Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Ayoub El Kerch, au nom du père
Europe 1 9/22/23 - 37m - PDF Transcript
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On de l'âtre à compte. Christopher Delat.
En août 2019, dans un petit village du Doux, après une nuit bien arrosée,
Ayub et son grand frère au Mar se battent comme des chiffonniers. La bagarre tourne mal et le
grand frère tombe sous les coups du plus jeune. Ouvrons ensemble la Côte B du dossier d'instruction
d'Aiub Elkerche.
Européen, Christopher Delat. Dans le système judiciaire français,
le dossier d'instruction contient un sous-dossier appelé Côte B. Il rassemble les rapports des
experts psychiatres, psychologues et de l'enquêteur de personnalité. Ouvrons l'un de ces dossiers.
On de l'âtre à compte. Côte B sur Européen.
Le 24 août 2019, Ayub Elkerche, 23 ans, passe la soirée avec son grand frère au Mar, 33 ans.
Les demi-frères récument les bars, ils boivent, ils fument de l'herbe et ils finissent en boite
de nuit. Et au petit matin, ils rentrent à pied et les esprits s'échauffent. Les nélences au plus
jeune. Allez Ayub, je suis mort fatigue, porte-moi sur ton dos. T'es grand toi, t'es fort. Ah non, non, non, c'est bon là, tu me soules.
Il a laissé sa gasse et il balance une phrase terrible. Non, t'es pas mon frère, toute façon.
T'es qu'une merde. On n'a pas le même père, toute façon. Le petit frère esquive un coup de point
et il répond par une avalanche de coups de point et de coups de pied. Les nez s'effondrent sur le
bord de la route, ils meurent à l'hôpital. Ayub Elkerche a tué son frère aîné.
Il s'agit d'un meurtre. Laurence François, experte psychologue.
Je dois expertisez le présumer, meurtrier, mais je n'en sais pas d'avantage.
Je me rends à la maison d'arrêt. Je vois arriver un grand jeune homme mince.
Lorsque je le rencontre, il a 23 ans, il vit dans des conditions évidemment pas très agréables.
Quand on est incarcérés, je me présente toujours avec beaucoup de simplicité.
Et là, je vois un garçon qui a une attitude à la fois méfiante et réservée.
Mais qui me regarde bien en face, il est en attente.
Il a besoin de comprendre ce qu'est une expertise psychologique.
Code B71, expertise psychologique de Laurence François.
M. Elkerche m'accueille avec méfiance et adopte une attitude assez distante en tout début d'entretien.
Après avoir écouté avec attention mes explications concernant le déroulement de cette expertise,
il se détendra et acceptera les conditions de cette investigation psychologique,
allant même jusqu'à m'interroger sur certaines pathologies en nous demandant la définition de la psychopathie.
Dès lors qu'il entend les explications concernant les motifs de cette rencontre,
là, on sent tout de suite un jeune homme qui se détend et qui va adhérer.
Il va répondre à des questions avec simplicité, avec précision et même, je dirais, avec une certaine authenticité.
Puis il a une réflexion qui va souvent utiliser un petit accent alzacien, léger,
et très souvent il me dit, vous comprenez ce que je veux dire, vous comprenez ce que je veux dire.
Alors, je trouvais intéressant cette manière de s'inquiéter de la compréhension de l'autre,
de se soucier aussi du fait qu'il soit bien compris.
Et ça signifiait, à mon sens, qu'il avait le souhait d'un échange véritable.
Côte B-29, rapport d'expertise psychiatrique du docteur William Guichet.
A Youbel Kerch, est entré en prison pour la première fois à l'âge de 18 ans.
Il dit avoir été condamné à neuf reprises en 11 mois pour des vols, des extorsions, des agressions.
Il nous dit, j'ai raté ma jeunesse, j'ai beaucoup volé, je faisais la bagarre souvent quand j'étais petit.
Il n'y a que quand je me bagarre, que je suis confiant.
En août 2019, alors qu'A Youbel Kerch est incarcéré pour des vols et des bagars,
il bénéficie d'une permission de sortie de quatre jours.
Il ne souhaite pas aller ailleurs qu'à Strasbourg, dans sa famille.
Mais les sœurs d'A Youbel, apprenant qu'il y a des tensions dans le quartier,
choisissent d'orienter leurs frères vers Omar, qui se trouve à morto.
Et c'est ainsi que les deux frères se retrouvent pour la permission d'A Youbel à morto
et ils décident de sortir ensemble.
Madame, on est allés dans un bar.
On a bu.
Moi, je n'avais pas bu depuis trois ou quatre mois.
Puis j'ai fumé du shit.
J'étais morceau.
Et alors en sortant, il n'y avait personne pour nous ramener.
Alors mon frère Omar me dit, porte-moi sur ton dos.
J'ai refusé, quoi.
Alors il s'est énervé.
Il m'a dit, t'es pas mon frère, t'es qu'une merde.
Et puis de toute façon, on n'a pas le même peur.
Et ils échangent quelques coups de point.
Il m'a mis une droite, il se bagarre un petit peu.
Et là, A Youbel me dit, je me rappelle de mes chaussures vers A Youbel.
A pointe en fer.
Et j'ai écrasé sa tête avec mes pieds.
J'ai tapé, tapé et j'ai tellement tapé que j'avais les talons des pieds bleus.
À l'issue de cette nuit de pure folie.
Pierre Vincent Conno, avocat d'A Youbel Kerch.
Finalement, le soleil allait accoucher d'une tragédie parce que,
pendant que eux terminaient leur soirée sur le bord de la route,
beaucoup de passants et même d'habitants allaient au travail ce matin-là.
Et donc, on a une multitude de témoignages de personnes qui les ont vus marcher,
qui les ont vus bien s'entendre.
Et on a, après, quelques témoins qui nous disent,
on les a vus front contre front alors que, quelques instants,
ils étaient comme des frères amis côta côta,
et c'était à ce moment-là quand les gens les voient en train de se battre,
qu'ils s'arrêtent en voiture et qu'ils essaient d'intervenir à l'arrivée des gendarmes.
Le frère d'A Youbel Kerch est inert sur le sol et A Youbel Kerch, lui, attend.
Il avait récupéré dans la voiture d'un passant qui s'était arrêté
pour tenter de l'aider une boîte de jus d'orange.
Et il avait essayé de le donner à son frère qui n'en avait pas pris
et donc, du coup, il attendait comme ça assis bêtement que quelqu'un intervienne
alors que son frère était inconscient.
Il explique l'effet calmement et, systématiquement,
une fois qu'il a fini de vous expliquer ce qui s'est passé,
il font un larme.
C'est un petit peu comme si, à chaque fois qu'il racontait cette histoire,
il la revivait et, à chaque fois qu'il termine de la raconter,
il ressent une même douleur mais qui se voit.
C'est une douleur qui se voit, qui s'entend, il se met à pleurer
et ça dure quelques instants.
Ensuite, il se ressaisit et il dit à très nombreuses reprises,
je n'ai pas fait mon deuil.
Il me dit, vous rendez compte d'âme, il est mort.
Il était bouleversé, lorsqu'il parle des faits.
Il est encore bouleversé par la mort de son frère
lorsque je le rencontre un an plus tard.
Et il dit, bien sûr, j'étais en colère,
j'étais en colère parce qu'il m'avait mal parlé,
il m'avait encore donné des ordres, il m'avait insulté
mais je ne voulais surtout pas le tuer.
Il a expliqué que pendant les semaines qui ont suivi le décès
de Domar, il a tellement pleuré qu'il avait l'impression
à un certain moment qu'il allait étouffer, tellement il pleurait.
D'ailleurs, il se scarifiait depuis,
comme pour se topunir quelque part de ce qu'il avait pu faire.
Il avait de vrais remords par rapport à ce qu'il avait pu faire
et surtout, cette impression de ne pas avoir senti sa force.
Code B-36, rapport d'expertise psychiatrique du docteur William Guichet.
Hayou Belker se sent oppressé à la prison de Dijon, loin de sa famille.
Il fait beaucoup de cauchemars et se réveille angoissé.
Il se perçoit comme quelqu'un de très calme.
Mais il nous dit, il ne faut pas venir me chercher.
J'ai fait longtemps de la boxe.
Je fais sans faire exprès ces mécaniques.
Après, je regrette.
Interroger sur ce qui pourrait être son modèle,
il nous répond, mon frère.
Ce jeune homme, ruminé sans cesse, c'est de scène dramatique.
Il ne remettait pas en question cette incarcération.
Je crois qu'il était davantage envahie par la douleur
que par la réalité de la situation
et des conséquences qui allaient en découler.
Il ne m'a pas parlé de sa peine éventuelle,
parce que sa peine, il la vivait déjà.
Il disait, maintenant, on me voit comme un meurtrier.
Il ne l'avait tellement pas voulu, l'être.
Et ça, c'était quelque chose de terrible pour lui.
Il a eu une vie extrêmement difficile
et qui l'a fragilisé, ça, c'est certain.
Ayoubel Kirch est né à Strasbourg en 1996
dans une famille d'immigrés marocains.
Il décrit une enfance faite de bons et de mauvais souvenirs.
Sa mère, Zoubida, était douce.
Elle prenait soin de lui.
Mais son père, Armen, était un tyron.
Code B-70, expertise psychologique de Laurence François.
Ayoubel Kirch considère son père
comme un homme très bizarre, spécial et très nerveux.
Il dit, mon père était sévère.
Il pouvait taper.
Il était violent dans ses paroles.
Il avait des insultes tous les jours.
Il m'angoisse quand j'étais petit.
Il me disait, t'es un fils de pute.
Ta mère est une pute.
Et si tu portes une sacoche, c'est que t'es un pédé.
Il a été un enfant qui n'était pas désiré.
Laurence François, experte psychologue.
Et il en veut pour argument qu'il y a peu de photos chez ses parents,
qu'il y a peu photo de lui.
Il décrit un père distant,
qui était beaucoup absent,
qui avait travaillé au Maroc, à la fois dans la marine et comme magasinier.
Et qui arrivait en France, dit-il, fabriquer des grilles-grilles.
Sa maman faisait de la voyance.
Il y avait quelque chose entre la magie,
ou des sciences qu'il ne comprenait pas tout à fait
et qu'il le mettait mal à l'aise.
Donc ce papa était peu présent, très méprésent.
Il dit que son papa l'insultait énormément.
Ne s'occupe pas de lui.
Mon père disait toujours,
jamais de calme.
Puis on n'allait jamais à la piscine.
Mes copains, ils y allaient.
Nous on ne se promenait jamais.
Ils m'emmenaient jamais chez des amis.
Ils ne voulaient pas remplir le frigo.
Il était chalou,
quand maman m'a acheté des chaussures.
Il a vraiment un sentiment,
à la fois de rejet de la part de cette figure paternelle,
mais également de mépris.
Et ça, c'est quelque chose de très douloureux.
A l'inverse, il décrit une maman extrêmement douce,
extrêmement protectrice, bienveillante.
Et finalement, il y a une espèce de rapprochement.
On était tous les deux maltraité par mon père.
Parce qu'il disait que son père
insultait copieusement sa mère.
Donc ça, c'était quelque chose de très difficile.
Et il pense que sa mère a été très malheureuse en couple.
D'ailleurs ses parents divorcent leur styla 14 ans.
Et il sort Marie un an plus tard.
Et il dira, j'étais pas d'accord pour qu'il sort Marie.
Et je ne suis pas allée au mariage.
Il acceptera pas cette reprise de vie de couple.
Il était persuadé que sa maman s'était mariée
initialement pour les papiers.
Il grandit dans des conditions difficiles pour plusieurs raisons.
D'abord, il a des problèmes de santé, cet enfant.
Il a des troubles du comportement.
Il change plusieurs fois d'école.
Ça s'est compliqué.
Dans son quartier, on lui dira qu'il n'est pas normal.
On lui fera des réflexions.
Et il dira d'ailleurs, ça met la haine qu'on parle comme ça de moi.
Qu'on parle comme ça de moi.
Et qu'on dit que j'étais quelqu'un de bizarre.
Côte B-32.
Expertise psychiatrique du docteur William Guichard.
À l'âge de 7 ou 8 ans,
Aiyou Belkerche est en voyage au Maroc avec sa famille.
Demande une maison, il voit une jeune fille
puis un homme se rét arrivé.
Il raconte que cet homme aurait essayé de le pénétrer.
Mais n'aurait pas réussi.
Aiyou Belkerche dit que cet homme l'a fait oralement.
Lorsqu'il rentre chez lui, sa mère lui dit,
on t'a fait quelque chose.
Et ça, c'est quelque chose aussi qui convoquera à lui
à la fois un sentiment de colère intense,
mais aussi, et il le dit, de la peine.
Parce que je pense que ça réactive
une position passive de subir
qu'il a déjà connu avec son papa.
Et ça, c'est très difficile pour lui.
Et donc, il y a une forme d'isolement
qui va se mettre en place.
Dans ses amitiés aussi,
il dit qu'il n'a pas d'amis,
sauf en devenant adulte,
lorsqu'il ira en maison d'arrêt
et rencontrera des hommes
qui ont finalement l'âge de son père
et avec lequel il ira des amitiés.
Il ira, moi, je préfère les gens plus vieux
parce que comme ça, il n'y a pas de concurrence.
Comme si en ayant été un enfant
parmi d'autres dans sa famille,
alors qu'il était, je le rappelle, le cadet,
il ne s'est pas senti suffisamment individualisé.
Et là, avec des plus âgés,
finalement, il y avait une forme de reconnaissance,
sans doute identitaire, qui le rassurait.
En tout cas, sur mon art sussiquement, il était rassuré.
Quand il parle de son frère,
il décrit la personne qui était la plus extraordinaire.
Il dit également qu'il avait des défauts,
pour Ayub, ces défauts-là ne comptent pas du tout.
Et je pense que ça sera toujours le modèle
qui s'était fixé, son grand frère,
qui avait de nombreuses années de plus que lui
et qui était le modèle
de ce qu'il aurait aimé être s'il n'avait pas été dénu.
Ayub vivait avec son père et sa mère,
ainsi qu'une de ses jeunes sœurs.
Son grand frère, lui, très tôt, a quitté le domicile familial
et avait pris son indépendance et avait son propre logement.
Il ne revenait que de façon extrêmement rare,
et ça n'était pas pour longtemps,
mais son frère vivait indépendamment de la famille.
La relation qu'Ayub avait avec son frère
était une relation basée sur le respect,
une relation qui lui avait été inculquée également par son père
et peu importe les mots que pouvait avoir un aîné
ou son père sur Ayub,
il était conditionné à ne pas devoir avoir de réaction
ou en tout cas ne pas réagir et se laisser faire,
c'est-à-dire subir.
Son grand frère en profitait
et avait tendance à abuser du fait qu'Ayub ne disait rien,
y compris lorsqu'il était rabaissé,
mais parfois même plus bas que terre verbalement,
il était capable de lui dire des choses
qui sont extrêmement brutales et qu'on ne peut pas oublier.
Et ça d'ailleurs, Ayub rappelle très souvent
qu'il leur a baissé et que c'était quelque chose
qui lui faisait énormément de peine,
mais c'était des mots auxquels il ne devait pas réagir
parce qu'il venait du grand frère.
Mon père tapait tout le temps Omar,
mon demi-frère avait du coup une haine contre ma mère,
il fumait, buvait beaucoup et il prenait de la coque.
Il explique que, finalement, Omar m'a fait entrer dans une doctrine.
Alors, quand il dit dans une doctrine,
il veut parler d'un engrenage qui est celui de la drogue.
Et il dit, la première fois qu'il m'a montré du shit,
j'avais six ans, j'ai cru que c'était une tablette de chocolat.
Et ensuite, il dit qu'Omar est devenu irritable,
il est sans doute trafiquant, profondeur, enfin,
et il gagnait de l'argent et il dit que ça l'a rendu fou.
Il est devenu mal poli, il insultait Dieu.
Et là, pour la première fois, Ayub me parle
du fait qu'il est de confession musulmane,
il dit, moi, je suis croyant et je ne veux pas qu'on insulte Dieu.
Et pour terminer, il me dira, Omar, il me parlait mal,
il m'insultait et même il me menaçait, comme qui ?
Comme son père.
Autrement dit, il adoptait une position paternelle
qui pouvait convoquer chez Ayub une colère.
J'ai déjà eu assez de ce papa qui n'était pas gentil.
Tu vas pas, toi aussi, être comme mon papa qui n'était pas gentil.
Ayub Elker, je répète à la juge d'instruction
qu'il n'a jamais voulu tuer son frère.
Il avait passé des heures incroyablement géniales
avec son frère, qu'il trouvait encore plus fabuleux que d'habitude.
Pierre Vincent Conno, avocat d'Ayub Elker,
il a été connu pour lui,
il a été connu pour lui,
il a été connu pour lui,
il a été connu pour lui,
il a été connu pour lui,
il a été connu pour lui,
avocat d'Ayub Elker.
En un claquement de doigt, son frère était en train de le dénigrer,
de le considérer comme étant plus bas que terre.
Et le fait que son frère vienne même contester
ce lien fraternel qui était très cher pour Ayub
a été extrêmement douloureux à entendre.
C'est quelque chose qu'il avait déjà entendu,
mais qu'il ne pouvait plus entendre.
Surtout après une soirée aussi belle
que celle qu'il avait vécue avec son frère,
les mots qu'il venait de prononcer
d'un coup d'un seul anéantir
tout le week-end qui s'était passé avec son frère,
il venait en l'espace d'une phrase
de détruire tout ce qui avait été fait jusqu'à l'heure.
Les mots qu'il recevait qui étaient pour lui
de véritables coups dans le cœur
additionnés au coup qu'il venait de recevoir
ont rendu à Ayub incapable de pouvoir se contrôler
parce que là il était en train de se sentir complètement disparaître.
Et à partir de là, la digue a cédé dans l'esprit d'Ayub
et quand il s'est pris le premier coup de poing
de la part de son frère,
il n'a pas su qu'on tire sa rage
parce que la violence de la part de quelqu'un
qui l'aimait et qui l'aime comme un père
eh bien lui a rappelé précisément
la violence qu'il avait subie petit
et c'est ce mécanisme-là qui s'est mis en place
dans son esprit à savoir je ne peux pas
me laisser battre encore une fois,
il en va de ma survie
et c'est comme ça qu'il a répondu par les coups
et quand Ayub tape, il tape fort
Code B38
Expertise psychiatrique du docteur William Guichard
Il faut se montrer vigilant d'un point de vue clinique
sur l'évolution de la personnalité d'Ayub Elker
En effet, des troubles de contact,
une impulsivité,
une irritabilité très présente
et la labilité émotionnelle importante
sont des éléments de risque
vers une transition psychotique
ou bipolaire
Il a un versant psychopathique
Lawrence François, experte psychologue
Et d'ailleurs, ça faisait partie
de ses premières questions
Quand il s'est détendu et qu'il s'est rendu compte
que ma foi je lui proposais
de travailler
sur son histoire
et sur ce qui lui était arrivé
plutôt pour mieux le comprendre
à partir de là, il m'a dit très rapidement
mais dit, vous pouvez m'expliquer
ce que c'est un psychopathe
Il avait certaines caractéristiques de communes
avec ceux que l'on peut nommer psychopathe
à savoir l'irritabilité, des accès de colère
ou même un esprit très labile
et la question qui se pose c'est de savoir
qu'est-ce que ces indices ?
On est sur des indices qui sont des prémices
d'une personnalité psychopathique qui va éclore
ou est-ce qu'au contraire
ces indices-là sont des fragments
d'une personnalité psychopathique
qui est en train de se guérir
parce que
l'expert psychologue a relevé chez lui
des grandes facultés d'empathie
Je vous parle d'empathie
je ne vous parle pas de l'empathie
de tout à chacun, il avait
une véritable faculté d'empathie
qu'on ne relève pas chez tous
et ces éléments-là
aller en contradiction avec une personnalité psychopathique
ce qui a conduit des experts
à parler de très de personnalité
d'indices de personnalité
mais on en est seulement
à un stade de pourcentage
il n'est pas validé comme étant psychopathe
Elle était à développer cette altérité
mais il ne manque pas d'empathie
il a de vraies ressources psychiques
mais qui n'ont pas été exploitées
et s'il fait des bonnes rencontres
et notamment s'il peut bénéficier
d'une bonne prise en charge
avec un psychologue
je suis sûre que c'est un jeune homme
qui peut évoluer favorablement
j'en suis certaine
seulement il faut qu'il rencontre la bonne personne
s'il sent qu'il est considéré
qu'il est reconnu
et qu'il n'est pas jugé
pour ce qu'il a pu faire
mais justement s'il est regardé
pour ce qu'il peut être
là ça va matcher
c'est certain
Côte B38
Expertise psychiatrique
du docteur William Guichet
Ayu Belker
doit avoir une relation fusionnelle
avec sa mère Zubidam
il doit avoir été collé à elle
et qu'elle est tout pour lui
il indique
malgré mes bêtises
ma mère me pardonnera
même si je lui ai enlevé un fils
La mère d'Ayu Belker
elle a très rapidement compris
ce qui s'était passé
que les deux principaux intéressés
de cette histoire
étaient ces deux garçons
et elle les connaissait parfaitement
elle connaissait les rivalités
même sous-jacentes qui pouvaient les opposer
elle connaissait également
la jalousie qui habitait
chacun des deux à différents niveaux
et quand elle a appris
ce qui s'était passé
et qu'elle a parlé à Ayu
il n'a pas eu besoin de lui en dire beaucoup pour qu'elle comprenne
elle a tout de suite su
ce que tous ont toujours su
et ce qu'Ayu n'a eu de cesse
de répéter
depuis son placement gardaveu
c'est qu'il ne s'agit là que d'une bagarre
qui a mal tourné
et qui a terriblement mal tourné
Pendant toute l'instruction
Ayu Belker se répète à la juge
qu'il n'a pas supporté d'être
rabaissé par son aîné
Trois ans après avoir tué son frère
Ayu Belker s'est jugé pour meurtre
devant la cour d'assice du tout
sa mère a fait le choix
de ne pas se porter particifie
elle n'a pas voulu choisir
entre ses deux fils
Mme Elker, j'avais dit que
ce constitut particifie ne ferait pas revenir son fils
Pierre Vincent Conno, avocat d'Ayu Belker
et que la place la plus utile
qu'elle pouvait avoir dans ce procès
c'était du côté du fils qui lui restait
La mère d'Ayu Belker
a été
toute longue d'instruction et même durant tout le procès
d'une extrême dignité
elle n'a pas s'fianté en dehors de la salle
ou dans la salle une fois qu'elle avait été entendue
en tant que témoin parce que en tant que partie civile
elle aurait pu assister à tout le procès
en tant que simple témoin elle ne pouvait être entendue
qu'à partir du moment où elle avait témoigné
et ça a été un moment extrêmement
compliqué pour cette femme
qui vivait le procès
le plus difficile qu'il soit
parce qu'elle vivait un double procès
elle vivait une partie
de ce procès en tant que victime
parce qu'elle avait perdu un fils
et également du côté de l'auteur
parce qu'elle avait peur de perdre un autre fils
ce procès était déchirant pour Mme Elker
elle a subi ce procès
d'un côté avec la peine
de son fils décédé
et d'un côté avec la peur
de la peine de son fils accusé
j'ai rarement rencontré
quelqu'un d'aussi digne
et l'attitude qu'elle a eu
durant ce procès et le témoignage
qui a été tellement
poignant quand elle a pris la parole
et qu'elle s'y exprimait
ça a été un témoignage très beau
et l'attitude qu'elle a eu
par rapport à son fils décédé
et par rapport à son fils accusé
a été, je trouve, la plus noble qu'il soit
Mme Elker, je vous vous présentez
à la barre en tant que témoin
je ne vous ferai pas prêter serment
car vous êtes la mère de l'accusé
et la mère de la victime
Avez-vous un premier mot à nous dire
en préambule de votre déposition
Monsieur le Président
j'ai déjà perdu un petit
je vais garder le petit qui me reste
je ne suis pas juge
je ne suis pas avocat
je pleure juste mon aîné
qui est parti
et mon second qui est derrière les barreaux
c'est
la souffrance d'une mère
que je viens vous déclarer ici
dans cette salle
je viens juste vous redire
que je souhaite simplement
être là
et être présente pour mon fils
il a besoin de moi
elle dit, juste après avoir témoigné
durant le procès
que c'était son instant
et c'était
j'ai vraiment senti un esprit maternel
qui était préservie ce que j'ai
et s'il y en a un qui est parti
je ne peux plus rien faire
je peux simplement garder celui
qui est encore là
Ayub
c'était beaucoup préparé à cette audience
parce qu'il la redoutait
il avait peur de cette audience
et il comptait les jours non pas
dans l'attente de connaître la peine
mais surtout dans l'attente de connaître
cette confrontation à ses souvenirs
avec sa psychologue au sein de la maison
d'arrêt de Strasbourg
qui avait énormément aidé à se préparer
et la posture qu'il adopte est une posture
extrêmement distante par rapport à ça
il essaye
de
répondre le moins possible
sur sa douleur parce que dès qu'il en parle
il se met à pleurer et ça c'est systématique
il a pleuré
énormément durant ce procès
Faites entrer
l'accusé
Ayub
Ayub Elker
je vis avec la culpabilité
d'avoir tué son frère
on n'est pas face à quelqu'un
et bien
qui va finalement
ranger ça dans un coin de son esprit
ça l'habite
du soir au matin encore aujourd'hui
depuis qu'il a commis ses faits là
il y pense tous les jours
qu'il commence à se carifier pour se punir
de ce qu'il avait fait
et il tenait systématiquement quand il parlait
de son frère
à dire la vérité par rapport
aux rapports qu'ils avaient
et les rapports parfois conflictuels qu'il pouvait avoir ensemble
mais systématiquement
à dire que son frère était quelqu'un de bien
il y tenait
Côte B81
Expertise psychologique de Laurence François
Ayub Elker doit absolument
bénéficier d'un suivi psychologique régulier
et d'un constable
pendant au moins 3 ans
doublé d'un suivi psychiatrique
nous avons pu observer son aptitude
à élaborer
à réfléchir
et une dimension empathique
qui reste à développer
c'est la seule condition
pour s'engager dans la vie active
à sa sortie de prison
S'il ne peut pas revenir
à ce qu'il s'est passé
il peut faire en sorte que cela ne se reproduise plus
Quand il est arrivé en détention
dans le cadre de cette détention provisoire
il a été confronté à la violence du monde carcéral
qu'il connaît très bien
et il a subi des violences de la part
de dit-nus, violences auxquelles il a répondu
ce qui lui a valu
d'être à nouveau placé à l'isolement
Quelques mois avant le procès
il a subi de nouvelles violences
auxquelles il n'a pas répondu
Il s'est laissé faire
par l'acheter ou par peur
mais simplement parce qu'il s'était dit
que s'en était fini avec cette violence
il ne voulait plus répondre
à la violence par la violence
et aujourd'hui il a fait le choix
de quitter la violence pour répondre par les mots
et ça c'est un élément
que j'ai soumis à la cour d'assises en leur disant
on peut se poser la question de savoir
s'il est grillé ou s'il est guéri
je pense que ce n'est ni l'un ni l'autre mais qu'il est sur la voie de la guérison
J'ai trouvé que c'est un jeune homme très touchant
Laurence François, expert psychologue
et surtout je reste toujours
parce que mon métier
avant tout c'est d'être psychologue et psychothérapeute
donc je cherche toujours
à mesurer
le potentiel
de travail
et je pense que c'est un jeune homme
qui ne fait pas appel
du jugement
j'ai trouvé que c'est un jeune homme très touchant
Laurence François, expert psychologue
je pense que c'est un jeune homme qui
vraiment
était capable
d'évoluer favorablement
même si
bien sûr
il a une angoisse d'abandon qui est majeure
il avait donc
un recours à l'agir privilégié
des conduites antisociales
mais tout cela procédait
finalement
de certaines carences affectives et d'une vraie difficulté
à s'être construit identitèrement
d'ailleurs il disait de sa maman
ma mère elle essayait toujours de construire
alors que vous voyez
contrairement à sa maman
il avait l'impression que son père essayait toujours
de détruire
son papa
qui avait été pourtant
extrêmement désagréable avec lui
était devenu gentil depuis qu'il était incarcéré
oui c'est curieux
il m'a dit depuis que je suis à la prison
il est gentil
je pense qu'il a aussi grandi
et pris en maturité
il arrive aujourd'hui parce que c'est un adulte
parce qu'il a un raisonnement
bien qu'il soit toujours immature
mais d'adulte
à avoir un dialogue avec son père
ce qui je pense n'était pas possible
durant toute son enfance et son adolescence
il a dit il s'en est souvent voulu
de se faire gronder par son père
en se demandant
pourquoi est-ce qu'il se dégondait
qu'est-ce qu'il avait fait de mal
et aujourd'hui il a compris qu'il n'avait rien fait de mal
mais aujourd'hui c'est lui qui pardonne à son père
c'était on de la traconte Côte B
rédaction en chef Guillaume Maury
en quête Vincent Duby
réalisation Guillaume Vasso
Retrouvez on de la traconte Côte B
tous les vendredi et samedi
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Ecoutez Christophe Hondelatte dévoiler la personnalité de Ayoub El Kerch. En août 2019, dans le Doubs, après une nuit de beuverie, il a massacré son demi-frère à coups de chaussures à pointe dans la tête. Ayoub El Kerch a laissé exploser des années de colère et de frustration. Il n’a pas supporté que son aîné lui lance : 'T’es pas mon frère, t’es qu’une merde, on n’a pas le même père de toute façon'.Vous voulez écouter les autres épisodes de ce podcast ? >> Retrouvez-les sur notre site Europe1.fr ainsi que sur vos plateformes d’écoute habituelles.