Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Carmen Maria Vega, enfant volée - Le récit

Europe 1 Europe 1 4/4/23 - 28m - PDF Transcript

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On de l'âtre à compte.

Christopher de l'âte.

Je vous raconte l'histoire d'une adoption à l'étranger.

Au Guatemala.

L'histoire de Carmen Maria Vega que vous connaissez peut-être,

puisqu'elle est chanteuse.

Carmen Maria Vega a été adoptée tout bébé par un couple de Français.

Elle est d'origine Guatemaltech.

Et il y a dix ans, à l'âge de 26 ans,

elle s'est lancée à la recherche de sa mère biologique.

Une incroyable aventure qu'elle raconte dans un livre qui paraît chez Flamarion.

Le chant du bouc.

Voici donc son histoire, je l'ai écrite avec Bettina Servant.

La réalisation est de celles-ci de nos bras.

Europain.

Christopher de l'âte.

Nous voici en 1987,

à l'école primaire Héctor Berlioz,

dans le 9e arrondissement de Lyon.

Anaïs?

Viens à ma perle.

Écoute-moi bien, je veux te le redire.

Bon, t'es pas sorti du ventre de maman, mais c'est tout comme, hein?

Je t'aime pareil, hein? Tu comprends?

Oui, j'ai compris, je sais, tu me le dis tout le temps.

Je peux y aller maintenant, maman.

Ça me donne l'occasion de vous la présenter, maman.

Une mère volubile, elle fait un de ses bouquons,

elle parle, elle parle comme si elle avait peur de ne pas avoir le temps de tout dire.

Papa, lui, c'est tout l'inverse.

Autant elle, elle fait du bruit, autant lui, c'est un silencieux.

Un physique à la Francis Cabrel,

un marrant mec qui réserve la fantaisie à ceux qui le méritent.

Et puis il y a Jean-Batieu, leur enfant biologique.

Il m'a fait des misères de grands-frères, normal.

Après sa naissance, maman est devenu stéride.

Il voulait une famille nombreuse.

Alors ils ont décidé de m'adopter.

Jusqu'à mes 26 ans,

pour nous, mon adoption est une non-question.

C'est une adoption réussie, pleine d'amour.

Il m'aime.

Pareil, ni plus ni moins, je ne me sens pas différente.

Et on pratique l'humour noir.

Et papa, tu te calmes, hein.

Je te rappelle que tu m'as trouvé dans une poubelle.

Si je t'avais trouvé dans une poubelle,

j'aurais mis au fait de fermer le couvercle, je te l'ai, moi.

Si on avait su, à l'époque,

qu'on n'était pas si loin de la vérité.

Mes parents ne sont pas parfaits.

Mais quelles parents sont parfaits?

Aujourd'hui, avec mes yeux apaisés de trente nerfs,

je les observe avec amour.

C'est ça, devenir adulte, non?

Je me perçois de que ils sont immortels.

Et ça m'aide à ne pas me préoccuper du futur.

Quand ils m'ont adopté,

on a dit à mes parents que ma mère biologique

était une activiste du Guatemala.

Qu'elle avait dû m'abandonner pour me sauver la vie.

Une mère héroïne, quoi.

Non, parce qu'un jour, à Doupin qu'en colère, je dis.

De toute façon, ma mère, je la déteste.

Elle m'a abandonnée parce qu'elle m'aimait pas.

Oh, non!

Non, je ne peux pas te laisser dire ça à Naïs, enfin.

Ta mère t'a abandonnée parce qu'elle t'aimait.

C'était un acte d'amour.

Ça m'a cloué le bec.

Et ils en ont parlé le soir au lit.

Ça, je l'ai appris plus tard.

Et le lendemain, papa vient frapper à la porte de machin.

Ah, mon petit château.

Viens voir.

Et là, ils m'emmènent dans leur chambre.

Voilà.

Je voulais te donner quelque chose.

Tiens.

Et ils me tentent une chemise orange sur laquelle est inscrit au feutre rouge.

Dossier, adoption, à Naïs.

Avec maman, on a trouvé un important que tu puisses le lire.

Ça va?

Là-dedans, tu vas trouver à toutes nos démarches

et aussi des choses sur ton identité.

Ça va?

OK.

Si tu as des questions, ben...

T'hésite pas, ma chérie.

Et donc ce jour-là, à 15 ans,

je découvre que je suis né Carmen Maria Vega.

Et pourquoi ils n'ont pas gardé mon prénom?

Carmen Maria.

Il est beau?

Je suis né le 11 juillet 1984

à Colonia & Limone, à Guatemala City,

la capitale du Guatemala.

Mais ça, je le savais, c'est sur mes papiers d'identité.

À partir de ce moment-là, je décide de récupérer mon nom.

Et le seul moyen que je trouve, c'est sous l'intitulé pseudonyme.

Juste après, à Naïs.

C'est normal!

C'est mon nom.

Dans ce dossier,

il y a aussi le nom de ma mère.

Et à partir de là, quelque chose se met à bouillonner dans mes tripes.

Et si elle était encore vivante?

Et qui est mon géniteur?

On n'en parle nulle part de celui-là.

Il est mort?

Et si j'étais né d'un viol?

Et si elle ne voulait pas me rencontrer?

Et si...

Et si...

Mais par?

Va rencontrer ton pays?

Trouve-la.

D'accord?

Mais par où commencer?

T'es marante?

Alors, je me lance.

Accroche ton cœur.

Je ne voulais pas encore dîmer.

Aujourd'hui, je suis comédienne et chanteuse.

Départ d'une vie sous les astres dorés.

Je suis né pour te connaître.

Je vivrai pour te trouver.

Un jour, à l'été 2010, j'ai 26 ans.

Et après un concert,

un garçon qui s'appelle Vincent tente de venir me voir dans ma loge.

Mais le vigile ne le laisse pas passer.

Alors, il m'envoie un mail.

Bonjour Carmen.

Je suis avocat au barreau de Madrid.

Et je suis porte-parole de Rigoberta Menchou,

une indigène du Guatemala qui a reçu le prix Nobel de la Paix en 1992.

Mon but est de sensibiliser tous les Guatemala que je rencontre

au combat de Rigoberta.

Et à la cause des indigènes.

Êtes-vous retournés dans votre pays, mademoiselle?

Et bravo pour votre concert.

Je lui réponds.

Je serai enchanté de rencontrer Rigoberta.

Mais j'ai une question à vous poser.

J'ai été adopté et je n'ai que le nom de ma mère.

Accepteriez-vous de m'aider à la retrouver?

Oui, je peux vous aider.

Je suis au Guatemala en janvier pendant trois semaines.

Je pars dans un mois et je l'annonce à maman et papa

un dimanche de poulet-frit de salade.

C'est pas un peu précipité, non?

La puissance, tu l'as jamais vu?

T'es sûr qu'il est fiable?

Il doit aussi se poser tout un tas de questions

sur le désamour que je pourrais ressentir si je la retrouve.

C'est couillant, mais rien de plus normal après tout.

Et me voilà à Guatemala, Ciudad, dans une chaleur humide et crazante.

Vincent est venu me chercher.

Son physique me rassure.

Il est avec un homme armé.

C'est le garde du corps de Rigoberta.

Elle nous le prête pour la journée.

Le lendemain, on a rendez-vous à la RENAP, l'équivalent de la mairie.

Je veux retrouver la trace officielle de ma mère.

Quand on arrive, il y a une queue gigantesque.

Vincent, sur sa carte des Nations Unies, il s'en sert de coupes-fil.

On se dirige vers le premier bureau, une minette de 25 ans, derrière un ordinateur.

Voilà, la demoiselle que vous voyez ici, il cherche sa maman.

Elle a été adoptée au Guatemala et donc on a besoin de son acte de naissance pour

tenter de trouver son adresse.

Vous pouvez la chercher.

Elle rentre le nom de ma mère, elle me regarde, elle regarde l'ordinateur, elle me regarde

à nouveau.

Les paris c'est Anna, elle y a.

Qu'est-ce qu'elle dit?

Elle dit que tu lui ressembles, malheureusement elle ne peut pas nous donner son acte de naissance.

Donc je dis, elle dit qu'elle nous le donnera dans deux jours et qu'il y a quatre photos

dans le dossier.

La dernière quand ta mère avait 25 ans, c'est l'âge auquel elle, elle t'a eu, non?

Elle est tenue sous direction, si?

Elle va nous donner son adresse, son assais, elle dit que c'est dans la zone 6, bon c'est

un quartier calme, on essaie d'y aller tout de suite.

On se retrouve devant une petite maison au mur gris, c'est là donc qu'elle habitait

dans les années 80 quand je suis né, moi je reste dans la voiture.

Bon, ils ne la connaissent pas mais ils m'ont dit que pas loin il y a un genre de couvent

qui est aidé d'après ce qu'ils disent les femmes célibataires, on va y faire un tour,

mais le couvent est fermé.

Ce matin, Vincent est content, on a rendez-vous avec l'avocate qui a signé les papiers de

mon adoption.

Elle n'est plus toute jeune mais elle est toujours en exercice.

Dans sa salle d'attente, j'ai la tremblote, je n'ai plus d'ongles arrangés, elle arrive

toute petite tortue au cheveuil gris.

Bonjour maître, voilà nous avons des documents, peut-être que vous savez quelque chose?

On vous le savait, j'ai fait tellement d'adoption à mon âge, je peux pas m'en souverner de

tous les cas.

Vincent est d'un calme admirable, mais je sens qu'il sent qu'elle nous ment, la garce,

qu'elle sort un vieux classeur, ou se trouve l'acte d'abandon de ma mère, que j'ai

déjà dans mon dossier.

Oui, ce sont des papiers que nous avons également.

Dites-moi maître, je voulais vous demander, qu'est-ce que vous savez des trafics d'enfants

pendant le conflit armé?

Je sais que pas mal d'avocats ont aidé des passeurs dans leurs besoins.

Jamais, vous s'entendez jamais, j'ai été des centaines de femmes et tout est légal.

J'aurais, ou Vincent vient de parler de trafics d'enfants.

On n'a jamais parlé de ça.

Vous n'avez pas une adresse à nous communiquer avant qu'on se quitte? Aucune information

sur son lieu de résidence actuelle, par exemple?

Non, y'en est rien concernant cette personne, voilà.

Merci beaucoup! Et nous voilà dans la voiture.

Elle nous a menti, c'est évident.

T'as vu comme elle s'est enflammée quand je lui ai demandé pour les trafics?

Je lui ai dit d'accord, mais tu as parlé de trafics d'enfants, ça fait partie des

options.

Toutes les options sont possibles pendant le conflit armé.

On est obligé d'étudier toutes les possibilités.

A la reine à la mairie, il nous avait promis de nous donner son acte de naissance dans

deux jours.

C'est demain.

Alors? C'est bon, j'ai récupéré les papiers.

Et te ressemble? Enfin, tu lui ressembles, tiens, ouvre, prends ton temps, tu veux que

je te foute la paix cinq minutes? Non, non, reste, je prends l'enveloppe marron, j'en

sors une feuille à quatre ou figure quatre photos.

C'est ma mère de ses 17 à ses 25 ans, c'est mon portrait craché à 15 ans, jusque-là

je m'étais retenu de pleurer, mais cette fois c'est plus fort que moi.

Merci Vincent.

De rien, ma belle.

On est allé à Colonial Limone, dans la zone 18, là où je suis né, là où ma mère

a vécu.

C'est l'un des quartiers les plus dangereux de Guatémal à Ciudad.

Et on a vu des végas, mais aucune n'était la bonne.

Il nous reste trois jours pour la retrouver.

D'après son acte de naissance, ma mère est née à Esquipoulas, à la frontière avec

le Honduras et le Salvador.

Nous y partons à l'hôbe, on roule pendant quatre heures et demie, et on arrive à l'hôtel.

Dites-moi monsieur, est-ce que vous connaissez des végas par ici à Esquipoulas?

Végas? C'est ouro que si! Le maire, le maire vient de nos familles où les gens portent

beaucoup le nom de Végas.

Nous allons donc sonner chez le maire.

Il est d'abord méfiant et puis...

Tenez, voici l'annonce et l'adresse de mon frère.

C'est un passionné de genealogie.

Peut-être qu'il connaîtra votre maître.

Nous nous rendons tout de suite chez le frangien, qui est ravie de notre visite.

Il sort des archives, des photos, l'arbre généalogique, et il finit par nous traîner

chez un autre de ses frères, qui ne connaît pas ma mère, ni ma grand-mère, dont le nom

figure aussi sur l'acte de naissance.

Le lendemain, nous allons à la reine d'Esquipoulas, la mairie.

On entre? C'est tellement vétuste qu'on a beaucoup de mal à imaginer que c'est une

mairie.

Au fond de la salle, une femme est en train de faire la fée celle.

Elle se séche les mains? Elle se dirige vers nous?

Personne n'a suivi, personne suivante.

Elle est gonflée, on éclate de rire.

Elle va s'asseoir à son bureau, Vincent lui explique, elle fouille dans ses fichiers.

Il y a votre mère aussi?

Mais elle ne peut pas vous donner les papiers à 20 tchours.

Et ma grand-mère, la mère de ma mère, elle s'appelle Anne Navega.

Anne Navega, c'est-ce?

Non? L'effet de m'envoyer les papiers, s'il vous plaît?

Attention, c'est pas Anne Navega, c'est pas bien écrit.

C'est Dora, Dora Vega, Dora Vega, il y a une adresse à Guatessioudin, il peut vous

la donner?

Et sur le chemin du retour, on croise le frère du maire, le passionné de généalogie.

Et on lui dit, c'est pas Anne Navega, c'est Dora Vega, Dora, Dorita, la bouchière.

Elle avait toutes nos boucheries dans les années 1960, je me souviens très bien, mais

elle est morte.

Mais son mari, habite au Honduras, il s'appelle Ricardo Portillo, il vous amène si vous

voulez.

On a peut-être retrouvé mon grand-père, mon cœur bas à cent mille.

Une heure et demie de route à retenir mon souffle, et on arrive devant une échoppe,

et une petite mamie se trouve sous le vent, Vincent lui explique, elle, elle me fixe

à distance, Vincent ne finira pas sa phrase.

« Aïe, aïe, aïe, comment parler cet amour, Alba? »

« Alba? elle a dit Alba, elle a dit le prénom de ma mère? C'est ça, Vincent?

Cette petite mamie, c'est la deuxième femme de Ricardo, mon grand-père.

Elle dit qu'il est parti chercher du bois au Salvador, elle l'appelle.

Ricardo, la fille d'Alba est là, si, si, rentrez vite! »

On entend un bruit de frein, et apparaît un tout petit bonhomme de 80 ans.

Il me regarde, il me sourit, Vincent explique, il me présente, il s'approche, et nous

nous faisons la bise maladroitement, et puis il me prend la main, il me fait signe de

m'asseoir à côté de lui sur le canapé.

Il avait tout raconté, tout ce qu'il y a, je crois que c'était un grand frère ou

un grand-sœur, il n'y a plus.

Et toi, il était beau, il était beau quand tu étais encore un bébé, ta maman, elle

est fâchée contre moi, mais il y a des nouvelles par courrier de temps en temps, il m'a

envoyé des photos d'elle, il était son mari, il a refait sa vie en Belgique, il y

avait une cinquante, stop! En Belgique, à côté de la France, c'est-à-dire que

je viens de me taper 8000 km pour la retrouver, et elle est en Belgique, il y avait tout

à raconter depuis le dépôt.

Moi, il y a sur ton grand-père, et je viens d'une heure, et ta grand-mère vient du Salvador,

et tous les deux, on avait une petite boucherie, et ce qui poulasse, c'est que les escadrons

de la mort sont arrivés, ils sont voulu réquisitionner mon commerce, et moi, j'ai

refusé, ils m'ont passé à tabac, et je fais semblant d'être mort, et ils devraient

m'aider à fuir jusqu'à la frontière du Honduras, et à cette époque nous savions

déjà, 5 en fin, donne ta maman, à moi.

Ils m'expliquent que Dora, ma grand-mère, est restée, et que pendant un an, ils n'ont

pas pu se voir, et que quand il l'a revu, elle était enceinte, à l'évidence pas

de lui, il l'a mal pris, et elle est morte juste après, d'un cancer du ventre, dit-il,

ou plutôt, à mon avis, des suites d'un avortement, et là il dit que les enfants se sont retrouvés

orphelins, et que lui ne pouvait pas aller les chercher, trois de ses filles sont donc

partis à l'adoption aux Etats-Unis.

Et ta mère, Alba, elle est restée sur un institut triste des skipoulas, et croit qu'elle

m'a toujours voulu de les savoir abandonner, et elle a compris, mon avion décolle demain

midi, je pourrais le repousser, mais je dois être en studio pour enregistrer un disque

dans 24 heures, alors je pars avec un numéro de téléphone, pas celui de ma mère, il ne

l'a pas, mais le numéro de mon demi-frère, qui a le numéro de sa sœur aux Etats-Unis,

qui elle, est en contact avec ma mère.

Alba?

Si, oui.

Bonjour Alba, c'est ta fille, Carmen.

Ah, mais tu t'appelles pas Carmen, tu t'appelles Angie.

Mais pourquoi je m'appelle Carmen sur mes papiers?

Je ne sais pas, c'est Michel, non?

Est-ce que je suis bien né à coloniale Limone, dans la zone 18?

18, 18, 18, non, tu es né dans la zone 6.

Bon, et je suis bien né le 11 juillet, ou encore, ou c'est encore faux?

Ah non, non, j'ai né le 11 juillet, le 11 juillet.

Bon, t'es où? Pourquoi t'es en Belgique?

Je suis à Saint-Loroi, tu viens me voir, je n'y accorde, je t'expliquerai.

D'accord, je t'embrasse?

Si, je te veux, mon chien.

De retour en France, on a donc pris la route de Charleroi, avec Igor, mon amoureux.

À 100 mètres, vous êtes arrivés à destination.

J'ai chaud, j'ai froid, je ne veux pas descendre, et on n'était jamais prêt à rencontrer

sa mère.

On l'a attendu toute notre vie, et on est paralysés.

C'est son mari qui ouvre la porte, et au fond de la petite maison de mineur, surgit

en courant, un être aussi, aussi petit qu'un enfant de 13 ans, et elle me sert de toutes

ses forces.

Oh, mire, te quiero, te quiero, perdona, perdona moi.

1,42 mètres, de tendresse, à ne plus savoir qu'en faire, et elle m'embrasse sur la

bouche, sur les joues, sur les tempes, je suis submergé d'amour.

Cette femme retrouve un bébé de 9 mois, qu'elle a vu pour la dernière fois il y a 25

ans.

Regarde-les, ces deux animaux qui se reniflent.

Je ne sais pas ce que je ressens, je suis ému, mais c'est trop pour moi.

Elle m'a tout raconté.

Mon père s'appelait Carlos Henrique e Bolaños Ponce.

Un jour, il est parti pour les États-Unis, sans Francisco, il a envoyé de l'argent

pendant trois mois, et puis plus rien, et Alba s'est retrouvé toute seule sans personne

sur qui compter.

Je devais avoir 6 mois, et mon frère Juan dit 3 ans et demi, on n'a pas le même père

tous les deux.

C'était la guerre, on lui a conseillé d'aller voir des sœurs, des sœurs qui viennent en

aide aux jeunes femmes en détresse, dont une certaine au félia des gammas, qui se

trouvait être la belle-sœur du dictateur Guatemaltec de l'époque.

C'est elle qui a présenté Alba, ma mère, à Madame Houdard de l'association Belge

basée à tourner, assez repontée.

Alba lui a expliqué qu'elle ne voulait pas abandonner ses enfants, mais que s'il existait

un moyen de leur offrir une meilleure vie, alors elle était prête à nous accompagner

en Belgique.

A l'époque, il n'était question que de familles d'accueil temporaires, mais Madame Houdard

lui a fait signer un mandat donnant l'autorité parentale et s'aidant ses droits parentaux

à une certaine Michel Bouc, mais il fallait aussi que mon père signe, et c'est là qu'ils

ont changé mon identité, et écrit « N'est de père inconnu ».

C'est l'avocate, la tortue, vous vous souvenez, qui a décidé de m'appeler Carmen Maria

Vega au lieu de Angie Maria del Rosario Vega, et de me faire naître dans la zone 18 au

lieu de la zone 6, le 11 juillet, au lieu du 11 juin, et voilà, voilà comment je suis

rentré en Europe avec une identité falsifiée.

A l'aéroport de Bruxelles, Madame Houdard m'a arraché au bras d'Alba, et ma mère

m'a vu disparaître derrière une vitre Santa, et passer de bras en bras, jusqu'à

ceux de mes parents adoptifs.

Eux, eux mes parents, ils avaient leur agrément, toute leur démarche était légale, ils avaient

essayé d'adopter en Roumanie, en Colombie, ils ont failli laisser tomber, s'ils avaient

su à ce moment-là se convener de manigancer dans leurs dos.

Et moi, et moi pourquoi crois-tu qu'en 1985, à mon arrivée en France, dans les bras

de Martin et Manu mes parents, j'ai pleuré pendant huit heures non stop, là désormais

petit Anaïs pleurait son déracinement, elle pleurait sa mère, elle pleurait son identité.

Vous avez aimé cette histoire, Christophe Fondolat, vous propose de la débriefer avec un invité

dans un podcast d'ores et déjà disponibles sur votre application.

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Sa mère était une activiste au Guatemala qui l'a abandonnée par amour. Anaïs est adoptée à 9 mois par des Lyonnais. A 15 ans, elle décide de partir à la recherche de sa mère.