Monde Numérique - Actu Technologies: [INTERVIEW] Clara Chappaz : les 10 ans de la French Tech

Jérôme Colombain Jérôme Colombain 10/10/23 - Episode Page - 36m - PDF Transcript

Aujourd'hui, on ouvre son téléphone, on paie un ami avec Lydia, on partage sa voiture

avec BlaBlaCar.

Et donc ça, on voit que les startups de la French Tech ont réussi à créer ces innovations

du quotidien.

Bonjour Clara Chapaz.

Bonjour.

Vous êtes directrice générale de la mission French Tech.

Merci de me recevoir ici, au coeur de l'univers French Tech à Station F.

Peut-être pourriez-vous, avant toute chose, nous rappeler un petit peu ce que c'est

que la mission French Tech exactement ?

La mission French Tech, c'est une administration qui fait partie du ministère de l'économie

et qui depuis sa création en 2013, en fait, cette année, nous dix ans, je suis sûre

qu'on y reviendra, a le même objectif, finalement, la même mission, celle d'accompagner l'écosystème

de startups en France à se développer, à grandir et à prendre toute la place qu'ils

devraient occuper dans le monde économique.

C'est vrai que c'est un nom qui est devenu quasiment générique, la French Tech, tout

le monde connaît d'une part, et puis on met beaucoup de choses sous le nom French Tech,

d'ailleurs.

Complètement, et je pense que c'est d'ailleurs un des signes du succès de cette première

décennie de la French Tech, quand en 2013, donc on se replonge un peu en arrière, émerge

cette idée de comment est-ce qu'on peut travailler tous ensemble, entrepreneur, investisseur,

structure d'accompagnement, tel que les incubateurs, à faire émerger cet écosystème

Tech entrepreneurial en France, et que l'État se dit, j'y ai ma place et je dois y occuper

un rôle important en créant la mission French Tech, je pense qu'on aurait pu imaginer de

plus beau succès que de se dire que finalement le nom French Tech, qui est une marque de l'État

à la base, est tombé dans le langage courant pour désigner cet écosystème, et donc loin

de nous, sont les années où on se demandait un peu, peut-être quand on était de l'autre

côté de l'Atlantique, ce qui se passait d'un point de vue technologique en France

ou en Europe.

Aujourd'hui, le petit coque rouge est reconnu en France et est porté très fièrement par

nos entrepreneurs et à l'international, quand on se déplace, et tout à fait, au

CES, au Web Summit où on va dans quelques semaines, ou encore à Slosh, à Helsinki.

On a ce symbole French Tech qui vient avec nous, toutes les entreprises qui le portent

fièrement et qui permet de mettre en visibilité et donc d'assurer une certaine attractivité

du secteur.

Dix ans de French Tech, si on devait retenir, je ne sais pas, deux trois noms ou deux trois

événements, deux trois non-start-up emblématiques.

Alors ce qui je pense aussi est signe de la maturité de l'écosystème, c'est qu'on

a pu, où les entrepreneurs et entrepreneurs ont pu créer dans ces premières dizaines

d'années un certain nombre d'innovations qui sont rentrées dans notre quotidien.

Donc on ne parle plus des innovations et on pourrait imaginer des innovations un peu

farfelues qui ne sont pas possibles.

Parce qu'il y en a eu, hein, pardon, mais moi je m'en souviens, j'ai connu les débuts

de la French Tech, il y en a eu entre les objets connectés qui servaient à des choses

bizarres.

J'y imagine.

Mais on a besoin aussi de cette puissance d'innovation et avant tout pour créer le monde de demain.

Mais je reviens à mon idée du quotidien.

Aujourd'hui on ouvre son téléphone, on paie un ami avec Lydia, qui est une boîte de

la French Tech.

D'ailleurs notre programme French Tech 120x40, je reviendrai peut-être un peu plus en détail

sur ce programme.

On partage sa voiture avec Blablacar, 2013 je pense que l'idée d'ouvrir sa porte pour

accueillir un étranger et faire un bout de trajet ensemble était complètement farfelue

pour le coup.

Mais aujourd'hui c'est possible grâce à Blablacar, elle s'est même devenue un usage.

On fait un Blablacar.

Et puis c'est une réussite entrepreneuriale française.

Tout à fait.

Je pense aussi du point de vue entreprise, des logiciels comme Konto ou encore Payfit

qui sont rentrés dans le quotidien ou peut-être Soil sur les tickets et restaurants.

On a aujourd'hui des entreprises où les employés vont demander à leurs ressources

humaines, est-ce qu'on peut avoir Soil pour les tickets et restaurants.

Donc c'est vraiment un point important parce que…

C'est la dématérialisation du ticket et restaurants, plus de papier, tout sur une

carte ou même dans le téléphone.

Et donc ça on voit que les startups de la French Tech ont réussi à créer ces innovations

du quotidien.

Aujourd'hui c'est deux Français sur trois qui utilisent les services ou les produits

des startups de la French Tech, des 25 000 startups de la French Tech de façon quotidienne

ou en tout cas régulière.

Mais bien sûr, le propre des startups, c'est qu'il y en a beaucoup qui naissent et il

y en a quelques-unes qui deviennent les stars comme celles dont on vient de parler.

Et puis il y en a aussi beaucoup qui meurent.

Bien sûr.

Alors je dis souvent les startups pour une grande majorité d'entre elles.

Donc sont quoi ?

Elles ont des entreprises jeunes, innovantes, avec de fortes ambitions de croissance qui

développent un produit technologique ou un service technologique.

Elles sont souvent financées soit dans cette partie de recherche de croissance ou soi-même

parce qu'elles sont sur des processus de recherche et de développement très long ou

peut-être qu'elles ont besoin de passer à l'échelle industrielle pour produire

leurs produits et d'ouvrir des usines.

Donc elles ont besoin de financement.

Toutes ne vont pas chercher ce financement.

Il y a aussi des startups qui s'auto-financent, mais une grande partie va faire appel à du

financement.

Et ce financement, on l'appelle le financement de capital risques.

Donc je pense qu'il faut toujours se rappeler que ça fait partie du processus d'innovation

d'une startup de prendre des risques et en effet, il y en a pour toutes celles que

j'ai citées qui se sont inscrites dans les usages des français, il y en a tout autant

voire même davantage qui aujourd'hui ont porté un projet qui a pivoté, qui peut-être

s'est arrêté, mais c'est pas grave parce que c'est ça aussi la maturité de l'écosystème

de la France Tech dix ans après, c'est de voir qu'on a des personnes qui se sont lancées

une première fois et puis se sont relancées, on a peut-être des employés de ces startups

à succès que j'ai cités qui aujourd'hui sont partis et créés leurs propres projets

entrepreneuriels.

D'ailleurs c'est un peu une tendance du moment, les historiques quittent les startups des

débuts de la France Tech, on va dire, et puis…

Relance d'autres projets, mais c'est magnifique, c'est ça un vrai écosystème, c'est de

voir qu'on peut créer cet écosystème qui va au-delà d'un simple succès, d'une

simple entreprise, mais vraiment qui perdure et qui crée des opportunités.

Donc dix ans, je pense, on a permis de créer et d'atteindre un certain stade de maturité

où on a aujourd'hui à la fois les talons et certains d'entre eux qui ont vécu de

très belles expériences et qui se relancent, et aussi une capacité à attirer les talons

étrangers via des dispositifs comme le French Tech Visa par exemple.

On a le financement en 2013, les startups de la France Tech, donc le nom émergeait

seulement à l'époque, avaient levé en tout et pour tout sur l'année moins de 1 milliard

d'euros.

En 2022, l'année dernière, on est à 13.5 milliards, on a une accélération de la

capacité de ces entreprises de se financer, de lever de l'argent, qui est aussi bien

arrivé à mobiliser les acteurs plus traditionnels du financement via des initiatives comme

Tibi, 1 et le 2ème volet qui s'est lancé cet été.

Alors, parenthèse, qu'est-ce que c'est Tibi ?

Tibi, c'est quoi ? C'est mobiliser les acteurs institutionnels du financement, les assurances,

les banques, etc., à pouvoir aller soutenir l'investissement dans les startups en finançant

ces fonds de capital risques.

Donc ils vont eux donner de l'argent au fonds de capital risques et les fonds de capital

risques vont pouvoir déployer cet argent dans les projets entrepreneuriaux.

Du coup, le troisième élément de succès, donc talent financement, et c'est un des

défis, je pense, quand on se projette dans l'avenir, c'est d'avoir réussi à créer

un écosystème assez divers dans les entreprises que je vous ai citées.

On a aussi bien des logiciels, des plateformes de marché qui visent, par exemple, mettre

en relation un conducteur et quelqu'un qui veut trouver un moyen de transport, pour

la placard, des outils de paiement comme Lidia.

Donc on a, je pense, montré qu'on pouvait réussir à porter un projet entrepreneurial,

et c'est une des grandes forces de la French Tech dans un très grand nombre de secteurs.

Parfois, c'est même assez éloigné de la tech, il y a des choses qui sont plus, qui

relèvent plus du commerce, du business que de la technologie et de l'innovation technologique

à proprement parler.

Je pense que dans l'innovation technologique, il y a à la fois les outils qui permettent

à ce genre de plateformes de se mettre en place et de passer à l'échelle.

Par exemple, dans une plateforme de mise en relation commerciale, j'ai cité BlaBlaCar,

j'aurais pu citer Back Market sur le reconditionné ou Vestaire Collective sur les produits

vêtements, sacs et autres d'occasions.

Il y a énormément de technologie derrière ces plateformes parce qu'il y a un certain

nombre d'algorithmes propriétaires, parce que quand on met beaucoup de produits en ligne,

il faut pouvoir trouver une manière de les montrer, qui est la plus satisfaisante possible

pour le client.

Il y a beaucoup de outils aussi de personnalisation, il y a énormément d'innovation technologique

sur toute la partie logistique, il y a énormément d'innovation technologique sur la partie

sécuritaire.

Dans la création de ces nouveaux usages, qui en soi sont des innovations, ces usages

digitaux, elles ne sont rendues possibles que par la création d'un certain nombre

de technologies.

Mais ensuite, et c'est là justement où je voulais ouvrir, dans les défis qu'on

a, on va célébrer la semaine des 10 ans de la French Tech du 16 au 22 octobre, donc

on se retournera avec une certaine fierté sur ce qui a été accompli, mais on se projettera

aussi surtout sur ce qu'il reste à l'arrivée.

On va parler d'ailleurs des tendances actuelles et futures.

Je pense qu'on va aller.

Et un des grands défis, c'est de s'assurer que les succès qu'on voit aujourd'hui,

ces entreprises qui sont rentrées dans notre quotidien, qui sont souvent des entreprises

plutôt numériques, peuvent être répliquées sur des entreprises de technologie et notamment

d'innovation de rupture.

C'est le programme qu'on a lancé qui s'appelle le French Tech 2030, qui accompagne 125 cloréas

d'innovation de rupture dans des secteurs stratégiques, comme la santé avec les biothérapies,

comme la transition écologique.

Ça part d'un constat qui est que ça manquait un peu, parce que c'est vrai qu'il y a pas

mal de startups deep tech, comme on dit, qui arrivent des centres de recherche, etc.

Avec là, pour le coup, des choses très, très, très innovantes, des brevets, etc.

Des prix Nobel parfois.

Ils ne font pas partie de la French Tech, la plupart du temps, ce genre-là.

Alors ils font partie de la French Tech, parce que toute startup technologique fait partie

de la French Tech.

Et on a un réseau formidable de capital et de communauté French Tech, qui sont des associations

de proximité dans lesquelles ce genre de structures sont bien sûr les bienvenues,

mais même une grande priorité.

Mais peut-être qu'ils ne faisaient pas encore assez partie de programmes, par exemple, comme

le French Tech 120 X 40, qui est le programme qui accompagne, que l'on a lancé à la mission

French Tech en 2019, qui accompagne les startups les plus développés.

Alors il y en a certaines, il ne faut pas assez pas tout blanc ou tout noir.

Il y a sur le Next 40, 7 startups deep tech.

La plupart d'entre elles sont industrielles.

C'est des entreprises comme Diena Script, qui créent une technologie de réplication

ADN, des entreprises comme Insect ou Inovafid, qui produisent des insectes pour remplacer

les protéines animales, encore une fois, un procédé industriel.

Donc on voit ce genre de leader du French Tech 120 X 40 émergé.

Mais c'est sûr qu'on a une conviction, c'est qu'on a besoin de ce genre d'entreprise-là,

de startups de la French Tech, qui vont s'attaquer à ce genre d'innovation.

Le plan France 2030, qui a été lancé par le président Emmanuel Macron en octobre 2021,

a listé un certain nombre de secteurs stratégiques dans lequel il faut aller soutenir l'innovation

de rupture.

C'est, je vous disais, la santé, bien sûr, tout ce qui est numérique, notamment intelligence

artificielle, cyber-sécurité, le quantique, la transition écologique.

Tous ces secteurs ont besoin d'innovation de rupture, parce qu'aujourd'hui, ils

s'ouvrent une opportunité de création technologique.

Et ce qu'on voit, c'est qu'il y a, de plus en plus, et on l'encourage de startup

deep tech qui se lance.

La BPI a lancé en 2019 le premier plan deep tech.

À l'époque, il y avait une centaine de startups deep tech qui étaient créés par an.

Aujourd'hui, on est autour de 300 et l'objectif, c'est d'atteindre les 500.

D'accord.

Mais alors attendez, je ne sais pas.

Ça, c'est effectivement la quantité, c'est important, mais la qualité, ça l'est

aussi.

Il y a eu, effectivement, des hauts et débats en 10 ans de French Tech.

On mesure souvent ça au niveau de, avec les niveaux de levée de fonds, avec des années

record, vous en avez cité, d'autres qui étaient plus creuses.

En ce moment, on en est où ?

Alors, c'est une bonne question.

Je reviendrai à l'angle deep tech et la qualité, parce que c'est justement ce qu'on fait

avec le programme French Tech 2030, c'est de se dire si le plan France 2030 a listé un

certain nombre de secteurs stratégiques, que les startups ont tout leur rôle à jouer

pour créer des innovations sur ces secteurs.

50% des 54 milliards de France 2030 doivent aller vers des acteurs émergents.

Nous, la French Tech, notre rôle, c'est de pouvoir accompagner les acteurs de l'innovation,

les startups deep tech et d'innovation de rupture de ces secteurs à accélérer, à

aller plus vite, pour qu'on voit de plus en plus de très grandes réussites dans les

années à venir.

Ça, c'est un vrai objectif pour les prochaines années.

Et donc, French Tech 2030, c'est 125 startups d'innovation de rupture qui vont bénéficier

d'un accompagnement tout particulier de la mission French Tech, mais couplé aussi à

la BPI et à France 2030 pour la partie du financement.

Et il y a déjà des candidats pour ça ?

Il y a 125 L'Oréa qui ont été dévoilées à Vivatech.

C'est des startups comme Altaro, avec qui j'étais tout à l'heure, qui utilisent à la fois des

technologies numériques et des technologies d'objet connectés pour mesurer les déchets

et l'impact carbone des bâtiments dans la construction.

Eolink était là aussi ce matin, qui créait des Eoliennes flottantes autour de Brest ou

peut-être Hélicite Plante, qui change l'ADN des plantes pour que les plantes transpirent

moins et en transpirent moins, elles consomment moins d'eau, donc aussi une dimension très

vertueuse sur l'écologie.

C'est tout ça aujourd'hui, ou en tout cas demain, les géants de la French Tech, parce

que c'est des startups qui sont sur les secteurs dont on a besoin, les secteurs sur lesquels

tout est inventé, on reviendra probablement à l'intelligence artificielle, c'est tout

un pont qui s'ouvre.

Et je pense qu'on a aujourd'hui une opportunité, non pas seulement de créer des très belles

entreprises numériques qui sont peut-être un peu sur la fin de la chaîne de valeur, mais

de remonter et d'avoir aussi bien des innovations entrepreneuriales technologiques sur le numérique,

mais que sur les batteries électriques, par exemple si on prend la chaîne de l'automobile

vers corps, créer des batteries électriques à Dunkerque et annoncer la semaine dernière,

ça a levé de fond record de 850 millions je crois, mais aussi sur créer des nouveaux

véhicules.

On a un certain nombre de startups qui aujourd'hui travaillent sur créer beaucoup plus petits

et plus légers véhicules pour pouvoir se déplacer, et ensuite sur les visages comme

la black art.

On remonte la chaîne de valeur et c'est ça l'opportunité de la French Tech de demain.

Mais est-ce que ces entreprises aujourd'hui ont encore besoin d'un accompagnement de

l'État ?

Complètement parce que je reviens à votre question à laquelle je pensais retourner.

Quel est le contexte aujourd'hui ? Le contexte est un peu paradoxal parce qu'à la fois

on a dix ans d'expérience, de maturité, on se le disait les fonds n'ont jamais eu

autant d'argent, ce qu'on appelle le dry powder, donc le montant qui est levé, qui

aujourd'hui est disponible dans les fonds d'investissement.

Donc les investisseurs sont chauvouillants, c'est ce que vous voulez dire ?

Mais, le monde a un petit peu changé par rapport aux années post-COVID où qu'est-ce

qu'il s'était passé ? On avait vu une espèce d'emballement de la digitalisation où quand

tout était fermé, les usages digitaux ont accéléré, les startups du digital ont eu

des taux de croissance exponentiels, et donc ça a créé un peu, et en plus l'argent

étant gratuit, ça a créé à cette époque un effet peut-être un peu d'emballement.

De bulle ? De bulle ? Je dirais emballement.

Qu'est-ce qu'on voit aujourd'hui ? C'est que ce dynamisme a changé, la remontée

des taux, couplé au conflit en Ukraine et les répercussions qu'on a pu voir sur l'énergie,

et puis le contexte économique global, notamment lié aux marchés et aux indices technologiques

sur les marchés étrangers qui ont pu peut-être perdre un peu en valeur, fait que les fonds

d'investissement sont dans des thèses d'investissement peut-être un peu différentes et regardent avant

toute chose la profitabilité.

Ça ne veut pas dire que les startups de la French Tech se doivent d'être toutes profitables

au jour 1 de leur création, non, on est, je le disais, une innovation de rupture, startup

industriel, il faut pouvoir investir une startup industrielle comme Vercor.

Avant d'avoir son premier heureux de revenu, il faut non seulement qu'elle construise

sa recherche et le développement, mais en plus qu'elle construise son usine, mais en

plus qu'elle fasse fonctionner son usine avant d'avoir la première bêterie à vendre

à ses clients.

Donc c'est une startup qui, de fait, ne pourra pas être profitable au jour 1.

Donc il faut que les investisseurs soient rassurés et aussi se montrer patient.

Exactement.

Et il faut que les startups puissent montrer quel est ce chemin par la profitabilité.

Ça c'est un petit peu nouveau parce qu'on sort de quelques années de hyper-croissance

à tout prix, où il fallait surtout dépenser pour croître plus vite.

Et donc c'est là où en fait je pense qu'on a finalement encore plus besoin d'accompagnement.

En tout cas c'est ce qu'on voit avec les startups qu'on accompagne, c'est que dans

ce changement de paradigme se crée un certain nombre de défis, donc le défi du financement

sur lequel l'État fait toute sa part avec le plan France 2030, mais nous, notre objectif

avec le programme French Tech 2030, c'est de pouvoir aider les startups à mieux comprendre

quels dispositifs sont les plus pertinents pour eux à quel moment de leur développement.

Je parlais de startups industriels, il y a un dispositif exceptionnel qui s'appelle

l'appel à projet première-usine.

Premier-usine c'est quoi ? C'est juste une entrepreneur avec un projet industriel et

j'ai besoin de fonds pour financer ma première-usine, pour justement commencer à commercialiser.

Donc ça, ça fait partie des dispositifs qui peuvent être mobilisés.

Mais je pense qu'au-delà de la question du financement, quand même cette question de

la profitabilité revient de plus en plus sur la table, ça a permis quelque chose qui

je trouve peut-être un peu, enfin peut-être même très positif, c'est de sortir ou en

tout cas de ne plus avoir la focale uniquement sur le financement, mais de penser au revenu.

Pourquoi ? Parce que la profitabilité c'est les revenus et les coûts, donc il y a certes

la partie de travail sur les coûts, mais il y a avant tout comment j'ai plus de revenus.

Et là, via le programme French Tech 2030 et via une initiative qui s'appelle « Je choisis

la French Tech » qu'on a lancé en juin, je pense qu'on touche du doigt un peu le pivot.

On parlait disant le pivot pour la prochaine décennie, c'est de se dire « L'écosystème

est arrivé à maturité, mais comment est-ce qu'on fait collectivement pour pouvoir aider

les startups à vendre davantage leurs produits, notamment au grand groupe, aux collectivités

locales, à l'étranger ? »

C'est sans net 1 indéniable, c'est toujours difficile pour une entreprise, une start-up

d'aller vendre son produit à ce genre de grand décideur, mais pourquoi ? Parce qu'une

start-up, on en parlait en introduction, c'est risqué, ça a du capital risque, donc forcément

un acheteur doit mesurer la prise de risque dans ses décisions d'achat, donc il est certainement

plus difficile aujourd'hui, c'est ce qu'on voit quand on traîchera avec les startups,

pour une start-up de vendre à un hôpital que vendre au ministère des Armées, parce

que le ministère de les Armées a certainement plus l'habitude de la prise de risque et

donc a déjà fait un certain travail sur comment mesurer, prendre en compte et accompagner

à la prise de risque.

Mais du coup, on est extrêmement mobilisés sur cette question parce que je pense que

c'est une des clés pour continuer à grandir et avoir l'écosystème se développer.

On a fait un très bon travail à créer un écosystème, il a une marque, il est reconnaissable,

il y a un vrai collectif, entrepreneur, investisseur, association, état, on travaille tous ensemble.

Maintenant, le défi, c'est peut-être un peu de casser les barrières et d'arriver

à mieux rapprocher cet écosystème de l'écosystème des grands groupes, de l'écosystème

des collectivités locales et des acheteurs publics, parce que c'est seulement en ayant

la confiance de ces grands clients qu'on pourra déployer des solutions à l'échelle et donc

il faut pouvoir accélérer là-dessus.

Et peut-être que finalement, c'est un peu logique, on avait dans les premières années

besoin de très fortes identifications, de créer la visibilité autour de ce monde

des startups qui du coup a été peut-être un peu traité comme un monde à part.

Mais au final, une startup, c'est quoi ? C'est une entreprise comme une autre qui doit gagner

de l'argent, convaincre ses clients, développer ses innovations.

Qui commence par embrûler en général.

Et aujourd'hui, justement, c'est pour ça que là où je pense que l'accompagnement

est le plus nécessaire, c'est à trouver ses clients.

Il y a une étude de la Banque de France récente qui dit que les deux tiers des startups ne

sont pas rentables, les startups de la French Tech.

Oui, ou alors 30% le sont déjà.

Oui, surtout des pensions, on voit le verre à moitié plein ou à moitié vide.

Je pense qu'il ne faut pas diaboliser le fait qu'une startup ne soit pas rentable.

Parce qu'on est, je le disais pour la plupart, sur des innovations de rupture qui vont prendre

énormément de temps à être développés.

Et quand on parle de startups industriels, donc French Tech 2030, les 125 lorais, il y en

a 70% qui vont à terme ou ont déjà ouvert une usine.

Donc c'est vraiment les startups d'innovation de demain, la plupart doivent passer par ces

procédés.

Donc, de facto, ces business-models font qu'on n'est pas rentables au début, parce qu'il

y a besoin de temps.

Mais…

Oui, mais alors comment rassurer les investisseurs ? Et puis, alors, les font directement, ceux

qui vont mettre l'argent, et puis derrière, tout le monde, en fait, tous les investisseurs

même individuels, etc.

Je pense qu'il faut… Ce qu'on observe, c'est que les dirigeants des startups ont

très bien compris ce changement de paradigme, et souvent dans l'action, on n'est pas du

tout dans un monde où les gens seraient un peu figés, ne pas trop savoir comment passer

ce paradigme de l'hyper-croissance à la profitabilité.

Donc, on voit des entreprises qui se remettent en question sur leur trajectoire de profitabilité,

peut-être utilisent aussi le moment actuel pour se dire qu'il y a des opportunités

qui s'ouvrent, de consolidation, de croissance externe, peut-être…

Donc acquisition, fusion, etc.

Acquisition, fusion.

Comment est-ce qu'on arrive à passer à l'échelle et à pouvoir avoir, du coup, une belle croissance

des revenus ?

Mais on sent qu'à vous écouter que c'est ça que le message de l'État aujourd'hui,

finalement, par rapport au start-up.

Le message, c'est qu'en tout cas, on est là pour les accompagner, on est là pour

les accompagner à se débloquer.

La réussite, je pense, de la mission French Tech des 10 premières années, c'est d'avoir

créé ce collectif.

Il n'en tient qu'à nous et on est 100% mobilisés d'arriver aujourd'hui à finalement rouvrir

les portes de ce collectif pour mieux le connecter aux grands groupes, aux acheteurs

publics, aux collectivités locales et faire en sorte parce qu'avoir des innovations

exceptionnelles mais qui restent dans le placard, ça ne sert pas à grand-chose à la fin.

Et donc, si on veut en plus s'assurer que ces entreprises puissent continuer à croître,

à déployer leurs innovations, à créer de l'emploi.

Aujourd'hui, c'est 1.1 million de personnes qui travaillent dans les start-ups de façon

directe ou indirecte partout en France sur nos territoires.

Il faut qu'on puisse ancrer l'utilisation de leurs produits et de leurs services et

on est mobilisés.

Bien sûr.

Alors, voilà pour le volet économique, on va dire, le volet technologique, où est-ce

qu'on en est aujourd'hui ? Quelles sont les tendances en matière d'innovation dans

la French Tech au sens très large ?

Vous l'avez déjà un peu évoqué, l'IA, etc.

Qu'est-ce qui est-ce que... parce que c'est aussi une bataille internationale.

Donc, où est-ce que les Français vont pouvoir véritablement jouer des coups et sortir

leur épingle du jeu ?

On voit deux secteurs aujourd'hui qui tirent vraiment l'écosystème et sur lequel il

y a beaucoup d'espoir mais aussi de raison d'espect.

C'est l'intelligence artificielle que vous en avez parlé et tout le secteur

au sens large, c'est très vaste mais de la transition écologique.

Sur la transition écologique, je commence là, on est face à un défi d'une taille

immense dans laquelle il va falloir changer un grand nombre de comportements mais dans

laquelle aussi il va falloir un certain nombre d'innovations.

On a la conviction et ce depuis le lancement de la mission French Tech que les start-ups

technologiques ont une part des solutions sur la partie innovation.

C'est ce que je disais tout à l'heure, le plan France 2030.

La moitié des loréats du programme French Tech 2030, donc qu'on a créé pour accompagner

ces grandes innovations, sont des loréats qui sont directement dans la transition écologique.

Par exemple, j'ai cité tout à l'heure Hélicite Plante qui modifie la DND Plante pour qu'elle

consomme moins d'eau et donc avoir un comportement plus vertueux sur le développement agricole.

J'aurais pu citer Javlo qui est une entreprise dans l'agriculture qui utilise la data pour

optimiser le stockage de grains et donc moins de pertes et donc encore une fois une agriculture

plus vertueuse.

J'aurais pu citer des entreprises comme Life qui travaillent sur l'hydrogène vert dans

la région de Nantes.

On a vraiment des innovations à la fois dans la mobilité, dans l'énergie, dans l'agriculture.

Tous les secteurs doivent se réinventer et on a des entrepreneurs fabuleux qui font

ce choix d'aller utiliser leurs innovations pour créer ces start-up.

French Tech 2030, c'est 125 loréats donc la moitié sur la transition écologique et

la moitié des entreprises ont un lien très fort avec la recherche.

D'ailleurs je crois que sur les fondateurs, 30% d'entre eux ou 28% exactement ont un

PhD donc sont docteurs et c'est un des grands enjeux, c'est comment est-ce qu'on peut finalement

accompagner le rapprochement entre cet univers de la recherche et l'univers des start-ups

pour créer ces innovations.

Éviter que les chercheurs partent à l'étranger.

L'année dernière, la Green Tech donc c'est startup de la transition écologique et le

secteur qui a levé le plus en France c'était 15% de tous les fonds levés et ça nous

place en tête non seulement de l'Union européenne mais aussi de l'Europe au sens large

donc devant le Royaume-Uni pour ce secteur et je pense que c'est un signe extrêmement

positif parce que ça concilie à la fois les talons qu'on a en France sur ces questions

de recherche et de développement appliquées à la transition écologique peut-être une

question de valeur.

Je pense qu'on a un pays où on a des entrepreneurs très engagés qui ont envie de faire des choses

qui ont du sens, qui ont de l'impact.

C'est vrai qu'on le voit quand on est à l'étranger où la France a un discours et

une prise de conscience du problème environnemental que n'ont pas forcément les autres pays,

les autres entrepreneurs.

On le constate sur les salons comme le CEVS etc.

Tout à fait.

C'est surtout les Français qui parlent de ça.

Et avec un soutien, il y a un cadre de l'État qui je pense ne peut que soutenir l'accélération.

On entend en ce moment beaucoup parler de la crise des logements et des mesures DPE

sur le marché du logement locatif et que, sous un certain score, A, B, C, D, E, F, à

partir d'une certaine allée, les logements ne pourront plus être loués.

Il y a énormément de start-up qui travaillent sur la décarbonation du secteur de l'immobilier,

que ce soit Hoffman sur le ciban décarboné, Altaro dont je parlais tout à l'heure qui

mesure les déchets et les émissions carbone dans le secteur de la construction, DeepKey,

une FrenchTech120 qui aide aussi sur la mesure et la compréhension de l'impact carbone

du bâtiment.

Ce secteur est très riche et je pense que l'effort qui est fait en France notamment

via le secrétariat pour la planification écologique permet aussi d'avoir un horizon

de temps assez long parce que c'est des innovations qui prennent du temps et donc

pour lesquelles il faut en parler de la patience des investisseurs, il faut avoir un peu une

vision long terme de où est-ce qu'on veut aller et le fait qu'on sache de façon très

précise où est-ce qu'on veut aller en tant que pays sur ces questions permet ce foisonnement

d'innovation.

Alors ça c'est la GreenTech, ce sont les GreenTech du côté de l'intelligence artificielle

maintenant.

Alors on a vu des choses comme Mistral, Mistral.ai qui vient un petit peu de sortir du bois,

on sait pas trop encore mais ils viennent d'annoncer leur premier produit, une start-up

dont on parle beaucoup qui a déjà fait beaucoup de buzz alors qu'on sait pas trop ce qu'elle

va nous sortir mais il y a d'autres choses.

Alors l'intelligence artificielle je pense que c'est le deuxième secteur sur lequel

on a une très grande France en France.

D'abord grâce aux talents, encore une fois on a certaines des meilleures universités

labo de recherche sur la question, on a des dispositifs qui permettent à ces chercheurs

de pouvoir vraiment être au point de leur recherche, je pense notamment à la thèse

Cypher qui finance ce type de recherche et on a un écosystème qui aujourd'hui bénéficie

du fait que ces talents ont été reconnus à l'étranger.

Il y a un certain nombre de grandes entreprises étrangères qui ont fait le choix technologique,

qui ont fait le choix de s'implanter en France pour leur labo de recherche d'intelligence

artificielle, je pense au META, je pense mais aussi des branques, JP Morgan, ça a été

relocalisé son équipe de recherche d'intelligence artificielle à Paris et on commence à voir

un petit phénomène qui est très intéressant je trouve, c'est des Français qui sont les

meilleurs de leur domaine comme Arthur Mensch, le CEO de Mistral dont vous parliez ou encore

le fondateur de Dust qui est une autre startup d'intelligence artificielle, qui sont percés

par ces grands groupes mais qui reviennent et qui reviennent avec l'ambition de créer

une entreprise dans l'intelligence artificielle en France, et justement de pouvoir avoir

accès à ce vivier de talent en France, avec une ambition de se dire, l'intelligence

artificielle c'est une nouvelle frontière, tout s'ouvre, tout est à construire, c'est

un vivier d'opportunités, on a les moyens de créer l'architecture ici en Europe grâce

à ce genre d'acteurs qui sont très soutenus par les fonds d'investissement, Mistraléa

y a levé 105 millions en sites, je pense que c'est la plus belle levée de sites qu'on

n'a jamais eu en France, et qui sont très soutenus par l'écosystème au sens large,

Xavier Niel a annoncé la semaine dernière, il est dédié 200 millions d'euros à l'intelligence

artificielle.

Il y a Skelway.

Il y a Skelway, il y a l'achat d'un super calculateur.

On a longuement parlé dans ce podcast.

L'état aussi au rendez-vous, le plan sur l'intelligence artificielle qui a été annoncé

en novembre 2022, il est dédié de 2.2 milliards, notamment sur la recherche et notamment sur

la capacité de calcul, donc tous les ingrédients sont là, et alors petit fait dont on peut

être fier aussi, on commence même à voir des acteurs étrangers décider d'implanter

leur startup d'intelligence artificielle en France.

Je pense par exemple à Poolside, ces deux anciens fondateurs à grand succès d'une

plateforme qui s'appelle GitHub, qui aide les développeurs informatiques, qui ont choisi

Paris pour s'implanter pour leurs nouveaux projets s'intéresser sur l'intelligence

artificielle.

Donc toutes les briques de l'écosystème sont là.

Maintenant on est au tout début, vous l'avez dit, Mistraléa a levé en juin.

On est au tout début de la deuxième décennie en fait.

Mais il y a de très belles opportunités devant nous et je pense que contrairement à

2013, on a l'expérience d'une première décennie et ça nous sera, je l'espère,

très utile pour gagner certaines de ces batailles.

Tout de dernière, ça pourrait être le mot de la fin, mais une dernière petite question

Clara Chapaz, l'une des missions de la French Tech, c'était aussi de réconcilier les

Français avec l'innovation et l'entrepreneuriat.

Et puis ça a été pas mal moqué, même la startup nation, etc.

Donc est-ce que cette mission a été remplie selon vous ?

Alors rempli, oui.

Aujourd'hui, quand la mission French Tech s'est lancée en 2013, il y avait,

j'ai pas le chiffre exact, mais on dit à près moins de 5% des jeunes qui disaient

vouloir être entrepreneur.

Aujourd'hui, c'est 53%.

Donc on voit une véritable progression.

Le mot French Tech, on le disait, est tombé dans le langage courant.

Quand on demande aux acteurs économiques, s'ils connaissent le mot French Tech, 78%

répondent oui.

Donc on a rendu visible, on a donné envie, il y a une vraie dimension d'attractivité.

On voit que les gens ont envie de se lancer.

Par contre, je pense que là où il reste énormément à faire, et je finirais peut-être

sur ce défi pour la prochaine décennie, c'est qu'on a un écosystème matur, un écosystème

qui a réussi, en tout cas cette première partie, on a des très beaux succès dont

on parlait, mais qui est peut-être encore peu ouvert, souvent le profil type, et je vais

tomber dans le cliché, mais malheureusement, le cliché n'est pas si loin de la réalité,

c'est un homme.

Moins de 9% des startups sont confondés par des équipes 100% féminines.

C'est souvent un diplômé de grande école, probablement HEC ou Polytechnique.

80% des fondateurs ont fait des grandes études, back plus 5.

Il vient souvent de la région parisienne.

En tout cas, s'il est financé, il est certainement région parisienne, 80% des fonds

levés vont vers les startups de la région parisienne, alors qu'une start-up sur deux

est créée en dehors de Paris, donc on a un vrai décalage.

D'accord, il y a un différentiel.

Nous, on a lancé un certain nombre d'initiatives dont le programme Tramplin, qui vise à ouvrir

les portes de cet écosystème tech, d'accompagner des publics qui sont éloignés de ce monde

de la tech à la base, qui peut-être vivent dans des quartiers priorités de la ville,

dans des zones rurales à revitaliser, qui sont réfugiés, boursiers, à pouvoir se

lancer, à obtenir une bourse, à obtenir un accompagnement dans un incubateur.

Mais est-ce qu'on est arrivé à 100% certainement pas ? Et je pense que c'est non seulement

une question de vision, de la société qu'on veut construire, parce que le secteur de

la tech est un très dynamique, il crée un très grand nombre d'opportunités économiques

pour toutes et tous, mais c'est aussi une question de performance.

Il n'est plus approuvé, en tout cas, je l'espère, qu'on crée les meilleurs produits et les

meilleurs services quand on a des perspectives différentes, et aujourd'hui on empatie de

se manquer de diversité, et on est mobilisé pour que ça change.

Merci Clara Chapaz, directrice générale de la mission French Tech.

Machine-generated transcript that may contain inaccuracies.

Clara Chappaz, directrice générale de la Mission French Tech, revient sur 10 ans de tech à la française. 

Lancée en novembre 2013 pour aider le développement des entreprises françaises innovantes, la French Tech a contribué à l’éclosion de plusieurs pépites (Lydia, Blabla Car, etc.). Aujourd’hui, après avoir connu des hauts et des bas, elle entame une nouvelle ère axée notamment sur les greentech et l’intelligence artificielle.