Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: [BONUS] - Human bomb, une prise d’otage à la maternelle de Neuilly

Europe 1 Europe 1 9/3/23 - 27m - PDF Transcript

Je vais vous raconter aujourd'hui une histoire vieille de 25 ans, 1993, une prise d'otage

à la maternelle de Neuilly, la banlieue chique de Paris, un type qui débarque un matin et

qui prend en otage toute une classe de maternelle et leur maîtresse, et qui a des revendications

très confuses, il veut de l'argent, il veut une voiture pour s'enfuir et ça dure presque

deux jours. C'est une affaire dans laquelle on va retrouver à la manœuvre Charles Pasquois

en ministre de l'Intérieur. Force doit demeurer à la loi. Et Nicolas Sarkozy en jeune mère

de Neuilly est déjà en animal politique hors du commun. Voici donc cette histoire que j'ai

écrite avec Thomas Houdoir, réalisation Céline Lebrasse. On retiendra que ce jour-là,

le jeudi 13 mai 1993, les enfants de la maternelle de l'école commandant Charles

Côte de Neuilly sur scène étaient en train de fabriquer des cadeaux pour la fête des mères.

A neuf heures et demie, tout s'arrête, d'un coup, un homme entre dans la classe, il a un casque

sur la tête et une cagoule, il porte une sacoche et surtout il brandit un pistolet, il ne dit

rien, il tend juste un bout de papier à la maîtresse, Laurence Dreyfus, dessus il est écrit,

c'est une prise d'otage. Pourquoi est-ce qu'il a écrit ça sur un bout de papier ? On ne sait pas

bien parce que juste après il parle. Allez chercher la directrice, prenez deux enfants, vous allez dans

son bureau, vous lui dites que je viens de vous prendre en otage, vous me la ramenez ici et puis vous

revenez avec elle, compris ? Laurence Dreyfus fait ce qu'il a dit et elle le laisse seul avec 19

gamins de trois ans et elle va chercher Suzanne Soudier, la directrice et quand elle revient toutes

les deux, le type sort des affichettes, sur lesquels il est écrit, si la police entre, je fais tout

sauter. Allez-y, prenez les affichettes, allez les coller sur les portes, à l'extérieur et après

il s'aperçoit que tout le long de la salle de classe, il y a une vitre qui donne sur le couloir.

Prenez des dessins des gamins, collez-les sur les vitres, il ne faut plus qu'on nous voit à travers.

Et là, il sort un cahier, un fascicule, un petit livre qu'il a fabriqué une dizaine de pages

qu'il veut remettre à Charles Pasquois, le ministre de l'Intérieur, rien de moi. Sinon il fait tout

sauter, il a une sacoche, elle est piégée, il fait tout péter et il envoie la directrice prévenir

la police parce que sinon évidemment ça pourrait durer longtemps comme ça. Quelques minutes plus tard

arrivent les premières voitures de police et dans la foulée, le patron de la police des Hauts-de-Seine

émet Tuitou. C'était l'époque où les patrons de la police venaient du terrain. Alors qu'est-ce

qu'il fait Tuitou ? Il se fait expliquer où est la classe et il y va tout droit et il entre.

Sortez ! Et au lieu de sortir, il avance. Les gamins sont pendus aux jambes de la maîtresse et là,

ils tentent de parlementer. Vous êtes qui ? Vous voulez quoi ? Pas de réponse. Le type a toujours

s'empistolé dans la main droite et il tient dans la main gauche une petite planche de bois avec

un interrupteur et une lampe rouge allumée. La bombe. Le commissaire Tuitou se dit qu'elle est bidon,

cette bombe. À 99% elle est bidon. Il n'y a rien au bout. Mais il ne peut pas prendre de risque.

Et l'autre lui remet son livret, pour pas ce quoi, livret qui est signé des initiales HB.

Pour l'instant, c'est tout ce qu'on sait de lui et HB, personne ne sait ce que ça veut dire.

Tuitou feuillette le pape-là, en gros le type fait 100 millions de francs et une grosse voiture pour

prendre la fuite. À 10h30, les journalistes débarquent à l'extérieur.

Bonjour, prise d'otage dans une école maternelle de Neuilly-sur-Seine dans les Hauts-de-Seine.

L'homme est armé visage masqué par une cagoule. Il s'est introduit dans une classe d'enfants

âgés de 3 à 4 ans. Stéphane Soumier, vous êtes devant cette école maternelle rue de la ferme à Neuilly.

Quelles sont les tout derniers éléments d'information ?

21 enfants retenus en otage par un homme d'une forte corpulence armée d'un révolver.

Il porte une caisse noire dont il dit que c'est une bombe. Ces revendications sont imprécises encore.

Et c'est comme ça que les parents apprennent la nouvelle. Les parents des 21 gamins qui

sont pris en otage. On les voit arriver à un parent dévoré par l'angoisse. Et juste après,

ce sont les policiers du raid qui débarquent. Et le raid se déploie partout, autour de la

salle de classe et sur les toits et les balconces à l'entour. Et l'un des policiers du

raid parvient à le voir, accroupi. Et il voit furtivement la petite plaque de bois qu'il

tient dans sa main gauche. Il y a trois dominoes électriques dessous. C'est une vraie bombe,

ça y ressemble en tout cas. D'après des experts du raid, le type pourrait avoir un kilo de dynamite

dans ce sac, de quoi faire beaucoup de dégâts. Le patron du raid, Louis Bayon,

se fait briffer par le commissaire Twitter. Vous verrez, je pense qu'il est dérangé,

le monsieur, mais je pense surtout qu'il est très dangereux. À partir de maintenant, c'est lui,

Louis Bayon, le patron du raid qui a les cartes en main, sous l'oeil du préfet et du procureur,

bien sûr. Dans son pape l'art, HB a réclamé 100 millions de francs. Il demande maintenant qu'il

lui soit donné, pour partie en franc, pour partie en dollar, en marque, en livre Sterling et en nord.

Il réclame aussi un téléphone portable et une radio et une télé. Ça, c'est intéressant,

il veut savoir ce qu'on dit de lui. Il voudrait également un détecteur de faux billets,

au cas où on voudrait le banané. Et puis, il veut à manger et à boire.

Je veux bien vous porter à café, mais si vous faites un geste, donnez-moi un enfant.

Le type refuse et il se met en rogne et ça, c'est pas bon. Le chef du raid vient de perdre

le contact avec lui. Dans la salle de classe, l'institutrice Laurence Dreyfus a parfaitement

conscience que des gamins de trois ans peuvent ressortir de ce qui est en train de se passer

avec un gros traumatisme. Alors, elle fait ce qu'elle peut pour détourner leur attention.

Elle les a mis en rond autour d'elle les vingt et un gamins et elle leur chante des contines.

A un moment, HB propose de libérer la maîtresse. Elle refuse. Elle veut rester

auprès des enfants. Et maintenant, des parents demandent à être échangés contre leur enfant.

Et là, c'est HB qui refuse. La situation est complètement bloquée. Il est clair qu'on ne lui

donnera pas ses 100 millions, c'est une somme astronomique. On ne lui donnera pas non plus de

voitures. Alors, qui c'est ce mec-là ? Les psychologues du raid pensent que c'est un

malade psychiatrique en pleine crise de paranoïa. Il est psychorégide, il ne veut rien négocier,

c'est très caractéristique. Je vous l'ai dit, en proposant d'échanger du café contre un

gamin, le patron du raid a perdu le contact avec HB. Et si on proposait à un père de famille de jouer

maintenant les négociateurs ? Pourquoi pas le père du petit Lucas, Pierre Narbony ? Il a l'air

structuré, il a le sang froid, le père d'un gamin, ça peut peut-être le faire bouger. Et voilà

donc Pierre Narbony, à la porte de la classe. Il n'entre pas, il est sur le pas de la porte.

S'il vous plaît, faites un geste monsieur. Montrez-nous qu'on peut vous faire confiance.

Libérez au moins un enfant. Et là, dans la classe, le petit Lucas entend la voix de son papa alors

il se lève et il court vers lui papa, papa. Et là le père attrape son fiston et sans demander

son reste, il s'en va. Un enfant de sauver. Et après il revient, il revient pour tenter de négocier

la sortie des autres enfants. Et comme ça, entre monsieur Narbony et les policiers, HB lâche

quatre enfants de plus. Et l'un d'entre eux contre un thermos de café. Et ces quatre-là,

plus le petit Narbony, ça fait cinq enfants libérés en quatre heures. C'est très bon signe. Il

est moins inflexible qu'au début. Il négocie. Il y a donc une faille. Et c'est là que déboule,

monsieur le maire de Neuilly sur scène, Nicolas Sarkozy, ministre du budget en exercice. En théorie,

il n'a strictement rien à faire là. L'opération de police dépasse largement ses responsabilités de

maire. Et si les ministres, il n'est pas ministre de l'intérieur. Mais disons qu'il s'impose façon

Sarkozy. Et vous allez voir à l'œuvre l'animal politique qui va devenir président de la République.

Maintenant c'est à moi d'agir. Je prends la suite.

Et le voilà donc qui se présente à HB. Monsieur, c'est avec moi qu'il faut discuter maintenant.

C'est moi le négociateur. Il n'ignore pas bien sûr qu'une caméra du RÊTE immortalise la scène.

Je sais qu'il y a quelqu'un bien. On peut être ami pour ça. On peut avoir confiance à l'un ou l'autre.

Qu'est-ce que je vais faire ? J'essaie de nous sortir la panade. J'essaie de trouver le pognon.

J'essaie de trouver la voiture. Je vais porter le message au ministre de l'intérieur. Qu'est-ce

que je peux faire ? Qu'est-ce que je peux faire ? C'est bien parce que je suis un ami que je fais ça.

Tu veux que je le fais pas ? Ou alors donne-moi le petit noir. Donne-moi le petit noir.

Allez j'ouvre. Et il ressort avec un enfant dans les bras. Blanc. Il n'a pas eu l'enfant qu'il voulait manifestement.

L'image est très forte. Et bien sûr, il l'amène lui-même dans les bras de sa maman. Et ensuite il raconte.

J'ai par le monté un quart d'heures avec lui. Il est très calme. Les enfants s'amusent, il n'y a pas de problème.

Il demande... Il va demander d'aller voir le ministre de l'intérieur pour discuter. Il portait un message.

Il portait un message. J'ai dit que je ne voulais pas tant que je n'avais pas d'autres enfants.

Parce que si je porte le message maintenant, qu'est-ce que j'ai après ? Alors j'ai amené aussi de l'argent.

Nicolas Sarkozy en fait des caisses. C'est vrai. Il tire la couverture à lui. C'est vrai.

N'empêche qu'il fait sortir 4 enfants au total. Lui-même. A 17h, 6h30 après le début de la prise d'otage, il ne reste plus que 12 gamins à l'intérieur.

A un moment donné de la négociation pour libérer les enfants, HB a obtenu une radio et une télé.

Mais le Red en a profité pour truffer les murs de la classe de micro-espions.

Il l'entend donc. Et il écoute France Info en boucle. Et donc le directeur de France Info reçoit un coup de fil de Charles Pasquois.

Vous devez savoir qu'il vous écoute. Et donc je vous invite à être extrêmement prudent. C'est une responsabilité que vous portez.

Et donc plus de direct. Et au journaliste de France Info, ne trouvez les mots pour ne pas le bousculer, ne pas le blesser.

Il est malade. Un mot de travers et il pourrait s'énerver. On parle donc d'autres choses.

Grâce à elle, les enfants jouent, dorment et nous dites un père de famille, ne se doute absolument pas de ce qui leur arrive.

L'institutrice est merveilleuse, dira encore une mère de famille. C'est d'abord grâce à elle, si le calme prévaut encore après 32h de prise d'otage.

Avantage de la situation, HB sait, par la radio, que Charles Pasquois suit la faire. C'est ce qu'il voulait et d'une certaine manière, ça le rassure.

En fin d'après-midi, il réclame une femme médecin pour s'occuper des enfants. Ils ont trois ans, ces gamins.

Ça fait huit heures qu'ils sont enfermés. On imagine qu'à l'intérieur, c'est un peu le chaos.

Et le docteur Catherine Ferrachi, du Samu, débarque donc dans la salle de classe.

Et au passage, en entrant, elle voit la petite affichette qu'il a fait placarder au tout début de la prise d'otage.

Parmi les menaces délirantes exposées dans ce texte, il est écrit,

les enfants resteront constamment enchaînés les uns aux autres par le coup.

Ils subiront un prélèvement sanguin avec un débit variable pouvant conduire à de graves séquelles, ou à la mort.

Elle comprend donc qu'elle va faire face à un homme en plein délire.

Mais ce qui la frappe quand elle entre dans la salle de classe, c'est l'odeur.

HB n'a pas laissé les enfants aller aux toilettes. Il y en a partout.

Alors elle fait un peu de ménage, elle les nettoie, elle s'installe dans la pièce.

HB écoute toujours la radio et il entend que les policiers viennent de faire le lien avec une voiture

qu'il a fait exploser dans un parking de Neuilly il y a une semaine.

Il avait laissé un message signé HB.

C'est la confirmation qu'il s'est manipulé des bombes et que donc sans doute, il a une vraie bombe sur lui.

Et du coup, le parking plus la prise d'otage, il entend les journalistes qui se perdent en conjecture à la radio

et qui s'interrogent sur ses motivations politiques.

Et ça, ça le met dans une orage folle.

Politique, ce qu'il fait n'est pas politique.

Il demande à voir Sarkozy qui est toujours là, il veut rétablir la vérité.

Et quelques minutes plus tard, on voit Nicolas Sarkozy sortir de l'école et se diriger vers les journalistes.

Je voudrais un journaliste Téfin s'il vous plaît.

Oui, moi.

Le journaliste qui vient de lever la main s'appelle Jean-Pierre Abou.

On l'entraîne à l'écart.

Il veut parler à Téfin. Il a des choses à dire. Vous acceptez ?

Bien sûr que j'accepte.

On lui explique que l'autre est susceptible, qu'il ne faut surtout pas lui faire la morale,

qu'à partir de maintenant, il n'est pas seulement journaliste, il tient la vie des enfants dans ses mains.

Alors Jean-Pierre Abou pénètre dans la classe.

Merci d'être venu.

Vos confrères racontent des conneries. Je n'ai aucune motivation politique au quai.

Aucune. Je veux juste 100 millions.

Et il remetta Jean-Pierre Abou, le fameux fascicule.

À une heure du matin, ça fait 16 heures que la prise d'otage a commencé,

l'orête fait passer 5 millions de francs à HB.

En échange d'un enfant, une petite fille qui, une fois de plus, sort dans les bras de Nicolas Sarkozy,

c'est la dernière à sortir. Il reste 6 enfants en otage.

La nuit passe, le jour se lève, la matinée passe,

et à un moment donné, HB dite au Dr Ferracchi du Samu qui est toujours là.

Je suis en train de faire ma prière finale.

Foutez-moi la paix.

Sa prière finale. Est-ce que ça veut dire qu'il va tout faire sauter maintenant ?

En début d'après-midi, Pierre Lyonquand, le procureur de la République de Nanterre,

parvient à renouer le contact avec HB.

Je vous donne une voiture. Vous gardez l'argent ? Ça vous va comme ça ?

Je pars avec les enfants. Ah, les enfants, c'est pas possible.

On ne me laissera pas faire ça.

Quelle autre solution, alors ?

Ben, c'est moi qui deviens votre otage.

Vous laissez les enfants dans la salle de classe, et puis on part tous les deux.

Vous roulez jusque-là où vous voulez, et puis après m'avoir jeté, vous continuez votre route.

Moi, je sais qui veulent me tuer.

Maintenant, à 16 heures, on amène une voiture.

Le préfet Hardy dira plus tard qu'à ce moment-là, il reçoit un ordre de Charles Pasqua.

Il n'est pas question que HB quitte les corps le vivant.

Pasqua démentira cet ordre. La prise d'otage dure depuis 32 heures.

À 17 heures, HB réclame une arme, et dit qu'il veut partir avec un enfant.

Le procureur, toujours au contact, refuse.

L'arme est là.

Comme contrepartie, il faudrait que vous me remettiez votre charge d'explosif.

Disons que c'est donnant, donnant.

Ah, ça, non ?

Les explosifs les gardent.

Et puis, je veux plus de votre plan.

C'est les enfants, les otages, c'est pas vous.

Je vais partir avec les enfants.

La négociation est à nouveau bloquée.

Et on entre dans la deuxième nuit de cette prise d'otage.

On amène alors une camionnette avec 50 millions à l'intérieur.

La moitié de ce qu'il réclame.

Il dit que ça n'est pas assez.

L'institutrice Laurence Tréfus est puisée, accepte de quitter la salle de classe.

Et elle est remplacée par une psychiatre.

Médecin des sapeurs-pompiers, Evelyn Lambert.

Comme tous les sapeurs-pompiers de Paris, Evelyn Lambert est militaire.

Elle est capitaine.

Alors certes, elle est psychiatre, elle est médecin.

Mais à partir de maintenant, elle est surtout aux ordres du raid.

HB boit des litres de café toute la nuit.

Et il baille.

Beaucoup.

Le raid l'observe maintenant au plus près.

Une caméra espion a été glissée dans la salle de classe.

À un moment, il parle avec les gamines,

puisqu'il n'y a plus que des petites filles en otage.

Elle lui demande,

« Comment tu t'appelles toi ? »

Ah ça, c'est un secret.

Je ne peux pas te le dire.

« Pourquoi tu peux pas ? »

Je m'appelle Bandy.

Bandy, c'est pas un prénom, ça.

Ce que ne c'est pas HB,

c'est que dans le dernier thermos de café,

que l'on fait passer les policiers.

Il y a des somnifères, puissants,

du gamma au H et de l'hypnovel.

Ils ont testé le cocktail sur un collègue.

Ça a marché.

Il est tombé reine.

Le capitaine Lambert a pour mission de prévenir le raid

dès qu'il se sera endormi.

HB boit une première tasse de ce café piégé.

Puis une deuxième.

Et une troisième.

Et ils s'endorrent lentement.

Le doigt à quelques centimètres de l'interrupteur de sa bombe.

Mais Evelyn Lambert n'est pas certaine qu'il ne fait pas semblant.

Alors elle le teste.

Elle se met à faire du rangement.

Elle bouge les tables.

Elle bouge les chaises.

Elle fait du rafus.

Ils ne mouffent pas.

À un moment, ils l'ouvrent en œil, mais ils le referment si tôt.

Alors elle s'approche, elle le secoue, elle l'engueule même.

Réveille-vous.

Vous vous rendez compte de la situation dans laquelle vous nous mettez ?

Elle n'a dans les mains qu'un corps inerte.

HB est neutralisé.

À ce moment-là, objectivement, c'est fini.

Il n'y a plus qu'à entrer, à lui passer les pince et à faire sortir les gosses.

C'est fini.

Alors elle réveille les six petites filles.

Ça va, mes chéris ?

On va jouer un jeu d'accord ?

Ça s'appelle le jeu de la tortue.

C'est très rigolo.

Vous allez vous mettre sous votre matelas.

Et ça vous fera comme une carapace de tortue, d'accord ?

Elle veut les protéger au cas où la bombe exploserait.

Et ensuite, elle fait ce qui est convenu depuis le début avec le raid.

Elle se met face à la caméra planquée dans la classe

et elle déboutonne les boutons de sa blouse.

C'est le signal.

À 7h25, après 46 heures de prise d'otage, le raid pénètre dans la salle de classe.

Et 5 minutes plus tard, à l'extérieur,

les journalistes voient les policiers sortir

avec les six derniers otages dans les bras.

La prise d'otage est terminée.

Et Nicolas Sarkozy prend la parole.

La joie qu'on éprouve, c'est pas une joie profonde.

C'est plus que ça encore.

La police a été formidable, le raid a été formidable,

les familles ont été sensationnelles, les pompiers merveilleux.

Tout le monde s'est fait confiance.

Et puis le résultat, c'est que tous les enfants sont sortis.

Et croyez-moi, les enfants, ils sont moins traumatisés que nous.

Et puis on voit arriver le ministre de l'Intérieur, Charles Pasquois.

Et c'est là qu'on apprend qu'HB est mort.

Il a été abattu de trois balles.

Un monsieur le procureur de la République

qui a été au contact de cet individu

et, naturellement, au responsable du raid,

qui ont tué la tâche la plus difficile.

Voilà, le cochemin a été terminé.

Il était très important que les enfants soient libérés.

En bonne santé, c'était notre objectif essentiel.

Le second, le second qui n'est pas négligeable,

c'était que force reste à la loi.

Le forcené est mort.

Force est restée à la loi ?

Ah bon, le procureur Lyon, quand on n'est pas d'accord,

les policiers sont intervenus sans l'informer.

L'autorité policière a pris le dessus sur l'autorité judiciaire.

Ça n'est pas normal.

était-il nécessaire d'abattre HB ?

Il dormait, il dormait à point fermé.

Le raid dit qu'il s'est réveillé au moment de l'assaut,

qu'il a voulu appuyer sur le bouton

et que donc c'était de la légitime défense.

On apprend au passage que la bombe était une vraie bombe.

Il avait même placé des explosifs sur les portes de la classe.

Avec sa télécommande, il était capable de les faire exploser

sans même se blesser lui-même.

Et il pouvait aussi se faire sauter par un autre bouton.

Il est là, mort sur le sol de cette salle de classe.

On ne sait toujours pas qui il est,

ni pourquoi il a fait ça.

Et d'abord, HB.

Ça n'était pas assez initial.

HB voulait dire Human Bomb, la bombe humaine.

C'est en tout cas ce qu'il a dit à la capitaine Lambert avant l'intervention.

Son vrai nom, c'est H. Schmidt, 42 ans, originaire de baisier.

On le découvre grâce à ses papiers d'identité.

Il les avait sur lui.

Au métier, il était informaticien, mais au chômage.

Il avait eu sa propre entreprise de maintenance informatique,

à Ivry, près de Paris.

Mais après un conflit avec ses associés,

la boîte a été liquidée.

Il était resté sur le carreau.

On interroge ses anciens employés.

Ils disent qu'avant la liquidation,

il était fier de sa réussite professionnelle,

voire un peu flambeur,

que cette entreprise, c'était toute sa vie.

Il n'avait ni femme ni enfant.

Après la liquidation, il a perdu pied

et il a plongé dans la dépression.

Avant, il avait passé ses temps dans l'armée.

Et c'est là qu'il a appris à se servir d'une arme.

C'est là qu'il a appris à fabriquer des explosifs.

On foillait de son dossier militaire.

On le décrit comme vif d'esprit,

comme solide,

mais ayant une difficulté à se soumettre à la discipline.

Éric Schmidt était célibataire,

mais il avait une sœur,

Anne-Marie Schmidt.

Deux mois après le drame,

elle porte plainte pour homicide prémédité.

Elle réclame la vérité sur la mort de son frein.

Mais la justice prononce un non lieu.

Éric Schmidt a laissé une lettre

qu'il a écrit sur place quelques heures avant de mourir.

Dans quelques heures, tout sera fini.

Je ne sais pas encore si ce sera la balle d'un sniper du raid

ou mes tripes qui voleront dans un grand boom.

On se dit alors qu'il avait prévu de mourir.

Les américains ont une expression pour ce genre d'opération.

Ils appellent ça suicide by cop,

se suicider par l'intermédiaire des policiers.

Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org

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Le 13 mai 1993, un homme cagoulé et casqué déboule dans une classe de maternelle de l’école Commandant Charcot de Neuilly près de Paris.