, c'est un homme de la carlingue, c'est un homme de la Gestapo française,

réellement dans la vraie vie, il était surnommé le torsionnaire de la Gestapo.

Donc c'est quand même pas un type éminemment sympathique.

Le formidable pari de Giovanni et de Soté, c'est de l'avoir humanisé et de Ventura aussi,

parce que le moins qu'on puisse dire c'est que ça plaisait à Ventura, ce genre de choses.

– Notamment la rencontre avec son fils.

– Mais bien sûr, c'est ça qui a d'ailleurs motivé Clos de Soté, c'est-à-dire que Clos de Soté

l'a dit à Giovanni, il a dit « je fais ce film parce qu'à un moment votre héros va voir son fils

à l'heure qu'il est traqué et qu'il dit à son fils si tout d'un coup je suis entouré par des hommes

dans la rue, tu ne cherches pas à me retrouver, tu ne cherches pas à m'approcher,

tu t'en vas, tu pars, tu vas dans une église et tu demandes de l'aide ».

Donc cette scène-là, elle est pour Soté fondatrice et quand Giovanni a entendu lui dire ça,

il lui a dit « vous avez compris, c'est ce que je veux dire, donc on va faire le film ensemble,

il n'y a aucun problème ». Et puis pour deux hommes dans la ville, on a à nouveau cette récurrence

qui est complètement saisissante de quelqu'un.

José Giovanni, venu de l'extrême droite, et étant resté je pense intellectuellement au moins à droite,

ayant été dans le couloir de la mort qui va faire l'un des films les plus abolitionnistes

de l'histoire du cinéma français, c'est-à-dire qu'il va aller contre son camp,

l'abolition de la peine de mort n'est pas un thème de droite, bien au contraire,

que lui-même a pratiqué la peine de mort quelque part, en l'infligeant à des gens,

mais il est resté dans le couloir de la mort, il s'en souvient en tant que scénariste et écrivain

et là il va faire un film incroyablement abolitionniste.

Donc c'est ça le paradoxe Giovanni en permanent, c'est-à-dire que ce passé qui, comme vous le disiez très bien,

ne passe pas, le remord permanent associé au déni permanent. Il n'y a pas plus d'habissal.

C'est clair. Dans ce genre de cinéma, il y a des bagnoles, des bagnoles qui refitent.

Vite, on va coûter mes voitures, demi au sec.

Pêcher en pleine nature, et celles dont je ne comprenais strictement rien.

Mes voitures, mes amours et leurs fins,

mon couleur et leurs allures, leurs souteurs et leurs destin.

Celles que je n'ai jamais su rendre heureuse,

et celles qui m'avaient rendues complètement zinzins.

Celles qui étaient belles à se vendre,

et celles dont je n'aurais jamais dû me séparer.

Mes voitures, tous mes amours au loin,

dans un champ sur la toiture, dans une casse fondant à vin.

Mes voitures, mes amours et leurs fins,

mon couleur et leurs allures, leurs souteurs et leurs destin.

France inter, affaire sensible, Fabrice Drouel.

Vous avez une heure, il ne fait pas partie de la Nouvelle Vague,

mais il est comme beaucoup d'autres, à la jonction.

On y trouve des choses comme la première scène de hold-up urbain,

c'est exactement le cas des charges de la Nouvelle Vague.

C'est des gens qui prouvent que la Nouvelle Vague est très spécifique,

et que ces films sont marqués par cette ère du temps.

Il y a des formes de continuité et de rupture,

mais il vaut mieux envisager les choses sous la forme d'un continuum,

et il n'en reste pas moins que l'ensemble de l'œuvre,

n'est pas Nouvelle Vague.

C'est ce que la critique a pu lui reprocher à l'époque.

Je crois qu'il avait le sentiment d'être d'abord un écrivain,

après il y a une redoutable efficacité scénaristique qui permet d'emporter le morceau.

Mais bien entendu, on pourrait multiplier, et les secondes rôles,

c'est combien les secondes rôles sont importantes.

Tout ça, c'est consubstantiel à ce cinéma, et ça lui donne sa chère, son sang, sa fève.

Vous connaissez bien Bertrand Tavernier et son œuvre, quel est le rapport de ce cinéaste?

Les liens viennent de sauter pour lequel Bertrand Tavernier, comme attaché de presse, a travaillé.

Tavernier, avant d'être un cinéaste, on arrivait dans l'école des cinéastes,

c'était très tardif, mais le premier film, c'est la fin des années 70, il a eu avant une vie de cinéma,

une vie d'attaché de presse, c'est un certain Bertrand Tavernier.

Les liens avec la nouvelle vague sont forts pour Bertrand Tavernier, mais aussi avec tous ces grands du cinéma.

Il a travaillé avec Melville, et donc Melville sautait, Giovanni, tout ça, c'est la même famille,

c'est le même moment du cinéma français, et Tavernier est là, il regarde, il les assiste,

il travaille avec eux, il les interroge, etc.

Donc c'est pour lui, effectivement, ça a été pour Tavernier, les années de formation.

Giovanni fait partie de ce corpus en quelque sorte.

Est-ce que les années 60 et 70 ont été à nage d'or du polar français ou non?

Oui, si, je pense qu'avec notamment quelqu'un comme Jean-Pierre Melville, on peut assurément parler de polar.

Et puis on voit bien que des gens comme Claude Sautey, dont l'immense majorité de la filmographie

n'est pas du polar, les choses de la vie, Vincent François Paul et les autres, Néli et Monsieur Arnaud,

on est très très loin du polar.

Mais il n'y a que la Stourisque qui commence presque la carrière, mais il y a aussi par contre Max et les Ferrières.

Max et les Ferrières, c'est quand même un grand pour moi, en tout cas, c'est un grand polar français

avec une figure de flic absolument pervers, une sorte de Robespierre de la police quotidienne

qui fait tomber des petits voyous.

C'est un très très beau polar, c'est un polar noir, c'est un polar à la fois très mélancolique.

Donc oui, il y a une apogée avec des gens aussi qui prendront le relais comme un lincorneau

qui sauront effectivement donner à ce polar à la française toute sa spécificité

parce qu'il emprunte évidemment au polar américain des grandes années,

mais il donne aussi, comme le faisait Giovanni, une singularité, une spécificité française.

Vous faites bien de citer Cornu et le polar parce que c'est une belle collection.

C'est sûr.

Merci infiniment, Laurent Delmas, à samedi.

Volontier.

Dix heures.

Avec plaisir.

C'était François Inter.

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durée :00:53:29 - Affaires sensibles - par : Fabrice Drouelle, Franck COGNARD - Aujourd’hui dans Affaires Sensibles, la sombre histoire du roi du polar, José Giovanni. - invités : Laurent Delmas - Laurent Delmas : Producteur - réalisé par : Charles De Cillia