Monde Numérique - Actu Technologies: [Edito] Un hashtag anti-Musk

Si vous êtes l'utilisateur de X, c'est-à-dire Twitter, mais que vous trouvez que ce réseau

part vraiment en vrille en ce moment, parce qu'il est envahi par les haineux, les complotistes

et tous les professionnels de la désinformation de tout poil, alors vous êtes invité ce vendredi

27 octobre à lever le pied à boycotter X pendant une journée. Oui, c'est une initiative

lancée par quelques spécialistes français du fact checking qui essaient de lutter un

peu contre les dérives des réseaux sociaux, journalistes et chercheurs avec même un hashtag

no twitter day. Un hashtag anti-mosque qui intervient, ce n'est pas un hasard, le 27 octobre,

c'est-à-dire le jour anniversaire de la prise de contrôle de Twitter par Elon Musk. Pour beaucoup,

c'est à partir de ce moment-là que tout a dérapé. Les certifications qui jadis garantissaient

une certaine crédibilité en identifiant des comptes fiables, bien, sont désormais accordées

à n'importe qui, avec l'abonnement payant Twitter Blue, des comptes utilisateurs jadis

suspendus qui sont revenus, comme celui de Donald Trump, les modérateurs de la société

Twitter qui ont presque tous été licenciés, sans compter l'algorithme de recommandation

de la plateforme qui aurait été modifié pour donner plus de visibilité au point

de vue les plus extrêmes, parce que c'est ça qui suscite l'engagement et donc l'audience.

Bref, la vision économique libertarienne d'Elon Musk, avec sa conception extrémiste

de la liberté d'expression, serait bien à l'origine de tous nos malheurs et de

la tension qui rayne aujourd'hui sur le réseau social.

Reste qu'on peut s'interroger sur la pertinence et l'efficacité d'une journée de boycott.

Attirer l'attention sur le problème, ok, peut-être, mais en même temps, si les gentils

entre guillemets disparaissent du réseau pendant une journée, mécaniquement, ça fera encore

plus de visibilité pour les méchants, autres guillemets, qui ont d'ailleurs déjà commencé

à se manifester et à se moquer de cette initiative.

En outre sur le long terme, quel effet ça peut avoir ? De même que le mouvement SOS

Racisme, rappelez-vous, dans les années 80, n'a malheureusement pas du tout éradiqué

le racisme, mais semble avoir même parfois exacerbé l'expression d'un certain racisme

radical.

On peut se demander si crier au troll, ça ne risque pas surtout de faire le jeu des

fameux trolls, les provocateurs en tout genre.

C'est le piège dans lequel on tombe tous, on s'indignant face à certains messages,

et bien on donne souvent encore plus de visibilité à ces dérapages.

Or, comme le dit cette vieille Maxime sur Internet, don't feed the troll, ne nourrissez

pas le troll au contraire.

Sur le fond, on pourrait aussi se dire que la montée des extrêmes sur X n'est peut-être

que le reflet de la montée des extrêmes dans la société, couplée à la croissance

naturelle de l'audience de la plateforme.

Et puis, n'y a-t-il pas un paradoxe à réclamer toujours plus de régulation et de modération,

alors là c'est vrai qu'il n'y en a quasiment pas.

Bref, de censure, comme dirait Elon Musk, alors que dans le même temps, on rêve d'un

Internet permettant à tout un chacun de s'exprimer le plus librement possible.

Le hashtag NoTweeterDay ressemble aussi à un hashtag anti-mosque, car vraiment le mosque

de 2023, surtout vu de France, est la bête à abattre.

Provocateur ultra libéral, Trumpiste allumé comme pas possible.

L'homme est engagé en plus dans un combat radical contre la tournure idéologique d'une

certaine Amérique, que l'on peut résumer avec le mot « wakism », un combat qui l'amène

à toutes les outrances, comme par exemple conseiller à Wikipédia de se rebaptiser

d'Ikipédia, ce qu'on pourrait traduire par « encyclopédia la con » ou quelque chose

comme ça.

Bref, pour revenir à X, tant que Musk sera le patron, il y a quand même peu de chance

visiblement pour que ça change, et pas sur qu'un hashtag lui fasse vraiment peur.

Ce qui pourrait peut-être lui faire peur, en revanche, c'est la menace d'une sanction

de 6% de son chiffre d'affaires au nom du DSA européen, à condition que ça aille au-delà

du stade des menaces.

C'est une action judiciaire, comme celle que 41 États américains viennent d'engager

contre son concurrent Métat, pour tout le mal que Facebook et Instagram sont supposés

avoir fait au public, notamment le plus jeune depuis des années.

C'est aussi peut-être se semblant de début d'exode vers des concurrents comme le petit

poussé Blue Sky, où on semble se presser de plus en plus ces derniers temps, même

si le ciel bleu pèse encore environ 300 fois moins que X en nombre d'abonnés.

Et puis n'oublions pas que dans la tête de Musk, le X de demain n'aura de toute façon

rien à voir avec le X d'aujourd'hui, la grande agoramondiale devrait faire place

à cette fameuse super-app commerciale à tout faire.

Alors en attendant pour préserver votre santé mentale, on peut rappeler un ou deux conseils

de bon sens.

Même si notre goût du sang nous pousse naturellement à consulter toujours plus de messages terribles

et de commentaires, et ne ne passez pas trop de temps sur X à scroller indéfiniment.

Et surtout, surtout, n'oubliez pas de temps en temps de lâcher l'onglet pour vous,

où l'on est propulsé de manière automatique, pour revenir sur l'onglet abonnement en

haut de l'application.

C'est le meilleur moyen de se protéger un peu de la fureur du monde, en se recentrant

sur les publications des personnes que l'on suit, et pas les autres.

Du coup, il faut penser également à faire le tri parmi ses amis, afin de ne garder

en principe que les meilleurs.

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