Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Guy Georges, l’enfant dont personne n’a voulu

Europe 1 Europe 1 9/1/23 - 40m - PDF Transcript

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On de l'être raconte.

Christopher Delatt.

Guy George est probablement le plus célèbre des tueurs en série français.

Entre 1991 et 1997 à Paris, il a violé et tué cette femme.

Je ne vais pas vous raconter ces crimes une énième fois.

Aujourd'hui je vais emprunter un chemin compliqué pour tenter de comprendre pourquoi.

Pourquoi Guy George est-il devenu l'un des psychopathes les plus terrifiants de l'histoire criminelle ?

Ouvrons ensemble la Côte B du dossier d'instruction de Guy George.

Dans le système judiciaire français, le dossier d'instruction contient un sous-dossier appelé Côte B.

Il rassemble les rapports des experts psychiatres, psychologues et de l'enquêteur de personnalité.

Ouvrons l'un de ces dossiers.

On de l'être raconte. Côte B sur Europe 1.

Le 20 mars 1998, la Brigade Criminelle de Paris interpelle Guy George.

Trois ans que les lignées du 36 étaient aux trousses du tueur de l'Est Parisien.

La capitale et la France poussent un ouf de soulagement.

Quand on parle de Guy George, on ne parle pas que de Guy George.

Quand on parle de Guy George, on parle aussi d'un moment de l'histoire de France, c'est-à-dire d'un traumatisme collectif.

Selon les enquêteurs de la Brigade Criminelle, il y aurait un tueur en série dans la capitale.

Depuis trois semaines, le tueur en série mobilise à lui seul la moitié des effectifs de la Brigade Criminelle.

Un tueur qui opère toujours la nuit, choisit sa victime au hasard pour vu qu'elle soit seule, la suit jusque chez elle, puis la viole avant de la tuer, à l'arme blanche.

Le tueur de l'Est Parisien, tout le monde en parlait, on surveillait les sorties, on donnait des consignes.

Un portrait robot a été largement diffusé et un numéro ouvert a été mis en place, un numéro qui a déjà reçu plus de 400 appels en deux jours.

Il y avait comme ça une atmosphère généralisée d'anxiété collective.

Le tueur a déjà commis des erreurs, il a laissé derrière lui une empreinte génétique, celle de son sperme, et une empreinte de pied dans une flacque de sang.

Le tueur en série de l'Est Parisien, cet homme qui était recherché activement a été interpellé peu avant 13 heures au métro blanche à Paris dans le 18e arrondissement par des policiers en patrouille.

A 35 ans, le tueur de l'Est Parisien est incarcéré à la prison de la santé. Trois experts psychiatres le rencontrent à 14 reprises. Le docteur Daniel Zaguri est l'un d'entre eux.

Avant d'être un expert, j'étais le père de famille, le citoyen, et j'avais à l'esprit un certain nombre de fantasmes à Cori qui m'occupaient, je me disais, celui-là je n'ai pas trop envie de l'examiner,

est-ce que je vais parvenir à surmonter mes sentiments, d'hostilité, et en fait, mais ça c'est mon métier, en fait assez vite se produit une rencontre.

Je suis en face d'un monsieur qui s'appelle Guy Georges, qui me reçoit de façon tout à fait aimable, tout à fait affable, vraiment très à l'aise, peut-être trop à l'aise, alors trop à l'aise évidemment au regard des actes atroces qu'il avait commis.

Bonjour Monsieur, je suis le docteur Daniel Zaguri, je suis là pour vous expertiser et nous allons passer à un moment ensemble pour évoquer votre personnalité.

Vous êtes d'accord ? Oui bonjour docteur, pas de problème, allons-y, vous voulez qu'on cause quoi ? Cela va durer longtemps et je reviendrai vous voir.

Vous allez me raconter votre vie, votre enfance, mais ce n'est pas tout, il faudra aussi que vous répondiez à des questions sur les faits, les faits qui vous sont reprochés.

Vous comprenez ? Je le ferai.

Nous étions propres psychiatres et il a servi à chacun la soupe qu'il attendait et il avait une capacité je dirais presque supranormal à saisir l'autre,

puisque ce qu'il a fait avec moi, il l'a fait avec les autres experts.

Cette formidable intuition à saisir l'autre, qui est probablement supérieur à la vôtre ou à la mienne, est inversement proportionnelle à sa capacité à se comprendre lui-même.

Je vois monsieur Guy George, que vous ne vous êtes pas toujours appelé Guy George, la naissance vous vous appeliez Rampillon, du nom de votre mère, Rampillon.

Vous savez que c'est le nom d'un footballeur professionnel du FC Nantes ? Oui bien sûr je le sais, je suis un foot-foot, je suis le FC Nantes.

Et vous docteur ? Vous aimez ça aussi ?

On s'est mis à parler foot comme deux copains au café du commerce, bon alors ça peut peut-être choquer, mais en même temps, si vous voulez, si on garde une très grande distance, on n'obtiendra pas grand chose.

Alors Guy George c'était pas un grand bavard, et en tout cas, pour ce qui concerne les crimes, il avait honte dans une certaine mesure de ce qu'il avait fait, je ne dis pas qu'il s'en comptait coupable.

Il avait honte d'avoir été appréhendé pour les faits qu'il avait commis, comme il disait, maintenant que je suis pris, oui j'ai honte.

Guy George est suspecté d'avoir commis 7 viols et 7 meurtres de femmes, face au juste Gilles Bertil, Guy George l'a reconné que 5.

Guy George s'est libéré après son arrestation, après être passé devant moi, et il a rencontré dans le détail effectivement l'assassinate postale d'Escarfai, puis celui de Magali Siroti, son avant-dernière victime tué en septembre 1997.

Mais après, même lorsqu'il est entré dans la voie des aveux chez moi, il était quand même très très réticent pour parler des faits.

C'était pas l'ouverture qui était définitive où il allait se confier. Je me souviens, au cours d'un interrogatoire qui a dû durer 8 à 9 heures, alors qu'il était assisté de 3 avocats, lorsqu'il a admis avoir, il m'a dit j'ai tué plusieurs femmes, je lui ai dit combien, il m'a dit je ne sais pas, j'ai dit on va les prendre dans l'ordre.

Quand je lui disais les noms, il disait qu'il ne les connaissait pas, donc je commençais par lui présenter la planche photographique de l'immeuble, vous connaissez l'immeuble, lui vous reconnaissez l'escalier.

Bref, il est quand même pendant toute l'instruction, avant de se bloquer complètement, il a été très très réticent pour parler des faits.

Par contre, lorsqu'on parlait de lui, lorsqu'on parlait de ses origines, là il était très très demandeur.

Mon sentiment profond, c'est que ça n'est pas du tout une personnalité sadique, une personnalité calculatrice.

Je me souviens très très bien de ce premier parloir, parce que c'est très important.

Je n'arrive pas à défendre des personnes pour qui j'ai une antipathie profonde.

Il faut que j'ai envie de défendre la personne, donc il faut qu'il y ait un minimum d'atome proche lui.

C'est évident que quelqu'un qui avait contre lui des accusations aussi fortes de tous ces 7 meurtres qu'il y ait regrouché, c'était évident que j'avais besoin de savoir comment il se comportait par rapport à une femme, parce que c'est quand même, j'allais dire, le cœur du sujet.

Et j'ai rencontré quelqu'un de facilement très sympathique, et je ne suis pas la seule, c'est à dire qu'on rencontrait Guy George, on rencontrait quelqu'un facilement très sympathique.

Côte B-13, rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubèque, Graspin et Zaguri. Guy George n'est Guy Rampillon, du nom de sa mère, le 15 octobre 1962.

Il est le fruit d'une aventure entre sa mère, Hélène Rampillon, et un soldat américain nommé George Cartwright.

L'enfant est rapidement renié et abandonné par sa mère, puis rejeté par ses grands-parents maternels, qui considèrent qu'il est issu d'une aventure extra conjugal.

A 20 mois, Guy George est confié et une famille d'accueil de la banlieue d'Angers.

Guy George va être confié dans une famille, notamment une dame qui a dédié sa vie à élever les enfants, mais il faut savoir qu'il va en avoir jusqu'à 20.

Donc c'est vraiment une famille dans laquelle il a une place en plus particulière, parce qu'elle va expliquer que Guy George est le seul noir.

En plus, en une région, il n'y en a pas beaucoup. A l'âge de 11 ans, il sera dans cette famille où il sera le seul garçon.

Tous les autres sont partis, donc il n'y a pas les meilleures circonstances pour avoir une enfance épanouie.

Il y a l'abandon maternel, il y a ce père héroïque, cette image du père soldat américain qui transpare dans son discours.

Dr Daniel Zaguri, expert psychiatre.

Il y a ce changement de nom, je crois que c'est vers 5-6 ans, on change son nom parce qu'il y a un ébranlement de l'identité absolument terrifiant.

Guy George, c'est l'enfant dont personne n'a voulu, qui va être confié à la Daas, qui va être confié à une famille d'accueil.

Et Guy George, il le dit lui-même, j'ai toujours manqué de quelque chose, alors j'ai été chapardeur.

Vous savez, l'enfant qui a le sentiment profond qu'on l'a privé de quelque chose auquel il avait droit et qui va s'en emparer.

Côte B-18, rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubèque, Grince Pan et Zaguri.

C'est un enfant nonchalant, parfois capricieux, dix-seize enseignants.

Guy George nous a confié qu'il s'agit d'une attitude de longtemps figée,

qui lui permet d'avoir une vue sereine de son enfance et de son adolescence.

Il nous dit, je n'aime pas me plaindre, montrer que je suis faible.

Je souffre en silence, je sais rester calme comme l'eau qui dort.

Mais quand c'est parti, je suis d'une violence terrible.

Donc c'est un enfant très vite rebelle, qui désinvestit complètement la scolarité

alors que par ailleurs il est fait normalement intelligent,

qui va par contre avoir un coup particulier pour la chasse.

Il raconte comment il pouvait guéter les poules d'eau pendant des heures

pour avoir le plaisir de les offrir à ses parents adoptifs.

Et c'est un enfant qui très tôt va commettre des vols et des agressions.

Côte B11, rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubèque, Grince Pan et Zaguri.

A 14 ans, Guy George agresse une sœur adoptive en tentant de l'étrangler.

Un an plus tard, il récidive avec une autre sœur adoptive.

Il tente de l'étrangler avec un pied de tabouret.

Cette seconde agression entraîne son exclusion de la famille d'accueil.

Placé en foyer, Guy George cumule les fugues, les actes antisociaux,

ce qu'il décrit comme son apprentissage de psychopathe.

Donc un enfant révolté, un enfant qui désinvestit la scolarité,

qui chapparde et qui commet des actes d'agression,

qui est perçu par certains éducateurs comme attachant

et vite comme ayant une conduite inquiétante dont on sait pas très bien jusqu'où elle est allée.

Côte B12, rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubèque, Grince Pan et Zaguri.

A 17 ans, Guy George agresse la jeune Pascal à la descente d'un bus.

Et il tente de l'étrangler, mais la jeune fille parvient à s'échapper.

Il est placé en détention une semaine.

En mai 1980, il agresse deux autres jeunes femmes avec un couteau.

Il est fait tuer neuf mois de prison.

Guy George n'est pas un inconnu pour la justice.

En 1985, il avait été condamné à dix ans de réclusion criminelle.

Il avait été reconnu coupable du viol d'une jeune femme.

Maître Jean-Pierre Morin l'avait défendu à l'époque devant la cour d'assises de Meurthe-Moselle,

il garde l'image d'un homme instable et replié sur lui-même.

Il a tenté d'agresser une jeune femme dans le parking souterrain,

le parking tiers en face de la gare avec un couteau.

Comme il a vu qu'il était pris, il a adopté le profil bas.

Il essaie de se faire tout petit en se disant qu'on va limiter les dégâts.

Mais il n'était pas causant, il était muré, il n'était pas communicatif.

Bon, une fois l'arrêt de la cour d'assises rendue, je n'ai plus entendu parler de lui.

Et on a l'impression très nette quand on regarde l'évolution de ces agressions

de plus en plus sévères, de plus en plus inquiétantes,

que c'est comme un brouillon qui se cherche et qui va finir par se trouver plus tard

dans les passages à l'acte criminelle.

Côte B16, rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubbeck, Graspon et Zaguri.

Pour le 1er meurtre, celui de Pascal Escarfaye dans la nuit du 24 au 25 janvier 1991,

Guy Georges nous indique qu'il n'était pas en chasse.

Il dit que c'était de l'improvisation. Je l'ai vu passer, je l'ai suivi.

J'étais prêt. Voilà, la piste est longtemps.

Je suis rentré dans son immeuble, je l'ai doublé, elle m'a demandé si je cherchais quelque chose.

Alors, j'ai sorti mon loupinelle et je l'ai menacé.

On est rentrés chez elle jusque dans sa chambre.

Je l'ai attaché avec du sparadrap que j'avais acheté.

Je l'ai attaché les bras derrière le dos.

J'ai découpé ses vêtements, je l'ai violé.

Elle avait peur, elle ne parlait pas, elle ne criait pas.

Je l'ai baillonnée ensuite pour pas qu'elle donne l'alerte.

Le premier crime, il s'en souvenait.

Il s'en souvenait assez précisément et les suivants, ça s'embrouillait un petit peu, ça se mélangait.

Ce qui est assez fréquent.

Alors, ce qu'il dit, nous, on ne le prend pas pour argent content.

C'est ce qu'il dit, c'est que la première fois, c'était le vol qui était présent à son esprit

et il y a eu cette séquence vol, viol, meurtre.

Je l'ai interrogé bien entendu sur qu'est-ce que vous éprouviez au moment de vos actes

et il m'a simplement répondu, c'est d'être le boss, c'est de faire sa loi.

Il n'en a pas dit plus, mais effectivement, ça renvoie, si vous voulez,

à ce vécu de toute puissance, d'ivresse du sujet au moment de ces passages à l'acte

qui va être ce qu'il va chercher à répéter par la suite.

Côte B. Van Neu, rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubbeck, grinspant et aguré.

Guy George ne demande jamais à ses victimes de se déshabiller.

Il veut les laisser dans l'ignorance de la suite.

Ce n'est que lorsqu'elles sont totalement à sa merci, qu'il leur annonce qu'il va les violer.

Début alors le rituel de possession.

Guy George découpe vêtement et sous vêtement de sa victime.

C'est à ce moment que son excitation sexuelle se produit.

Il pénètre sa victime et éjacule assez rapidement.

Après cela, il cherche des objets de valeur.

Mais avant de quitter les lieux, il prend son couteau et assaine des coups toujours au même endroit,

à la base du coup, vite et sans les regarder.

Il nous dit alors, ça saigne.

On pense souvent que ces criminels éprouvent une jouissance à faire souffrir les autres.

C'est pas la jouissance de faire souffrir l'autre, c'est la jouissance d'être indifférent.

Ça ne me fait rien, je ne ressemble rien.

Donc sa fierté, c'était d'être au-delà du bien et du mal, au-delà de la condition humaine.

C'est ça qu'il va chercher par la suite à répéter.

Guy George a eu cette phrase qui m'a beaucoup marqué et qui était

si je savais pourquoi je l'avais fait, je ne l'aurais pas fait.

Quand il part avec son kit de tueur, il sait qu'il va tuer.

Mais par contre, les raisons profondes qui font qu'il le fait et qu'il va le faire,

là il sort à un mur.

Si pour nous c'est un énigme, ça en est aussi une pour lui.

Si vous attendez que la solution de l'énigme soit résolue en trois mots,

bah non, c'est pas possible.

Je ne peux pas vous dire une formule qui serait Guy George a commis ces crimes parce que, voilà.

Donc il y a tout un ensemble de conditions qui vont le mener à un premier acte

qui au départ commence par un vol, qui se poursuit par un viol

et qui aboutit ensuite à un meurtre.

Et donc quand il rencontre des jeunes femmes, jeunes, jolies,

vivantes, vives, actives, dynamiques, manifestement épanouis et ça,

ça se télescope avec une espèce de destructivité de haine primitive liée

à l'image maternelle, c'est ce que j'appelle le coup de foudre criminel.

A vingt et un an, parce qu'il veut connaître ses origines,

Guy George écrit une lettre à la dace du ménéloi.

Monsieur le directeur, je m'appelle Guy George.

Je suis né le 15 octobre 1962 à Angers.

A ma naissance, je m'appelais Rampillon.

Quelle est l'identité exacte que l'on a,

à ma naissance, je m'appelais Rampillon.

Quelle est l'identité exacte de mes vrais parents ?

Que sont-ils devenus ?

Aîches des frères et des sœurs, pourrais-je les connaître ?

Je suis en âge de comprendre.

Pourquoi m'ont-ils abandonné ?

Surtout, pourrais-je les retrouver ?

Pourquoi est-il changé de nom ?

Et comment reprendre mon ancien nom ?

L'Immage maternel

Moi, ce qui m'a frappé au sujet de l'image maternelle,

c'est quelque chose d'ailleurs que j'ai observé chez la plupart des tueurs en série,

à savoir l'absence de haine.

L'absence de haine pour cette jeune mère qui l'a abandonnée

et qui a élevé par contre son frère.

Comme si cette haine était tellement intense,

risquant de le submerger, qu'il fallait absolument qu'elle soit contenue.

Et probablement, je pense que c'est l'un des ressorts des passages à l'acte criminel

déplacés sur d'autres jeunes femmes à l'époque des crimes.

On peut essayer de coller des mots.

Vengeance, revanche.

Moi, je dirais changement de posture.

C'est-à-dire, celui qui risque d'être détruit par cette rencontre

va être celui qui, au contraire, détruit.

La personne susceptible de réveiller cette détresse primaire fondamentale.

Ça peut être une interprétation, oui.

C'est le meurtre perpétuel de la mère.

Je ne sais pas si il y a un pourquoi,

parce que s'il y avait un pourquoi,

ça veut dire qu'on pourrait trouver une cause, une explication et du coup,

il remédiait.

Ce qui est certain, c'est que dans tout ça, il y a une absence totale d'affect.

Il ne va pas tuer quelqu'un qu'il connaît.

Il ne va pas tuer quelqu'un pour lequel il a eu des sentiments.

Il a eu des relations avec des femmes tout à fait ordinaires,

qui se sont bien passées.

Donc en fait, quand il tue, il tue la femme qui passe,

peut-être parce qu'elle déclenche une vitalité, quelque chose, une force, etc.

Mais il ne la connaît pas et donc il y a une indifférence totale.

Il n'y a pas d'altérité, il y a une chozification de l'autre.

Et d'ailleurs, quand il a raconté les scènes, il n'y a aucune émotion.

Rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubbeck, Graspin et Zaguri.

Chez Guy Georges, la différence prime sur la haine.

Reconnaître la haine et qu'il voudrait reconnaître les raisons de cette haine.

Et ce serait dans le même temps reconnaître sa propre souffrance passée

et le mal qu'il a fait.

Quand on lui demande ce qu'il éprouve pour ses victimes,

Guy Georges répond,

Ben, rien.

C'est des étrangers.

Je les connais pas.

Alors, il est totalement imperméable.

Il ne faut pas penser qu'il est imperméable tout le temps et à tout.

Cette absence d'empathie, elle est focalisée sur les situations criminelles répétitives.

Par ailleurs, c'était quelqu'un qui avait des petites amis.

Elles ont trouvé que s'il était un type plutôt gentil, plutôt sympa

et qu'il n'avait pas eu avec elle des comportements sexuels particuliers.

Donc l'idée commune qu'on a à faire à des pervers sexuels

dont la sexualité ne peut que s'exprimer de cette manière-là est une idée fausse.

C'est ce qu'on appelle le clivage d'un côté.

Vous avez quelqu'un banalement ordinaire et de l'autre côté,

vous avez quelqu'un qui commet des crimes absolument atroces.

Côte B32.

Rapport d'expertise psychiatrique des docteurs Dubèque, Graspant et Zaguri.

Guy Georges présente une dimension de perversion narcissique

dont le propre est de transférer sur l'autre ses conflits intérieurs.

On retrouve dans son propre récit des moments de bascule

à partir desquels se sentant victimes d'injustice.

Il estime avoir tous les droits et il n'apporte rien

s'abritant derrière sa carapace caractérielle

et son sentiment d'indestructibilité.

Il était sincère, je dirais, jusque dans les réponses qui peuvent choquer.

Il n'a pas cherché à nous faire croire qu'il pensait aux victimes

qu'il était broyé par la culpabilité.

Il a dit non, je ne veux pas vous mentir.

Bon, je ne ressens rien.

Il ne vit pas sans doute tous les jours en se disant

« mon Dieu, ce que j'ai fait, c'est monstrueux ».

Il dit « c'est monstrueux » mais ça n'imprime pas

parce qu'en fait, finalement, si ça a imprimé,

il tomberait dans une dépression profonde.

Sa personnalité serait totalement déconstruite.

Et Guy Georges, comme d'ailleurs la plupart des docteurs en série

que j'ai examiné, je lui ai posé la question

que feriez-vous à quelqu'un qui ferait ça à votre petit ami ?

C'est-à-dire que la réponse, elle a fusé, je le tuerai.

Le 19 mars 2001, Guy Georges comparé devant la cour d'assises de Paris.

Au cours des trois années d'instruction,

il a changé plusieurs fois de version.

Mais alors que s'ouvre son procès,

il ne reconnaît plus rien.

Il dit qu'il est innocent.

Il n'a pas violé ces femmes.

Il ne les a pas tués.

Ce procès, elle l'attend et le redoute.

Guylaine a perdu sa fille en novembre 94.

Elle a avait 22 ans, elle rentrait chez elle vers minuit.

Guy Georges la surprise dans le parking de son immeuble.

Dans le dossier, la description du crime donne des hallkeurs.

Le procès sera éprouvant.

La mère de Elsa en a conscience.

Mais elle a prévu d'assister à toutes les audiences.

Elle veut comprendre pourquoi sa fille a été tuée

et que l'assassin soit condamné au maximum.

La perpétuité a sorti d'une période de sûreté de 22 ans.

Dans les éléments à des charges,

qui pouvait y avoir une question qui se posait,

c'était le fait de savoir s'il était gauché ou droitier.

Et donc, Solange Doumique, qui a assisté la famille Escarfailles,

avait constaté que quand il tenait le micro,

il utilisait certaines mains,

mais que quand on lui passait les albums,

il utilisait une main,

et qu'il n'y avait pas d'autres.

Il n'y avait pas d'autres.

Il n'y avait pas d'autres.

Quand on lui passait les albums,

il utilisait une autre main,

donc autrement dit, il pouvait très bien être ambidextre.

Monsieur Guy George,

dites-moi,

êtes-vous gauché

ou droitier ?

Quand vous écrivez,

quand vous tournez la page dans l'album,

vous utilisez la main droite

ou la main gauche.

Et quand vous utilisez un couteau,

quelle main est-ce que vous utilisez ?

Et Guy George, au lieu de répondre

comme ce qu'aurait fait n'importe qui,

il fait d'un geste

qui signe la totalité

de sa culpabilité,

puisqu'en fait, il fait mine

de poignarder quelqu'un.

Dans sa globalité,

la cour d'assises a été

ses idées froides et de stupeurs,

une silence,

non seulement tout était dit,

mais en plus, tout était

de la scène, finalement.

Puisqu'on voyait un geste

et on pouvait imaginer que ce geste,

il avait été fait sur une des scènes de crimes.

Donc c'était très parlant.

Vous utilisez votre main droite.

Pourquoi cette déclaration ?

Guy George, ce débat, non, c'est un piège

chez votre avocate qu'en face

qui m'a eu, je n'ai pas fait attention.

J'ai dit oui à cette question, c'est un jeu

auquel je ne veux pas me prêter.

Il a basculé, il est devenu foutre-collère.

Donc il n'est pas capable

de me dire, ben oui, effectivement,

je remis mes l'agression pour laquelle

j'ai déjà été condamné,

je n'ai pas d'endurationnel.

L'audience a dû être suspendue

et donc là, effectivement, je suis allée

essayer de lui parler.

Et je n'ai pas vraiment pu,

parce qu'il était, j'ai eu le sentiment

qu'il était tordu

de colère, de violence,

rentré.

C'était un homme qui était prêt à exploser.

La Cour !

Monsieur, veuillez-vous lever ?

Comment t'expliquez-vous votre comportement ?

Je suis fatigué,

je commence à mêler la rue.

Que voulez-vous dire, Guy George ?

Dites que vous avez à nous dire.

Non.

Non, ça va être encore pire.

Pour moi, c'est pas un problème, hein.

C'est pour les familles, quoi.

Peut-être, mais

ça leur ferait du bien.

J'aimerais réfléchir.

Bien au calme.

Jusqu'à l'ordi.

Dans la salle,

l'attention est extrême.

Une voix éclate, celle de Nathalie,

qui affirme que Guy George l'a violée

en 1981, dans les larmes

et dans les cris, elle quitte le procès.

Il lui faut aller de réflexion,

mais on se moque du monde, ou quoi ?

Quand il découpe les vêtements, quand il nous poignarde,

quand il fait tout ça,

il s'amusait qu'on n'a pas le temps de réflexion,

et là, on lui accorde un temps de réflexion,

on en attendait au rigole, ou quoi ?

Vous espériez qu'il allait avouer ?

J'étais sûr qu'il allait le dire.

Il vient de dire lui-même qu'il donnait des couteaux de la main droite.

Et puis on lui dit...

Non, non, non.

Nathalie ne reviendra pas au procès lundi.

Les autres familles espèrent entendre

enfin des aveux de la part de Guy George.

...

Et donc, le week-end s'annonce comme ça,

et c'est vrai qu'on s'attendait à ce que le lundi,

l'audience reprenne avec un Guy George

qui allait s'expliquer.

Et en fait, il est revenu,

il s'est braqué sans doute pendant le week-end,

il a refusé d'être extrait,

donc il a été extrait de force par le président,

comme c'est possible,

et puis il a refusé de parler.

Et ce n'est, je crois, que le mardi,

que, finalement, sur question laélectro-sulier,

il va finir par passer aux aveux.

...

Pour votre famille,

pour votre père,

ou qu'il soit,

ou qu'il puisse vous pardonner,

avez-vous tué mademoiselle Pascal Escarfaye ?

Oui.

Avez-vous tué mademoiselle Kati Rocher ?

Oui.

Avez-vous tué mademoiselle Elsa Bernadine ?

Oui.

...

À ce moment-là, on se dit,

la messe est dite que les choses sont posées.

Là, comme avocat, ça a été particulièrement intense,

parce que quand vous commencez par bâtir une défense

sur une recherche d'acquitement,

et puis tout d'un coup,

la personne que vous défendez fait le geste

qui ruine tout espoir,

et vous devez changer de pied.

Et il y en a certains qui vous disent,

mais il faut le quitter.

Il faut quitter la barre.

Ils vous amontissent.

C'est pas bien, vous ne pouvez plus le défendre.

Ils vous disent,

cette personne a été abandonnée toute sa vie,

et elle ne va pas être abandonnée

par les avocats en qui elle a confiance.

Donc on continue, on est là,

et on trouve une explication.

...

C'était un moment terriblement bouleversant,

terriblement important, je pense,

pour les familles de victimes,

puisqu'il y en a même une qui s'est surprise

à formuler un merci,

une fois qu'il a dit oui à tout,

et tout reconnu.

Guy George a même demandé pardon aux familles.

La réaction de Liliane Rocher,

la mère de l'une des victimes,

elle raconte ce qu'elle a ressenti

tout à l'heure face à l'assassin de sa fille.

Nos regards se sont croisés,

et j'ai eu un mouvement de lèvres

pour lui dire merci,

et lui a eu un mouvement de tête.

Quelque chose est passé,

et si l'on m'avait dit qu'un jour,

je dirais merci à l'assassin de ma fille,

pour moi, ça aurait été complètement insensé.

Je pense que ça va

faire évacuer un peu cette haine

que j'avais en moi,

qui me détruisait en définitive,

parce que la haine, c'est très destructeur.

M. Greffier,

faites entrer le docteur Daniel Zinguri

en qualité d'experts psychiatres,

je vous prie ?

À la fin, lorsque le président

s'est tourné vers Guy George en lui demandant

s'il avait une question à me poser,

et donc Guy George s'est levé,

il a dit oui, j'ai une question à vous poser,

et il m'a dit, vous avez dit

que je n'étais pas malade mental.

J'ai dit oui, en effet, j'ai dit ça.

Mais vous avez aussi dit que je n'étais pas normal.

J'ai dit oui, en effet, j'ai dit ça.

Est-ce qu'il y a des gens comme moi

dans cette salle ?

Et j'ai dit oui, en effet,

il y a des gens comme vous dans cette salle.

Et au fond, il a dit merci et il s'est rassi.

Qui était une manière, tout de même,

de m'interpeller sur son humanité ?

Est-ce que je suis un monstre ?

Est-ce que je suis quelqu'un

d'au-delà de la condition humaine ?

Où est-ce qu'il y a des types comme moi

dans cette salle ?

Ce serait tellement facile

de dire effectivement que Guy George est un monstre.

Parce que dire que c'est un monstre,

ça veut dire que ce n'est pas un humain

et il est différent de nous.

Et donc ça nous protège.

La vérité, c'est que Guy George n'est pas un monstre,

Guy George est un humain

avec une pardonbre

que l'on n'arrive pas à percevoir

et c'est justement

cette incompréhension

de cette pardonbre

qui nous inquiète

et qui nous conduise

à qualifier les individus

qui commettent de tels actes de monstre

parce qu'on veut les sortir

de notre sphère.

La réalité est bien différente.

C'est un soulagement.

Sans surprise, Guy George l'a donc été condamné

à la réclusion criminelle à perpétuité

à sortie d'une peine de sûreté de 22 ans.

Bien sûr, il est condamné

et il est jugé responsable de ses actes.

Mais il n'est pas le seul responsable.

On ne n'est pas psychopathe,

on le devient

et on le devient par des constructions administratives.

C'est-à-dire que cette situation,

elle s'est enquistée,

j'allais dire, elle a été créée

car à 6 ans ou à 7 ans,

on lui a enlevé son nom

et on lui a donné le nom de Guy George.

Et cette négation de l'identité,

un âge où il est capable de comprendre les choses,

était comme le meurtre d'une personnalité.

Guy George a aujourd'hui purgé

la période de sûreté

de sa condamnation à perpétuité.

En théorie, il pourrait donc formuler

une demande de remise en liberté.

Mais il ne le fait pas.

Est-ce que c'est pour rester fidèle

à ce qu'il avait déclaré à son procès ?

Je vais m'infliger cette peine.

Je sortirai jamais de prison.

Vous serez tranquilles.

Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org

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Écoutez Christophe Hondelatte décrypter la personnalité de Guy Georges. Entre 1991 et 1997, Guy Georges a violé et tué 7 femmes. Le docteur Zagury a tenté de comprendre les pulsions criminelles du tueur en série… Le plus célèbre tueur en série français conserve tous ses mystères.Vous voulez écouter les autres épisodes de ce podcast ? >> Retrouvez-les sur notre site Europe1.fr ainsi que sur vos plateformes d’écoute habituelles.