Hondelatte Raconte - Christophe Hondelatte: Aurélien Pioger, vendanges barbares - L'intégrale
Europe 1 8/31/23 - 44m - PDF Transcript
Européens, Christophe Fondelat.
Voici la terrible histoire d'un fendangeur qu'on retrouve pendu dans une grange du
ménéloir.
Il s'appelait Aurélien Apiogé et ça n'est pas un suicide.
On a longtemps cru avoir arrêté les assassins, mais vous verrez.
Pour le débrif, je vous ferai appeler la maître Isabelle Guerin, avocate des parents
de la victime.
J'ai écrit cette histoire avec Aukis, réalisation Boris Pachinsky.
Européens, Christophe Fondelat.
Ça se passe un dimanche matin d'octobre 2008, au milieu des vines de Saint Lambert
du Latté, dans le ménéloir.
Un homme va rendre visite à son grand-père et quand il arrive, sous une grange, il voit
un truc qui penne au bout d'un câble électrique.
Il s'approche.
Ah, non de Dieu, c'est un homme, un pendu.
Un jeune entre 20 et 30 ans roue avec une petite barre et sa tête, mon Dieu, sa tête,
elle est tellement boursouflée qu'on voit à peine ses yeux, comme un boxeur qui a pris
un crochet du gauche en pleine poire.
Allô, je me darmerie, bonjour, je suis à Saint Lambert du Latté, je viens de trouver
un pendu, oui, sous un appendu, je pense que c'est un suicide, mais c'est pas vraiment
sûr, enfin vous verrez, d'accord, vous arrivez, je vous attend.
Et pourquoi est-ce que ça ne serait pas un suicide ? Et bien parce que c'est bizarre,
hein, mais le pendu a les pieds qui touchent le sol, mieux que ça, il a un genou fléchis,
un pendu normalement, ça a les pieds au-dessus du sol, ben sinon c'est pas un pendu.
Et puis il y a un saut à côté à l'envers qui suggère que le gars a sauté du saut pour
ce pendu, sauf que le saut est beaucoup trop loin, les gens d'armes arrivent et aussi
ça les étonne tout ça.
On en a des crochets, hein, des pendus dans notre carrière, mais celui-là on est d'accord,
hein, c'est pas sûr qu'il soit pendu, puis regarde sa tête, il s'est fait défoncer
le corps est décroché et le médecin légiste qui vient d'arriver n'est pas tout à fait de cette
avion.
Bon, d'abord, je pense que c'est passé cette nuit, je dirais, entre cinq ou six heures,
mais moi, je pense que ça peut être tout à fait un suicide.
Et qu'est-ce que vous faites du visage du méfier, docteur ?
Moi, je dirais que ça peut être des coups, hein, mais ça peut être aussi un effet de
la pendaison, quoi.
À vérifier quand même, au moment de l'autopsie, parce que tout de même, son visage est bien
abîmé, docteur.
À part ça, il y a un camion garé à 150 mètres dans les vies.
Les gendarmes se disent que c'est peut-être son camion.
Les portières ne sont pas verrouillées, il fouille à l'intérieur et il tombe sur un
permis de conduire.
Bon, le gars s'appelle Aurélien Pioget, 28 ans, regarde la photo à celui-là, il y a
pas de doute, hein.
La famille est prévenue et les parents n'ont plus, ne croient pas aux suicides.
En fait, c'est impossible, ils se sortaient très bien dans la vie, Aurélien.
Il était saisonnier, il aimait la nature, il vivait dans son camion, c'était sa manière
de vivre.
Nous, on respectait ça, mais lui, ça ne le rendait pas malheureux, je dirais même
au contraire.
Il faisait les vendanges dans le coin, c'est ça ? Oui, ça fait deux ans qu'il faisait
les vendanges à la jumelière, je crois, c'est ça.
Là, jumelière est un domaine situé à 8 km de l'endroit où on l'a retrouvée pendue.
Donc, les parents pensent que ça n'est pas un suicide.
Entre nous, en règle générale, les parents ont toujours du mal à croire à un suicide.
Ils disent toujours, « Ah mais il allait très bien, je comprends pas ».
Sauf que le suicide, parfois, renvoie à des choses qui ne se voient pas.
Mais les parents racontent aussi qu'ils étaient fâchés depuis quelques temps avec Aurélien.
Mais c'était l'année dernière, pour mon anniversaire.
Il est arrivé à la maison avec un type qui ne nous a pas plu du tout.
Alors on s'est engueulés et c'était dit « oh, que voulez-vous, c'est comme ça ».
« Vous pouvez nous parler de ce garçon avec lequel il est venu chez vous ? »
« Oui, il nous l'a présenté en nous disant qu'il s'appelait Tintin le Gaudin.
Mais je crois que son vrai nom, c'était Landry Frias.
Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise sur lui ?
Il était sale comme un peigne, il avait des dreadlocks,
il avait un anneau dans le nez, un autre dans l'oreille, un original quoi.
Mais c'est pas ça qui nous a énervé.
Bon d'abord, il passait ses journées à boire et à fumer des pétards dans le salon.
Mais surtout, il était soulant.
Il parlait tout le temps, il avait un avis surtout, il avait tout fait, il avait tout vu.
Bon, c'était mon anniversaire, on n'a rien dit.
Mais à l'automne, Aurélien nous a demandé s'il pouvait ramener toute sa bande de vent d'angeur à la maison.
Et là, avec mon mari Bain, on l'a refusé.
Il a mal pris.
Mais depuis, on l'a pas revu, il nous a pas appelé non plus.
Tout ça met les gendarmes sur la piste des amis d'Aurélien.
Et notamment ceux avec lesquels il a vendangé ces dernières semaines.
Ils vont pas être faciles à retrouver, parce que comme tous les saisonniers,
ils se sautent éparpillés dans la nature.
Le viticulteur qu'il employait, en revanche, est chez lui.
Et il raconte une soirée qui a eu lieu deux jours avant la découverte du cadavre d'Aurélien.
Bon, c'était la fin des vendanges.
Ils faisaient une petite fête, quoi, comme on en fait souvent.
En général, moi j'y vais, mais là, j'y étais pas.
Mais de ce qu'on m'a dit, ce soir-là, Aurélien, il s'est pas bien comporté avec une fille.
Ça, ça n'a pas trop plus aux autres, quoi.
C'est tout ce que je peux vous dire.
C'est rien de plus.
Ils étaient combien ?
Bah, une douzaine.
Vous avez été coordonnés ?
Bah, c'est-à-dire, j'ai surtout des prénoms,
même pour certains d'ailleurs, que des surnoms.
D'accord, l'URSAF n'était pas au parfum.
Et ça n'arrange pas les affaires de l'enquête, ça.
Ça y est, le légiste vient de rendre son rapport d'autopsie.
Et il s'est bien planté quand il est venu sur place pour les premières constatations.
Vous avez raison.
Ce garçon s'est fait lâcher.
Il a des émettements, mais des plaies partout sur le corps, pas que sur le visage.
En revanche, il est mort d'asphyxie.
Ça, c'est confirmé.
Il est mort suite à la pentaison.
Donc, on l'a d'abord roué de coups et ensuite pendu.
Donc, ça n'est pas un suicide, c'est un meurtre.
Pendant ce temps, les gendarmes ont réussi à retrouver l'un des vendangeurs qui était là ce soir-là.
Je me souviens pas de grand-chose.
Il faut dire, on a eu pas mal picot les uns et fumer la moitié d'un champ de bœuf.
On nous dit qu'il y a eu une altercation dans la soirée.
Vous n'étiez pas là ?
Non.
Non, mais je l'ai appris ce qui s'était passé le lendemain, quoi.
Par les coréliens, il aurait couché avec Rouliette, qui était complètement bourré.
Avec les autres, ça n'aura pas plu.
Et donc, il lui a donné une leçon.
Moi, c'est tout ce que je peux vous dire.
Quand vous dites qu'il a couché avec cette fille Rouliette, comme vous dites, qui était sous-le,
ça veut dire possiblement qu'il l'a violée.
Bah oui, genre.
Vous l'avez vu le matin, Aurélien, quand vous vous êtes levé ?
Non.
Non, non, ils m'ont dit qu'il était dans son camion.
Tout le monde était encore là quand vous vous êtes réveillé ?
Oui, oui.
Il y avait Cloré, il y avait Pimou, il y avait Rouliette.
Tout le monde était encore là.
Ah, si, si.
Il y avait aussi un gars qui était arrivé le soir même, la veille.
Je le connais pas.
Tout le monde l'appelait Toto.
Lui, je peux vous dire qu'il a donné une bonne à ce soir-là.
Le problème, c'est que tous ces gens sont introuvables.
Heureusement, la Rouliette en question, qui dans la vraie vie s'appelle Sophie,
appelle elle-même les gendarmes.
Bon, c'est vrai, on a pas mal picolé et fumé le buzz ce soir-là.
Et moi, je me souviens plus trop de la soirée.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'à un moment, le matin, je me suis réveillé,
il y avait tous les autres autour du camion d'Aurélien qui tapait et qui criaient contre Aurélien.
Et vous, à ce moment-là, vous êtes où ?
Moi, je vous l'ai dit.
Je suis dans le camion, coucher à côté d'Aurélien, quoi.
Et quand vous êtes sorti, comment ça s'est passé ?
Ils étaient tous super agressifs, ils accusaient Aurélien de m'avoir violé, quoi.
Et vous, vous l'avez dit qu'ils vous avaient violé ?
Ben non, moi, pour moi, on n'a pas couché ensemble avec Aurélien.
Mais lui, il a dit qu'on avait couché ensemble.
Bon, de toute façon, ça ne l'aigre pas.
Je veux dire, ce qui s'est passé avec Aurélien, ça ne l'aigre pas,
parce qu'en plus, on venait de se mettre ensemble tous les deux, Aurélien et moi.
J'avais un copain, le lui, mais j'avais décidé de me mettre avec Aurélien.
Et après, alors, qu'est-ce qui s'est passé ?
Ben, je ne sais pas trop, parce que moi, j'ai fait une crise de nerfs,
et Chloëlle m'a fait monter dans mon camion pour me calmer.
Et elle raconte qu'une fois calmée, quand elle est sortie de son camion,
eh bien Aurélien n'était plus là.
Et que les autres lui ont dit qu'il lui avait réglé son compte à coup de pied et à coup de bâton.
Bon, ben voilà, on commence à entrevoir ce qui s'est passé.
Ils l'ont défoncé, et après, ils sont allés le pendre dans la crange.
Un mois et demi après la mort d'Aurélien,
une information judiciaire pour homicide est ouverte.
Vous vous souvenez que le premier vendangeur interrogé par les gendarmes
a parlé d'un Toto qui a tapé l'Incruste à cette soirée et qui était sous commun cochon.
Quand les parents d'Aurélien découvrent son existence,
ça fait tout de suite tilt dans leur tête.
Mais ce Toto-là, ça ne serait pas le même que ce Tintin, le Guedin,
comme il disait, qu'Aurélien, il l'a ramené chez nous.
Ouais, t'as raison, c'est possible.
Guedin, ça veut dire dingue, non ?
Tintin le dingue.
C'était quoi, déjà, son vrai nom ?
L'Andrie Frias, je crois.
Oui, c'est ça, l'Andrie Frias.
Faut qu'on dise à notre avocat d'en parler au juge de ça.
Et le juge se montre très intéressé par cette peste,
d'autant plus intéressé que le Tata, le Guedin, en question,
à un joli petit casier judiciaire.
Bon, il a sacré pédigré, Holger.
Vol, délituite, destruction de biens et menace de mort.
Personne nous en a parlé, hein, ce cas-là.
On nous a parlé d'un Toto, mais manifestement,
il connaissait son vrai nom, quoi.
Pourquoi est-ce qu'ils n'ont pas dit ?
Pourquoi, en effet ?
À ce stade, les gendarmes ont réussi à coller un nom
à tous les protagonistes de la soirée sanglante.
Et ils ont découvert que l'une des filles
qui a participé à la soirée, Sylvie,
est la propre fille du vigneron
qui accueillait toute la petite troupe.
Et mieux que ça, la Sylvie, en question,
elle est à la colle avec Tintin, le Guedin.
Et ça, son père, propriétaire du domaine de la jumelière,
a oublié de le dire aux gendarmes.
Pourquoi est-ce que vous nous avez pas dit, monsieur,
que votre fille avait une relation avec monsieur Frias,
plus connue de ses amis,
sous le surnom de Toto ou de Tintin, le Guedin ?
Je vous l'ai pas dit parce que je voulais pas
que ma fille, elle était ennue,
mais je vais vous expliquer.
Le lendemain de la soirée, quand Sylvie m'a raconté
ce qui s'était passé, je voulais parler des coups
qu'ils ont donnés à Aurélien, pas de la suite,
je leur ai dit de tous venir à la maison.
Et l'Andrie Frias, donc, il a dit,
oui, moi, j'ai un casier judiciaire,
faut pas me mettre ça sur le dos.
Et du coup, je l'ai pas dénoncé pour ma fille,
pour la protéger.
Bon, il serait peut-être temps d'arrêter
et de placer en garde amus
tous les protagonistes de cette terrible soirée.
Enfin, ce qu'on a réussi à localiser.
Cinq mois après la découverte du corps supplicié
d'Aurélien Piongé,
les gendarmes en interpellent cinq,
dont trois qu'ils soupçonnent
pour pouvoir directement participer au lynchage.
L'Andrie Frias, alias Tintin Gaudin,
Maxime Deschamps, des Pimous
et Claude Boulet, que tout le monde appelle papa Claude,
parce que c'est le plus vieux,
il a quarante-neuf ans.
Et voilà ce qu'il raconte,
tous d'une même voix.
C'est vrai, on a donné une leçon à Aurélien.
C'est normal après ce qu'il avait fait à Rouliette.
Mais c'est tout.
Après, il était allé se remettre dans son camion
et puis, quand il est porté,
il était vivant.
Et à quelle heure serait-il partie du campement, selon vous ?
Je dirais vers 13h, je pense, le samedi.
Mais après, nous,
on ne sait pas ce qui s'est passé
pour qu'il se retrouve pendu.
Le récit des uns et des autres est tellement similaire
qu'on sent bien qu'ils se sont concertés.
Mais il y en a un qui craque.
Il s'appelle Alexandre.
Le samedi matin, quand je me suis réveillé,
je me suis fait un café
et je suis allé le boire près du feu.
Et là, il y avait Toto.
C'est lui qui m'a dit qu' Aurélien avait violé Rouliette
et qu'il l'avait tabassé pendant la nuit.
Il est taré, ce type.
Il est complètement taré.
Il ne faut pas qu'il sache que je vous ai raconté ça.
Promis.
Promis.
Il m'a dit que quand il a commencé
à tabasser Aurélien,
il avait rouge et qu'il pouvait plus s'arrêter.
Comme une machine, il m'a dit.
Il y a donc l'André Frillasse
qui a frappé Aurélien.
Non, non, non.
Après, plus tard dans la matinée, il y a Claude.
Je l'ai vu donner un grand coup de pied.
Et puis, il y a Pimousse aussi.
Attendez, plus tard dans la matinée,
M. Piogé était là.
C'est-à-dire, il était là sans être là.
Il était allongé au sol,
couvert de sa couette.
Il ne bougeait pas, mais il était vivant
parce qu'à un moment, Toto, il a pris une baramine
et lui a donné un grand coup.
Je l'ai entendu gémir.
Ensuite, Toto, il a dit.
Je vais t'apprendre à violer les nanas.
Moi, tu vas voir si c'est agréable.
Il lui a mis une baramine
dans le cul.
Il l'a fait vraiment.
En tout cas, il a soulevé la couette
et il a placé la barre et il la pensait très fort.
Après, je ne sais pas.
Un peu plus tard, il a enlevé la couette.
Il a traîné Aurélien
par un pied jusque derrière le camion de Claude
en disant, voilà,
ici, ce sera les toilettes.
Et avec Claude,
ils l'ont pissé dessus.
Ils l'ont pissé dessus.
C'était horrible.
Incroyable scène
que les gendarmes vont immédiatement
dessous le nez des trois autres.
Bien,
votre amie Alexandre vous accuse d'avoir
donné des coups de baramine à monsieur Pioget.
Qu'est-ce que vous avez à dire
là-dessus ?
Hé, ho !
Je vous écoute.
Qu'est-ce que vous avez à dire
sur ces accusations ?
Ben...
Ben, elles sont pas
forcément
fausse, quoi.
Et là, il raconte, enfin,
notamment ce qui s'est passé
après qu'il lui ait uriné dessus.
Ils lui ont attaché
pieds et poignets dans le dos.
Ils l'ont caché sous une bâche
et ils l'ont laissé là
pendant plusieurs heures.
Et de temps en temps,
ils sont allés lui donner un coup de pied
à un coup de baramine.
Et après distil, ils l'ont
libéré et mis dans son camion.
Les sons, le fameux
Toto-Tintin-Le-Guedin,
racontaient la suite.
Ben, il faut reconnaître
qu'il était seulement
à mocher, quoi.
Alors le soir, ben, Claude et moi,
on a décidé
de l'éloigner de là où on était, quoi.
Parce qu'on nous accuse, surtout moi,
qu'il y avait un casier.
Alors avec Claude, ben, on a pris
son camion.
Et Sylvie et Pupimous, ils nous ont
suivi en voiture.
On la roulait, quoi.
Et maintenant, écoutez la suite,
mais raconté par Sylvie.
On n'était pas derrière le camion,
en voiture. Puis à un moment, on les a
perdu de vue. Et puis on a fini par
les retrouver. Ils étaient
sur le bord de la route et ils nous ont dit
on vient d'abandonner où ils liaient
dans un champard-là.
C'est un moment
clé de cette histoire.
Parce que le champard-là,
comme elle dit, correspond
à l'endroit exact où on a
retrouvé le camion.
C'est-à-dire à deux pas de la grange
où Aurélien pondait au bout d'une corde.
Pour le coup,
on a envie que ce soit
Toto Tintin qui raconte la fin.
On est arrivés
dans un champ.
Là, j'ai dit Aurélien,
on te laisse là pour que tu te remettes.
D'ailleurs,
il m'a dit merci.
Ça prouve qu'il n'était pas si claqué que ça.
Et voilà.
Pour eux, l'histoire s'arrête là.
Ils l'ont battu violemment.
Ça, ils veulent bien le reconnaître.
Mais la suite,
la pandaison, ils n'y sont pour rien.
Il a dû se pend
même.
À ce stade,
je dois reconnaître que je pense
et sans doute pensez-vous aussi
qu'il monte,
qu'il ne raconte pas la fin
et qu'après, ils l'ont pendue.
Sauf qu'il y a un problème.
D'abord sous la pandie,
les gars de la scientifique n'ont pas trouvé
une seule trace de leur ADN.
Pas une.
Ce qui conforte l'idée coréliens
s'est pendue tout seul.
Ensuite, quand il est venu
pour les premières constatations le dimanche matin,
le légiste a pris
la température du cadavre.
35 degrés.
Donc ça, ça veut dire
que la mort remonte à quelques heures.
Je dirais 5 ou 6 heures.
Pas plus.
Or,
si on en croise que les 3 hygomars
viennent de raconter,
ils l'ont déposé
beaucoup plus tôt que ça.
Dans la soirée du samedi.
Donc soit ils sont revenus dans la nuit
pour le pendre,
soit il s'est pendu lui-même.
Même si on a beaucoup de mal
il est dans son camion.
Il a pris des coups de barre de fer
toute la journée.
Il a la tête comme un conterre à gaz.
Il fait nuit noire.
Il est miope et il n'a pas ces lunettes
puisqu'on les a pas retrouvés.
Et il fait 150 mètres entre son camion
et la grange
pour aller se pendre.
Qui peut croire ça ?
À moi que finalement
Aurélien ne soit pas mort pendu.
Le juge
décide de faire exhumer son cadavre
pour une nouvelle autopsy.
Alors c'est quelque chose
qui n'avait pas du tout été relevé
lors de la première expertise.
Sous la lesion provoquée
par le câble électrique
qui a servi à la pondrisson
on constate d'autres lesions
juste en dessous.
D'accord, d'accord docteur.
Et elle correspond à quoi selon vous ?
À une strangulation
Donc selon vous,
il a pu être étranglé avant d'être pendu ?
Oui, possiblement.
Monsieur le juge.
Ah, intéressant.
Mais ça n'explique pas l'absence d'ADN.
Et puis il y a un autre détail qui cloche.
Ils disent qu'il lui a uriné dessus.
Et bien il n'y a pas de traces
de pipi sur le corps.
Donc, on l'a possiblement
déshabillé et rabillé.
Qui ?
Mystère.
Reste la question du mobile.
Cette histoire de viole
ne tient qu'à moitié de vous.
Sophie Alias Rouliette dit
qu'elle ne se souvient de rien
mais qu'elle n'avait rien contre le fait
qu'elle n'avait rien.
Alors on cherche
et on trouve une petite histoire
qui pourra être expliquée que
Tintin Legudin est tué Aurélien.
Il l'avait aidé
à aménager son camion.
Et depuis,
il a réclamé la propriété
de la moitié du camion.
Ils étaient en conflit,
là-dessus.
Mais c'est un peu enfantin comme explication.
On ne tue pas quelqu'un
de mi-camion.
Alors que le procès
se profile à l'horizon,
retenez deux choses.
Il n'y a aucun doute
sur le fait qu'ils l'ont massacré.
Aucun.
En revanche, il n'y a
aucune certitude et aucune preuve
qu'ils l'ont étranglé
ou pendue.
Il n'aurait rien avoué
sur ce thème.
Et donc avec de bons avocats,
ils peuvent s'en sortir
concernant l'accusation de Meun.
Ça va se jouer
sur l'intime conviction,
comme souvent devant la cour d'assises.
Le procès
s'ouvre en mars 2013
et s'assise d'anger.
Landry Frias, Claude Boulet
et Maxine Deschamps,
accusés de meurtres de séquestration
de tortures et d'actes de barbarie,
sont dans un boc vitré.
Ils encourent la réclusion
à perpétuité.
Et quatre de leurs potes
comparèent ce libre pour non dénonciation
de crimes et non assistance
à personne en danger.
Le procès dure trois semaines,
d'où d'une journée sur place
d'espérer que ça délirait les langues,
ça n'a aucun effet.
À noter quand même
que tous les accusés ne font pas front commun.
Roliette par exemple
qui n'a pas directement participé
aux meurtres, mais qui était là
quand les trois autres ont roué
Aurélien de coup.
Moi j'ai aucun doute sur le fait
qu'Aurélien a été tué
par Tautou et papa Claude
et par Pimous.
J'ai pas de doute du tout.
Elle n'a pas de doute
mais elle n'a pas de preuves.
Et après trois semaines de procès
il faut se rendre à l'évidence.
On ne saura jamais
vraiment ce qui s'est passé.
Ça n'empêche pas l'avocat général
de réclamer 30 ans
pour le trio accusé de meurtres.
Voyons comment les jurés
vont gérer ça.
À la question
est-ce que Claude Boulet
Landry Friin, ses maximes déchants
ont volontairement
tué Aurélien Piogé ?
La réponse des jurés
est non.
Autrement dit,
le trio est acquitté
des faits de meurtres.
Il fallait s'y attendre.
En revanche, les trois sont
condamnés pour les coups de pieds
et les coups de baramine. Claude Boulet
Maxime Deschamps prenne 15 ans
et Landry Friin se dit
qu'il n'y a pas de gaudin 18 ans.
Et ceux et celles qui ont assisté
sans mouffeter
prennent entre un enferme
et deux ans avec sourcil.
Et ni vous, ni moi,
ni bien sur les parents
ne sauront jamais
qui a pendu Aurélien Piogé.
Je vous ai raconté l'affaire Aurélien Piogé
à un jeune vondageur de 24 ans.
Commençons par le verdict
difficile à avaler,
je suppose, de votre côté.
C'est difficile à avaler
pour mes clients, pour les parents d'Aurélien
parce qu'ils attendaient
d'avoir d'abord la vérité.
Et cette vérité,
il l'attend toujours actuellement
18 ans
pour concernant Tintin
et 15 ans concernant
Claude et Maxime.
Effectivement,
ce sont des peines
qui ne sont pas à la hauteur
et surtout, ils n'ont pas entendu
une condamnation prononcée
pour meurtre.
Et aujourd'hui, ils sont toujours
dans la certitude de savoir
qui a étranglé leur fils
qui a appuyé
sur le coup d'Aurélien.
Mais vous, leur avocate,
l'hypothèse d'un acquittement
est-ce qu'il y a de la vérité
dans votre tête ?
C'est toujours compliqué.
On assiste là
à l'expression d'une vérité judiciaire.
La vérité judiciaire,
on la connaît jusqu'au
dernier moment d'Aurélien.
C'est-à-dire, on sait qu'il a souffert
ce garçon d'actes de torture
et de barbarie terribles
d'une séquestration
de ces vices,
de ces vices profonds
qu'on ne sait pas, on ne peut pas dire
qui a tué
et pourtant, on sait qu'il a été tué.
Mais on ne peut pas dire qui a tué
et qui a aidé parce qu'il
devait nécessairement être
plusieurs, au moins deux
pour aider à cette pandaison.
Mais quand vous, avocate
professionnelle, vous allez au procès
dans votre tête,
il y a l'hypothèse qui ne soit pas
condamnée pour le meurtre.
Vous connaissez le dossier, vous savez que le dossier
il y a des failles.
Dans le dossier, il y a des interrogations.
On les connaît.
Il y a encore des questions aujourd'hui
qui sont restées sans réponse.
Mais
on attendait
et mes clients, les parents d'Aurélien
attendaient aussi jusqu'au bout
qu'il y ait peut-être
un désaccusé, pris de remords
qu'il y ait l'une des filles
qui puissent dire,
raconter, se repentir
à la barre.
On l'a entendu jusqu'au bout.
L'avocat général
qui demande 30 ans
obtient un acquittement des faits de meurtre.
Pourquoi est-ce qu'il ne fait pas appel ?
Il n'y a pas de logique ?
Il n'y a pas de logique effectivement.
C'était une question
qui a disposé à lui.
Mais
il y avait un risque. C'est-à-dire que
la Cour d'Assise
a quand même
renoncé à quand même dit
le Président a accompagné son verdict
d'une phrase en disant
la Cour d'Assise
a été dans l'incapacité
de désigner
ou les meurtriers
mais cela sont bien dans le box
désaccusé.
Ce qui est rarissime de dire ça.
Tout en admettant qu'il n'y ait pas
de condamnation pour le crime
de meurtre.
Ce qui explique
qu'en contrepartie
les peines pour les coups portés
soient extrêmement sévères
parce qu'au final, 18 ans
pour des coups portés et 15 ans
ce sont des peines lourdes qui ressemblent
un peu à des peines pour meurtre.
Tout à fait.
Il y a eu compensation ou quoi ?
Il y a une sorte de compensation.
Il faut dire que les coups portés
c'était pas une simple base
comme ils ont pu le dire au départ
ce sont des coups de baramine.
Ces coups de baramine
ça a été qualifié
d'actes de torture et de barbarie
et puis il y avait également
la séquestration d'auréliens
et sur de nombreuses heures
sur plus de 24 heures.
Vous votre scénario
plutôt celui des parents
puisque votre rôle est de les représenter
c'est lequel ? Est-ce que dans leur tête
ils ont la quasi certitude d'un scénario ?
Dans leur tête
ils ont la quasi certitude d'un scénario
lequel
ils n'en savent rien.
Ils ne savent pas
comment Aurélien a vécu ces dernières minutes
ou sa dernière heure
mais il y a un scénario
je pense que à partir du moment où les vendangeurs
ont déposé Aurélien
dans son camion, dans le champ
à 150 mètres de la Pantie
et entre
le moment où on l'a retrouvé
effectivement pendue
il y a eu un scénario.
Ils sont revenus dans la nuit ?
Le scénario est certainement celui-ci
ils sont revenus dans la nuit.
Pour le pendre et faire croire un suicide ?
Voilà.
Il vous nous avait très bien expliqué
que d'une certaine manière
au moment de rendre le verdict
le président a fait comprendre
qu'il n'avait pas pu déterminer
qui avait tué et qu'il n'avait donc condamné
aucun des trois aux meurtres
mais qu'ils avaient été condamnés
pour les coups portés et la séquestration
d'une certaine manière avec des peines
compensatoires
et il ne dit pas malgré tout
s'il y a eu suicide ou pas
est-ce que dans votre tête
l'hypothèse du suicide
existe ?
L'hypothèse du suicide
elle est impensable
elle est impensable
elle est impossible
ça a été il y a eu de multiples
reconstitutions
assisté également
aux médecins légistes
qui ont pu démontrer
que dans l'état d'Aurélien
il faut bien se souvenir
qu'au moment où Aurélien a été
remonté dans son camion
pour être amené dans le champ
il était comateux, c'est un garçon
qui était comateux
et qui est décrit dans l'incapacité
de reconnaître
les personnes qui venaient le voir
il ne pouvait plus ouvrir les yeux
il ne pouvait plus parler
par conséquent, comment peut-on penser
que ce garçon ait pu se suicider
dans le noir
remonter un champ de 150 mètres
et pour mettre en place tout un dispositif
de pendaison ?
c'est impensable, ça n'est pas possible
à votre amour, qu'est-ce qu'il y a
se met le doute dans l'esprit
des jurés ? est-ce que c'est
l'absence d'ADN ? je trouve moi
que c'est le point
effectivement le plus, qui amène le plus
aux doutes
d'ADN nous interroge
elle m'interroge
encore
on n'a retrouvé aucun ADN
et je crois même que même celui
d'Orelien n'a pas été
retrouvé par conséquent
il faudrait, et nous sommes dans le
domaine, dans le milieu des vendanges
et des vendangeurs
donc ils ont des gants, on sait bien
qu'il y a des gants, il y a du matériel
donc il y a eu
quand même une
précision, peut-être
même dans la précipitation, ça a été
calculé, ça a été pensé
c'est-à-dire, vous voulez dire qu'en pleine nuit
des types qui ont des cheveux longs
mettent des cagoules pour pas que
les cheveux tombent, je ne sais pas
quoi, et pour empêcher que
les peaux du visage tombent, on est
quand même à une période où on peut exploiter
l'ADN 2013
de manière infime, donc
ils ont émis des cagoules, il n'y a pas un cheveu qui serait
tombé, enfin ça ne tient pas de bout
peut-être pas des cagoules, mais des gants
mais en tous les cas
on forçait de constater qu'on n'a rien
trouvé, aucun ADN
donc ça a été détoillé
la scène a été détoillée
Ah non, j'aimerais bien que
vous nous aider
à décrire ce trio
parce que moi j'ai fait ce que j'ai pu mais je les connais pas
on est
dans quel milieu, qui sont ces gens
qui vivent dans
des camions de manière
d'un ginal qui boivent
énormément, qui fument
beaucoup beaucoup de pétards
et pas que
racontez-nous à quoi ressemble
ce trio
On a affaire
un trio
de jeunes saisonniers
voyageurs, ils sont
itinérants
par conséquent ils vivent dans leurs camions
au gré des saisons
ils parcourent la France
effectivement ils se rendent disponibles
ils sont assez courageux
ils vont travailler
mais ils vivent
et ils travaillent en communauté
c'est un groupe
c'est un trio mais c'est aussi une meute
avec les autres, ils forment
un groupe où ils ont leurs propres règles
leurs codes
chacun, peut-être qu'il a affaire
concernant la cuisine
concernant le feu
et le feu de camp
et l'entretien du feu de camp
c'est une
petite communauté
Il y a un côté un peu hippie
Exactement
un côté hippie et
comme chez les rêveurs
les rêves partis
on est dans ces jeunes
un peu dans cette population
Il y a une différence sociale
que je n'ai peut-être pas assez évoqué
et qui est peut-être aussi
une explication de ce face à face
entre Aurélien et les 3 autres
Aurélien c'est un peu le fils de bourge
et les autres
c'est des brôlots
Aurélien c'est effectivement
et on a pu penser
aussi qu'il y avait cette dimension
là dans le dossier
Aurélien quelque part
est-ce qu'on peut dire qu'il a été
véritablement accepté par le groupe
je n'en suis pas certain
En raison de la différence sociale
Oui, en raison de la différence sociale
c'était un jeune effectivement
pourtant
qui avait adhéré
à leurs règles et à leurs modes de vie
parce qu'il aimait ça
Aurélien c'était, il aimait la liberté
et Aurélien il aimait les autres
il aimait aller à la rencontre
des gens
il aimait les gens pour ce qu'ils sont
c'est un garçon
en plus avec une sensibilité
une sensibilité de photographie
il adorait la photo, le monde du cinéma
mais il n'a jamais
véritablement été
en définitive considéré
comme appartenant
au groupe parce qu'il n'avait peut-être
pas eu les problèmes
d'argent dans son enfance
dans son éducation
à l'opposé
Tata le Godin
il a l'air dur, il a l'air violent
il a l'air agressif
enfin on le voit facilement
meurtrier
relativement
le profil
du gars violent
qui est très impulsif
ça il y a
je me souviens une compagne
qui a témoigné
à la cour d'assive
qui en avait encore peur
les gens qui ont pu rencontrer Tintin
dans ces épisodes de crises de violence
en sont encore terrifiés
et même au jour du procès
il y a les deux autres
Maxime Deschamps et Claude Boulez
c'est des suiveurs des mots du genoux
Maxime Deschamps et Claude Boulez
ce sont des suiveurs
c'est un peu effectivement
il y a Papa Claude
le vieux
Maxime lui c'est le suiveur
mais
effectivement
on peut pas considérer
qu'ils sont véritablement des losers
parce que aussi on leur propre
rôle à jouer
le vieux on l'écoute
Papa Claude
Maxime lui il est un peu dans la
surenchère et finalement
ces deux-là vont vouloir
trouver grâce aux yeux de Tintin
le meneur
et être dans la surenchère
et lui démontrer que eux aussi
sont capables de frapper
eux aussi sont capables d'aller dans le dur
alors au centre de tout ça
il y a donc la question du viole
de rouillette
c'est un cas de figure qui est quand même assez rare
c'est-à-dire que eux disent qu'elle a été violée par Aurélien
et que c'est ça qui a déclenché
leur fureur
et elle dit pas du tout je sais pas s'il a couché avec moi
mais en gros j'étais d'accord
c'est quand même rare
comme cas de fureur
oui c'est rare mais
rouillette alors au départ
elle a pu dire ça
au départ elle a dit qu'effectivement elle ne se souvenait plus
mais ensuite
elle est revenue et d'ailleurs elle est revenue
à la grande armerie
spontanément
pour dire
j'ai repris mes esprits parce que c'est vrai que lorsque ça s'est passé
elle était également sous l'emprise
de produits stupéfiants et d'alcool
mais ensuite ayant retrouvé ses esprits
elle a pu dire
je sais pertinemment ce qui s'est passé
et ensuite ce que j'ai vu
d'une part je n'ai jamais été violée
d'autre part j'aimais Aurélien
on s'était trouvé
tous les deux
et j'étais prête à le suivre
et on était
on commençait à faire des projets ensemble
alors est-ce que le mobile serait donc
ce demi-camion
que Tintin le Godin
avait contribué à restaurer dont il réclamait
la moitié
c'est possible
c'est une piste
c'est une piste mais
une piétre piste
parce qu'effectivement il paraît qu'il y a eu
un potentieux que Tintin n'aurait jamais
pardonné l'achat du camion
par Aurélien
qui a été aidé d'ailleurs pour l'acheter
par ses parents
ça aussi ça n'est pas passé
ce camion a été financé par les parents
d'Aurélien
et Tintin était persuadé
qu'au départ c'était un projet
à deux un projet de copain
on va acheter à deux ce camion
on va le remettre en état tous les deux
on va l'aménager et on va partir sur les routes
et ça ne sera pas pâté comme toi
ce qui n'était pas possible
puisque ses parents à lui
qu'il l'avait payé
donc lui il ne pouvait pas le donner
exactement ça n'était pas possible
parce que Tintin n'avait pas les moyens
de le financer et Aurélien non plus
d'ailleurs tout seul
et donc il a fait appel à ses parents
merci beaucoup maître Guérard
d'avoir accepté de revenir sur cette histoire
qui remonte à y a une dizaine
d'années
des centaines d'histoires disponibles
sur vos plateformes d'écoute
et sur eurotin.fr
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En octobre 2008, à Saint-Lambert-du-Lattay dans le Maine-et-Loire, Aurélien Pioger, 28 ans, un vendangeur itinérant, est retrouvé pendu dans un appentis au milieu des vignes. Ses pieds touchent étrangement le sol et ses parents ne veulent pas croire à l’hypothèse d’un suicide.