La source: "Dupont Lajoie" : un tournage à racisme-sur-mer
Radio France 3/10/23 - Episode Page - 55m - PDF Transcript
France Inter
Aujourd'hui dans « Raffaire sensible », du pont de la joie 1975,
un film saisissant, signé Yves Boisset,
qui dépend une partie de la société française de son époque, raciste et sans complexe.
A l'été 1973, la France connaît en effet une vague de violence xenophobe
principalement axée contre les populations magrébiles,
exactions connues sous le nom de Ratonade.
Dans le midi, notamment à Grasse et à Marseille,
des travailleurs algériens sont agressés et même tués.
Un été meurtrier qui va inspirer Yves Boisset
connu pour ses films populaires et surtout engagés.
Le héros du film, du pont de la joie,
pour ne pas dire du pont de la joie,
est ce qu'on appelle un Français moyen,
et dans son cas, très moyen.
Bon vivant et spontané, amateur de charcuterie et d'un rouge,
il est aussi libidineux que l'âge, bête et raciste.
Un racisme diffus comme celui qui imbibe alors la France,
soit racisme ordinaire, dit-on,
qui mènera le personnage du film aux pires atrocités
et qui pèsera jusque sur le tournage.
Success public et polémique,
du pont de la joie reflète la France d'hier et peut-être d'aujourd'hui.
Notre invité, Julien Gardner, historien, enseignant Sciences Po
et directeur de la culture à l'université côte d'Azur,
il est aussi réalisateur.
Le documentaire Acawati, les derniers compteurs,
est actuellement disponible sur la plateforme technique.
Affaire sensible,
une émission de France Inter en partenariat avec Lina,
préparée aujourd'hui par John Mayer,
coordination Christophe Barreur,
réalisation Baja Mariquet.
Fabrice Drouel, affaire sensible,
sur France Inter.
Nous sommes en 1973.
Sans n'éterminer les 30 glorieuses et du plein emploi.
Retour sur Terre, fin de la parenthèse enchantée.
La France découvre le chômage.
Pour tenter d'y remédier,
le gouvernement de Jacques Chabandelmas,
public et circulaire Marcelin Fontanet,
qui restreigne la circulation des immigrés
malgré bains sur le territoire,
pourtant autrefois encouragé.
Une mesure qui va placer 83% des travailleurs migrantant
la clandestinité et renforcer leur précarité.
Victime de la crise économique,
qui frappe toute la France,
les ouvriers magravins souffrent aussi
de discriminations quotidiennes.
Certains cafés leur interdisent l'entrée
et de rancœurs persistantes liés
à la guerre d'Algérie.
Passe à ce climat de laitère
et aux contrôles incessants de la police,
les travailleurs nord-africains,
selon l'appellation de l'époque,
prennent la parole pour réclamer
des salaires décents,
des cartes de travail et du respect.
Manifestation, occupation d'usine
et grève de la fin s'organisent
dans toute la France,
attirant l'attention de la gauche
et des médias.
La vindication des travailleurs immigrés
ne plaise pas tout le monde.
Le 12 juin 1973,
à Grasse sur le Côte d'Azur,
une manifestation de travailleurs tunisiens
vire à l'expédition punitive.
Tandis que la police procède
à des interpellations massives,
de petits commerçants de la ville,
soutenus par le groupe d'extrême droite,
ordre nouveau ancêtre
du Front National,
se livre à une véritable chasse à l'homme.
Une heure à Thonade,
la première de cet été 1973,
ce qui fera cinq blessés
dont un grave parmi les travailleurs immigrés.
Mais c'est à Marseille,
à la fin de l'été,
que la situation va éclater,
comme le raconte ses journalistes de l'ERTF.
Marseille, le 25 août 1973,
un bus fou traverse une rue,
à bord un passager d'aiement
avait poignardé le chauffeur,
Emil Gerlach,
et blessé plusieurs personnes.
L'assassin, un algérien reconnu par la suite
comme irresponsable par les psychiatres,
est arrêté.
Un vent de violence et de haine raciale
souffle alors sur Marseille,
malgré les appels au calme des élus locaux,
du préfet de police et des ecclésiastiques.
Pendant que certains s'interrogent
comme le comité de défense des Marseillais,
ou se recueillent comme les familles des victimes,
d'autres excitées par des groupes d'extrême droite
passent déjà à l'action.
Le soir du crime,
un algérien était abattu dans la rue
à coups de 22 longs rifles.
Le lendemain,
un autre algérien de 16 ans,
l'Ajlouness,
est abattu dans la rue également.
Les enquêteurs avaient alors établi
que le jeune garçon avait été tué
par quatre balles tirées de plus une voiture.
Devant ses ratonnades, l'opinion publique s'émeut.
Les associations de travailleurs immigrés
organisent des manifestations silencieuses
et dernière phase de cette triste période,
le 19 septembre, soit trois semaines
après le premier drame,
le gouvernement algérien décide de suspendre
l'immigration algérienne en France
en raison de la situation précaire
de ses ressortissants.
Après l'assassinat de l'Ajlouness,
abattu le 28 août 1973,
le mouvement des travailleurs arabes, MTA,
lance six jours plus tard
des rêves générales dans les usines de Marseille.
Puis, partout en France,
des milliers d'ouvriers de commerçants maghrébains
comme ceux de Belleville à Paris s'engagent
pour défendre les droits des travailleurs immigrés
et denoncer racisme.
Futur sénateur front national, Gabriel Doménec,
le rédacteur en chef du méridional,
un journal marseillais de droite,
écrit alors.
Nous en avons assez, assez des voleurs algériens,
assez des vandales algériens,
assez des fanfarons algériens,
assez des syphilitiques algériens,
assez des voleurs algériens,
assez des macros algériens,
assez des fous algériens,
assez des toeurs algériens.
Dans le sillage des nostalgiques de l'Algérie française,
se développent en France
des groupes plus clus d'extrême droite,
plus ou moins violents,
comme le groupe terroriste Charles Martel
auto-proclamé anti-arabe.
Le 14 décembre 1973 à Marseille,
le racisme va franchir un nouveau cap.
C'est un acte ignoble qui vient d'être accompli.
Je ne trouve pas les mots pour le condamner.
Voilà ce que vient de déclarer le consul général d'Algérie
après l'attentat de Marseille.
Je vous rappelle que ce matin, quelqu'un a lancé
un pain de plastique de 10 kilos
dans le hall du consulat d'Algérie à Marseille.
Un premier bilan officiel fait état d'un mort
et de 23 blessés, dont 10 dans un état grave.
D'après certains sauveteurs, plusieurs de ces blessés
seraient même dans un état désespéré.
Les infirmiers ont d'ailleurs procédé
à des transfusions sanguines dans les ambulances
sans attendre d'être arrivés à l'hôpital.
Bien sûr, la question que tout le monde s'oppose,
pourquoi gaston d'offaires, le député maire de Marseille,
pense qu'il s'agit d'un attentat à la fois raciste et politique.
On craint en tout cas de nouveaux incidents à Marseille,
où vivent, je vous le rappelle, 50.000 nord-africains.
4 morts et 22 blessés,
tel est le bilan de cet attentat revendiqué
par le gros piscule d'extrême noire Charles Martel.
Les témoins racontent et regardent,
adharent le sang sur les murs,
les corps démembrés au milieu des débris.
Pourtant, malgré l'émotion que l'attentat provoque en France,
l'affaire est classée, enterrée,
faute d'éléments suffisants.
Attentat et raton à danser,
ils ne connaîtront pas dessus du judiciaire
en cette fin d'année 73.
Alors, Yves Boissé le sait,
il tient son film et son sujet,
ce sera du bon la joie.
En 1973, le réalisateur a 34 ans,
six longs métrages en compteur
et une réputation de franc-tireurs.
D'abord, assistant de Jean-Pierre Melville,
Sergio Leone ou Vittorio De Sica,
il écrit également pour la rubrique fédivère
de Paris Jours avant de devenir critique.
Amoureux de cinéma américain,
il développe en tant que cinéaste
un goût pour les narrations simples, efficaces.
Un sujet clair, un montage énergique,
une distribution impeccable,
c'est ça un bon film pour lui.
Mais s'il n'est pas le plus grand des techniciens,
il sait ce qu'il veut raconter
et ce qu'il veut dénoncer.
C'est un cinéaste engagé
et ses films sont politiques.
Mais s'il préfère dire humaniste
ou moraliste, ils sont politiques.
En blématique d'un certain cinéma
des années 70,
désenchanté, polémique, sulfureux,
le réalisateur s'est attaqué
à la guerre d'Algérie déjà
et à ses concdisciplineurs,
il a dénoncé également
les méthodes policières
et les agissements du sac,
cette milice au service d'égolistes.
Avec ce nouveau film,
alors que 30 Algériens sont morts
dans les ratelats dans 73,
c'est bien le racisme
qui vous bosser veut parler.
Ainsi commence la jeunesse
de Dupont-la-Joy.
Quelle raconte?
C'est quand je tournais RAS,
on était dans le désert,
dans les oresses
et
il y avait des Algériens
vivants en France
qui jouaient les Arquis,
qui jouaient les sublétifs musulmans,
qui jouaient les phélagas
et le soir on discutait
et ils me racontaient
les ratonades
dont ils avaient été,
soit les victimes, soit les témoins.
Et ça m'a donné l'idée
leur récit
de faire un film sur les ratonades.
Et après,
j'étais parti de l'idée d'un film
purement dramatique
et j'ai eu l'idée effectivement
pour mieux faire passer le propos
de faire un film
qui tendrait vers la comédie,
vers la caricature
pour renvoyer une sorte de miroir
aux spectateurs.
Bibronné au film
policier, au thriller ou au drame,
il vous boissait selon cette fois dans la comédie.
Sans l'inspiration, c'est en gros
tous les sujets qui préoccupent les Français en 1973.
La bouffe, le sexe, les voitures,
la télé, le racisme.
Le réalisateur, qui estime
que tous les Français sont plus ou moins racistes
veut faire un film sur le racisme
qu'on dit ordinaire,
des blagues bêtes et méchantes et des idées toutes faites,
qu'on rit comme idéologie.
Et celui qui va incarner cette bêtise diffuse,
c'est donc Georges Lajoie.
Patron de bistrot sur la place Sanigre
à Paris,
monsieur Lajoie est un homme apprécié de tous,
cordial et généreux avec ses clients,
des durions comptoirs, dit le réalisateur,
à condition qu'il ne soit pas noir
ou trop chevelu, bien sûr.
Un monsieur tout le monde de la pire espèce
qui comme coup de français passe ses vacances
sur la Côte d'Azur.
Georges Lajoie, sa femme et son fils
prennent donc l'autoroute assise
avec leur caravane flambe en oeuvre
direction le camping Beau Soleil.
Ils y retrouvent Loulou, le patron,
un jovial pien noir
et surtout leurs amis
dont les collins et leurs filles brigitent.
Un camping de privilégié pour petit bourgeois
où l'on est entrepreneur dans le bâtiment
huissier au commerçant.
Un camping de brave gens
comme il se définit ce même, plein de préjugés
de lieux communs
où l'on est fier de sa charcuterie, sa caravane,
son pinard, son camembert et son pays.
De la bonhomie et quelques blagues racistes
par-ci, par-là.
Qui voit cette?
L'essentiel du film se passe
dans l'univers des vacances de français moyens
c'est-à-dire dans un camping
un sémerieux camping
qui s'encoisse entre une voie de chemin de fer
et un autoroute
avec dans le cas particulier
en prime un immense chantier
avec des bétonneuses
des marteaux
piqueurs
des fonceurs de sable
puisque en bordure de ce camping
on est en train de construire
un immeuble magnifique
un de ces nombreux immeuble qui sont un des plus beaux fleurons
de la côte d'azur depuis quelques années
sont des gens qui sont venus
avec leurs caravanes, leurs chiens
leurs femmes, leurs enfants
et qui à
5h de l'après-midi sont de brave gens
en vacances et qui à 10h du soir
sont des assassin
En cours d'écriture
Jean-Cœur de l'indialogiste
à l'humour caustique abandonne le scénario
pour d'autres aventures
il vous voici que nous venons d'entendre
fait alors appel la Claude Veillot
dont l'arrivait coincide avec le changement
ton du film
les braves gens en effet
deviennent des assassins et du pont la joie
un violeur
l'honnête père de famille qui a l'habitude de pincer
les fesses de sa serveuse en pin 7 fois pour Brigitte
un fils de 18 ans
oui il l'asieux, il l'épie
il la cherche, il finit par la violer
et même par la tue
Georges la joie un peu choquée tout de même
parce qu'il vient de faire reprend bien vie de ses esprits
il rhabille le corps de Brigitte
et le transporte jusqu'à un chantier
où travaillent des bigos comme il les appelle
avec qui son groupe d'amis s'est un peu battu la veille
pour une histoire de bouteille renversée
le choix du viole
pour les deux scénaristes n'est pas hasard d'eux
en France
les migrants agrébins sont souvent présentés par
l'extrême droite mais aussi par la presse
ça coûte fait divers sordides
comme des hommes sexuellement déviants
à une époque où les femmes et la sexualité se libèrent
certains français trouvent plus facile
d'accuser les arabes que d'interroger
leur propre tension sexuelle
dans le scénario d'Yves Boissé
la découverte du corps sans vie de la jeune Brigitte
va attiser la haine des braves gens du camping
sous l'œil rassuré de Georges la joie
qui voit les soupçons s'éloigner de sa personne
oui, les campeurs s'échauffent
putain, si j'étais à sa place
je m'autant dire qu'il ne sentirait pas comme ça
elle est chouette la police
on tue la fille de Canin, lui il va se coucher lui
il faut dire qu'il n'est pas allé chercher bien loin
je suis absolument d'accord avec monsieur
il est bien aussi fort que ça, pourquoi il les arrête pas tout de suite
il faut faire confiance à la police
elle a sûrement ses raisons
je voulais vous dire ses raisons à la police
quand ils ont affaire à des arabes, ils les ont comme ça
ça les frigue avec les arabes
ils mouillent en comptant
c'est vrai Saint-Colain
c'est pas parce que les filles qu'on les j'ton
qu'on va laisser s'en tirer comme ça, le mec qui a bousillé ta môme
raison
ne les écoute pas Colin
dis-donc, de quoi je me mêle toi, qui tu es toi
j'ai dit simplement qu'il ne faut pas faire de conneries
la police elle a peut-être assez défaut
c'est ça, oui alors on va laisser les bougnous les se tirer tranquillement
pendant que ils vont au pilier, c'est ça
il a raison, il faut aller tout de suite dans ça
faut t'éluer la paire
dis-donc toi à l'horital, mais c'est toi qui fais la loi ici
depuis quand?
tu vas falloir les apprendre spécifique des phélous, non?
ça va me tourner, je crois qu'il faut les chercher de l'eau
allez-y, je reste ici pour les cafés
effectivement, ça tourne mal
saïd, un ouvrier de chantier
où le calaver a été retrouvé, battu à mort
la tête est écrasée par une pierre
par un groupe de camper, dont George la joie
les blagues salaces du début du film
se sont meuées en viol
et le remarque le raciste au comptoir
en ratonnant de meurtrière
pour Yves Boisset, il s'allait de montrer
que le racisme ordinaire n'est jamais inoffensif
et que les idées reçues
quand on ne cherche pas à les déjouer
peuvent tourner au drame
allez-vous, monsieur le maire
bonheur et messieurs
quelle belle journée
monsieur leotard d'Afghan
en vertu des pouvoirs
dans du pont la joie, comme il dit dramatique
qu'il veut choc et polémique, qu'il voissait
s'entour d'un castigne de comédiens populaires
Jean-Pierre Marielle, en Léo Tartafion
présentateur de jeux intercamping
inspiré de Léon Zitrone
Victor Lanou, en ancien paradis de l'Algérie Française
mais aussi la toute jeune Isabel Huppert
Pascal Robert
Pierre Tornal, Robert Castel
et surtout Jean-Carmé
si tout s'incarne impossible
à quel type du français lambda
Yves Boissédie, français quotidien
c'est Jean-Carmé qui en est l'incarnation la plus parfaite
des écritures
le réalisateur pense à l'acteur de grand blond
avec une chaussure noire qui est aussi son ami intime
né en Touraine
dans un milieu très simple
amateur de vin et de bon mot
Jean-Carmé est devenu comme il la malodire
le copain des spectateurs
mais au rôle comique celui que ses amis appellent
Jean Jean
rappelle souvent sa taille sur les plateaux
1m 66 et assume son côté monsieur tout le monde
bon vivant, rassurant
il se raconte chez Jacques Chancelle
sur France Inter
il fallait trouver un moyen
de le véhiculer pendant 1h35
ou 1h40
avec les mauvais sentiments
ou la vulgarité qu'il exprimait
je cherchais
je ne dirais pas une excuse
de ces chromosomes
mais une volonté
j'ai eu une volonté de savoir
ce qu'il était avant et comment il était ses parents
comment il était ses parents et comment
il avait été éduqué
c'est-à-dire que j'ai tellement entendu de choses
dans ma famille
j'ai tellement entendu de lieux communs
et j'habitais dans un milieu extrêmement pésible
et vraiment
ce sont vraiment de très très
de très très brave gens
mais j'entendais de tels lieux communs
dangereux
si j'avais pas eu la possibilité moi-même
de me rendre compte
du danger de certaines phrases
j'aurais certainement
atterri dans une mentalité
que je n'aimerais pas avoir
Lorsque Boisset propose à Jean Carmey d'incarner
Georges Lajoie, acteur de 54 ans n'hésite pas
lui qui a plutôt l'habitude
de la comédie et des bons sentiments
il accepte de mettre son physique passe partout
en service d'un personnage
à la fois raciste, libidineux, russe, très violent
après ce film
je risque d'être pour un moment au chômage
alors prenez-moi qu'il y aura toujours chez toi un canapé
un bol de soupe pour moi
annoncé avec humour au réalisateur
ensemble
les deux hommes vont peaufiner le personnage de Georges Lajoie
il s'inspire notamment du patron amistro
du boulevard Aspaï à Paris
un homme des bonheurs et raciste
qui tripote la serveuse quand ça va mal d'autourner
et qui refuse les toilettes aux garçons qui ont les cheveux
j'encarmé de son côté sa telle
à comprendre son personnage en le passant
au prisme de son propre vécu
je suis un français moyen
c'est-à-dire que j'ai mon physique
sur lequel on ne peut pas
évidemment on ne peut pas passer sur son physique
le cinéma est un art de naturel
qu'on doit faire sans phare
enfin c'est mon opinion
j'ai pas un physique
bien sûr
j'ai plutôt un physique d'archevec
campagne
évidemment je suis limité à certains emplois
un physique de râleur
de pas méchant
au contraire j'évolue beaucoup
j'ai l'impression que depuis par exemple le grand blond
avec une chaussure noire
là on m'a donné un peu de crédit
à partir de ce moment-là je peux décider
de ma carrière
j'ai tourné des personnages très différents
souvent dans des milieux semblables
et puis j'ai tourné du pont Lajoie l'année dernière
qui est un sous-homme
j'en ai pas l'impression qu'on a des personnages inquiétants
sur le cinéma de l'école
je suis chanté à pleins de voix
des ordonnances sans paroles
vieilles chansons d'autres voix
nous c'est France
cher Louis de mon enfance
baisser de temps d'attention
je t'ai gardé dans mon cœur
mon village
reclocher aux maisons sages
ou les enfants de mon âge
pour partager mon bonheur
oui je t'aime
et je te donne ce poème
oui je t'aime
dans la joie ou la douleur
j'ai connu des paysages
et des soleils beurre veilleux
au cours de loin d'un voyage
tout l'a pas sous votre cieux
mais combien je leur préfère
en ciel bleu mon horizon
ma grande route et ma rivière
ma frérie et ma maison
nous c'est France
cher Louis de mon enfance
baisser de temps d'attention
je t'ai gardé dans mon cœur
mon village
reclocher aux maisons sages
ou les enfants de mon âge
pour partager mon bonheur
oui je t'aime
et je te donne ce poème
oui je t'aime
dans la joie ou la douleur
à faire sentir Fabrice Drouel
le dimanche 31 août 1974
c'est dans la bonne humeur
que commence le tournage de Dupont
la joie sur la plage de Saint-Égulf
dans le varre
après tout le soleil brille
le réalisateur est serein
et les acteurs sont heureux
d'être là
un tournage à la plage
ce n'est pas des vacances
mais ça y est ressemble
il y a de la joie
et tout le monde est sur le pont
cependant
l'équipe du film va rapidement
être confrontée
à l'animousité de certains habitants
de la région qui ne regarde pas
d'un bon noeud
et ce réalisateur parisien
inspiré par les ratonates
de l'été précédent
l'affaire est sensible en le varre
et les autorités locales
retirent plusieurs autorisations
de tournage
sans doute pour éviter
les troubles à l'ordre public
que le film pourrait provoquer
en vain
puisque le camping
principal décor
de Dupont-la-Joy
est attaqué par
le groupe extrémiste
Charles Martel
à la coute grona
de le cocktail Molotov
ce même groupe
plus que la verre
appelons-le
à l'attentat
contre le consulat
d'Algérie à Marseille
le 14 décembre 1973
provoquant la mort
de quatre personnes
et sur le plateau
d'Ivoissé
l'ambiance
s'autant quelque peu
d'autant que
l'équipe n'est pas au bout
de ses peines
au casting
de Dupont-la-Joy
plusieurs acteurs maghrébins
dont le célèbre
en comédial
Chariens-Mohamed Zinette
et Abdirahman Ben-Cloua
doivent dormir
dans un hôtel
à tout long
à l'époque
les acteurs immigrés
au cinéma
et à forcerie
dans le cinéma grand public
certains font d'affiguration
dans les scènes d'usine
ou de chantier
mais ils restent peu visibles
rélégués à la marge
de la ville
dans des bidonvilles
et des HLM de banlieue
ils le sont aussi au cinéma
pour le patron d'hôtel
qui doit les accueillir
à tout long un acteur
et forcément
blanc
Abdirahman Ben-Cloua
un hôtel
dans lequel on blogeait
les comédiens arabes
on avait été
prévenus
qu'on allait loger chez lui
les comédiens
et le patron de l'hôtel
c'était un hôtel
tout à fait moyen d'ailleurs
mais le patron de l'hôtel
était tout fier
et tout à fait ravi
d'accueillir les acteurs
et quand il a vu
arriver
il se trouve que par un hasard
de trains et d'avions
ceux qui sont arrivés
les premiers dans son hôtel
c'était les quatre comédiens arabes
alors il était descendu
avec sa plus belle cravate
et son plus beau gilet
dans le hall de son hôtel
et quand il a vu arriver
les quatre comédiens arabes
il a dit régisseur
quoi c'est ça vos comédiens
oh bah alors là
vous pouvez les remmener
parce qu'ici c'est pas un hôtel
abicot
témoignage d'Ive Boissé
c'est à tout long
où les acteurs loge pendant
une partie du tournage
que la violence raciste
va exploser
Abdir Rahman
Benkhloua
le comédien qui joue saïd
l'ouvrier battu à mort
par les campeurs
est agressé en pleine rue
par un groupe de quatre hommes
qui le matraque
et lui tire dessus
le racisme qu'Ive Boissé
dénonce dans son film
s'incarne dans le réel
très gravement blessé
le crâne fracturé
l'acteur ne reprend pas le tournage
la police locale
retrouve rapidement
l'un des agresseurs hospitalisés
où Abdir Rahman Benkhloua
est lui-même soigné
l'homme s'est retrouvé
avec une balle de son propre
pistolet dans le postérieur
après qu'elle a ricoché
sur une voiture
mais les enquêteurs
dissuadent l'acteur
de porter plainte
non il vaut mieux s'écraser
plutôt que de lancer
les procédures
qui pourraient s'avérer
dangereuses pour lui
Abdir Rahman Benkhloua
Yves Boissé
décide de ne pas
mener l'affaire devant la justice
une nouvelle fois
le réel et la fiction se rejoignent
car dans le scénario
de l'éponge la joie
l'inspecteur Boulard
qui souhaite rendre
équitablement la justice
c'est punir
les coupables de la ratonade
et qu'on craint
d'enterrer l'affaire
mais vous faire croire
qu'il s'agit d'un règlement
de compte entre algériens
affirme sa hiérarchie
Extrait
Monsieur Boulard
croyez pas que nous m'estimons
votre travail
Monsieur le ministre
c'est vraiment pour
que je me déplace
des histoires comme celle-là
nous en avons 3 par mois
en France
l'entreprise politique
est de le rééviter
toute publicité
mais j'ai tout fait
Monsieur Boulard
le racisme me répugne
autant qu'à vous
j'ai pu vous assurer
qu'en haut lieu
on ait décidé
à tout mettre en oeuvre
pour empêcher de se développer
le climat de racisme larvé
qui existe
dans ces pays
parce qu'il existe
et vous savez
comme moi
que la moindre étincelle
ne s'est pas faite
d'inculper des Français
de naits, de pères, de familles
en vacances
pour s'être à Tynade
et demain vous avez
des incidents en Tiarra
bah...
tout long à Marseille, à Nice
partout
j'ai donné ma parole
d'aller jusqu'au bout
de cette enquête
et j'irai jusqu'au bout
après le tournage
place au montage
il vous boissez
ça retrouve confronté
à un choix
qui pourrait changer
le message du film
le réalisateur de Dupont-Lajoie a tourné deux fins lors du tournage. Dans la première,
Georges Lajoie sombre et méché se ventent au comptoir de son bistre parisien d'avoir
cassé la gueule à 15 Arabes. Un homme entre à l'ordre le café et le tu. C'est le frère
de Saïd, l'ouvrier tabassé à mort par les campeurs, il vient se venger. Dans l'autre fin,
personne n'entre dans le café. La femme de Georges Lajoie lui conseille de se taire et la vie
continue comme si de rien n'était. Pour aider sa décision, Yves Boisier organise une projection
test devant un public d'ouvriers de chez Renault. L'une des deux fins possibles provoque le débat que
le réalisateur appelle de ses vœux et il fait son choix.
La commission nationale de censure demande l'interdiction de Dupont-Lajoie au moins de 16 ans.
Pour les diffuseurs, cette classification signerait l'arrêt de mort du film. Et tout ça pour deux
plans. Le public se disabae l'hupère pendant la scène de Yoll et le crâne Saïd, victime de
la ratonade qui heurte le sol. Pour sauver son film, Yves Boisier va contourner la censure pour ne pas dire
la rnaquer. Il entaille la pellicule au niveau de ces deux images afin de donner l'impression qu'il
enlevait les plans en question. Mais en réalité, aucune image n'a été ôtée. Le film qui sort
est le même que celui que les censeurs ont censuré. Dupont-Lajoie, d'une durée d'une heure quarante,
sort donc dans les salles le 26 février 1975, sous la classification interdit au moins de 13 ans.
Boisier se rend avec les distributeurs du film ou marignan, un cinéma parisien sur les Champs
Élysées pour sonder l'atmosphère. Mauveste surprise, la salle est presque vive. Le réalisateur aimerait
faire confiance à l'ouvreuse qui lui assure que le film sera un succès. Mais il a le sentiment
à mer que son dupont-Lajoie ait mal accueilli. Les spectateurs le regardent avec mépris. Il ne le
sent pas. De fait, le film ne connaît pas d'être plus facile. Certaines salles refusent de le diffuser.
Le cinéma pâté de la place cliché à Paris craint par exemple qu'il n'attire des immigrés
ce qui pourrait déplaire à sa clientèle. A grâce sur la côte d'Azur, Dupont-Lajoie est interdit
par le préfet pour à risque de trouble à l'ordre public. Car dans plusieurs cinémas du midi,
le public a très mal réagi, allant jusqu'à jeter des grandes adoplâtres dans la salle. Bref,
le film fait polémique et les critiques des cinéphiles ne vont pas rassurer foissé. Le masque et
la plume, par exemple, est unanime. Dupont-Lajoie dit foissé, un mot de chacun là-dessus.
Non, moi je suis de la vie inverse de monsieur. C'est-à-dire, je le trouve caricatural.
Oui, c'est un peu caricatural. Oui, c'est un peu caricatural, mais c'est abusant.
Le mot caricatural dit un minimum d'esprit, alors que c'est un film d'une telle bêtise,
une telle vulgarité, que le mot caricatural ne saurait le caractériser.
Caricatural, mais aussi maniqué à un démonstre inti,
ce sont les reproches que beaucoup de critiques adressent au film du foissé.
De fait, Dupont-Lajoie oppose schématiquement le français moyen, raciste criminel,
coupable, au travail rimiré, exclu, brutalisé, victime, une simplification du bien et du mal
que le réalisateur reconnaît et qui l'a accentué afin de provoquer le spectateur de le pousser
dans ses retranchements. Beaucoup de critiques, comme le Jacques Septier du Monde, Michel Morte,
du Figaro, considèrent que le viol et le meurtre, c'est trop gros pour être vrai.
Un incident envenimé aurait suffi, écrit le critique du Monde qui estime qu'il foissait à
dramatiser outrance au risque d'en faire trop. Pour d'autres, comme Henri Rabine dans la croix,
le film est certes outrancier, voire un peu vulgaire, mais il est nécessaire.
Il voici, écrit-il, tourne ses films comme on donne des coups de poing et il arrive à notre
profondeur de jeter le bébé avec l'eau du bain, n'empêche qu'après, on se sent mieux.
Et puis finalement, au masque et la plume, on a aussi ses défenseurs.
Maintenant, je voulais dire simplement un mot sur du pont la joie.
Je voulais vraiment dire un mot sur du pont la joie, je trouve que c'est totalement une honte que vous
trois messieurs, vous criez contre du pont la joie, parce que c'est un film qui est absolument
nécessaire. Il fallait cette caricature dans le film, parce que si cela n'avait pas été une caricature,
ce film aurait été lamentable. Il se serait perdu dans des considérations ridicules comme
on en a déjà vu au cinéma. Il fallait cette caricature, sinon ce n'est pas un film extraordinaire,
ce n'est pas Viscontine et Orson West, c'est simplement il boissait, mais il boissait qui dit
quelque chose de très très juste et il faut absolument le voir. Bref, du coup,
la joie est un film polémique et il a tiré à sa sortie en 1975 les critiquants tout genre.
Rire du français moyen, celui qui voit camping et qui boit du pastis considère certain, c'est
du mépris de classe. D'autres, comme le journal Libération, rapprochent à Yves Boisset de ne pas
analyser les causes du racisme et d'en faire une maladie spontanée hors sol. Le racisme ne
devient pas du bas, mais du haut où dénonce le journaliste de Libé à la sortie du film. Tandis
que d'autres, ils voient le signe de rupture entre les classes populaires et la gauche dont se
revendiquent le réalisateur. Dans Libération également est publié la lettre assassine d'une
électrice qui déploie la froideur avec laquelle le viol est traité comme un élément de récit
parmi d'autres, puis il essaie de côté sans être revangé comme l'éloclème raciste. Je crache sur
les antiracistes, sexistes écrit l'électrice. Carré caturale bourgeois, phallocrate et même
raciste, à chacun sa critique. Sur France Inter, Jean-Marie Le Pen donne lui aussi son avis au micro
de Jean-Pierre Gavache. Est-ce que vous pensez, Jean-Marie Le Pen, que c'est le rôle du cinéma de
présenter tel film? Est-ce que c'est un film utile à votre avis? Une action utile dans la France d'aujourd'hui?
Je crois que le cinéma s'accorde maintenant toutes les libertés, bah conséquent on n'a plus à lui donner.
Monsieur Boisset dit là qu'il a voulu faire un film sur le racisme. Il s'est un petit peu spécialisé
dans le genre et je lui prédis d'ailleurs une très grande carrière parce qu'en en ramant dans le sens du
conformisme général qui dans notre pays est largement antiraciste, il est à peu près sûr d'être
encensé par la presse, la radio, la télévision et le cinéma et il faut dire que ça doit avoir une
certaine conséquence sur les recettes, c'est tout de la grâce que je lui souhaite. Contrairement à ce
qu'affirme Jean-Marie Le Pen dont le parti a été fondé deux ans auparavant, le film n'est pas du tout
encensé par la presse, on l'a vu d'ailleurs. Cependant l'ouvreuse du cinéma Le Marignon avait
vu juste lorsqu'elle rassurait et Boisset inquiet lors des premiers jours d'exploitation car au bout du
compte du Pond-la-Joy est un succès commercial. Après des débuts molassons, le film se huisse en
tête du box-fice pendant huit semaines et cumulera près d'un million et demi d'entrée. Dans les salles,
le public applaudit et une vague d'émotion s'empare de la France. Du Pond-la-Joy inspire les médias
qui s'emparent de cette question, les français sont-ils racistes? Le film reçoit l'orcellargeant
festival de Berlin de 1975 et son titre devient une expression communement utilisée pour désigner
celui qu'on appelle aujourd'hui le bauf. Avec du Pond-la-Joy, il boissait obtenir ce qu'il souhaitait,
créer la polémique, non pas pour le plaisir de choquer ou de dépler, mais pour questionner, débattre.
La démonstration du cinéaste, qu'on lui aura parfois reproché, trouve sa force dans l'inspiration
unique d'Yves Boisset, le réel. Bien que certains critiques considèrent alors que l'intrigue du
film est invraisemblable, les drames qui ponctuent le tournage, eux, viennent rappeler que parfois
la réalité rattrape la fiction. Au point que les spectateurs eux-mêmes y perdent l'équilibre,
l'acteur Jean Carmet, qui sous George la joie, sera un temps confondu avec son ignoble personnage.
Prise à partie et menacée dans la rue, agressée dans son pavillon de banlieue,
l'acteur se repliera un temps sur lui-même, choquée d'avoir si profondément incarné la bêtise à l'étapeur.
Dans les poules laillées d'Acajou, les belles bascours à Bijou, on entend la conversation de la
volaille qui fait l'opinion, qui disent, on peut pas être gentil tout le temps, on peut pas aimer
tous les gens, il y a une sélection, c'est normal, on lit pas tous le même journal, mais comprenez-moi,
c'est une migraine, tous ces campeurs sous mes persiennes, mais comprenez-moi, c'est dur à voir quelles
sont ces gens sur mon plongeois. Dans les poules laillées d'Acajou, les belles bascours à Bijou,
on entend la conversation de la volaille qui fait l'opinion, qui disent, on peut pas aimer tout
Paris, n'est-ce pas, il y a des endroits à la nuit, où les peaux qui bouffent la peau sont plus
bronzés que nos petits poules beaux, mais comprenez-moi, la gélaba, c'est pas ce qu'il faut
sous nos climats, mais comprenez-moi, un roche-joie, il y a des taxis qu'on peur du noir,
dans les poules laillées d'Acajou, les belles bascours à Bijou, on entend la conversation de la
volaille qui fait l'opinion, que font ces jeunes assis par terre habillés comme des traînes visaires,
on dirait qu'ils n'aiment pas le travail, ça nous prépare une belle pagaille, mais comprenez-moi,
c'est inquiétant. Vous vous écoutez à faire sensibles sur France Inter, aujourd'hui, le film du
pont de la joie qui parle d'un film, certes, mais qui parle surtout d'une société à une époque
donnée, et avec ses raisonnances aussi. Notre invité Julien Gartner, bonjour. Bonjour. Vous êtes
historien, enseignant, chercheur, directeur de la culture à université, côte d'azur et documentariste,
votre documentaire à Kawati, les derniers compteurs et à tel on disponible sur la plateforme.
Tain, nous allons donc revenir ensemble sur la place stéréotypée dans le cinéma français de
celui que vous désignez, vous dans votre travail de recherche, comme l'arabe. Dans votre thèse,
vous utilisez des guillemets autour du mot arabe, l'image de l'arabe dans le cinéma français,
l'arabe sur les écrans, en France, c'est donc toujours un stéréotype dont on fixe l'identité
entre guillemets? Ça l'a été pendant très longtemps et ça l'a été aussi durant le cinéma
colonial, c'est une image, celle de l'arabe entre guillemets qui vient de loin et je mets des
guillemets justement parce qu'effectivement derrière ce terme de l'arabe, ça recouvre plein
de réalités différentes, mais néanmoins c'est le thème qui tient lieu de mots principales dans
l'opinion publique, on reconnaît l'immigré sous le terme d'arabe, c'est à la fois de l'héritage
colonial, c'est un terme aussi poste et garde algérie, et cet arabe il va effectivement rester
un stéréotype dans le cinéma français à peu près jusqu'au début des années 2000,
au milieu des années 90 on va voir des personnages un peu plus complexes qui vont se dessiner et des
personnages un peu plus complexes notamment que ceux de Dupont-la-Joy ou les personnages
arabes entre guillemets ou les immigrés maghrébins sont quand même relégués à des secondes rôles.
Alors une autre figure de l'arabe au cinéma en France c'est le sultan,
cupide, violeur par exemple? Effectivement l'image du sultan c'est une image qui résonne avec
le choc pétrolier, c'est pas un hasard s'y arrive sur les écrans français à partir du milieu des
années 70 et le substance libidineux il arrive dans Angélique et le sultan, cette immense fresque du
début des années 60 et puis il revient au milieu des années 70 donc au moment du choc pétrolier
où la France s'inquiète pour ses économies et voit le danger non seulement auprès des immigrés
maghrébins mais aussi auprès de ces arabes toujours entre guillemets qui sont les émires du
golf et qui menacent notre économie nationale donc du coup on voit fleurir tout un tas de films sur
les écrans français ça va jusqu'à l'émire préfère les blondes au début des années 80 il
y a tout un tas de titres comme ça évoquateur pétrole pétrole j'en passe et d'autres dans
lequel vous retrouvez Bertrand Blier d'autres immenses acteurs du cinéma français donc il y a
toute une vague comme ça de pantalonade qui représente un sultan qui fait vis d'un moins
écho avec un contexte géopolitique du milieu des années 70.
Bien sûr Chris Pétrolier en 73 avec toutes les conséquences que l'on connaît au moment où sort
du pont de la joie d'Yves Boissé nous sommes donc en 1975 quelles places sont les hommes
maghrébins dans les films français je parle même pas des femmes on peut en parler après mais
par l'instant les hommes maghrébins. Les hommes maghrébins sont évidemment extrêmement rares
il y a eu quelques tentatives de les mettre au premier plan des tentatives qui se sont
soldées par d'immenses polémiques comme celle de du pont la joie je prends l'exemple de
Elisabeth Révy qui est un film de Michel Draque qui a adapté d'un roman de Claire et de
Thierry qui le film sort au début des années 70 il est présenté au festival de Cannes
et il déclenche la polémique on accusera Michel Draque d'avoir fait un film pro FLN
notamment et je vous rappelle que Elisabeth Révy c'est l'histoire d'amour entre une
jeune française et un ouvrier algérien et qu'évidemment c'est une histoire d'amour
complètement impossible donc une polémique au début des années 70 avec Elisabeth Révy
puis après vraiment des rôles secondaires et surtout l'immigré maghrébin dans les
années 70 est un personnage tourné en dérision perpétuellement mise en scène dans des
comédies et quelque part à cette période on a l'impression qu'on le met à distance
par le rire l'humour est une forme d'arme d'ailleurs on le voit dans des sketches
de comiques comme Pierre Péchain la Sigalée de la fourmie vous en rappelez fort probablement
donc le cinéma se fait court de cet état d'esprit de cet état de l'opinion en quelque
sorte on peut rire de ces immigrés parce qu'on pense alors qu'ils ne vont pas rester et alors
concernant les femmes émigrés maghrébine on n'en a pas au cinéma à cette époque là où est-ce
qu'on en a quand même est ce qu'on en trouve on en trouve extrêmement peu on en trouve un petit peu
plus au début des années 80 et souvent elles vont être elles aussi renvoyées au marge et là encore
c'est un véritable héritage du cinéma colonial puisque le cinéma colonial avait tendance à
mettre en scène les femmes maghrébine à travers le rôle des moucaires qui souvent
ont été déprostituées au service des légionnaires comme dans le film la bandera de julien du vivier
par exemple avec jean gabin et cette image de la moucaire de la prostituée de la fille facile au
mœur slégère elle va durer et elle va durer jusqu'au début milieu des années 80 dans toute une
série de films policiers dans lequel les hommes ne sont plus des travailleurs émigrés mais des
dealers désormais et dans lesquels les femmes deviennent déprostituées quand on va le cinéma
aujourd'hui on se dit qu'on a fait des progrès et c'est tant mieux on a fait des progrès évidemment
tu n'es pas réglé mais on a fait des progrès on a fait des progrès immense je pense aussi qu'il
y a un état de l'opinion publique qui fait qu'on ne peut plus évidemment se permettre les mêmes
choses et ça bascule véritablement au milieu des années 90 tout le monde a vu au moins un film de
la saga taxi il y a eu cinq volets de la saga taxi dans lequel il y a un personnage qui s'appelle
Daniel Morales qui est incarné qui est incarné par un acteur qui s'appelle sa miniserie qui dans la
vraie vie s'appelle Saïd donc on peut aussi là se questionner sur le fait qu'on ait besoin de la
pied Daniel Morales mais en en moins ce personnage de Daniel Morales c'est le plus vu de l'histoire
du cinéma français si on cumule les entrées des cinq taxis on arrive quasiment à 30 millions
d'entrées ce qui est un chiffre absolument énorme et c'est un héros qui va être très populaire donc
on le mesure par le nombre d'entrées on va l'identifier on va lui mettre le maillot de
Zinedine Zidane sur le dos donc au milieu des années 90 il y a comme ça un tournant on a de
premiers héros d'origine magrébine sur gantre écran et ça va te perdre aussi avec un mouvement de
l'opinion notamment sur les victoires de l'équipe de France etc donc donc il y a un tournant et puis
aussi il y a une génération d'acteurs qui arrivent il y a Roj Dizem il y a Samuel Boijila il y aura un
peu plus tard Lella Beltit, Tarah Raim qui sont des acteurs qui vont avoir de nombreux prix au César ou
dans des festivals donc en plus à leur présence il y a une véritable reconnaissance artistique qui se
met en place et qui va aussi de père avec une reconnaissance de réalisateur comme comme Karim
Dripdy mais du charrette et d'autres mais du charrette qui est une sorte de père fondateur c'est
vraiment le précurseur du charrette même si au début des années 70 il y a des cinéastes comme
Ali Rahnem qui font des films dans les bidons villes sur les immigrés en noir et blanc avec très
peu de moyens des films qui font 5000 entrées en France mais qui laisse déjà une toute petite
trace pour l'historien et qui montre que déjà on essayait de raconter ces histoires.
Alors je parle de Mehdi Chareff puisqu'en 1985 son film Le thé aux harem d'Archimède je rappelle
qu'il est cinéaste d'origine algérienne arrivée à 10 ans en France en 1962 alors ce film est très
bien reçu par la critique et par le monde du cinéma il reçoit même une récompense rare
peut-être il dit d'ailleurs pour un réalisateur immigré lors des Césars on l'écoute Mehdi Chareff.
Le gagnant est le thé aux harem d'Archimède Mehdi Chareff.
Je ne sais pas, il y a quelque chose qui se passe dans la tête dans le cadre de l'ego et je ne sais pas.
Je ne sais pas ce qui passe, je vois une gare, je vois un bateau, une gare, la gare d'Osterlitz,
c'était je ne sais pas il y a 25 ans je crois, un bide en vie, je ne sais pas qui on se retrouve là.
L'autre réalisateur a eu la bonne idée de laisser ce silence au milieu qui traduit toute l'émotion
de Chareff, c'était un moment important Julien Gartner, quel changement en 12 ans, même pas 10 ans
d'écart puisqu'on parlait du Pond de la Joie 1975 là c'est 1985 donc les changements ont été
filialement assez rapides et tant mieux. C'est quand même une exception, il faut quand même attendre
une dizaine d'années avant qu'il y ait une vraie émergence de cinéastes, d'acteurs français,
d'origine magrébine, voilà donc il faut quand même un peu de temps et puis je pense qu'on peut faire
un parallèle entre Mehdi Chareff et un personnage, un acteur de du Pond de la Joie qui s'appelle
Mohamed Zinette, qui joue donc le rôle de l'espèce de justici à la fin qui va assassiner
Jean de la Joie dans son café. Mohamed Zinette est un immense acteur qui est un des fondateurs du
théâtre national algérien, il est assistant réalisateur de Gilom Prothé Corvaux sur la bataille
d'Alger, il est réalisateur d'un incroyable film qui s'appelle Taria Yadidou et il va mourir dans
l'anonymat en France en 1995, il n'aura fait que des secondes rôles et finalement il ne restera
connu que pour ce rôle de du Pond de la Joie et pour son dernier rôle au cinéma français. Beaucoup
d'entre nous s'en rappellent dans les sous-doués de Claude Zidie, c'est lui le terroriste à la
couscousière piégée qui rate son attentat avec cette fameuse formule « Notre peuple vaincra ». Et
donc Mohamed Zinette c'est vraiment l'exemple aussi d'un immense acteur, d'un grand talent,
totalement oublié et effectivement dix ans plus tard on voit déjà avec Mehdi Chareff que ça
commence à changer mais c'est un tout petit déclic.
Julien Garner se retrouve dans trois minutes après avoir écouté « Prince Fatih, take me as I am,
prend moi comme je suis » de circonstance pour le sujet évoqué dans l'émission.
« Baby, here I am, come on and take me, take me, just as I am.
C'est ça, c'est ça, c'est ça, c'est ça, c'est ça.
C'est ça, c'est ça, c'est ça, c'est ça, c'est ça.
C'est ça, c'est ça, c'est ça, c'est ça.
C'est ça, c'est ça, c'est ça.
C'est ça, c'est ça, c'est ça.
Je viens de Gardeneur, on parlait tout à l'heure du thé aux ARM d'Archimab, sorti en 1985, et vous me disiez que ça faisait quand même figure d'exception, et qu'il fallait attendre une petite dizaine d'années pour voir un vrai tournement au milieu des années 90.
Concrètement, quelques titres de films qui pourraient illustrer cela.
Bye bye de Karim Dredi, l'histoire, enfin le premier rôle, le premier grand rôle de Sammy Boijila, c'est l'histoire de deux frangins qui prennent la route, qui doivent traverser la Méditerranée pour retourner en Tunisie, s'arrêtent à Marseille dans leur famille, et puis la question se pose, vont-ils rester, vont-ils partir?
Énorme sujet, énorme questionnement, je vous invite à voir ou à revoir ce film bye bye, et puis à côté de bye bye, il y a aussi tout ce qu'on appelle alors les films de banlieue, dans lesquels, pour la première fois, il y a des acteurs français d'origine magrébine dans les premiers rolls, je pense à Said Tagmawi dans la haine, succès inattendu.
Et puis surtout, ces succès qui sont concomitants avec un nouveau type de salle, que sont les multiplexes, qui sont situés à la périphérie des grandes villes, et on se rend compte qu'il y a un public, une sociologie des publics qui change et un public d'origine migrée, un public plus divers qui se rend dans les salles de cinéma.
Et par conséquent, les producteurs, à mon avis, comprennent ici bien l'intérêt de ce nouveau public, et donc de mettre des héros qui sont moins caricaturaux que ceux qu'on avait tendance à voir dans les années 70 ou 80.
Est-ce qu'on pourrait parler de nouvelles vagues pour décrire cette génération de cinéaste immigré, office d'immigré dont Mehdi Charret fait partie, ou on l'a dit aussi, Rachid Bouchard et Boukarim Dridi?
C'est incroyable de sa palme d'or. C'est très nombreux. César, effectivement, c'est une espèce de nouvelle nouvelle vague parce qu'ils ont été extrêmement longtemps à la marge du cinéma français et on peut imaginer les efforts qu'il a fallu.
Et surtout, leur présence aujourd'hui, c'est quand même une trace qui a quelque chose qui va mieux dans la société française. Du Pont-la-Joy, ça inspire de terribles faits divers du début des années 70.
Et c'est vrai qu'on peut parler aussi des années précédentes. Il y a quand même le meurtre de Gilles Ali Ben Ali qui heurte l'opinion, qui mobilise Sartre et Michel Foucault en 71.
Et il y a quand même cet énorme vague d'Arabicide dans le sud de la France. On parle de Ratonane, mais il y a un journaliste italien qui s'appelle Fausto Giudice, qui parle lui d'Arabicide.
On a quand même franchi un grand pas par rapport à cette période. Certes, beaucoup reste à faire, mais néanmoins, avec le recul, je pense que du Pont-la-Joy, dont vous avez extrêmement bien parlé,
on se rend compte de la valeur pédagogique de ce film et de ce succès, en long terme, extrêmement important. Parce que du Pont-la-Joy, c'est l'antithèse du discours politique du milieu d'année 70 et notamment de 73.
Mais qui essaie de cacher la réalité de racisme. Mais qui disait clairement, Pompidou aux conférences de presse ou le porte-parole de l'Élysée, qui s'appelle Olivier Styrne à l'époque,
qui n'en parle pas du gouvernement, qui disent, le racisme, n'en parlons pas. Effectivement, il ne faut pas en parler parce que si on n'en parle, ça va réveiller cette sorte de vieux démon.
Et du coup, le fait de ne pas avoir traité ce sujet-là, alors qu'il émerge au début des années 70, c'est bien fait connaître à la société française un certain retard, en tout cas une forme de déni sur ce sujet.
Très bien, merci infiniment, Julien Gardner pour tous vos éclairages. Merci, au revoir.
Sous-titrage ST' 501
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durée :00:54:01 - Affaires sensibles - par : Fabrice Drouelle - Eté 1973, la France connait une vague de violences racistes connues sous le nom de « ratonnades ». A Grasse et à Marseille, des travailleurs algériens sont agressés et même tués. Un « été meurtrier », un an après la création du Front National, qui va inspirer le réalisateur Yves Boisset… - invités : Julien Gaertner - Julien GAERTNER