La source: La maison de l'horreur 3/5 : Six jours avec Jean-Claude Romand
Radio France 7/30/23 - Episode Page - 57m - PDF Transcript
France Inter
Aujourd'hui l'on va faire sensible retour sur l'affaire Jean-Claude Romand
où l'histoire de cet homme qui a tué sa femme, ses deux enfants, son père, sa mère, un soir de janvier 1993.
Le lendemain, après 25 mois, ce lieu du drame et de la vie passée de la famille Romand,
le sentiment est indescriptible, d'abord face à l'horreur de la situation,
mais aussi autour de cette question, comment cet homme socialement si respectable a-t-il pu en arriver là ?
Ce père attentif, ce chercheur à l'OMS, engagé dans la vie associative et auprès des parents de l'Eve,
était en fait un mitoman, un menteur professionnel qui a construit son destin autour d'une obsession
et qu'il s'était vertu à cacher toute sa vie jusqu'à enlever la vie.
L'échec d'un examen à la fac de médecine, il n'était ni médecin, ni chercheur,
il était un autre qui se faisait passer pour lui, un exemple paroxystique de schizophrénie
et de bien d'autres choses encore que les psychiatres n'ont pas fini de disséquer.
On parle parfois, d'or et à travers d'affaires hors normes, histoire d'attirer le chalant,
mais là, nous sommes vraiment dans une histoire hors norme.
C'est même l'un des faits d'hiver les plus fascinants de la vraie guerre en France.
Condamné la prison à perpétuité avec peine incompressible de 22 ans,
Romain était donc libérable en théorie depuis 2015.
En théorie seulement, la preuve, le 8 février dernier, la justice a refusé sa demande de liberté conditionnelle.
Notre invité, aujourd'hui, Julie Brafman, journaliste chargée de la rubrique justice
aux Journals Libérations, notre partenaire, une fois par mois.
Avers sensible, une émission de fancentère en partenariat avec Lina, préparée aujourd'hui par Jean Buleau,
coordination Christophe Barrère, voix Jean-Claude Romand, Philippe Hirard, réalisation Jérôme Boulet.
Fabrice Drouel, affaire sensible, sur France Inter.
De lundi 11 janvier 93, les pompiers découvrent trois morts et un blessé inconscient.
Jean-Claude Romand, 42 ans, escrot et mitomane, faux médecin,
vivant de la crédulité des autres, est accusé des crimes les plus atroces, assassinats de sa femme.
Jean-Claude Romand a reconnu avoir défoncé le crime de son épouse avec un rouleau à pâtisserie.
Jean-Claude Romand, l'homme qui a tué ses parents, sa femme, ses deux enfants, 20 ans de mensonge.
Je suis un monstre, c'est ainsi désormais que Jean-Claude Romand se définit.
C'est vrai que c'est le silence qui s'impose à moi.
Je comprends que mes paroles et même ma survie ajoutent au scandale de mes actes.
J'ai voulu assumer et le jugement et le châtiment.
La vie de Jean-Claude Romand, l'affaire Romand est probablement l'un des faits divers les plus fascinants de l'après-guerre.
Parce qu'il nous parle de l'humain et de l'inhumain.
Parce qu'il nous renvoie aux pires faiblesses de la condition humaine,
à ses paradoxes jusqu'au meurtre perpétré par un homme qui a néantit tout son univers intime.
Il assassine les membres les plus proches de sa famille, parce que le mensonge,
qu'il a entretenu pendant tant d'années, ne doit pas être découvert.
Logique impitoyable pour ses victimes, fatal conflit également entre Jean-Claude Romand et son pire adversaire, lui-même.
Oui, l'adversaire.
C'est le titre d'ailleurs, que choisira l'écrivain Emmanuel Carrère,
hanté à l'époque par cette histoire qui en a hanté bien d'autres.
A tel point, qu'elle a inspiré deux films de fiction, un film documentaire, deux romans,
deux pièces de théâtre et bientôt une nouvelle fiction.
Le 11 janvier 1993, dans le journal de France 3 Ronald, un drame fait la une.
Dans une maison en feu de Prèves Saint-Moiens, dans les départements de l'I,
les corps d'une femme et de ses deux enfants tués par balles viennent d'être découverts.
Les poules, lui, a été sauvé des flammes brûlées mais vivant.
C'est ainsi que débute l'affaire romand.
Dans l'I, sa femme, Florence, âgée de 37 ans, sa fille de 8 ans, Caroline et son fils de 5 ans, Antoine.
Puis il a tenté de se suicider en mettant le feu à sa maison.
L'intervention des pompiers l'a sauvée, il est actuellement à l'hôpital de Genève, grèvement brûlé.
Le mobile de ses actes n'est absolument pas connu. Sur place, personne ne comprend.
Retrouvez dans le coma, Jean-Claude Romand est conduit dans la matinée à l'hôpital de Genève.
Selon les pompiers, il n'a plus que quelques jours à vivre.
Puis, doucement, il remonte à la surface.
Lors de ces quelques jours de rétablissement, on découvre les corps de son père aimé de sa mère,
un mari romand tué aussi par balles chez eux. L'enquête se poursuit.
En téléphonant à Genève, au siège de l'OMS, où, selon son propriétaire Jean-Claude Romand travaille,
les inspecteurs découvrent qu'aucun médecin ou chercheur, répondant à ce nom, n'y est employé.
Aucune trace, non plus, de son diplôme obtenu à Lyon au médecin ni de son interna à Paris. Rien.
Romand était-il un médecin imaginaire, sans qu'aucun de ses proches ne le sache, mais comment est-ce possible ?
A Genève, pendant ce temps, Romand est sorti du coma. Il est transféré en médecine pénitentiaire à Lyon.
Le juge, le procureur, son substitut, un greffier et son avocat débarquent,
pour interroger celui qui est considéré jusque-là comme le seul survivant, oui, survivant de l'incendie.
Romand commence par tout nier et le retourne dans le cercle du mensonge,
parle d'une mission en tant que consultant scientifique, pour une société inexistante.
Il argumente, se contredit, puis change tout et réinvente à chaque fois une nouvelle histoire.
Il n'a cessé d'inventer sa vie. Au bout de 7 heures d'interrogatoire, la vérité leur attrape.
Enfin, il avoue.
Je suis un monstre titré aujourd'hui le progrès de Lyon.
C'est ainsi désormais que Jean-Claude Romand se définit,
transféré lundi dernier à Lyon dans l'unité cellulaire de l'hôpital Jules Courmont.
Le faux médecin, à peine sorti du coma, a été interrogé vendredi pendant 7 heures par un juge d'instruction.
Jean-Claude Romand a reconnu avoir défoncé le crâne de son épouse,
avec un rouleau à pâtisserie, et assassiné ses enfants après les avoir longuement embrassés.
La pire des sanctions, c'est que je sois encore en vie.
Je regrette que la peine de mort soit abolie.
A-t-il confié à son avocat ?
Jean-Claude Romand a tué parce qu'il craignait d'être découvert.
C'est le mobile des meurtres, croit maître Frémion.
La passion a sûrement guidé ses gestes.
Reste à savoir comment le quintuple meurtrier a pu vivre 20 ans derrière un tel masque,
et à combien s'élèvent ces malversations financières.
En juin 1996, après trois ans d'enquête, Romand se prépare à répondre de ses actes devant la justice.
Dans la ville de Bourg-en-Bresse, c'est les fervescences.
Depuis quelques jours, l'ensemble des rédactions des grands quotidiens envoie l'art
de leur journaliste judiciaire pour couvrir cette affaire l'une des plus troublantes à ce jour.
A la cour d'assises de l'un, l'enjeu n'est pas de mettre un nom sur un coupable, on le connaît,
mais de comprendre l'histoire de ce meurtrier que l'ont décrivé le soir du drame comme un homme doux.
C'est un monsieur extrêmement gentil, sympathique.
Il avait de bonnes relations avec tout le voisinage.
Moi, pour moi, c'est incompréhensible parce que c'était vraiment un type sympa et doux.
Je ne peux pas comprendre ce qui s'est passé.
Et tous les gens du voisinage pourront dire que c'était un type vraiment sympathique.
Ce qui s'est déclenché, on ne peut pas... Je ne peux pas le comprendre.
Après trois ans d'enquête, la justice va essayer de trouver des réponses là où les inspecteurs n'ont obtenu que des silences.
Pendant six jours, la présidente et les avocats essaient de mettre les pieds dans la vie secrète
de Romand de comprendre les mots qui l'ont amené à écrire l'alfin en lettres d'aussan.
La justice n'est pas qu'une chambre d'enregistrement des infractions, du crimain, baromètre de l'horreur des hommes.
Non, elle est aussi cette sphère où l'on décompose, où l'on essaie de comprendre les fractures intimes de nos sociétés.
Le temps de la justice, le temps d'un procès, c'est le temps où l'on essaie de remettre à plat une vie,
d'y chercher le fil des vérités, de mettre des mots sur l'impensable.
Pendant six jours, au Palais de Justice, du Bourg-en-Bresse, les familles des victimes, les juges, les journalistes,
vont plonger dans l'invraisemblable, dans l'inimaginable et dans la vie insoutenable de Jean-Claude Romand.
La justice française ne se filme pas, ne s'enregistre pas, sauf exception.
Alors elle se lit dans nos journaux et parfois, dans les mots d'un écrivain, surpris et bouleversé par l'histoire qu'on instruit sous ses yeux.
L'écrivain, c'est Emmanuel Carrère, il est sur les bancs de la salle d'audience.
Certaines déclarations de Jean-Claude Romand, citées dans ce récit, d'ailleurs, sont extraites de son livre, l'adversaire.
Le 25 juin 1996, le procès débute.
Une double vie suivie d'un quintuple meurtre, vingt ans de mensonges qui prennent fin en une journée sanglante.
Voilà résumé l'affaire Romand, Romand du nom de l'accusé dont le procès s'est ouvert cet après-midi à Bourg-en-Bresse, devant les assises de l'un.
Jean-Claude Romand, 42 ans, escrow et mitoman, faux médecin vivant de la crédulité des autres, est accusé des crimes les plus atroces,
assassinat de sa femme, de ses deux enfants de 5 et 8 ans et de ses parents de 69 et 74 ans.
Ce 9 janvier 1993, après avoir tué tout le monde, Jean-Claude Romand, tant train de se suicider sans habileté ni conviction,
à peine sera-t-il légèrement blessé.
Décidément, Jean-Claude Romand ne réussit que ses assassinats.
Ce sont maintenant les jurés et les psychiatres qui vont se pencher sur son cas.
Devant le palais de justice, en plus des familles et des journalistes, il ne fou le curieux à temps l'ouverture des portes.
La fluence est telle qu'on a mis en place une salle de retransmissions vidéo pour permettre au plus grand nombre d'assistés au procès.
Jean-Claude Romand a accepté la présence de photographes et de caméraman de la télévision au début de l'audience.
Il le sait, ces images ne représentent rien, elles sont comme lui, images silencieuses, apparences.
La vérité, elles se dessinent ailleurs hors champs.
Sur ces images succinctes, on observe l'accumulation de petites tâches successives qui marquent le début de chaque séance.
C'est un rituel, l'arrivée du public, l'entrée des avocats et des familles, l'entrée de la présidente du tribunal, des jurés, de l'accuser.
Oui, l'accuser.
C'est la première fois que le journaliste voit Romand en vrai.
Comme à chaque fois, la vie carcérale change les corps.
Il paraît bien loin des quelques photos de lui prises avant la tuerie et publiées par la presse.
Un visage blanc sur un costume noir.
Jean-Claude Romand est devenu quasi-chauve.
Il garde les yeux fixés sur le sol et sur ses mains jointes.
Selon les formules des journalistes, certains trouvent qu'il ressemble à un curé de campagne,
un voisin renant de course que l'on croise en descendant son escalier.
C'est souvent le cas avec le criminel.
On dit souvent, c'était un homme sans histoire, monsieur tout le monde en quelque sorte.
Pour chaque procès, rien n'est écrit à l'avance.
Le premier jour ne ressemble en rien au suivant.
C'est une accumulation de sentiments et de ressentiment
face à un homme, à une déclaration, à une confession.
On se perd en lui.
On l'accompagne, lui et ses victimes.
C'est la dérive de toute une vie débouchant sur cinq assassinats à partir de rien d'un échec.
En face de Jean-Claude Romand, sur une petite table, les pièces à conviction sont déposées.
En dessous du fusil, du crime, on aperçoit quelques photos du bonheur passé de la famille Romand,
celle que l'on imaginait sans problème, la vie officielle.
Jean-Claude Romand avec Florence, sa femme, avec ses enfants, Caroline et Antoine, ses parents.
Émets et Anne-Marie, puis d'autres photos le montrant seul, fixant l'objectif.
C'est cette vie officielle, celle qu'il s'est construite, ordonnée,
sans accident, ni fracas, qui est au centre des premières heures du procès.
Qui était Jean-Claude Romand avant ?
Les premiers mensonges de sa vie apparaissent dès la sortie du lycée.
Après un essai pour devenir forestier comme son père,
Jean-Claude Romand se lance dans les études de médecine.
A Lyon, il y retrouve une cousine éloignée, Florence,
un amour secret qu'il entretient depuis ses 14 ans, mais qui n'est pas réciproque.
En seconde année, Florence échoue à l'examen et se lance en pharmacie.
Romand, lui, n'a pas eu de problème.
On le retrouve en septembre, au cours de troisième année.
Personne ne le sait, mais lors de l'examen du mois de mai,
comme cela arrive à des milliers d'étudiants brillant chaque année,
Jean-Claude Romand a échoué de quelques points.
Rien grave, un jour sans une question mal comprise.
Peu importe, la session de rattrapage est faite pour ça.
Mais il décide de ne rien dire et surtout de ne pas aller à la session de septembre.
Alors, il entre directement en troisième année, comme si de rien n'était.
C'est le premier mensonge de Jean-Claude Romand,
celui qui déclenchera les autres selon une logique qui le mènera à l'abîme.
Ainsi, pendant près de 12 ans, il se réinscrit en seconde année.
Il fait comme s'il accompagne ses amis,
celui les cours, prête ses photocopies, achète les mêmes ouvrages, prête ses notes.
Romand est brillant.
Et en juin, après chaque examen,
personne ne remarque l'absence de son nom sur les listes d'admission.
Et surtout, personne ne se pose la question.
Non.
Aussi étonnant que cela puisse paraître,
personne n'a le réflexe de dire,
« Et Jean-Claude, combien est-il obtenu ? »
Ce qui n'échappe pas à la présidente du tribunal, bien sûr.
Comment répond, en haussant les épaules ?
Je me suis posé cette question tous les jours, pendant 20 ans.
Je n'ai pas de réponse.
Quand même, les résultats des examens sont affichés.
Je peux vous assurer que je ne suis pas allé ajouter mon nom à la main.
D'ailleurs, les listes étaient derrière des vitres.
C'est une énigme pour moi aussi.
On pourrait appeler ça des réussites mensongeurs.
C'est à cette époque qu'il s'est dûi Florence.
En 1980, il se marie.
Cinq ans plus tard, Caroline vient au monde, puis Antoine en 1987.
A cause du travail de Jean-Claude à l'OMS, à Genève,
le couple roman s'est installé à la frontière de la Suisse, au pays Jex.
Le lieu de vie des hauts fonctionnaires internationaux
qui aiment ses espaces verts et valonnaient d'une partie du département de l'I.
La présidente du tribunal, Yvette Wilver,
l'interroge longuement sur sa relation avec sa femme,
ce mariage fondé sur le faux.
C'est à sa fonction de chercheur qui n'avait pas la sécurité financière
qu'il ne pouvait lui offrir.
Elle pontuise en interrogation d'indignations de colère
pour essayer de comprendre l'ombre qu'elle tente d'éclaircir.
Pour elle, et dans ses conditions,
le mariage, déjà monstrueux, roman, lui répond.
C'est vrai qu'il aurait suffi de quelques paroles pour qu'elles soient encore là.
Ce qui est dramatique, c'est que j'ai réussi à masquer ce déséquilibre
car un faux équilibre qui a trompé tout le monde, moi le premier,
je me voyais tel que les autres me percevaient.
Pendant ces années pour ses voisins,
ses amis Jean-Claude Roman est un homme effectivement
qui on peut faire confiance,
où il a une tête qui inspire confiance et comme ça.
Et c'est cette confiance qui lui permet de poursuivre sa double vie,
celle officielle d'un médecin-chercheur important de l'OMS
et l'autre celle d'un menteur de talent, oui de talent, c'est tout le problème.
Et comment s'est déroulé la vraie vie de Jean-Claude Roman,
celle où il ne se mentait pas, où il n'était pas médecin,
où il était seul, que faisait-il de ces journées ?
Devant les jurés et la présidente, Roman livre ses souvenirs de faux médecins,
comédiens menteurs attendant derrière leur ido, la nouvelle scène.
J'accompagnais mes enfants à l'école et je restais dans mon bureau
qui selon les saisons pouvait être ma voiture,
une cafétéria ou une bibliothèque.
Je stationnais sur les parkings des supermarchés, les aires d'autoroutes
ou près d'un jardin botanique.
La solitude est un compagnon fidèle de la vie de Jean-Claude Roman.
Ces journées, il n'est pas effectivement à lire des revues spécialisées
pour entretenir le mythe du chercheur de l'OMS
pour avoir réponse à tout y compris et surtout auprès de ses amis médecins,
des vrais, eux.
Alors il prend la route sans but, sans horizon.
La Suisse, il la connaît comme sa poche à force de l'assillonner,
les vignobles en pente douce du domaine de Lavaux, sa lumière exceptionnelle
du mois de septembre, juste avant les Vendanges, la route qui serpentent au-dessus du lac.
Parfois il sert de voir ses parents à Clairvaux et se promène en forêt avec son père, aimé.
Mais Jean-Claude Roman passe sa journée, comme Sarah, elle son multiple, ses journées, elles sont complexes.
Il y a le roman associatif qui s'investit dans le secours catholique à la paroisse
chez Greenpeace au sein de la Fondation Brigitte Bardot.
Il y a le roman flambeur, celui qui aime le golf, le ski, le tennis.
Mais aussi le roman qui aime d'autres compagnies que celle de sa femme
qui utilise son temps libre ses possibilités d'agents et d'acharger
pour mentir une nouvelle fois à Florence.
La seule vérité dans ses journées parfois chargées, c'est que Jean-Claude Roman
est sans profession, ne travaille pas et ne déclare aucun revenu.
Alors, comment vit-il ? Comment le mensonge peut-il devenir salaire ?
...
Je fais un bien triste métier
Je suis un faussaire qui le sait
Sans remettre à moi
Tout plein d'espoir
Que quelqu'un va lui se faire aimer
En deux temps je sais provoquer
Un amour sans fin
Qui ne bougera pas
Mais pour moi je ne sais rien faire
Rien ne marche et je ne connais pas
D'autres faussaires qui sachent un peu m'aider
Je t'aimais, je te perds
Tu crois qu'un faussaire c'est mentir
Pour faire feu de tout bois pour lui-même et là
Je voudrais revenir
Surtout ce que j'ai construit pour autrui
Et puis tous les fers les voir déchanter
Voir leur désespoir en chantier
Tandis que ce qui les tenait
Sous leurs yeux prendrait
Un tout autre tour
Mais mon or gaillant dément pas
Alors je ne fais rien
Je ne peux pas d'un seul coup changer
Personne ne peut ça
Me passe tout le nez
Car pour moi je ne sais rien faire
Rien ne marche et je ne connais pas
D'autres faussaires qui sachent un jour m'aider
Pour survivre à ce mensonge de la non-profession
Roman va se servir d'un autre mensonge
Celui de facilité bancaire en Suisse
Car rappelons-le, il affirme travailler à l'OMS, à Genève
Jean-Claude propose donc de jouer les intermédiaires
Auprès de ses proches qui se laisserait tenter par l'évasion fiscale
Ainsi son beau-père lui remet plus de 350 000 francs à un oncle
Lui confie 50 000 francs en tout près de 2 500 000 francs
Une somme qui explique le standing de la vie des romans
La villa, la belle voiture, l'école privée, les voyages
L'argent était le cœur du mensonge
Sans lui le médecin de l'OMS n'existait plus
En 1991, Chantal, une dentiste de la région
Y a mis du couple, vend son cabinet
Au mensonge étudiant, puis professionnel
Roman ajoute celui du mensonge conjugale
Chantal devient sa maîtresse
Elle lui confie la somme de la vente de son cabinet
900 000 francs, mais enfin d'année 1992
Elle demande à récupérer ses économies pour s'installer à Paris
La tuile, circonstance agravante
Roman est un piètre, investisseur
A aucun moment, bien sûr, il n'a placé l'argent de ses proches
Il passe Noël en famille
Et c'est au fond de lui-même que bientôt
Il devra faire face à ses mensonges
Vertige
Au troisième jour du procès, Jean-Claude Roman est interrogé
Sur son emploi du temps, le jour du drame
Le 9 janvier 1993
Calme, posée, de façon ordonnée
Roman fait visité à la cour, chaque recoin
De sa double vie, puis laisse sa place
Peu à peu un autre Jean-Claude Roman
Qu'on n'avait encore jamais entendu
Celui des sanglots et des silences
La présidente veut comprendre
Elle l'interroge sur sa relation avec Florence
Le questionne sur le taux important d'alcool
Retrouvée dans le sang de sa femme
Imagine une dispute autour du mensonge
Que sa femme aurait peut-être découvert
S'il y avait eu une scène de ménage
Pourquoi la cacher ?
Je ne me sentirai pas moins coupable
Mais ce serait une explication
Ce serait peut-être plus acceptable
Je ne peux pas dire avec certitude qu'elle n'a pas eu lieu
Mais je ne me rappelle pas
Je me rappelle les autres scènes de meurtres
Qui sont tout aussi horribles, mais pas celles-là
Je suis incapable de dire ce qui s'est passé
Entre le moment où je consolais Florence sur le canapé
Et celui où je me suis réveillé
Avec le rouleau à pâtisserie taché de sang entre les mains
Pourtant, après son premier meurtre
Jean-Claude Roman ne s'endort pas dans son canapé
Une nettoile au rouleau à pâtisserie
Répond un appel téléphonique
Au bout du fil, une amie de Florence
Alors, sans stress, il entame la conversation
Et indique que son époux s'est endormi
Mais ses enfants se réveillent
Ils amènent dans le salon
Et lancent la cassée des trois petits cochons
Dans le magnétoscope
Caroline et Antoine sont dans le canapé
Lui prépare deux bols de céréales
Puis s'assoit avec eux
Je savais, après avoir tué Florence
Que j'allais tuer aussi Antoine et Caroline
Et que ce moment, devant la télévision
Etait le dernier que nous passions ensemble
Je les ai callinés
J'ai dû leur dire des mots tentent comme
Je vous aime
Cela m'arrivait souvent
Et j'y répondais souvent par des dessins
Même Antoine, qui ne savait pas encore bien écrire
Savait écrire
Je t'aime
Nous sommes restés comme ça peut-être une demi-heure
Caroline a vu que j'avais froid
Elle a voulu monter chercher ma robe de chambre
J'ai dit que je les trouvais chauds, eux
Qu'ils avaient peut-être de la fièvre
Et que j'allais prendre leur température
Caroline est montée avec moi
Je l'ai fait coucher sur son lit
Je suis allé chercher la carabine
Jean-Claude Roman assassine ensuite son fils
Dans les mêmes circonstances
Dans le palais de justice des crises et des pleurs
Racompagnent l'intenable confession de Romain
Dans la petite pièce aménagée avec le retour vidéo
Le public est tétanisé, certains sont debout
D'autres quittent la salle sans faire un bruit
Puis Jean-Claude Roman raconte la mort de ses parents
Son départ de la maison conjugale
La route vers Clair-Volé-Lac
L'ouverture du portail
Comme il dû le faire des milliers de fois
Le dernier dîner, puis
La mort, tranchante, chirurgical
Son père, sa mère, son chien
Dans un sanglot, Romain confesse
En quittant Clair-Vaud
J'ai eu le même geste que d'habitude
Je me suis retourné pour regarder le portail et la maison
Je le faisais toujours car mes parents étaient âgés et malades
Et je me disais que c'était peut-être la dernière fois que je les voyais
Arrêtons-nous un instant sur cette description
Avec cet élément troublant
Lorsque Roman raconte les cinq meurtres
Il les raconte froidement, presque avec distance
Or, quand il arrive à l'épisode du chien
Là, il craque, oui, à ce moment précis
Malaise dans le prétoire
Immense malaise
Toujours est-il que la confession de Roman
N'a pas fait avancer l'explication
L'énigme Roman reste entière
Il indique qu'il ne voulait pas faire subir à sa femme
Et à ses parents l'intolérable mensonge
Celui de sa vie, dans son esprit
Mieux valait qu'il meurt, plutôt qu'il sache
Au quatrième jour du procès
Dans le public encore sous choc des déclarations de Roman
La salatant avec impatience les raisons de cet acte
Le témoin du jour chantal
L'ancienne maîtresse de Roman est très attendue dans le prétoire
Et pour cause, elle est la seule survivante
La dernière personne qui a vu Roman
Ce jour-là, le roman meurtrier
Celui qui est passé à l'acte
Le 9 janvier 1993, après avoir assassiné ses proches
Jean-Claude Roman fonce à Paris la rejoindre
Il avait invité Chantal à un dîner le samedi 9 janvier
Chez l'un de ses amis Bernard Couchner
Sauf que cet ami ne le connait pas
Ce dîner n'existe pas
Jean-Claude Roman récupère Chantal chez elle, à Paris
Et il part ensemble, vers Fontainebleau
Le lieu du soi-disant dîner
Il se perd, prétexte une erreur dans le trajet
Ne retrouve plus le numéro de téléphone de son ami
Et il tourne en rond durant plusieurs minutes
Puis stoppe la voiture, en pleine forêt
Roman sort, fouille dans son coffre
Il revient avec une bombe lacrymogène
Et un tiseur électrique
Chantal se défend hurle, l'interpelle
C'est la première fois qu'une voix brise
Le silence de sa folie meurtrière
Elle résiste, lui s'écroule
Il pleure dans ses bras, s'excuse
Parle de fatigue, de son traitement contre son cancer
Faut, lui aussi
Chocaine ne dira rien, ne portera aucune plainte
Elle attend toujours le retour de ses 900 000 francs
Qu'il promet de lui rendre dès lundi
Roman, lui, rentre après 5 mois
Se retrouver les corps de sa femme et de ses enfants
Au palais de justice, on attend toujours l'arrivée de Chantal
À 14h, on apprend que c'est fait porter malade
On n'en saura pas plus, Jean-Claude Roman
Reste seul, avec ses secrets
Depuis 4 jours, Jean-Claude de Roman
Essaye de raconter et d'expliquer
Devant la cour d'assises de Bourre-Hembrès
Roman a tué son père, sa mère, sa femme
Mais ses 2 enfants, après une vie entière de mensonge
Depuis 4 jours, il ne cesse de répéter
Je ne comprends pas
Chantal, qui fut la maîtresse de Roman
Et qui faillit être sa victime
Ne s'est pas présenté à la barre
Au bénéfice d'un certificat médical
Disant qu'elle en était moralement incapable
C'est dommage, car elle est le seul témoin
Survivant de l'affaire
Affaire racontée avec bien des hésitations
Et il faut le dire, un air un peu sournois
Qu'il dessert par l'accusé
Que dit-il de pauvres mots
C'est affreux, j'étais l'assassin
J'aurais voulu les rejoindre
Je ne comprends pas
Il n'est pas le seul
La plongée dans l'invraisemblable vide
De Jean-Claude Roman se poursuit le 10 janvier
Seul chez lui, rien de particulier
Continuait sa vie dans cette maison vide
Où derrière certaines portes
Les corps de Florence, Antoine, Caroline, Gise
Vers 4h du matin, il sort les géricaines
Dessence, qu'il avait rempli quelques jours avant le drame
Le même jour où il avait acheté la bombe
La crémogène, l'arme, les munitions
Et les médicaments
Il ferme les portes et les fenêtres
Mets le feu, s'allonge près de Florence
Et ingurgite un mélange de médicaments
Au même moment, le camion poubelle
Commence à tourner, la ville se réveille
L'alerte est très vite donnée
Roman sera sauvé des flammes
Alors, est-ce que cette tentative de suicide
Est aussi un ençonge
Une ultime falsification
Une dernière mise en scène
Au cinquième jour du procès
C'est sur les lectures de Jean-Claude Roman
Que la présidente s'interroge
Il y a un livre qu'il apprécie beaucoup
Un livre lu pendant son adolescence
Et dans lequel il aime se replonger
Parfois, c'est la chute d'Albert Camus
Pour ponctuer sa question
La présidente lit plusieurs passages
Citons-là
Comment la sincérité
Serait-elle une condition de l'amitié
Le goût de la vérité est un confort
Parfois, ou un égoïsme
Elle poursuit la lecture de Camus
La vérité comme la lumière aveugle
Le mensonge est un beau crépuscule
Qui met chaque objet en valeur
On voit parfois plus clair
Dans celui qui manque
Que dans celui qui dit la vérité
Roman écoute, se lève
Et ne trouve que quelques mots en réponse
J'ai peut-être fonctionné dans ce sens-là
Parfois, on peut mentir
Juste pour voir un peu de joie chez les autres
Face à lui, le public reste dubutatif
La vérité de plus en plus lointaine
On la perd dans la mythomanie de l'accusé
Face à lui, la mère de Florence est à la barre
Elle s'appelle Jean-Crolet
68 ans, elle raconte la vie de sa famille
Avec Jean-Claude
Elle ne comprend pas, elle n'ont plus
Bien sûr, elle ne comprend pas
Avoir été bernée pendant de si longues années
Elle ne comprend pas pourquoi elle a perdu sa fille
Et ses petits-enfants
Alors quand la justice peine a dessiné la vérité
Et j'ai vu la vérité
Alors quand la justice peine a dessiné la vérité
Elle invite les psychiatres à la barre
Elle leur pose à chaque fois la même question
L'accusé est-il fou ?
Jean-Claude Roman est-il fou ?
Devant la cour d'assises de l'un, la parole était
aux experts psychiatres cet après-midi
Ce matin, la belle-mère de Jean-Claude Roman
dont la vie est brisée depuis l'assassinat de sa fille
et de ses deux petits-enfants
s'est écriée des sanglots dans la voie
Jean-Claude Roman tunait qu'un monstre
était-il pour autant
en état de démence au moment des faits
Les experts expliquent que non
Les psychiatres nous ont longuement décrit Roman
un mythoman, un égocentrique, narcissique
intelligent mais lâche
avec des troubles de la personnalité
Il aurait tué pour nier une partie de lui-même
et éliminer la réalité trop lourde à supporter
La vérité aurait tué ses proches
alors il a préféré les tuer avant
Et n'ayant pas la capacité de simplement
déprimer, eh bien il a cassé
autrement une situation sans issue
fort bien, mais cela n'explique pas le massacre
Et comme le dit tout simplement
Maître Abad, son défenseur
Alors mon client est-il un malade ou non ?
On répond, il est limite
C'est une personnalité pathologique
et son discernement a été partiellement
occulté, il n'est pas normal
on pouvait s'en douter, pas vraiment
démant non plus, c'est donc la partie
malade qui l'a emporté sur la partie
saine, il est justiciable de cette
cour d'assises, mais sa responsabilité
est atténuée, mais personne n'a pu
expliquer comment ce mythoman, cet égocentrique
qui avait peur de perdre l'estime
des siens, a pu passer à l'acte
avec tant de violence, sans être
schizophrène, ni en profonde
crise dépressive, la cour
devra juger sans vraies
réponses à ces questions-là
Dernier jour de procès, dernière
confession avant le vérédict
Pendant 4 heures, l'avocat général
Jean-Olivier, vu à somme la salle
les romans avec un requisitoire tranchant
ne laissant la place à aucun doute
à aucune explication, à aucune
explication valable, romans
a tué cinq fois son père, sa mère
sa femme et ses deux enfants
Romans est un génie malin, un
imposteur, qui pendant près de 20 ans
a trompé ses amis, sa famille a volé
pour financer son mensonge
Pour l'accusation, tout semble
calculé, maîtrisé, une sorte de mécanique
bien huile et démoniaque
En ce début d'année 93, la fin
du mensonge était proche, le rideau
allait se lever sur la vie
de Jean-Claude Romand
C'est précisément pour éviter d'assumer
cette vérité que romans préfère
supprimer l'obstacle et en l'occurrence
supprimer des vies
l'avocat de la défense lui, et dans son rôle
il emprunte les chemins de l'intime, remonte
celui de l'enfance, des trébuchements
qui ont amené Jean-Claude jusqu'au drame
du 9 janvier 1993 et conclu ainsi
je le cite, Jean-Claude Romand
les aimait mal comme un malade mental
à la vie, à la mort
C'est donc à l'accusé que l'on donne la parole
avant l'ultime délibération de la cour
Jean-Claude Romand, comme à son habitude
a soigneusement préparé ce moment
où il demande pardon
C'est vrai que
c'est le silence qui s'impose
à moi
Je comprends que mes paroles
et même ma survie ajoutent au scandale
de mes actes
J'ai voulu assumer
et le jugement et le châtiment
et je crois que c'est la dernière occasion
de parler à ceux qui souffrent à cause de moi
Je sais que mes mots sont dérisoires
mais je dois les dire
leur dire
que leur souffrance ne me quitte
ni le jour, ni la nuit
Il s'adresse ensuite ou disparue
ou victime de ses actes
Pardon d'en avoir pu supporter l'idée
de vous faire souffrir
Je sais que je ne pourrai vivre sans vous
mais aujourd'hui je suis encore en vie
et je vous promet d'essayer de vivre
tant que Dieu le voudra
sauf si ceux qui souffrent
à cause de moi me demandent de mourir
pour atténuer leur peine
Je sais que vous m'aiderait
à trouver le chemin de la vérité
de la vie
Il y a eu beaucoup d'amour entre nous
Je vous aimerai encore en vérité
Pardon à ceux qui pourront pardonner
Pardon aussi à ceux qui ne pourront jamais pardonner
Merci madame la présidente
Le 2 juillet 1996
la cour d'assise de l'I
condamne Jean-Claude Roman
à la réclusion criminelle à perpétuité
La sentence tombe
mais la vérité se cache encore
Roman n'a rien livré
il quitte les tribunales avec ses secrets
Désormais
la vie de Roman ne lui appartient plus
Elle entre dans le grand livre
ce que l'on n'arrive toujours pas à expliquer
et qui pour cette raison nous hante
A la station Belière
tu t'es pas fait prier
J'étais grand de crains je serre
Pour un peu
je t'en fais
histoire de
La nuit je m'en
je prends des trains
à la plaine
La nuit je m'en
je m'enlève les mains
J'ai dans les pâtes des montagnes
de questions
ou subsiste encore ton écho
ou subsiste encore
ton écho
J'ai fait la saison
dans cette boîte crimine
T'es pensé
je ne te faisais mien
T'as qu'apparaît
seulement
t'as qu'apparaît
Des strades, des strades
J'ai fait danser
dans de mal entendu
Des kilomètres
de vie en hausse
Un jour au cirque
un autre à chercher
à te plaire
Presseur de l'eau
dynamiteur
d'Aquec
Ta nuit je m'en
je prends des trains
à travers la plaine
La nuit je m'en
et effrontement
J'ai dans les pâtes
des montagnes
de questions
ou subsiste encore
ton écho
ou subsiste encore
ton écho
On m'a vu
dans le verre corps
sauté
à l'élastique
voleurs d'enfort
au fond des crics
L'immense
la nuit je m'en
à l'imbachoum sur France Inter
Affaire sensible
Fabrice Drouel
Aujourd'hui l'affaire Jean-Claude Roman
notre invité Julie Brafman
Bonjour
justice au journal Libération
notre journal partenaire
Alors vous êtes jeune
en 1993
quand l'affaire a éclaté
vous n'étiez pas assez
vieille pour en avoir conscience
Je pensais que je n'étais pas journaliste
Surtout pas journaliste
Moi qui suis
moins jeune que vous j'ai vécu cette affaire
et je me dis que ça change rien
Non je pense que vous avez raison
en fait je pense qu'en 93
comme en 2018
quand on se penche
un petit peu sur le dossier
finalement on est intéressé par les mêmes choses
les mêmes ressorts
ça touche à quelque chose d'assez universel
ce qui change peut-être
c'est le recar qu'on a une société
finalement celle de 93 et celle de 2018
de notre rapport à la vérité, à la transparence
c'est peut-être ça qui change plus collectivement
mais individuellement je pense que non
Bien sûr et le fait qu'elle traverse
les générations montre
qu'elle est fascinante et qu'elle est hors norme
pour une fois qu'on peut dire hors norme
et le dire honnêtement
alors il est en prison depuis
25 ans maintenant
qu'a-t-il entrepris en prison
je vous pose la question parce que
dans votre article vous écrivez
comme si la liberté était paradoxalement
advenue pour lui derrière
les barreaux, que s'est-il passé
pendant 25 ans ?
Cette phrase là fait référence
finalement au moment où après le procès
donc il est incarcéré, c'est le moment
où son imposture
est connu de tous et pour lui
finalement c'est le premier moment de sa vie
aux yeux des autres il en est déchargé
c'est-à-dire que pour lui cette liberté
paradoxalement advient derrière les barreaux
parce que derrière les barreaux
on sait qu'il n'a plus apporté
le poids de ça donc cette phrase
faisait référence à ça
Au-delà de ça
quand même il est très vite je crois
dans un mysticisme religieux
il n'a pas grand chose d'autre à faire
il faut bien l'avouer
mais quand même, qu'est-ce que c'est que ce passage
ce mysticisme, qu'est-ce que ça dit
qu'est-ce que ça explique et comment on peut le relier
à sa vie et
à cet épisode terrible de 93
ça sur la foi
de Jean-Claude Romand
je serais bien en peine de vous répondre
je sais que c'était quelqu'un de croyant
déjà dans sa vie avant
maintenant la façon dont il a cultiver ça
derrière les barreaux, l'importance que ça a pu prendre
je crois qu'elle est allée croissante
d'après ce que j'ai pu lire
d'après les différents archives
je crois que c'est quelque chose de très important
dans sa vie, oui
Alors, est-ce qu'on peut parler
d'une vie de mensonge
ou d'une vie de maladie mentale
alors je prends des précautions
parce que ce sont des notions très précises
les notions de psychiatrie
et nous ne sommes pas psychiatres
nous ne sommes pas psy-journalistes
c'est déjà bien
d'une vie de mensonge certainement
ça on peut dire
c'est l'effet, c'est la façon dont lui aussi
il a raconté, il a bien dit
comment un mensonge en a appelé un autre
comment il en est arrivé finalement
d'une petite falsification personnelle
à l'imposture d'une vie
c'est-à-dire qu'il a tout reconstruit
ce qui est intéressant c'est comment
il s'est inventé parce que finalement
et c'est ce qui a fasciné c'est-à-dire de se demander
qu'est-ce qu'il a déconstruit
pourquoi qu'est-ce qu'il a voulu cacher
qu'il a arrivé d'onteux
qu'est-ce que pourquoi ce mensonge-là
et personne n'a rien trouvé
personne n'a été capable de dire qu'est-ce qu'il a voulu occulter
et cette construction là
en fait c'est une série
donc ça part de l'école de Métine
mais c'est toute sa vie
sa vie personnelle c'est une imposture
qui était dans l'intimité conjugale
c'est-à-dire chaque pan de sa vie
qui s'est construite selon
peut-être un modèle social
de la bourgeoisie
il allait dans les colloques
c'était une vie de dîner mondain
une vie d'un couple
qui présentait bien sous tout rapport
on a l'impression qu'il a reconstruit
peut-être quelque chose qui correspondait
à ça des certaines clichés sociaux
peut-être
Est-ce que l'explication selon laquelle
il s'est enféré dans le mensonge
parce qu'il a raté son examen
de médecin et qu'il ne voulait
surtout pas le dire par rapport à ses amis
qui ont emprunté la même voie
les mêmes études avec succès
est-ce que c'est un peu court de dire
que tout ce mensonge est parti
de là et tourne autour de là
certainement après il n'y a qu'une seule personne
qui peut essayer d'expliquer
comment il a construit son mensonge
c'est lui et lui s'est trouvé bien en peine
finalement on le voit
pendant le procès il n'a pas réussi
ni vraiment à expliquer
son geste meurtrier ni
l'origine de ce mensonge-là
toujours est-il qu'il est
encore en prison
et on va écouter
l'archive du 11 janvier
c'est Emmanuel Crolet qui parle
c'est le frère de Florence
on me rappelle c'est la femme de Jean-Claude Roman
c'est donc une des victimes
et il s'indignait au micro de François Bleu
pays de sa voix d'une possible libération
de Jean-Claude Roman
je le rappelle c'était le 11 janvier
la décision de justice de laisser Roman en prison
est intervenue 10 jours plus tard le 8 février
une colère rentrée
le courrier de la justice qu'Emmanuel Crolet
a appris que son beau frère Jean-Claude Roman
demande à sortir de prison après
25 ans de détention
comme la loi lui permet
ça a été un choc
nous n'attiendons pas du tout à cette
éventualité
étant dans une qui étude
relative depuis 25 ans
tant qu'il est en prison, loin de chez nous on a la paix
c'est un cauchemar qui renémarre
c'est un nouveau cauchemar
comme toute la famille, Emmanuel Crolet a cru
que son beau frère était médecin
à l'OMS
lui aussi lui a prêté de l'argent
lui a fait confiance, l'a pris pour modèle
qu'est ce que vous craignez
on peut le croiser dans la rue
on peut le croiser sur la tombe de ma sœur
je sais pas si on se rend compte
du choc que ça pourrait faire
ma crainte
elle est que pour moi c'est quelqu'un qui n'a pas changé
parce qu'il reste
un manipulateur
et un menteur
les psy ne s'opposent pas
à sa libération
ils disent qu'il n'y a pas de risque
de récidier
ils ont en face de quelqu'un qui est excessivement intelligent
et ça c'est clair
il est excessivement intelligent
et donc qu'il donnera le change
aux personnes qu'il a en face de lui
il l'a fait pendant 20 ans
c'est un marché
c'est un homme qui a tué mais c'est aussi votre beau frère
je l'ai en face de moi demain
je lui dis tu, je lui dis vous
je lui dirais pas Jean-Claude
je l'appellerai Romain
ou je l'appellerai pas
c'est plus bon beau frère
donc rendons un César
ce qui est un César c'était un archive
de France 2
Julie Brafman
quels sont les motifs
officiels
donner la justice pour refuser la
mise en libération conditionnelle de Jean-Claude Romain
donc dans sa décision
le parquet a communiqué
finalement assez sommairement
sur cette décision
en disant que le refus
était motivé finalement par deux raisons principales
la première tiendrait
à sa personnalité
et la seconde à son projet de réinsertion
celui qu'il a présenté
donc devant le tribunal de l'application des peines
donc voilà après
dans le détail c'est difficile de savoir
exactement plus précisément
ce qui a conduit à cette décision
comment les proches des victimes
d'auroman la lumière
de ce qu'on vient d'entendre le beau frère
comment les proches des victimes
après tout pourraient-elles accepter la libération
la question finalement c'est pas celle-ci
parce que bien sûr pour les proches des victimes
c'est une souffrance qui est ravivée
et qui est tout à fait légitime
la question qui est posée
à la justice et cet homme doit-il sortir
a-t-il un projet suffisamment
abouti pour sortir
celui sur le regard qu'il porte
sur son geste
et puis surtout quel est le sens de sa peine
quel est le sens d'une peine
de 25 années
Jean-Claude Romand il doit sortir
il n'y a plus de peine de mort en France
donc la question de sa sortie va se poser
et il va falloir y répondre
alors peut-être qu'à ce stade
on a considéré que le projet n'était pas suffisamment mûre
mais en tout cas
c'est une préoccupation qui va se reposer
ce que ça veut dire
officiellement la justice n'a pas à répondre
à la question de l'émotion
elle a à répondre à la question
ou de la dangerosité
ou à des questions plus rationnelles
plus concrètes comme celles que vous venez de soulever
alors l'effet d'hiver fascine
pas tous certains en tout cas celui-là
il nous questionne et nous les questionnons
et c'est le cas aussi
d'écrivain comme Emmanuel Carer
écrivain et cinéaste
qui s'est emparé de cette histoire
ou des documentaristes comme
Laurent Canté, Nicole Garcia ou Gilles Caillat
Laurent Canté en 2001 avec l'Emploi du temps
et en 2002 avec l'inverseur
Nicole Garcerte
tous ces gens sont revenus sur cette tragédie
ont questionné cette histoire
cet homme qui, écrivez-vous, a fait
de la banale tricherie un art de vivre
des arrangements que la réalité ne routine
de la petite imposture personnelle
une grande mystification
quelle est cette chevaux de sentiments
dans le même homme
c'est ça aussi qui nous fascine
cette affaire-là elle fournit
déjà un premier matériau
à tout romancier cinéaste
c'est celui d'une vie qui est déjà fictionnalisée
donc il y a une espèce de mise en abîme
de la fiction et il leur laisse
aussi finalement
une totale liberté d'interprétation
en étant lui-même pas capable d'expliquer
son geste
d'expliquer son mensonge
je veux dire cette propre interrogation
qui l'a par rapport à lui-même
finalement pour tout romancier
c'est une liberté totale d'interprétation
aussi et d'essayer de réfléchir
à cette histoire
ce qui nous fascine également c'est que pendant 20 ans
il a pu tromper tout son monde
se faire passer pour un vrai médecin
et alors on l'écoutait
parce qu'il était médecin c'est quand même
complètement fou, complètement fou
que la raison sociale présumait
parce qu'elle était pas vrai
dicte le comportement
des gens et construise leur naïveté
c'est incroyable et au-delà
est-ce que ces gens qui l'ont cru
se sont sentis ensuite
complices finalement du drame
moi je pense que ce qui fascine
dans cette histoire c'est que ça renvoie
à quelque chose de très universel
en chacun de nous c'est-à-dire c'est cette espèce
de se rêver
se rêver autrement, se rêver quelqu'un d'autre
tout le monde
et même dans la société tout le monde
se ment à différents degrés
mais tout le monde rajuste un peu le costume
enfin c'est quelque chose qui touche tout le monde
lui il l'a fait un degré
qui n'a jamais été égalé
et il l'a fait dans une sphère
où en général ça n'intervient pas
c'est-à-dire au sujet de ses plus proches
dans l'intimité jusqu'à la chambre à coucher
maintenant est-ce que ces proches se sont sentis
complices de ça
je pense qu'ils se sont surtout sentis
ils n'ont jamais pu le savoir
puisqu'en tout cas sa famille proche
voilà il les a tués
pour ne pas leur dire finalement
tout ce qui était pour qu'il ne le sache pas
c'est juste là dans ce qu'il en a dit
et des gens autour je pense qu'ils se sont
surtout sentis bernés peut-être plus que complices
ouais
en tout cas pour tous ceux qui ont partagé
la vie de roman
ces années là c'était un ancien élève
brillant, un chercheur à l'OMS
toujours en déplacement et ça c'est une vérité
qui était enfin une vérité d'un truc lumé
mais qui était accepté par eux-mêmes
et on va en coûter ensemble
un extrait de documentaires de Gilles Gaillat
autour de la question
qui est celle de la naïveté
de ceux qui l'ont touré
et qui l'ont cru
nous étions allés passer une journée
chez Florence et Jean-Claude
et Florence très fière de son mari
et puis
d'autre part elle nous dit
Jean-Claude très modeste
ne vous l'aurez pas montré
c'est moi qui vous la montre
sa nouvelle carte de visite
l'argent Claude Roman
chef de clinique à l'hôpital
cantonal de Genève
maître de recherche, maître de conférence
et interne des hôpitaux de Paris
d'un côté
un service à l'hôpital
cantonal de Genève
à l'OMS
à Lyon
il était un peu pour moi
un expert dans son domaine
il disait
travailler dans un laboratoire de recherche
à Dijon
théoriquement il avait
invité à Lyon aussi
donc il faut
faire la navette je sais pas ce qu'il faisait
le fait que l'OMS
par exemple un bureau à Lyon
faisait que Jean-Claude était
soit 10 ans souvent je sais pas ce qu'il faisait
de cette journée mais soit 10 ans souvent en déplacement
donc pour moi c'est quelque chose
dans les organisations internationales
vous êtes souvent en déplacement
quoi qu'il arrive donc c'est quelque chose qui est tout à fait acceptable
encore une fois une de ses particularités
de cette région
vous pouvez être à droite, à gauche
et avoir un siège qui est tout mieux
Julie Barfemaine qu'est-ce que ça vous inspire
moi j'ai dit mal
personnellement à comprendre comment autant
de gens ont cru
à ça jusqu'à prêter de l'argent
c'est complètement dingue et pourtant c'est vrai
j'ai pas le choix je suis bien obligé
de considérer que c'est vrai c'est vrai
oui enfin nous on a la chance d'être
au bout du film finalement
nous on le rend bobine mais les gens qui le vivent
je sais pas si à ce moment-là
on se remettait dans nos vies à nous je suis pas sûre
qu'on porte le regard sur nos proches
et qu'on soit capable de déceler
ce qu'eux n'ont pas su déceler à l'époque
c'est toujours plus facile rétrospectivement
mais euh...
bah c'est interroge quand même
oui c'est interroge après la façon dont il a construit
c'est une vie construite avec des comme-ci
parce que finalement il était comme si il était médecin
comme si il gagnait de l'argent
comme si il allait aller coloc comme si le matin
il partait travailler
et les apparences sont restées saufs jusqu'au moment
si il va s'iller un petit peu
on est sorti au moment
où il a senti qu'elle n'était plus tenable
vous dites dans votre article
que Jean-Claude Romand est devenu une sorte de référence
dans les annales criminelles
à chaque affaire impliquant
un petit ou grand falsificateur
de l'existence on ressort
c'est vrai
en tout cas je crois qu'aujourd'hui
rien que la façon dont il a perduré
dans la mémoire collective
il y a le crime
je crois que son crime a pu provoquer
de ce qu'un tuple meurtre
mais on l'appelle bien le faux docteur Romand
c'est ce qui nous en reste aujourd'hui
c'est ce deuxième crime finalement
qui s'est doublé au premier celui du mensonge
le faux messeur on dit toujours ça
et on va écouter pour terminer Manuel Carrer
justement qui nous donne également
les raisons qu'il nous poussait
à s'interroger sur le cas Jean-Claude Romand
et à écrire l'adversaire
c'est une archive qui date du 15 juillet 2015
récupéresse sur le site du.fr
comment c'est converti en prison
cet homme qui a donc commis
ces crimes terribles
non seulement il a commis ces crimes terribles
mais surtout il a menti toute sa vie
c'est quelqu'un qu'on identifie au mensonge
comme si c'était une espèce d'incarnation du mensonge
or cet homme
dit maintenant
qu'au fond qu'il a été touché par la grâce
qu'il est temps
dans une espèce de communication avec le Christ
et
c'est évidemment quelque chose qui inspire
beaucoup de soupçons je me souviens
qu'à son procès
beaucoup de soit avec moquerie
soit avec indignation soit avec dégoût
un tas de gens disaient
mais des journalistes et tout ça
disaient mais enfin en gros c'est
son ultime mensonge
et en plus celui-là il a l'avantage
c'est une forteresse imprenable
si vous êtes faux médecin
vous vous exposez évidemment à ce qu'un jour on vous démasque
si vous dites que vous êtes en communication
quotidienne avec Jésus personne va pouvoir
vous prouver le contraire donc
maintenant
je me refuse à
disons à juger la foi de Jean-Claude Roman
qui sait je suis pas dans sa
je suis pas dans sa tête je suis pas même
pardon d'utiliser ce mot un peu
embarrassant je ne suis pas dans son âme
voilà c'était pour boucler la boucle
sur cette thématique du mysticisme
de Jean-Claude Roman
en prison d'ailleurs Emmanuel Carer
n'avait pas voulu s'exprimer
lors de la première diffusion
de cette émission sur Jean-Claude Roman
il m'avait dit tout simplement
je me suis vraiment
investi dans cette histoire
voilà c'était un période de ma vie
de ma vie littéraire
merci infiniment Julie Brafen
merci beaucoup
libération notre journal partenaire
merci au revoir
les affaires sensibles aujourd'hui
l'affaire Jean-Claude Roman
une émission que vous pouvez réécouter
également sur la page affaires sensibles
du site de France Inter
pour toute information complémentaire
à notre émission livre référence et vos commentaires
si le coeur vous en dit merci
à Loïc Frapsos qui était pas la technique
aujourd'hui
Antoine Elham a dit tout
c'est très bien Antoine de Cônebon
au programme
j'ai vu votre petit mini-criquette
nous allons passer une heure dans les nuages
et une heure au paradis avec Vanessa
qu'est ce que vous avez l'air calme
j'ai du temps dur
Machine-generated transcript that may contain inaccuracies.
durée :00:56:25 - Affaires sensibles - Le 8 février 2019, la justice a rejeté la demande de remise en liberté du faux docteur qui avait assassiné sa famille en 1993, et l'a condamné à une peine de perpétuité assortie de 22 ans de sûreté. Retour sur son histoire, il y a 25 ans avec Julie Brafman qui suit l'affaire pour "Libération", notre partenaire mensuel.